LE VIII SEPTEMBRE. LA NATIVITE DE LA TRÈS
SAINTE VIERGE.
C’est la naissance de la
Vierge Marie; faisons-lui fête, en adorant le Christ son fis, le Seigneur
(1). Telle est l'invitation que nous adresse aujourd'hui l'Eglise. Ecoutons son
appel ; entrons dans sa joie qui déborde (2) : l'Epoux est proche, puisque son
trône est dès maintenant dressé sur terre (3) ; encore un peu, et lui-même
paraîtra sous ce diadème de notre humanité dont doit le couronner sa mère au
jour de la joie de son cœur et du nôtre (4). Aussi, comme en la glorieuse
Assomption, retentit à nouveau le Cantique sacré (5) ; mais il est plus de la
terre, cette fois, que du ciel.
Voici qu'en vérité nous est donné
mieux que le premier paradis à cette heure. Eden, ne crains plus les retours des
mortels humains ; ton chérubin peut cesser sa garde (6) et regagner les cieux.
Que nous importent tes beaux fruits auxquels on ne peut toucher sans mourir (7)
? La mort, maintenant (8), elle est pour ceux qui ne goûteront pas du fruit qui
s'annonce parmi les fleurs de la terre vierge où nous fait aborder notre Dieu.
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Salut, monde nouveau où les
magnificences de la création primitive sont dépassées; salut, port fortuné dont
le repos s'offre à nous après tant d'orages! L'aurore paraît (1) ;
l'arc-en-ciel brille (2); la colombe s'est montrée (3); l'arche touche terre,
ouvrant au monde de nouvelles destinées (4). Le port, l'aurore, l'arc-en-ciel,
la colombe, l'arche du salut, le paradis du céleste Adam, la création dont
l'autre n'était qu'une ébauche, c'est vous, douce enfant, en qui déjà résident
toute grâce, toute vérité, toute vie (5).
Vous êtes la petite nuée que le
père des Prophètes attendait dans l'angoisse suppliante de son âme, et qui
apporte à la terre desséchée la fraîcheur (6) ; sous la faiblesse de vos
membres si frêles apparaît la mère du bel amour et de la sainte espérance (7).
Vous êtes cet autre léger nuage d'exquis parfum qu'exhale aux cieux notre
désert (8); l'incomparable humilité de votre âme qui s'ignore révèle leur Reine
aux Anges, armés en guerre (9) près de votre berceau.
O tour du vrai David (10),
citadelle où, du premier choc, s'est brisé l'enfer (11) ; vraie Sion, dès
l'abord fondée sur les saintes montagnes, au sommet des vertus (12); temple et
palais dont ceux de Salomon étaient l'ombre (13) ; maison que l'éternelle Sagesse
s'est bâtie pour elle-même (14) : le plan réalisé dans vos lignes si pures
était arrêté dès l'éternité (15). Avec l'Emmanuel qui vous prédestina pour son
lieu de délices (16), vous êtes
vous-même, enfant
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bénie, le sommet de toute création,
l'idéal divin pleinement réalisé sur terre (1).
Or donc, comprenons l'Eglise,
quand elle acclame dès ce jour votre divine maternité, ne séparant pas la
naissance de l'Emmanuel et la vôtre en ses chants (2). Celui qui, étant Fils en
Dieu par essence, voulut l'être aussi dans l'humaine nature (3), avait avant
tous autres desseins résolu qu'il aurait une Mère; tel par suite devait être en
celle-ci le caractère primordial, absolu, de ce titre de Mère, qu'il ne fît
qu'un dans l'éternel décret avec son être futur, comme en étant le motif, comme
renfermant la cause même de son existence ainsi que le principe de toutes ses
perfections de nature et de grâce. Donc nous aussi, dès le berceau, devons-nous
voir en vous la Mère, et célébrer votre naissance, en adorant votre fils, le
Seigneur (4).
D'autant qu'embrassant tous les
frères de l'Homme-Dieu, votre bienheureuse maternité
projette ses rayons sur tout ce qui précède ou suit dans le temps ce fortuné
jour. Dieu, notre Roi avant les siècles, a opéré le salut au milieu de la
terre (5) : « Le milieu de la terre, c'est admirablement Marie, dit
l'Abbé de Clairvaux ; Marie, centre universel, arche de Dieu; elle est la cause
des choses, l'affaire des siècles (6). Vers elle se tournent les habitants des
cieux comme du séjour de l'expiation, les hommes qui nous précédèrent et nous
qui sommes présentement, ceux qui doivent nous suivre, et les fils de nos fils
et leurs descendants : les cieux pour voir se remplir leurs vides,
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les habitants des bas lieux pour
leur délivrance; les hommes du premier âge pour être trouvés des prophètes
fidèles (1), ceux qui viennent après pour obtenir de parvenir à la béatitude.
