RÉPONSE DE SAINT
THOMAS D’AQUIN AU FRÈRE JEAN DE VERCEIL, SUPÉRIEUR GÉNÉRAL DE L’ORDRE DES
FRÈRES PRÊCHEURS, SUR 108 PROPOSITIONS TIRÉES DE L’OUVRAGE DE PIERRE DE
TARENTAISE.
SAINT THOMAS
D'AQUIN, DOCTEUR DE L'ÉGLISE
Editions Louis Vivès, 1857
Entièrement reprise et
corrigée par Georges Comeau,
2010
Deuxième édition numérique, https://www.i-docteurangelique.fr/DocteurAngelique,
2010
Les œuvres complètes de saint Thomas d'Aquin
Sancti Thomae de Aquino
Responsio de 108 articulis
ad magistrum Ioannem de
Vercellis
Textum Taurini 1954 editum |
Traduction par Georges Comeau, 2010 Texte édité à Turin en
1954 et trans par machine sur bandes magnétiques par Roberto Busa, S.J., puis
relu et programmé par Enrique Alarcon. |
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Quaestio 1 |
Question 1 : [Concepts et images dans notre
connaissance] |
[70685] De 108 articulis, q. 1 Primo considerandum est, quod ratio cuiuslibet est quam significat
nomen eius, sicut ratio lapidis est quam significat nomen eius. Nomina autem
sunt signa intellectualium conceptionum: unde ratio uniuscuiusque rei
significata per nomen, est conceptio intellectus, quam significat nomen. Haec
autem conceptio intellectus est quidem in intellectu sicut in subiecto, in re
autem intellecta sicut in repraesentato: nam conceptiones intellectuum sunt
similitudines quaedam rerum intellectarum. Si autem conceptio intellectus non
assimilaretur rei, falsa esset conceptio de re illa, sicut si intelligeret
esse lapidem quod non est lapis. Ratio igitur lapidis est quidem in
intellectu sicut in subiecto, in lapide autem sicut in eo quod causat
veritatem in conceptione intellectus intelligentis lapidem talem esse. Cum
igitur intellectus rem aliquam comprehendit, una conceptione perfecte illam
rem repraesentat; et sic diversas conceptiones contingit esse diversarum
rerum. Intellectus autem noster Deum comprehendere non potest, nec ipsum in
essentia sua videre in statu viae, sed aliqualiter ex rebus creatis ipsum
cognoscit. Diversae autem perfectiones rerum creatarum, puta sapientia,
voluntas, et huiusmodi, repraesentant quidem imperfecte divinam perfectionem:
ex hoc enim quod aliqua creatura est sapiens, aliqualiter accedit ad divinam
similitudinem; similiter ex hoc quod est potens, et ex hoc quod est volens;
ita tamen quod quidquid perfectionis seu nobilitatis competit creaturae,
etiam Deo competit, qui est creaturarum causa effectiva aequivoca. Sed tamen haec diversa eminentius competunt Deo
secundum simplicem essentiam suam. Et similiter intellectus
noster ex rebus creatis scientiam accipiens per diversas conceptiones
assimilatur uni divinae essentiae, licet imperfecte. Sic igitur bonitas,
sapientia, et potentia, et si quid aliud huiusmodi de Deo dicimus, differunt
ratione propter diversas conceptiones intellectus nostri, sed sunt idem re,
quia essentia divina est una et eadem, quam intellectus noster diversis
conceptionibus repraesentat; sicut etiam diversae res repraesentant essentiam
divinam diversis formis. Sic igitur sane intelligi potest quod primo ponitur:
quia omnis perfectio est in Deo
verissime, cum alia sit sapientiae, alia bonitatis verissima ratio, oportet
quod haec in Deo differant ratione; quia vero modo simplici in ipso sunt,
