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TROISIÈME EXHORTATION
AUX URSULINES DE MEAUX (a).
Mes Filles, j'ai désiré de vous
parler à vous autres en particulier, pour vous exhorter encore aujourd'hui à
estimer extrêmement votre vocation et votre état; et j'ai voulu vous faire venir
(a) Prononcée aux Ursulines de Meaux, le 18 avril
1685.
Pendant la visite pastorale dans ce monastère, le pieux
évêque fit réunir les professes du noviciat, et leur donna les instructions
qu'on va lire.
C’est toujours à une religieuse qu'on doit le texte, plus
ou moins exact, du discours.
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ici toutes en ma présence, pour vous animer derechef à vous
perfectionner par les meilleurs et plus solides moyens que vous avez dans votre
état, et que vous devez fidèlement suivre. Ces jours passés je vous ai fait dire
une chose que j'estimais que vous devez faire touchant le plus important de ces
moyens, qui est la retraite. Vous m'avez fait paraître là-dessus vos bons
sentiments, m'ayant toutes marqué le désir que vous aviez d'observer avec
exactitude ce que je vous ai ordonné sur ce point, qui vous est de si grande
conséquence.
Vous êtes déjà à Jésus-Christ et
vous lui appartenez par votre consécration, puisque vous êtes professes; et vous
êtes heureuses de ce que Dieu prend un soin particulier de vous. Mais j'estime
encore extrêmement votre bonheur de ce qu'étant obligées de tendre à la
perfection du christianisme, vous êtes dans le plus favorable temps pour vous y
avancer et pour vous y bien établir. Je considère beaucoup l'avantage que vous
possédez dans ces années de noviciat où vous voilà encore. La religion vous y
retient pour vous mieux former, et pour vous mieux revêtir de son esprit.
Jésus-Christ a sur vous un regard tout particulier de bienveillance et de grâce,
et il vous le témoigne par ce plus grand soin que l'on prend de vous. On vous
cultive davantage ; on vous destine tout exprès une mère pour veiller plus
particulièrement sur vous, et pour vous inspirer les dispositions que vous devez
avoir et qu'il faut que vous établissiez pour le fondement de votre vie
religieuse. On vous tient sous une discipline plus exacte ; et vous avez pendant
ce temps plus de facilité pour vous avancer dans la perfection chrétienne et
pour acquérir les vertus religieuses, vivant plus séparées et hors des emplois
plus capables de vous distraire. Vous n'avez en cet état que l'unique soin de
votre avancement : travaillez-y par la retraite. Ce qui vous y avancera, ce sera
la retraite, la séparation des créatures, l'amour de la solitude , l'attention à
ne se point répandre çà et là, à ne point parler aux créatures, à ne point faire
parler en vous les créatures, mais à se former une habitude d'un saint
recueillement pour parler à Dieu et pour l'écouter parler en vous.
C'est là, mes Filles, le désir
que vous devez avoir de vous rendre
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dignes que Dieu vous parle, de vous disposer à traiter avec
lui, et de ne point perdre les moyens que vous avez pour vous procurer ce grand
avantage. Je vous regarde comme le fondement sur lequel Dieu veut établir
l'édifice de la religion, puisque c'est dans le noviciat que se doivent former
celles qui après composent la communauté. Pour y être utiles, il faut
premièrement que vous soyez bien fondées en la vertu par un bon noviciat, où
vous ayez bien employé le temps et travaillé à votre perfection, et cela par la
séparation des créatures, sans laquelle vous ne pourrez acquérir aucune vertu :
et ce serait, à la vérité, une chose bien ruineuse et bien préjudiciable, de
voir une fille sortir du noviciat sans y avoir acquis les bonnes habitudes et la
pratique des vertus nécessaires pour tendre efficacement à sa perfection, et
pour y faire tous les jours de nouveaux progrès le reste de sa vie. Cela serait
bien dommageable et pour elle et pour toute la maison, dont l'ordre est troublé
et détruit par le défaut de vertu solide. Or cette solide vertu consiste
principalement dans le soin que vous devez prendre de cultiver
très-soigneusement, chacune en votre particulier, la grâce de votre vocation
sainte, par la récollection intérieure et par la séparation des créatures.