Mère de Dieu, Reine des cieux, Souveraine du monde, toutes les générations vous
diront bienheureuse (2); car vous avez engendré pour
toutes la vie et la gloire. En vous à jamais les Anges puisent la joie, les
justes la grâce, les pécheurs le pardon ; en vous, et par vous, et de vous la
bénigne main du Tout-Puissant a créé une seconde fois
ce qu'elle avait fait une première (3). »
« Solennité d'entrée, dit de ce
jour André de Crète; fête initiale, dont le terme est l'union du Verbe et de la
chair ; fête virginale, de joie pour tous et de confiance (4). » — « Toutes les
nations, soyez présentes, s'écrie Jean Damascène ; toute race, toute langue,
tout âge, toute dignité, célébrons joyeusement le jour natal de l'allégresse du
monde (5). » — « C'est le commencement du salut, l'origine de toute tète,
proclame à son tour saint Pierre Damien : voici qu'est née la Mère de l'Epoux!
A bon droit, l'univers aujourd'hui tressaille, et l'Eglise, transportée, module
des motifs d'épithalame en ses chœurs (6). »
Mais les docteurs d'Orient et d’Occident
ne sont pas seuls à exalter dans les mêmes termes aujourd'hui l'apparition de
Marie sur terre. Dans l'Office de la fête, les deux Eglises latine et grecque
chantent toujours, chacune en leur langue, cette belle formule de conclusion (7), identique
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pour toutes deux : « Votre
naissance, o Mère de Dieu, fut l'annonce de la joie pour le monde ; car c'est
de vous qu'est né le Soleil de justice, le Christ notre Dieu, qui détruisant la
malédiction octroya la bénédiction, et confondant la mort nous gratifia de
l'éternelle vie. »
L'accord de Rome et de Byzance
dans la célébration de la fête de ce jour remonte au VII° siècle au moins (1).
On ne saurait avec quelque assurance préciser davantage, ni surtout généraliser
la date première de son institution. Angers regarde le saint évêque Maurille comme en ayant été le premier auteur, sur un désir
de la Bienheureuse Vierge à lui apparue, vers l'an 430, dans les prairies du Marillais : d'où le nom de Notre-Dame Angevine, ou fête de
l'Angevine, donné si fréquemment à la présente solennité. Au XI° siècle,
Chartres, la ville de Marie, n'en revendique pas moins pour son Fulbert,
soutenu de l'autorité de Robert le Pieux, une paît prépondérante dans la
diffusion delà glorieuse fête au pays de France; on sait l'intimité de l'évêque
et du roi, et comment celui-ci voulut noter lui-même en chant d'une suave
mélodie les trois admirables Répons où son ami célèbre le lever de l'étoile
mystérieuse qui doit engendrer le soleil, la branche sortant de la tige de Jessé pour porter la fleur divine où se reposera l'Esprit-Saint, la bénigne toute-puissance qui fait produire
à la Judée Marie comme la rose à l'épine (2).
En l'année 1245, dans la session troisième
du premier Concile de Lyon, celle-là même où Frédéric II fut déposé de
l'empire, Innocent IV établit pour l'Eglise universelle, non la fête partout
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dès lors observée, mais l'Octave de
la Nativité de la Bienheureuse Vierge Marie (1) ; c'était l'accomplissement du
vœu fait par lui et les autres cardinaux pendant le veuvage de dix-neuf mois,
résultat des intrigues du fourbe empereur, qui suivit pour l'Eglise la mort de
Célestin IV, et auquel l'élection de Sinibaldo
Fieschi sous le nom d'Innocent avait mis un terme.
En 1377, le grand Pape qui venait
de briser les chaînes de la captivité d'Avignon, Grégoire XI, voulut compléter
par l'adjonction d'une Vigile à la solennité les honneurs rendus à Marie
naissante ; mais soit qu'il n'eût exprimé sur ce point qu'un désir, comme un
peu plus tard au sujet du jeûne préparatoire à la fête de la Visitation son
successeur Urbain VI, soit pour toute autre cause, les intentions du pieux
Pontife ne prévalurent que peu de temps dans les années si troublées qui
suivirent sa mort.
Avec l'Eglise (2) implorons,
comme fruit de cette fête si suave, la paix qui semble fuir toujours plus nos
temps malheureux. Ce fut dans la seconde des trois périodes de paix universelle
signalées sous Auguste,etdont
la dernière marqua l'avènement du Prince même de la paix, que naquit
Notre-Dame.
Pendant que se fermait le temple de Janus, l'huile
mystérieuse sortait du sol où devait s'élever le premier sanctuaire delà Mère
de Dieu dans la Ville éternelle; les présages se multipliaient; le monde était
dans l'attente; le poète chantait: « Voici qu'arrive enfin le dernier âge
prédit par la Sibylle, voici s'ouvrir la grande série des siècles nouveaux,
voici la Vierge (3) ! »
En Judée, le sceptre est ôté de
Juda (4) ; mais
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celui-là même qui s'en est
approprié la puissance, Hérode l'Iduméen poursuit en hâte la splendide
restauration qui doit permettre au second Temple de recevoir dignement dans ses
murs l'Arche sainte du nouveau Testament.
C'est le mois sabbatique, premier
de l'année civile, septième du cycle sacré : Tisri,
où commence le repos de chaque septième année, où l'année sainte du jubilé
s'annonce (1) ; le plus joyeux des mois, avec sa solennelle Néoménie que
signalent les trompettes et les chants (2), sa fête des Tabernacles, et la
mémoire, de l'achèvement du premier Temple sous Salomon.