sunt idem re. Calumniose autem contra haec obiicitur, quod ipsa
differentia sapientiae et bonitatis in Deo sit, et non solum in intellectu
creato. Non enim haec intellexit scribens, sed quod in Deo, idest cum de Deo
dicuntur, differunt ratione, idest secundum diversas conceptiones intellectus
nostri, quae unam divinam essentiam repraesentent, licet imperfecte. Patet
enim iam ex dictis, quod ratio de qua mentio fit, est quidem in intellectu
sicut in subiecto, in essentia autem divina sicut in repraesentato. Item quod
secundo obiicitur, quod ratio bonitatis divinae includit in se sapientiam,
quia bonitas divina est sapientia, non valet: quia bonitas divina est divina
sapientia ex hoc quod est divina, non ex hoc quod est bonitas; neque ex hoc
quod est sapientia, est bonitas. Hoc autem pertinet ad rationem bonitatis et
sapientiae, scilicet quod competit bonitati inquantum est bonitas, et
sapientiae inquantum sapientia. Unde patet quod etiam tertium non valet: non
enim pertinet ad rationem bonitatis et sapientiae quod huic vel illi convenit
inquantum est divina, sed quod competit bonitati inquantum est bonitas, et
sapientiae inquantum est sapientia, ut dictum est. |
Il faut d’abord
remarquer que la notion de quoi que ce soit est ce que signifie le nom de la
chose ; par exemple, la notion de la pierre est ce que signifie ce nom. Or,
les noms sont les signes des concepts de l’intelligence ; c’est pourquoi la
notion de toute chose signifiée par un nom est la conception intellectuelle
signifiée par ce nom. Cependant, cette conception intellectuelle se trouve
dans l’intelligence comme dans son sujet, et dans la chose comprise comme
dans un objet représenté, car les conceptions intellectuelles sont des
ressemblances des choses comprises. Mais si la conception intellectuelle
n’était pas à la ressemblance de la chose, elle serait une fausse conception
de cette chose, par exemple si on comprenait comme une pierre ce qui n’en est
pas une. La notion de pierre est donc bien dans l’intelligence comme dans un
sujet, et dans la pierre comme dans ce qui cause la vérité de la conception
intellectuelle qui perçoit la pierre comme étant une pierre. Lors donc que
l’intelligence comprend une chose, elle la représente parfaitement par un
seul concept, et il arrive ainsi que des choses diverses donnent lieu à des
concepts divers. Mais notre intelligence ne peut comprendre Dieu, ni le voir
dans son essence dans la vie présente ; pourtant elle le connaît de quelque
façon à partir des choses créées. Les diverses perfections des choses créées,
comme la sagesse, la volonté et ainsi de suite, représentent, quoique
imparfaitement, la perfection divine ; en effet, une créature atteint d’une
certaine manière à la ressemblance divine du fait qu’elle est sage, ou encore
du fait qu’elle est puissante ou qu’elle est douée de volonté, de manière
cependant que toute perfection et toute noblesse qui appartient à la créature
appartient aussi à Dieu, qui est appelé, de façon équivoque, la cause
efficiente des créatures. Mais pourtant, ces diverses qualités appartiennent
de façon plus éminente à Dieu en son essense simple. Pareillement, notre
intelligence, qui acquiert la science à partir des choses créées au moyen de
divers concepts, ressemble de manière imparfaite à l’essence divine unique.