Croyez-moi, mes Filles, et je
vous l'ai déjà dit, vous n'avancerez qu'à mesure que vous vous affectionnerez à
désirer et à rechercher la retraite et le silence. Ce sera ce silence qui vous
établira solidement dans les vertus qui soutiendront votre conduite , et qui en
feront toute l'économie pendant tout le reste de votre vie ; et quand vous serez
à la communauté, à moins de cela jamais vous n'y pourrez être de bonne
édification, et vous n'y vivrez point en vraies religieuses. C'est donc dans
cette retraite qu'on ne peut assez vous recommander, que vous cultiverez, que
vous goûterez et que vous conserverez le fruit d'une vocation si sainte : sans
elle vous ne le pouvez faire ; sans elle vous ne trouverez jamais que du déchet
en votre âme, du désordre dans votre conscience et du trouble dans votre cœur.
Si vous vous épanchez facilement au dehors, vous ne pouvez retenir longtemps
l'impression d'aucune grâce, ni en faire nul profit : car les discours vains et
inutiles ne servent qu'à dissiper, et à remplir l'esprit d'une
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multitude de choses qui l'empêchent de se porter vers Dieu
son souverain bien. Les épanchements au dehors offusquent l’âme de pensées
attachantes qui sont de grands obstacles à l'oraison ; cela forme votre
intérieur à un état de distraction, qui vous rend inhabiles à ce saint exercice
de traiter avec Dieu.
Que l'on fait de grandes pertes
par le manquement d'intérieur! Que l'habitude à tant parler cause de grandes
omissions du bien, et fait tomber dans de grands maux ! Si l'on connaissait ce
que l'on perd à se répandre inutilement à l'extérieur, on s'affligerait avec
grand sujet sur ces pertes. Que fait-on quand on préfère les entretiens des
créatures à ceux de Dieu, sinon se livrer volontairement à son propre dommage?
Et que faites-vous , mes Filles, lorsque vous vous remplissez des idées et des
entretiens des créatures? Vous en êtes distraites, vous vous en occupez, vous en
demeurez toutes pénétrées ; cela vous dissipe et vous traverse dans vos saints
exercices. Vous portez cette impression dans la prière, et c'est ce qui vous ôte
la présence de Dieu. Vous ne sauriez vous adonner à l'oraison, et vous y perdez
le temps. Ainsi tout l'ouvrage de votre avancement spirituel est arrêté par ce
dérèglement et par cet épanchement au dehors.
Vous ne pouvez rien faire dans
l'oraison, ni rien établir dans l'édifice de votre perfection, si pour traiter
avec Dieu, vous n'entrez dans une grande disposition de solitude à l'égard de la
créature. Il attend qu'il vous trouve silencieuses. Quand il trouve notre âme
seule, dégagée des créatures et retirée avec lui tout seul, il la visite, il lui
envoie ses lumières, il répand en elle ses grâces, il lui découvre ses vérités ;
c'est là où il nous remplit de la connaissance de nous-mêmes et de la contrition
de nos fautes. En ce saint silence, si nous avons besoin d'humilité, nous
recevons des impressions qui nous anéantissent : nous sommes occupés au dedans
de notre âme de l'esprit d'une componction intime; Dieu nous remplit de cette
sainte horreur de nous-mêmes à la vue de nos indignités; il opère en notre
intérieur de secrètes, mais puissantes convictions de nos iniquités; il nous
abaisse et nous écrase comme des vers : enfin, mes Filles , sa bonté prend ce
temps de retraite et il l'attend pour nous occuper, pour nous
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éclairer, pour nous purifier et nous changer par tous ces
effets de sa grâce. Dans ce saint commerce avec Dieu, vous formerez des
résolutions efficaces pour la pratique des œuvres de la perfection du
christianisme, qui fait la principale de vos obligations.