Au ciel, l'astre du jour,
parcourant ses demeures du Zodiaque, vient de quitter le signe du Lion pour
entrer dans celui de la Vierge. Sur la terre, deux descendants obscurs de
David, Joachim et Anne, remercient Dieu qui a béni leur union longtemps inféconde.
AUX PREMIERES VEPRES.
Les Psaumes, le Capitule et
l'Hymne des Vêpres sont les mêmes que ceux des autres fêtes de Notre-Dame. Les
Antiennes et le Verset glorifient la naissance de la plus noble des filles
d'Eve, illustrant notre race, donnant à Dieu une Mère, à nous une avocate dont
les prières ne seront jamais repoussées.
1. Ant.
C'est la naissance de la
glorieuse Vierge Marie, issue de la race d'Abraham, de la tribu de Juda, de la
noble souche de David.
Psaume CIX. Dixit Dominus, page
43.
2. Ant. C'est aujourd’hui la naissance de la sainte Vierge
Marie, dont la vie sublime est la lumière de toutes les églises.
Psaume CXII. Laudate pueri, page 46.
3. Ant.
De Royale descendance, Marie naît en ce jour ; de cœur et d'âme nous implorons
dévotement le secours de ses prières.
PSAUME CXXI.
Je me suis réjoui quand on
m'a dit: Nous irons vers Marie, la maison du Seigneur.
Nos pieds se sont fixés dans
tes parvis, ô Jérusalem ! nos cœurs dans
votre amour, ô Marie !
Marie, semblable à Jérusalem, est bâtie comme une cité : tous ceux qui
habitent dans son amour sont unis et liés ensemble.
C'est en elle que se sont
donné rendez-vous les tribus du Seigneur, selon l'ordre qu'il en a donné à
Israël, pour y louer le Nom du Seigneur.
Là sont dressés les sièges de
la justice, les trônes de la maison de
David; et Marie est la fille des Rois.
Demandez à Dieu, par Marie,
la paix pour Jérusalem : que tous les biens soient pour ceux qui t'aiment, à
Eglise !
Voix de Marie : Que la paix règne sur tes remparts, ô nouvelle
Sion! et l'abondance dans tes forteresses.
Moi, la fille d'Israël, je prononce sur toi des paroles de paix, à cause de
mes frères et de mes amis qui sont au milieu de toi.
Parce que tu es la maison du
Seigneur notre Dieu, j'ai appelé sur toi tous les biens.
4. Ant.
De cœur et d'âme chantons gloire au Christ, en cette solennité sacrée de
l'incomparable Marie Mère de Dieu.
PSAUME CXXVI.
Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain
travaillent ceux qui la bâtissent.
Si le Seigneur ne garde la
cité, inutilement veilleront ses gardiens.
En vain vous vous lèverez
avant le jour ; levez-vous après le repos, vous qui mangez le pain de la
douleur.
Le Seigneur aura donné un sommeil tranquille à ceux qu'il aime : des fils, voilà
l'héritage que le Seigneur leur destine ; le fruit des entrailles, voilà leur
récompense.
Comme des flèches dans une
main puissante, ainsi seront les fils de ceux que l'on opprime.
Heureux l'homme qui en a rempli
son désir ! il ne sera pas confondu, quand il parlera
à ses ennemis aux portes de la ville.
5. Ant.
En allégresse célébrons la naissance de Marie la bienheureuse
, pour qu'elle-même intercède en notre faveur près du Seigneur Jésus-Christ.
PSAUME CXLVII.
Marie, vraie Jérusalem,
chantez le Seigneur ; Marie, sainte Sion, chantez votre Dieu.
C'est lui qui fortifie contre le péché les serrures de vos
portes ; il bénit les fils nés en votre sein.
Il a placé la paix sur vos
frontières ; il vous nourrit de la fleur du froment, Jésus, le Pain de vie.
Il envoie par vous son Verbe
à la terre ; sa parole parcourt le monde avec rapidité.
Il donne la neige comme des
flocons de laine ; il répand les frimas comme la poussière.
Il envoie le cristal de la
glace semblable à un pain léger : qui pourrait résister devant le froid que son
souffle répand?
Mais bientôt il envoie son
Verbe en Marie, et cette glace si dure se fond à sa chaleur : l'Esprit
de Dieu souffle, et les eaux reprennent leur cours.
Il a donné son Verbe à Jacob,
sa loi et ses jugement à Israël.
Jusqu'aux jours où nous
sommes, il n'avait point traité de la
sorte toutes les nations, et ne leur avait pas manifesté ses décrets.
CAPITULE. Eccli. XXIV.
J'ai été créée dès le
commencement et avant les siècles, et jusque dans le siècle futur je ne
cesserai point d'être ; j'ai rempli mon office devant lui dans son temple.
HYMNE.
Salut, astre des mers,
Mère de Dieu féconde !
Salut, ô toujours Vierge,
Porte heureuse du ciel !
Vous qui de Gabriel
Avez reçu l’Ave,
Fondez-nous dans la paix,
Changeant le nom d'Eva.
Délivrez les captifs,
Eclairez les aveugles,
Chassez loin tous nos maux,
Demandez tous les biens.
Montrez en vous la Mère;
Vous-même offrez nos vœux
Au Dieu qui, né pour nous,
Voulut naître de vous.