Ainsi donc, la bonté, la sagesse, la puissance et les autres qualités que
nous attribuons à Dieu, diffèrent en raison à cause des divers concepts de
notre intelligence, mais elles sont la même chose en réalité, car l’essence
divine est une seule et même chose que notre intelligence représente par
divers concepts ; de la même façon, les choses diverses représentent
l’essence divine par diverses formes. C’est donc ainsi qu’on peut comprendre
correctement la première proposition : puisque
c’est en Dieu que toute perfection se trouve de façon suprême, puisque la
notion de la suprême sagesse diffère de la notion de la suprême bonté, il
faut qu’en Dieu elles diffèrent en raison ; mais puisqu’en lui elles sont
totalement simples, elles sont la même chose en réalité. C’est à tort
qu’on s’y oppose en disant que la différence entre la sagesse et la bonté se
trouve en Dieu et non seulement dans l’intelligence créée. En effet, l’auteur
de ces lignes a seulement voulu dire qu’en
Dieu, c'est-à-dire quand on parle de Dieu, elles diffèrent en raison, c'est-à-dire selon les divers concepts
de notre intelligence, qui représentent tous l’unique essence divine, mais de
manière imparfaite. En effet, il est déjà évident d’après ce qui précède que
la notion dont il est question est dans l’intelligence comme dans son sujet,
mais dans l’essence divine comme dans ce qui est représenté. Quant à la
deuxième objection (que la notion de la bonté divine inclut celle de la
sagesse, parce que la bonté divine est la sagesse), elle ne tient pas, car la
bonté divine est la sagesse divine du fait qu’elle est divine et non du fait
qu’elle est bonté, et elle n’est pas bonté du fait qu’elle est sagesse. Mais
cela seulement appartient aux concepts de bonté et de sagesse, qui convient à
la bonté en tant que bonté, et à la sagesse en tant que sagesse. Cela montre
avec évidence que la troisième objection non plus n’est pas valable : en
effet, ce qui appartient aux notions de bonté et de sagesse ne s’y applique
pas en tant qu’elles sont divines, mais relève de la bonté en tant que bonté
et de la sagesse en tant que sagesse, comme nous l’avons dit. |
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Quaestio 2 |
Question 2 : [Notre connaissance complexe du Dieu
simple] |
[70686] De
108 articulis, q. 2 Ex praemissis etiam patet,
quod sanum intellectum habere potest quod secundo ponitur, scilicet: ratio qua differunt divina attributa,
partim fundatur super rem, partim super intellectum. Oportet tamen quod aliter et aliter fundetur
super utrumque. Nam rationes quibus attributa differunt, fundantur in
intellectu nostro, quia sunt in eo sicut in subiecto. Fundantur autem super
rem, quia sunt similitudines quaedam repraesentantes essentiam divinam suo
modo: sic enim dicitur ratio lapidis fundari super rem, inquantum conceptio
intellectus repraesentat lapidem. Quod autem in contrarium
obiicitur, scilicet id quod omnino unum est, non est diversitatis
fundamentum, patet esse falsum ex praemissis: nam eadem divina essentia a
diversis repraesentatur et in intellectu et in natura. Sic autem intellexit
scribens, rationes diversorum attributorum fundari super essentiam divinam,
sicut super repraesentatum per diversas conceptiones intellectus nostri, quas
nomina diversa significant. |
D’après ce qui
précède, il est également évident qu’on peut comprendre dans le bon sens la
deuxième proposition : la raison de la
différence entre les attributs divins provient en partie de l’objet et en
partie de notre intelligence. Cependant, cette différence est
nécessairement fondée autrement sur l’un et sur l’autre. En effet, les
notions par lesquelles ces attributs diffèrent sont fondées sur notre
intelligence, car elles s’y trouvent comme dans leur sujet ; mais elles sont
fondées sur l’objet parce qu’elles sont des ressemblances qui représentent
l’essence divine à leur façon ; c’est ainsi qu’on dit que la notion de pierre
est fondée sur l’objet, du fait que le concept de l’intelligence représente
la pierre. Mais ce qu’on avance en sens contraire, à savoir que ce qui est
absolument un ne peut pas être un fondement de diversité, est manifestement