C'est le but où vous devez
tendre sans cesse ; c'est là votre fin que vous devez toujours regarder, et non
pas vous porter à rien de singulier. Il ne faut point vous proposer rien
d'extraordinaire qui ressente l'élévation ; mais pourtant vous devez vous tenir
disposées à vous exercer en la pratique des plus grandes vertus , si Dieu vous
en donne les occasions. Car bien qu'une religieuse ne doive pas se porter
d'elle-même à rien d'extraordinaire, elle est cependant obligée d'être fidèle à
embrasser les actes des plus grandes vertus et de s'y porter avec fidélité,
quand Dieu les exigera et s'il les demande d'elle. Le soin que vous devez avoir
de votre salut et de votre sanctification doit vous rendre attentives et
soigneuses de recevoir et conserver la grâce ; mais vous ne le serez jamais, si
vous vous répandez trop à l'extérieur et si vous ne vous récolligez pas.
Je sais que vous êtes toutes
fort occupées. Il y a assez d'obédiences dans cette maison, et votre institut
vous occupe bien du temps et vous emploie beaucoup. C'est pourquoi le peu de
loisir qui vous reste, employez-le à rentrer sérieusement dans le sanctuaire de
votre âme, où sans doute vous trouverez le Saint-Esprit. Ayez un saint
empressement de vous donner à la retraite et de faire de votre cellule un petit
paradis, estimant tous les moments où vous pouvez vous y retirer, afin d'y
entendre parler Dieu en vous-mêmes et pour l'y écouter paisiblement et
non-seulement pour l'écouter, mais pour le posséder. Car, mes Filles, il n'est
pas de ce divin objet de notre amour la même chose que des créatures : souvent
nous aimons ce que nous ne possédons pas, et au moins ce que nous ne pouvons pas
toujours posséder. Mais en Dieu, nous avons ce bonheur et ce grand avantage , de
ne le pouvoir aimer sans le posséder : aussitôt que nous l'aimons, nous sommes
en possession de lui-même. Quand donc vous serez en obédience avec quelqu'une de
la communauté, aussitôt préméditez tout ce que vous aurez à faire pour prendre
toujours le parti du silence,
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et prévoyez comment vous ferez pour le garder partout
autant que vous pourrez.
Après vous être acquittées des
devoirs de vos offices, estimez-vous heureuses si vous pouvez ménager le reste
du temps pour le consacrer à la retraite. Si vous y êtes véritablement
affectionnées, vous ne consommerez pas vainement le temps, vous n'aimerez pas à
le perdre ni à le mal employer : soyez-en ménagères ; et au lieu de le consommer
à parler inutilement après l'acquit de vos obédiences, allez le passer en votre
cellule en ouvrage et eu silence ; et là, mes Filles, occupez-vous de Dieu et de
sa présence : pesez l'état que vous devez faire de ces moments qu'il vous donne
pour lui parler, pour vous entretenir de lui et avec lui.
Combien précieux ces moments qui
nous mettent en état d'écouter Dieu parler en nous-mêmes ! Dieu qui se plaît à
se communiquer à une âme, quand il la trouve dans une entière oubliance et
séparation de tout ce qui est hors de lui ; Dieu qui observe et qui attend ce
temps favorable pour prendre une possession intime de l'intérieur, pour y
établir son règne, et qui le dispose à ses grâces dès que notre cœur le cherche
dans la récollection véritable; Dieu qui visite l'intime de ce cœur pour en
faire son temple, sa maison vivante et animée , pour contenir son immense et
incompréhensible grandeur ; Dieu qui porte des lumières dans le fond de L'âme
recueillie, tantôt comme juge pour la remplir du regret de ses fautes, tantôt
comme Souverain et Tout-Puissant pour la remplir du sentiment de sa présence et
de sa majesté, et la former à des états d'abaissement et d'anéantissement devant
lui ; Dieu qui communique sa sainteté à ses créatures par des impressions de
pureté et des désirs qu'il leur donne de séparation pour les choses de la terre
; Dieu qui leur confère cette même pureté , et qui les dispose à traiter
familièrement avec lui, en leur imprimant une chaste crainte de lui déplaire et
les rendant amoureusement désireuses de lui plaire ; Dieu qui prend une secrète
possession d'une âme qu'il trouve fidèle à se séparer des vaines joies et des
vains amusements de la terre, et qui la comble de délices en lui faisant part de
sa même joie; Dieu qui lui ouvre des sentiers admirables de paix , de
consolation et de douceur, quand
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il la trouve à l'écart, seule avec lui, séparée des objets
créés, et fuyant tout engagement avec les créatures.