O Vierge incomparable,
Vierge douce entre toutes !
Affranchis du péché,
Rendez-nous doux et chastes.
Donnez vie innocente
Et sûr pèlerinage,
Pour qu'un jour soit Jésus
Notre liesse à tous.
Louange à Dieu le Père,
Gloire au Christ souverain ;
Louange au Saint-Esprit ;
Aux trois un seul hommage.
Amen.
V/. C'est aujourd'hui la naissance de la
sainte Vierge Marie,
R/. Dont la vie sublime est la lumière de toutes les églises.
ANTIENNE de Magnificat.
Honorons la très digne nativité
de la glorieuse Vierge Marie, qui a obtenu la dignité de Mère sans perdre son
intégrité virginale.
Le Cantique Magnificat, page
31. L'Oraison est la Collecte de la Messe, ci-après, page 178.
Un illustre Martyr veille avec
les Anges sur le berceau de la Mère de Dieu. Officier des gardes à la cour d'un
empereur de la terre, c'est à ce titre encore qu'il demeure auprès de la
Souveraine du monde. Nicomédie fut le lieu des combats d'Adrien ; son saint
corps, transporté d'abord à Byzance, l'avait été ensuite dans la Ville
éternelle. Enrichie à cette date de l'année du précieux dépôt, l'impériale cité
sut concilier magnifiquement avec l'hommage dû à Marie naissante l'honneur que
méritait l'héroïque soldat devenu son hôte au même jour. Dès le VII° siècle (1),
l'église Saint-Adrien était fixée comme point de
départ de la solennelle Litanie qui, dans cette fête de la Nativité, puis dans
celles de l'Annonciation et de l'Assomption delà Bienheureuse Vierge,
conduisait le peuple romain du forum à Sainte-Marie-Majeure.
On reconnaît aujourd'hui que les
Actes du martyre d'Adrien ne sont pas contestables. Ils empruntent à
l'intervention de sa jeune épouse Natalie un charme
tout spécial d'héroïque suavité. Chrétienne dès l'enfance à l'insu de son époux
engagé dans les liens de l'idolâtrie, elle apprend à la fois sa conversion
opérée par le spectacle de la constance des Confesseurs, et l'élan généreux qui
l'a poussé soudain à demander de partager leurs chaînes. Transportée elle
accourt et, baisant ses fers : « Bienheureux étes-vous,
s'écrie-t-elle, mon seigneur Adrien ! » Entre les deux époux, durant les jours
que celui-ci doit vivre encore, se déroulent d'admirables scènes dont les plus
grands génies de l'antiquité n'approchèrent point dans leurs
fictions. Laissée libre
176
par les geôliers de Galère, Natalie ne quitte plus celui que la captivité pour le Christ revêt à ses yeux d'une auréole où
pâlit tout l'éclat de sa valeur d'autrefois sous les enseignes de César. Assise
à ses pieds dans la prison, l'accompagnant au prétoire, elle n'a
d'autre pensée que de maintenir le néophyte sous l'assaut des tourments à la
hauteur de la vocation qui le marque pour le martyre, d'autre souci que
d'écarter de lui toute sollicitude de la terre, tout retour sur elle-même si
faible, qu'il va laisser presque encore une enfant ; si ce n'est qu'à la veille
du dénouement suprême, elle laisse échapper
ces mots : « Souviens-toi de ta coopératrice au martyre ;
prie que je meure avec toi, pour que les autres femmes apprennent à se conduire
comme elles doivent envers leurs époux, en voyant ton amour pour moi. » Enfin,
l'heure venue, soutenant jusqu'au bout dans la simplicité de son cœur si pur
une fidélité où l'héroïsme n'altère pas un instant la tendresse la plus
exquise, elle-même étend sur l'enclume où on va les briser les pieds de celui
qu'elle aime seul au monde. Et comme après l'atroce supplice il respirait
encore, le Martyr présente sa main à Natalie pour
qu'elle la donne à couper aux bourreaux. Alors il meurt, et se rappelant la
prière de sa compagne, il l'attire peu après avec lui au ciel.
On se souvient que l'Emmanuel
voulut joindre la mémoire de la sainte veuve Anastasie à la solennité de son
jour natal (1). C'est dans une même délicate pensée de sa très suave maternité
pour tous, que la Vierge des vierges inspire à l'Eglise d'associer aux joies de
sa propre naissance la glorification de l'héroïque époux de sainte Natalie.
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A TIERCE.
L'Hymne et les trois Psaumes dont
se compose l'Office de Tierce, se trouvent
ci-dessus, page 26.
Ant. C’est aujourd'hui la naissance de la sainte Vierge
Marie, dont la vie sublime est la lumière
de toutes les églises.
Le Capitule comme aux premières Vêpres, page 173.
R/. br.
Dans votre éclat,* Et votre beauté.
Dans votre éclat.
V/. Avancez, triomphez, et régnez.
* Dans votre beauté.
Gloire au Père. Dans votre éclat.
V/. Le Seigneur la protégera
de son regard.
R/. Dieu est au milieu d'elle ; elle ne
sera point ébranlée.
L'Oraison est la Collecte de la Messe, page 178.