faux d’après ce qui précède ; en effet, l’essence divine est représentée par
des choses diverses, tant dans l’intelligence que dans la nature. Mais c’est
ce qu’a compris l’auteur : les notions des divers attributs sont fondés sur l’essence divine comme sur l’objet représenté
par les divers concepts de notre intelligence, que signifient les noms
divers. |
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Quaestio 3 |
Question 3 : [Les idées en Dieu et en nous] |
[70687] De 108 articulis, q. 3 Ex eisdem etiam patet hoc quod tertio ponitur sanum habere
intellectum, scilicet, diversitas
rationis potentiae, sapientiae et bonitatis fundatur in intellectu sicut in
subiecto, in Deo sicut in obiecto, quod praestat causam et fulcimentum suae
veritati. Ut tamen intelligatur, quod
praestat fulcimentum veritati, inquantum repraesentatur per unamquamque
conceptionem intellectus nostri intelligentis huiusmodi attributa: non autem
quantum ad hoc quod ipsa diversitas attributorum repraesentet aliquam
diversitatem in Deo, ut in contrarium obiicitur. Haec enim diversitas
conceptionum seu rationum non provenit ex diversitate Dei, sed ex defectu
intellectus nostri, qui rem unam perfecte non potest intelligere nisi per
multa, qui intelligit attributa secundum quod perfectio invenitur in rebus creatis. |
À partir de ces mêmes
principes, il est également évident que la troisième proposition peut être
prise dans le bon sens : la diversité
des notions de puissance, de sagesse et de bonté est fondée sur
l’intelligence comme sur son sujet, et sur Dieu comme sur son objet, qui
constitue la cause et le soutien de leur vérité. Il faut cependant la
prendre en ce sens qu’elle constitue le
soutien de leur vérité en tant qu’elle est représentée par chaque concept
de notre intelligence qui saisit ces attributs, mais non de sorte que cette
diversité des attributs représente une diversité en Dieu, comme le veut
l’objection. En effet, cette diversité des concepts ou des notions ne
provient pas d’une diversité en Dieu, mais de la faiblesse de notre
intelligence, qui ne peut comprendre parfaitement une chose que par plusieurs
idées et qui comprend les attributs en tant qu’une certaine perfection se
trouve dans les créatures. |
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Quaestio 4 |
Question 4 |
[70688] De 108 articulis, q. 4 Quod vero quarto ponitur: in Deo
non est infinitas extensiva, sed intensiva, non sic est in scripto; ibi
enim sic scriptum est: quod obiicitur
de infinita emanatione: respondeo. Infinitas
extensiva, imperfectionis est, cum recedat ab unitate; infinitas vero
intensiva, perfectionis est, cum accedat ad unitatem. Prima ergo Deo non
convenit, sed secunda. Patet enim quod loquitur de
infinitate emanationis. Emanatio autem extensionem habere potest
secundum numerum, saltem in creaturis: licet Deus habere non possit
extensionem secundum quantitatem dimensivam..
Intensiva autem dicitur infinitas emanationis, etsi non proprie, eo tamen
modo loquendi quo dicitur Deus intensus in bonitate, quia est summe bonus.
Emanatio autem divina non est extensive infinita, quia non est infinitus
numerus personarum emanantium, licet emanatio divina sit aeterna, ut
obiiciens proponit. |
La quatrième
proposition, qu’en Dieu n’est pas une
infinité d’extension, mais d’intensité, n’est pas énoncée ainsi dans
l’ouvrage ; en effet, il est écrit à cet endroit : À l’objection formulée sur l’émanation infinie, je réponds que
l’infinité d’extension relève de l’imperfection, puisqu’elle s’éloigne de
l’unité, mais l’infinité d’intensité relève de la perfection, puisqu’elle
atteint l’unité. Donc, la première ne convient pas à Dieu, mais la deuxième
lui convient. En effet, il est évident qu’on parle de l’infinité
d’émanation. Or, l’émanation peut avoir une extension au sens numérique, au
moins dans les créatures, bien que Dieu ne puisse pas avoir d’extension sous
forme de dimensions spatiales. Cependant, l’infinité d’émanation est dite «
d’intensité », non au sens propre, mais de la façon de parler selon laquelle
on dit que Dieu est intensément bon, parce qu’il est la bonté suprême.