Mes Filles, j'ai eu bien raison
de vous le dire : on fait des pertes déplorables par le défaut de silence.
Pleurez celles que vous avez faites et réparez-les à l'avenir, vous rendant
fidèles à retrancher tout discours inutile et superflu. Etablissez en vous-mêmes
ce silence, inspirez-le dans les autres; et croyez que c'est l'élément de votre
perfection d'être retirées, intérieures et récolligées. Attendez plus de fruit
de cette conduite que de tous les entretiens avec les créatures, quelque saints
qu'ils puissent être. Votre avancement ne dépend point de traiter avec les
créatures; persuadez-vous plutôt, comme il est vrai, qu'il est attaché à parler
peu aux hommes et beaucoup à Dieu. Apprenons aujourd'hui à nous passer de toutes
les créatures, et à ne chercher de consolation qu'en Jésus-Christ. Et à quoi
servent tant de discours, entretiens inutiles, et tant de paroles superflues,
sinon à vous ôter ces grands biens et à vous faire de grands maux en vous
dissipant? Cela vous remplit de trouble et d'inquiétudes, et vous ôte l'Esprit
de Jésus-Christ, qui ne se trouve que dans la paix et dans la fidélité à se
retirer en son intérieur. D'où viennent tant de désirs de parler, sinon de cette
nature qui veut toujours se satisfaire en la créature et parmi les sens, et qui
nous détourne de Dieu pour nous convertir vers les choses de la terre ?
Non, mes Filles, il ne faut plus
que vous suiviez ces mouvements qui vous ont attirées dehors ; il faut rentrer
en vous-mêmes et que vous vous passiez, le plus qu'il vous sera possible, de
tout ce qui n'est point Dieu pour le faire occuper tout seul votre cœur et vos
pensées. N'ayez d'entretien avec personne , à moins qu'il n'y ait du besoin :
évitez par là de grands écueils, qui font obstacle à la pureté de la vie. Saint
Jacques dit que de la langue viennent tous les péchés qui se commettent (1). La
paix serait toujours dans les communautés si l'on savait gouverner sa langue.
Car d'où procèdent tant de fautes ? D'où vient que l'on a de petites
antipathies, que l'on fait des médisances, que l'on raille, que l'on se plaint,
que l'on murmure et que l'on voit de certains éloignements
1 Jacob., III, 6.
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les unes des autres, qui forment les divisions? Tous ces
défauts ne viennent que du dérèglement de la langue et du défaut de silence ; et
si l'on ne parlait point, et que vous vous tinssiez dans votre retraite, tout
cela n'arriverait pas. Le manquement de silence cause toutes les fautes contre
la charité, qui se trouvent dans les maisons religieuses. Aussi saint Jacques
nous dit : « Que l'homme soit prompt à écouter et tardif à parler ». »
Qu'entend-il par là, sinon qu'il faut apprendre à ne parler que pour les choses
nécessaires? Que veut dire cela, si ce n'est qu'on doit écouter celles qu'il
faut qui nous parlent, mais les écouter d'une manière qu'elles ne nous
distraient point, et ne nous empêchent pas d'entendre parler Jésus-Christ dans
le fond de notre âme ?
Faites si bien que vous
contractiez une sainte habitude de ne parler précisément que lorsque quelque
nécessité vous y oblige ; faites-vous-en une loi, et mettez-y votre plaisir. La
pratique fidèle de ce point vous en fera goûter l'exercice. Rendez-vous-y
soigneuses, mes Filles ; ayez toujours un nouveau désir d'en faire l'expérience.