A LA MESSE.
L'Eglise entonne le beau chant de
Sédulius à la Mère de Dieu ; comme le Très-Haut, en
effet, elle voit Marie déjà Mère, ainsi qu'elle l'est par la divine
prédestination dès avant tous les âges. Déjà aussi Marie répond au salut de
l'Eglise par le chant de l'Epouse, le psaume d'épithalame, qui jamais ne
résonna si pleinement pour nulle autre âme que la sienne dès ce premier jour.
INTROÏT.
Salut, Mère sainte, ô vous
dont l'enfantement a mis au monde le Roi qui gouverne
le ciel et la terre dans les siècles des siècles.
Ps. Mon cœur a proféré une parole excellente ; c'est au
Roi que je dédie mes chants. Gloire au Père. Salut.
Bien que le divin enfantement de
Notre-Dame ait historiquement suivi sa propre naissance, la sainte Liturgie se
place en ses prières au point de vue du Cycle annuel qui, commencé dans les
semaines de l'Avent, se poursuit toujours. C'est pourquoi la Collecte demande
que le mystère présent développe en nous l'œuvre de sanctification et de paix
inaugurée à Bethléhem.
COLLECTE.
SEIGNEUR, nous vous prions
d'accorder à vos serviteurs le don de la grâce céleste : afin que ceux pour qui
l'enfantement de la bienheureuse Vierge a marqué le commencement du salut,
trouvent dans la solennelle mémoire de sa Nativité l'accroissement de la
paix. Par Jésus-Christ.
Dans les Messes privées, à la
suite des Collecte, Secrète et Postcommunion de la fête, on fait mémoire
de saint Adrien.
ORAISON.
Accordez à notre prière, Dieu
tout-puissant, que nous, qui célébrons la naissance au ciel du bienheureux
Adrien votre Martyr, soyons par son intercession fortifiés dans l'amour de
votre Nom. Par Jésus-Christ.
ÉPÎTRE.
Lecture du livre de la Sagesse. Prov. VIII.
Le Seigneur m'a possédée au
commencement de ses voies, avant qu'il créât aucune
chose au commencement. J'ai été établie dès l'éternité et de toute antiquité,
avant que la terre fût créée. Les abîmes n'étaient point encore, et déjà
j'étais conçue ; les fontaines n'avaient point encore répandu leurs eaux ; la
pesante masse des montagnes n'était pas encore formée ; j'étais enfantée avant
les collines : il n'avait point encore créé la terre, ni les fleuves, ni les
pôles du monde. Lorsqu'il préparait les cieux, j'étais présente ; lorsqu'il
environnait les abîmes de cette circonférence qui a de si justes proportions ;
lorsqu'il affermissait l'air au-dessus de la terre, et qu'il pesait comme dans
une balance les eaux des fontaines ;
lorsqu'il renfermait la mer dans ses bornes, et qu'il imposait une loi aux
eaux, afin qu'elles ne franchissent point leurs limites ; lorsqu'il fondait la
terre sur son propre poids, j'étais avec lui et je réglais toutes choses. Je
prenais plaisir chaque jour, me jouant sans cesse devant lui, me jouant dans
l'univers ; et mes délices sont d'être avec les enfants des hommes. Maintenant
donc, ô mes enfants ! écoutez-moi : Heureux ceux qui
gardent mes voies! Ecoutez mes instructions, soyez sages, et ne les rejetez
pas. Heureux celui qui m'écoute , qui veille tous les
jours à l'entrée de ma maison, et qui se tient tout prêt à ma porte ! Celui qui
m'aura trouvée trouvera la vie, et il puisera le salut dans le Seigneur.
Près du berceau des princes, il
est d'usage de pronostiquer leur grandeur future, en composant aux nouveau-nés une
auréole de la gloire des aïeux. Ainsi et mieux fait aujourd'hui l'Eglise.
L'Evangile doit nous rappeler la généalogie temporelle du Messie et de celle
qui ne naît aujourd'hui que pour lui donner naissance à son tour; mais tout
d'abord, c'est la genèse en Dieu du Fils et de la Mère qui vient de nous être
livrée par ce passage des Proverbes. J'étais enfantée avant les collines et
la terre, dit pour tous deux la Sagesse éternelle; j'étais présente,
lorsqu'il préparait les cieux.
A la différence de notre infirme humanité qui, sujette du
temps, perçoit les choses selon la série
de leur évolution successive, Dieu
les considère d'au delà du temps qu'il domine de son éternité, dans l'ordre de
la dépendance mutuelle où il les a mises en vue de la manifestation de sa
gloire. Le commencement pour Dieu, le principe de toute œuvre, est la raison
qui la détermine. Or, le Très-Haut n'agit au dehors de lui que pour se révéler
par son Verbe fait chair, devenu fils d'une Mère créée comme il est fils
du Créateur. L'Homme-Dieu comme but, Marie comme
moyen : tel est l'objet des résolutions éternelles, la raison d'être du monde,
la conception fondamentale où tout le reste n'apparaît qu'à titre d'accessoires
et de dépendances.
O Notre-Dame, qui daignez nous appeler nous aussi vos fils, heureux
sommes-nous que la bonté égale en vous la grandeur ! Heureuse l'humanité qui
veillait depuis tant de siècles dans votre attente, et vous trouve enfin
; car avec vous sont le salut et la vie.