Mais l’émanation divine n’est pas
infinie en extension, parce que le nombre de personnes émanant de Dieu n’est
pas infini, bien que l’émanation divine soit éternelle, comme l’affirme le
critique. |
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Quaestio 5 |
Question 5 |
[70689]
De 108 articulis, q. 5 Quod vero quinto ponitur:
in Deo producere personas non est de
ratione perfectionis, sed in creaturis esset, simpliciter intellectum
falsum est; nisi addatur quod non est de ratione perfectionis absolutae, vel
ad se dictae; et hoc videtur ipse intelligere per ea quae subdit, licet non
bene exprimat; subdit enim: quia dicit
tantum quid quod non est ad aliquid sic producere personam in creatura. |
La cinquième
proposition, qu’en Dieu il n’est pas de
l’essence de la perfection de produire des personnes, mais ce serait de
l’essence de la perfection des créatures, prise isolément, est fausse, à
moins qu’on n’ajoute qu’il ne s’agit pas de l’essence de la perfection
absolue ou en vue d’elle-même; et l’auteur lui-même semble l’avoir compris si
on considère ce qu’il ajoute ensuite : car
il désigne seulement, pour ce qui n’est pas en vue d’autre chose, le fait
de produire ainsi une personne dans la créature. |
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Quaestio 6 |
Question 6 |
[70690] De 108 articulis, q. 6 Quod vero sexto ponitur, relatio
in divinis comparata ad essentiam, ratio sola est; comparata ad obiectum
cuius est, sic res quaedam est, sic intelligitur: quia relatio comparata
ad essentiam, differt solum ratione ab ea, ab opposita autem relatione
differt realiter; unde postea subdit: ipsa
enim relatio, scilicet per comparationem ad essentiam, idem est quod ipsa res,
sed differt ratione; non autem intelligitur quod relatio sit solum ratio,
cui non respondeat res aliqua, ut obiiciens calumniatur. |
La sixième
proposition, que la relation entre les
personnes divines, comparée à leur essence, est seulement une notion ;
comparée à son objet, elle est une réalité, doit se comprendre ainsi : la
relation, comparée à l’essence, n’en diffère qu’en raison, mais elle diffère
de la relation opposée de façon réelle ; c’est pourquoi l’auteur ajoute : la relation en effet, par comparaison à
l’essence, est la même chose que la réalité de l’essence, mais elle en
diffère en raison, ce qu’on ne doit pas comprendre au sens où la relation
serait seulement une notion qui ne correspond à aucune réalité, comme le
prétend à tort le critique. |
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Quaestio 7 |
Question 7 |
[70691]
De 108 articulis, q. 7 Quod vero septimo
ponitur, lux est qualitas agentis
universalis, idest caeli, intelligitur universalis in genere naturalium
agentium, et non simpliciter, ut obiiciens intellexit: lux enim etsi sit in
aere, est tamen in eo a corpore caelesti, sicut calor in aqua ab igne. Sicut
igitur calor est propria qualitas ignis, licet sit in aliis corporibus ab
igne, ita lux potest dici propria qualitas caeli, licet sit in aliis
corporibus causata a caelo. |
Dans la septième
proposition, que la lumière est une
qualité de l’agent universel, c’est-à-dire du ciel, « universel » est
pris dans le genre des agents naturels, et non de façon absolue comme l’a
compris le critique. En effet, bien que la lumière soit dans l’air, elle s’y
trouve en provenance d’un corps céleste, comme la chaleur de l’eau lui vient
du feu. Alors, de même que la chaleur est la qualité propre du feu même si
elle se trouve dans d’autres corps en provenance du feu, on peut dire aussi
que la lumière est la qualité propre du ciel, même si elle est causée dans
d’autres corps par le ciel. |
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Quaestio 8 |
Question 8 |
[70692] De 108 articulis, q. 8 Quod vero octavo ponitur, quia
in hoc nomine Deus, tam res quam modus significandi idem est cum persona,
ideo potest hoc nomen Deus supponere pro persona, non sic intelligitur,
quod modus significandi sit idem cum persona, ut obiiciens intellexit: sed
quod modus significandi in hoc nomine Deus, est idem modo significandi
personae quantum ad hoc quod utrumque significat in concreto. |
La huitième
proposition, que dans le mot « Dieu »,
la réalité ainsi que la manière de la signifier sont identiques à la personne