Lorsqu'une âme pressée du désir de se perfectionner, fait de suffisants efforts
pour obtenir cette grâce de récollection et s'y adonne sérieusement, il arrive
que par le moyen de son silence elle obtient le silence ; je veux dire que
venant à goûter le bonheur de sa solitude, elle en chérit et en recherche la
possession : elle ménage les moindres moments de cette sainte retraite, et elle
les estime précieux. On voit cette religieuse se renfermer dans sa petite
cellule, parce qu'elle est toute animée des dispositions qui lui font aimer sa
solitude, et la préférer à toutes les conversations et à tous les
divertissements de la terre.
Ainsi, mes Filles, avec un peu
d'application à ce que nous vous disons, vous ferez vos délices de cette
pratique et de ce saint exercice , de laisser parler Dieu intérieurement dans
votre cœur. Tout aussitôt qu'il vous trouvera seules, vous entendrez sa voix et
vous sentirez sa présence par certaines touches de grâce : vous vous trouverez
tout abîmées devant lui dans un profond sentiment de respect pour sa majesté ;
vous y produirez des actes intérieurs de toutes manières, qui vous disposeront à
l'oraison et vous en
1 Jacob., I, 19.
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conféreront l'esprit ; vous serez dégagées et purifiées des
dispositions grossières, dont les sens et la nature font des impressions si
fréquentes et si imparfaites. Ce sera dans la séparation et en vous retirant
seules auprès de Dieu, que vous posséderez ces grâces et jamais parmi les
discours et les fréquentations inutiles avec les créatures.
Faites donc taire chez vous
toutes les créatures ; et vous-mêmes, quittez tout entretien de pensée avec
elles, afin d'être en état que Dieu vous parle. Observez de ne point parler pour
vous-mêmes : voilà une bonne règle du silence. Il ne faut point parler pour
soi-même , mais seulement pour la gloire de Dieu, pour le bien du prochain ,
pour la charité ; et comme Jésus-Christ est votre modèle, voyez l'exemple qu'il
vous en donne pendant sa vie : chose admirable , que l'on ne nous ait pu dire
qu'une seule parole qu’il ait dite durant trente ans, qui fut lorsque sa mère le
cherchait !
En sa passion il a fait usage
d'un perpétuel silence. Voyez-le chez Caïphe, il répond pour rendre témoignage à
la vérité : devant Pilate, il parle pour l'instruire ; hors de là, quel
silence ! Il n'a jamais parlé pour soi : lorsqu'il était accusé et calomnié , il
ne répondait rien ; et quand la vérité l'a obligé de parler, il l'a fait en peu
de paroles. Apprenez donc de lui le silence ; aimez à être seules, après
l'acquit de vos emplois. Occupez-vous à aimer Jésus-Christ, à penser à lui :
méditez sa passion, lisez ses paroles, goûtez ses maximes, aimez d'être
abandonnées des créatures, pesez les états d'abandon de Jésus-Christ ; voyez-le
seul, délaissé. Ce divin Sauveur nous est d'un grand exemple dans tous ses
mystères. C'est sur lui, mes Filles, qu'il faut vous imprimer bien avant cette
vérité : Il n'y a que Dieu dont je doive attendre ma perfection ; et partout
trouver moyen de pratiquer l'éloignement et la solitude des créatures. Quand on
y a mis son affection, on la trouve en tout temps, en tous lieux.
C'est donc là, mes Filles, ce qui m'a fait vous parler en
particulier, vous assembler toutes ici en ma présence pour vous donner cette
instruction, qui n'est pas simplement un avis et un conseil : ce n'est pas
seulement une exhortation ; mais c'est un précepte que je vous donne, et que
Dieu m'a inspiré de vous enjoindre.
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Recevez-le de la part du Saint-Esprit, qui m'a porté à vous
le donner ; ressouvenez-vous bien de ce jour, et ne l'oubliez jamais. Je vous ai
trouvées toutes, ce me semble, dans de bons désirs : ce sont vos bonnes
dispositions qui me font espérer que vous ferez profit de cette ordonnance ;
gardez-la donc soigneusement, et priez Dieu pour moi ; je le prie de tout mon
cœur qu'il vous bénisse.
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