C'est toujours la virginale et
divine maternité que l'Eglise chante, au Graduel, comme déjà l'honneur de cette
journée qui nous donne la Mère de Dieu.
GRADUEL.
Vous êtes bénie et digne de
toute vénération, Vierge Marie, qui, sans la moindre souillure, êtes devenue
mère du Sauveur.
V/. Vierge mère de Dieu,
celui que le monde entier ne saurait contenir s'est enfermé dans votre sein,
s'y faisant homme.
Alléluia, alléluia.
V/. Heureuse êtes-vous et
digne de toute louange, sainte Vierge Marie ! de vous
s'est levé le Soleil de justice, le Christ notre Dieu. Alleluia.
EVANGILE.
Le commencement du saint Evangile selon saint Matthieu.
Chap. I.
Le livre de la
généalogie de Jésus-Christ, fils de David, fils d'Abraham. Abraham engendra Isaac. Isaac
engendra Jacob. Jacob engendra
Juda et ses frères. Juda engendra
Phares et Zara
de Thamar. Phares engendra Esron. Esron engendra Ara m. Aram engendra Aminadab. Aminadab engendra Naasson. Naasson engendra Salmon.
Salmon engendra Booz de Rahab. Booz engendra Obed de Ruth. Obed engendra Jessé. Jessé engendra David roi. David
roi engendra Salomon de celle qui avait été femme
d'Urie. Salomon engendra Roboam. Roboam engendra Abias. Abias engendra Asa. Asa engendra Josaphat. Josaphat engendra Joram. Joram engendra Ozias. Ozias engendra Joatham. Joatham engendra
Achaz. Achaz engendra Ezéchias. Ezéchias engendra Manassé. Manassé engendra Amon. Amon
engendra Josias. Josias engendra
Jéchonias et ses trères, au temps de la
transmigration de Baby-lone. Et depuis la
transmigration de Babylone, Jéchonias engendra Sala-thiel.
Salathiel engendra Zorobabel.
Zorobabel engendra Abiud. Abiud engendra Eliacim. Eliacim engendra Azor. Azor
engendra Sadoc. Sadoc engendra Achim. Achim engendra EliuJ. Eliud engendra
Eleazar. Eléazar engendra Mathan. Mathan engendra Jacob. Jacob engendra
Joseph, l'époux de Marie, de laquelle naquit Jésus, qui est appelé Christ.
Marie de laquelle naquit Jésus
: c'est tout le mystère de Notre-Dame, c'est dès ce jour, nous l'avons vu, le
titre constitutif de son être de nature et de grâce ; comme Jésus devant naître
de Marie, fils de la femme (1) et fils de Dieu (2), était dès le commencement
la raison cachée de toute cette création, dont le mystère ne devait se révéler
qu'à la plénitude des temps (3). Œuvre unique, dont le Prophète disait dans
l'extase : Votre œuvre, ô Dieu, vous la ferez connaître au milieu des ans ;
le Saint viendra de la montagne ombragée (4) ; les pôles du monde
s'inclinent sous les
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pas de son éternité (1).
Cette montagne d'où le Saint, l'Eternel, le Dominateur du monde doit venir en
son temps, est la Bienheureuse Vierge (2) que la vertu du Très-Haut couvrira
de son ombre (3), et dont l'élévation dépasse déjà à sa naissance toutes
les hauteurs du ciel ou de la terre (4).
Les temps donc sont accomplis.
Depuis l'heure où l'éternelle Trinité sortit de son repos pour créer le ciel et
la terre (5), toutes les générations du ciel et de la terre, comme dit
l'Ecriture (6), étaient en travail du jour qui donne au Fils de Dieu la Mère
attendue. Parallèlement à la ligne courant d'Abraham et de David au Messie
lui-même, toutes les généalogies humaines préparaient à Marie la génération des
fils adoptifs que Jésus, né de Marie, se donnera pour frères.
Avec l'Eglise, félicitons
Notre-Dame de cette maternité sublime, qui embrasse dans son éternelle
virginité le Créateur et les créatures.
OFFERTOIRE.
BIENHEUREUSE êtes-vous,
Vierge Marie, qui avez porté le Créateur de toutes
choses! vous avez engendré celui qui vous a faite, et
vous restez vierge éternellement.
Que cette maternité, que cette
virginité consacrée par elle, nous rapprochent
toujours plus du Fils de Marie en même temps Fils de Dieu; qu'elles nous
unissent dans une pureté plus grande au Sacrifice préparé sur l'autel à
l'honneur de ce jour.
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SECRETE.
Permettez, Seigneur, que
vienne à notre aide l'humanité de votre Fils unique ; né d'une vierge, loin de
léser l'intégrité de sa mère, il l'a consacrée : qu'il nous délivre de nos
fautes et vous rende ainsi notre offrande acceptable en cette fête de la
Nativité, Jésus-Christ notre Seigneur qui, étant Dieu, vit et règne avec vous.
MEMOIRE DE SAINT ADRIEN.
Agréez nos offrandes et nos
vœux, nous vous en supplions, Seigneur ; purifiez-nous par ces Mystères du
ciel, exaucez-nous dans votre clémence. Par Jésus-Christ.