; donc, le mot « Dieu » peut être pris comme étant la personne, ne veut
pas dire que la manière de signifier est identique à la personne, comme l’a
compris le critique, mais que la manière de signifier du mot « Dieu » est
pareille à la manière de signifier la personne quant à ce que l’un et l’autre
signifient dans la réalité concrète. |
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Quaestio 9 |
Question 9 |
[70693] De 108 articulis, q. 9 Quod vero nono dicitur, generatio
divina non terminatur ad relationem, sed ad hypostasim quae est subiecta,
verum est si intelligatur de substantia prout significat suppositum, non
autem si intelligatur de substantia quae est essentia vel natura. Nec valet
quod obiicitur in contrarium. Relatio in divinis est hypostasis: ergo si
terminatur ad hypostasim, terminatur ad relationem; sicut non valet, essentia
divina est hypostasis, ergo generatio divina terminatur ad essentiam: sicut
enim essentia divina non generatur, ita nec filiatio, sed filius. |
La neuvième
proposition, que la génération divine
n’a pas pour terme la relation, mais l’hypostase qui en est le sujet, est
vraie si on l’entend de la substance en tant qu’elle signifie le sujet réel,
mais pas si on l’entend de la substance, qui est l’essence ou la nature. Et
l’objection en sens contraire n’est pas fondée. Dans la divinité, la relation
est l’hypostase ; donc, si elle a pour terme l’hypostase, elle a pour terme
la relation. Il n’est pas fondé non plus de dire : « l’essence divine est
l’hypostase, donc la génération divine a l’essence pour terme » ; en effet,
de même que l’essence divine n’est pas engendrée, ce n’est pas la filiation
qui est engendrée, mais le Fils. |
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Quaestio 10 |
Question 10 |
[70694] De 108 articulis, q. 10 Quod vero decimo ponitur, quamvis haec concedatur sub aliqua
improprietate, natura de natura, lux de luce, substantia de substantia, Deus
de Deo, non tamen communiter conceditur haec, essentia de essentia, male
dictum est, quantum ad hoc quod dicitur, quod Deus de Deo improprie dicatur.
Est enim haec propria, Deus de Deo, sicut et haec, Deus genuit Deum, ut
obiiciens dicit, et ut ipsemet in quarta distinctione determinat; unde
arbitror ex errore scriptoris accidisse. |
La 10e
proposition, nature de nature, lumière
de lumière, substance de substance, Dieu de Dieu, peut être admise de façon
un peu impropre, mais on ne peut pas admettre en général l’idée d’« essence
d’essence », est incorrecte en ce qu’elle affirme que « Dieu de Dieu »
est un énoncé impropre. En effet, il est correct de dire « Dieu de Dieu »,
aussi bien que de dire « Dieu engendre Dieu » comme le dit le critique, et
comme il l’établit dans sa quatrième distinction ; je suis donc d’avis qu’il y
a eu une erreur de copiste. |
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Quaestio 11 |
Question 11 |
[70695] De 108 articulis, q. 11 Quod vero undecimo proponitur, etsi
eadem sit natura in patre et filio et spiritu sancto, non tamen eodem modo se
habens, dubium sensum habet. Si enim intelligat modum essentialem,
expresse falsum est: puta si diceret, quod melius aut perfectius essentia sit
in uno quam in alio; si autem intelligat modum relativum, secundum quod Hugo
de sancto Victore, in Lib. de Trin., cuilibet personae attribuit quendam
essendi modum, sic verum est quod dicitur: quia licet essentia non referatur
ut sit generans vel genita, sicut obiiciens dicit, est tamen essentia per
generationem accepta vel communicata. Essentia igitur divina est in patre ut non accepta ab
alio; in filio ut accepta per generationem; in spiritu sancto ut accepta per
processionem. |
La 11e
proposition, que bien que dans le Père,
le Fils et le Saint-Esprit, la nature soit la même, celle-ci ne se comporte
pas en eux de la même façon, a un sens douteux. En effet, si on la comprend
sur le plan de l’essence, elle est carrément fausse, par exemple si on disait
que l’essence est meilleure ou plus parfaite dans une personne que dans une
autre. Si par contre on la comprend de façon relative, selon ce que dit
Hugues de Saint-Victor dans son traité De
la Trinité (où il attribue à chaque personne un certain mode d’être),
alors ce qu’il dit est vrai, car, même si l’essence n’est pas dite
génératrice ou engendrée, comme le dit le critique, elle est pourtant reçue
ou communiquée par génération. L’essence divine est donc dans le Père, sans
qu’il l’ait reçue d’un autre ; dans le Fils, qui la reçoit par génération, et
dans le Saint Esprit, qui la reçoit par procession. |
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Quaestio 12 |
Question 12 |
[70696] De 108 articulis, q. 12 Quod vero duodecimo ponitur, productio
a natura et a voluntate potest intelligi tripliciter: a natura solum, aut a
voluntate solum, aut a natura et voluntate simul: primo modo procedit filius,
secundo modo creatura, tertio modo procedit spiritus sanctus, quantum ad
id quod obiiciens contra opponit, non magnam difficultatem habet. Sic enim
potest dici filius a natura et spiritus sanctus a natura et voluntate
procedere, sicut dicitur filius esse natura de natura, sapientia de
sapientia, licet pater et filius sint una natura et una sapientia. Sed magis
videtur esse calumniosa ista distinctio, ex qua videtur relinqui spiritus
sanctus quasi medio modo se habens inter filium et creaturam. Sicut igitur
Deus pater filium non voluntate, sed natura produxit, ita de spiritu sancto
sentiendum est: quod enim Deus producit voluntate, creatura est, ut Hilarius
probat in Lib. de synodis. Dicitur tamen quod spiritus sanctus procedit per
modum voluntatis, quia procedit ut amor, sicut et filius procedit per modum
intellectus, inquantum procedit ut verbum: sicut tamen verbum procedit
naturaliter a Deo dicente, ita et amor similiter a Deo amante. |
La 12e
proposition est ainsi conçue : Les
effets de la nature et de la volonté peuvent se prendre en trois sens : de la
nature seulement, de la volonté seulement, ou à la fois de la nature et de la
volonté. Le Fils est un effet de la première manière, les créatures de la
deuxième manière, et le Saint-Esprit procède de la troisième manière.
L’objection du critique à ce sujet n’est pas très difficile à résoudre. En
effet, on peut dire que le Fils procède de la nature et le Saint-Esprit de la
nature et de la volonté, de la même façon qu’on dit que le Fils est nature de
nature et sagesse de sagesse, même si le Père et le Fils sont une seule
nature et une seule sagesse. Mais cette distinction semble plus blâmable du
fait qu’elle semble faire du Saint-Esprit une sorte de moyen terme entre le
Fils et les créatures. Alors, de même que le Père n’a pas produit le Fils par
un acte de volonté, mais par nature, il faut penser de même pour le
Saint-Esprit :
ce que Dieu a produit par sa volonté, c’est la créature, comme saint Hilaire
l’a prouvé dans le Livre des synodes. On
dit pourtant que le Saint-Esprit procède par mode de volonté, car il procède
en tant qu’amour, de même que le Fils procède par mode d’intelligence, du
fait qu’il procède comme Verbe, de sorte cependant qu’il procède
naturellement de Dieu qui parle, comme le fait l’amour procédant de Dieu qui
aime. |
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Quaestio 13 |
Question 13 |
[70697] De 108 articulis, q. 13 Quod autem tertio decimo ponitur, generare
non est actus naturae ut communis est, sed ut coniuncta cum proprietate
suppositi generantis, quantum ad id quod obiiciens tangit, non multum
videtur calumniabile, quia coniunctio potest referri ad intellectum vel
locutionem nostram, ut puta cum dicimus, essentia et paternitas sunt in
patre; non autem ad compositionem rei. Sed magis posset calumniari ex hoc
quod dicitur, generatio est actus naturae in patre, si intelligeretur esse
actus naturae, ut generantis; debet enim intelligi esse actus naturae ut quo
generans generat: natura enim non generat, sed pater naturaliter generat
filium. |
La 13e
proposition, que l’acte d’engendrer
n’est pas un acte de la nature en général, mais un acte de celle-ci en tant
qu’elle est alliée à une propriété du sujet qui engendre, quant au point
soulevé par le critique, ne semble pas très contestable, car leur union peut
être celle que fait notre intelligence ou notre discours, par exemple quand
nous disons que l’essence et la paternité sont dans le Père, et non l’union
de composition d’une chose. Mais la proposition est plus critiquable du fait
qu’elle dit que l’acte d’engendrer est un acte de la nature du Père, si on
comprend que c’est un acte de la nature en tant qu’elle engendre ; en