PRÉFACE.
C'est une chose digne et
juste, équitable et salutaire, Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu
éternel, de vous rendre grâces en tout temps et en tous lieux ; spécialement de
vous louer, de vous bénir, de vous célébrer en la Nativité de la bienheureuse
Marie toujours vierge. C'est elle qui a conçu votre Fils unique par l'opération
du Saint-Esprit, et qui, sans rien perdre de la gloire de sa virginité, a donné
au monde la Lumière éternelle, Jésus-Christ notre Seigneur : par qui les Anges
louent votre Majesté, les Dominations l'adorent, les Puissances la révèrent en
tremblant, les Cieux et les Vertus des cieux, et les heureux Séraphins la
célèbrent avec transport. Daignez permettre à nos voix de s'unir à leurs voix,
afin que nous puissions dire dans une humble confession : Saint ! Saint ! Saint
!
En possession du Seigneur,
n'oublions pas, dans la Communion, que nous devons sa venue à l'Enfant bénie
qui naquit à cette date, il y a dix-neuf siècles, pour le donner à la terre.
COMMUNION.
Bienheureuses les entrailles
de la Vierge Marie, qui ont porté le Fils du Père éternel !
Puisse le retour de cette
bienheureuse fête au Cycle sacré ne rester pas infécond dans nos âmes; puissent
les Mystères adorables auxquels il nous a valu de participer, éloigner de nous
le mal du temps et le mal éternel, ainsi que le demande la Postcommunion.
POSTCOMMUNION.
Nous avons, Seigneur,
participé aux Mystères qui consacrent cette fête annuelle ; faites, nous vous
en supplions, qu'ils nous soient un remède pour la vie du temps et pour
l'éternelle. Par Jésus-Christ.
MÉMOIRE DE SAINT ADRIEN
Nous vous en prions, Seigneur
notre Dieu : de même que nous applaudissons à vos Saints en célébrant dans le
temps leur mémoire, faites que leur vue nous réjouisse dans l'éternité. Par
Jésus-Christ.
A SEXTE
L'Hymne et les trois Psaumes se
trouvent ci-dessus, page 32
Ant. De royale descendance, Marie naît en ce jour; de cœur et d'âme
nous implorons dévotement le secours de ses prières.
CAPITULE. (Eccli. XXIV)
Et c'est ainsi que je me suis
affermie dans Sion. J'ai donc trouvé mon repos dans la cité sainte, et ma
puissance est établie dans Jérusalem. J'ai pris racine dans le peuple honoré du
Seigneur, dans le peuple héritage de mon Dieu, et ma demeure est dans la
plénitude des Saints.
R/. br.
Il la soutiendra * De son regard divin.
Il la soutiendra.
V/. Dieu est au milieu d'elle ; elle ne sera point ébranlée. *
De son regard divin.
Gloire au Père. Il la
soutiendra.
V/. Dieu l'a élue et la
choisie d'avance.
R/. Il la fait habiter dans
son tabernacle.
L'Oraison est la Collecte de la
Messe, page 178.
A NONE.
L'Hymne et les Psaumes, ci dessus,
page 37.
Ant. En allégresse célébrons la naissance de Marie la
bienheureuse, pour qu'elle-même intercède en notre faveur près du Seigneur
Jésus-Christ.
CAPITULE. (Eccli. XXIV
Sur les places, j'ai donné
mon parfum comme le cinnamome et le baume odorant ,
comme une myrrhe de choix, j'ai donné ma senteur.
R/. br.
Dieu l'a élue, * Et l'a choisie d'avance. Dieu l'a élue.
V/. Il la fait habiter dans
son tabernacle, * Et l'a choisie d'avance.
Gloire au Père. Dieu l'a
élue.
V/. La grâce est répandue sur
vos lèvres.
R/. C'est pourquoi le
Seigneur vous a bénie à jamais.
L'Oraison, page 178.
AUX SECONDES VÊPRES.
Les Antiennes, les Psaumes, le
Capitule, l'Hymne et le Verset, sont les mêmes qu'aux premières Vêpres, pages
169-174, à l'exception de l'Antienne de Magnificat.
ANTIENNE de Magnificat.
Votre naissance, ô Vierge
Mère de Dieu, fut l'annonce de la joie pour le monde ; car c est de vous qu'est
né le Soleil de justice, le Christ notre Dieu, qui détruisant la malédiction
octroya la bénédiction, et confondant la mort nous gratifia de l'éternelle vie.
Après l'Oraison de la fête, on fait mémoire d'un
saint Martyr, que l'Eglise continuera d'associer demain aux honneurs rendus à
Notre-Dame en ce deuxième jour de sa vie sur terre. Gorgonius
était chambellan de l'empereur Dioclétien. Les saints de la maison de César (1),
dont l'Apôtre envoyait le salut aux chrétiens de Philippes, n'avaient fait depuis lors que s'accroître en nombre.
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Eusèbe s'étend sur la faveur spéciale dont les entourait,
avant la dernière persécution, la confiance des maîtres du monde ; la
préférence dont ils étaient l'objet allait jusqu'à les exempter de toute
participation aux rites officiels, pour leur permettre d'accepter le
gouvernement des provinces (1). Dans le palais, liberté entière de pratiquer et
d'affirmer leur foi était laissée à leurs femmes, enfants, serviteurs (2) : si
bien que la cour de Nicomédie formait comme une église autour de l'impératrice
Prisca et de sa fille Valéria, chrétiennes
elles-mêmes alors, mais qui, hélas ! ne persévérèrent
pas (3).
Il avait fallu toute la fourberie
de Galère pour amener Dioclétien à publier contre la religion de ces hommes
dévoués, qu'il aimait comme ses fils, dit Eusèbe (4), les sanglants édits de
l'année 3o3. Mais l'ère des Martyrs une fois ouverte, César redevenu Néron, on
vit les officiers du palais surpasser en gloire tous les héros du Christ que
leur courage avait illustrés jusque-là dans l'empire ou par delà ses frontières
(5). Comme princes de ces vaillants, l'historien nomme Pierre, Dorothée, Gorgonius (6). C'est à la translation qui eut lieu plus
tard des reliques saintes de ce dernier dans Rome, que nous devons de pouvoir
le célébrer, au nom de tous ses nobles compagnons, sur notre Cycle d'Occident ;
il méritait, comme Adrien, d'y faire cortège à la Mère de Dieu.
MÉMOIRE DE SAINT GORGON, MARTYR.
Ant. Ce saint a combattu
pour la loi de son Dieu jusqu'à la mort,
et il n'a pas tremblé devant les paroles des impies ; car il était fondé sur la
pierre ferme.
V/. Seigneur, vous l'avez
couronné de gloire et d'honneur.
R/. Et vous l'avez établi sur
les œuvres de vos mains.
ORAISON
Daigne, Seigneur, Gorgonius votre Saint prier pour nous, et nous donner part
aux pieuses joies de son jour de fête. Par Jésus-Christ.
A l'honneur de la douce naissance
qui ravit la terre, chantons les suaves Répons dus à la collaboration de
Fulbert de Chartres et de notre Robert le Pieux. La France entière les avait
adoptés ; l'Europe les répéta après la France.
REPONS.
R/. Pour engendrer le Soleil de justice, monarque suprême:* Etoile de la
mer, Marie se lève, et elle naît en ce jour.
V/. Fidèles, réjouissez-vous
d'avoir à contempler la lumière de Dieu.
* Etoile de la mer, Marie se
lève, et elle naît en ce jour.
R/. La tige de Jessé a produit une branche ; la branche a produit une
fleur : * Et sur cette fleur repose l'Esprit-Saint.
V/. La Vierge Mère de Dieu
est la branche ; la fleur, c'est son Fils.
* Et sur cette fleur repose l'Eprit-Saint.
R/. Par bon plaisir du
Seigneur ennoblissant en nous ses dons : * Comme l'épine la rose, la Judée
engendra Marie.
V/. Pour que le vice fût
surmonté par la vertu, le péché par la grâce.
* Comme l'épine la rose, la Judée engendra
Marie.
Gloire au Père, et au Fils,
et au Saint-Esprit.
* Comme l'épine la rose, la Judée engendra
Marie.
Notre monde, ô Marie, vous
possède enfin ! Votre naissance lui révèle le secret de sa destinée, le secret
d'amour qui l'appela du néant à devenir le palais du Dieu qui résidait
au-dessus des cieux. Mais quel est donc ce mystère de la chétive humanité,
qu'inférieure aux Anges par sa nature, elle soit appelée à leur donner pourtant
leur Roi et leur Reine? Leur Roi, bientôt ils l'adoreront nouveau-né dans vos
bras ; leur Reine, ils la révèrent aujourd'hui, et l'admirent dans son berceau
comme admirent les Anges. Astres du matin, ces nobles esprits
contemplaient au commencement les manifestations de la Toute-Puissance,
et ils louaient le Très-Haut (1) ; jamais
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néanmoins leur avide regard ne
découvrit merveille pareille à celle qui les fait tressaillir à cette heure:
Dieu reflété plus purement sous le voile corporel, sous l'enveloppe fragile
d'une enfant d'un jour, que dans la force et tout l'éclat des neuf chœurs ;
Dieu captivé lui-même par tant de faiblesse unie par sa grâce à tant d'amour qu'il
en fait le point culminant de son œuvre, en arrêtant d'y manifester son Fils.
Reine des Anges, vous êtes aussi
la nôtre ; recevez-nous à foi et hommage. En cette journée où le premier élan
de votre âme très sainte fut pour le Seigneur, le premier sourire de vos yeux
pour les fortunés parents qui vous mirent au monde, daigne la bienheureuse Anne
nous admettre à baiser à genoux votre main bénie, toute prête déjà aux divines
largesses dont elle est la dispensatrice prédestinée. Et maintenant grandissez,
douce enfant ; que vos pieds s'affermissent pour briser la tête du serpent
maudit, que vos bras prennent force pour porter le trésor du monde : l'ange et
l'homme, toute la nature, Dieu Père, Fils, Esprit-Saint,
sont dans l'attente du moment solennel où Gabriel pourra s'envoler des cieux,
vous saluant pleine de grâce et vous apportant le message de l'amour.