effet, il faut plutôt penser que c’est l’acte de la nature en tant que celui
qui engendre agit par elle, car ce n’est pas la nature qui engendre, mais le
Père qui engendre le Fils par nature. |
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Quaestio 14 |
Question 14 |
[70698] De 108 articulis, q. 14 Quod vero quarto decimo ponitur, potentiae
enim ex parte operationum, scilicet creationis et generationis quae diversa
sunt, et secundum quod prius et posterius se habent, habent distinctionem,
sanum habet intellectum. Quamvis enim potentia creandi et generandi sit
divina essentia, ut obiiciens tangit: tamen importat respectum quem non
importat essentia; et quantum ad hunc respectum distinguitur potentia, licet
non distinguatur essentia. Similiter etiam licet creationis actio sit Deus et
divina essentia, tamen connotat effectum secundum quem distinguitur creatio a
generatione, non autem secundum ipsam essentiam actionis, prout est ipsa
essentia divina. |
La 14e
proposition, que les puissances se
distinguent en effet du côté des opérations, c’est-à-dire de la création et
de la génération, qui sont des choses différentes, et en tant qu’elles
s’exercent avant et après, est correcte. En effet, même si la puissance
créatrice et génératrice soit l’essence divine, comme le dit le critique,
elle comporte un aspect que l’essence divine ne comporte pas ; et la
puissance se distingue sous cet aspect, même si l’essence ne se distingue pas
ainsi. De même, quoique l’acte de création soit Dieu et l’essence divine, il
comporte pourtant un effet par lequel la création se distingue de la
génération, mais non selon l’essence de l’action en tant qu’elle est
l’essence divine elle-même. |
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Quaestio 15 |
Question 15 |
[70699] De 108 articulis, q. 15 Quod autem quinto decimo ponitur, sicut
aeternum prius est temporali, ita aliquid aeternum prius est secundum ordinem
ad temporale; unde potentiae ordinatio ad actum aeternum generandi prior est
ordine eius ad actum temporalem creandi, non habet calumniam: quia actus
creandi dicitur temporalis quantum ad effectum connotatum, ratione cuius non
conceditur quod Deus ab aeterno creet, licet actio eius sit aeterna, quae est
divina essentia. Aeternum etiam licet non habeat ordinem ad aliquid temporale
ut ad finem, habet tamen ordinem ad aliquid temporale, ut principium ad
effectum: Deus enim qui est aeternus, est principium et finis omnis
creaturae. |
La 15e
proposition que voici n’est pas critiquable : Comme l’éternité est antérieure au temps, de même quelque
chose d’éternel précède en ordre le temporel ; il s’ensuit que la
disposition de la puissance vers l’acte éternel d’engendrer précède en ordre
la disposition à l’acte temporel de créer.
En effet, l’acte de créer est appelé temporel en raison de l’effet qu’il
comporte, mais on n’admet pas pour autant que Dieu a créé de toute éternité,
bien que son action, qui est l’essence divine, soit éternelle. Et bien que ce
qui est éternel ne soit pas ordonné au temporel comme à une fin, il est
cependant ordonné à quelque chose de temporel comme le principe l’est à son
effet : car Dieu, qui est éternel, est le principe et la fin de toute
créature. |
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Quaestio 16 |
Question 16 |
[70700] De 108 articulis, q. 16 Quod vero sexto decimo ponitur, esse
potest dupliciter accipi, simpliciter et absolute, et sic non est Deo
proprium: vel cum praecisione, idest nullo addito, et sic est Deo proprium,
calumniatur obiiciens non intelligens quod dicitur. Non enim hic accipitur
absolute, secundum quod absolutum dicitur quod non dependet ab alio; sed
absolute, idest universaliter. Similiter, quod dicitur cum praecisione, idest nullo addito, non bene intellexit.
Intellexit enim scribens, quod esse cui nihil additur, sed est esse purum
subsistens, est proprium Deo; non autem intellexit quod esse prout sine
additione proponitur, sit proprium Deo. |
Le
critique rejette sans la comprendre la 16e proposition : L’être peut se comprendre de deux
façons : au sens simple et absolu, et alors il n’est pas le propre de
Dieu, ou de manière précise, c’est-à-dire sans aucun ajout, et alors il est
le propre de Dieu. En effet, « absolu » ne veut pas dire ici ce
qui ne dépend pas d’un autre, mais est pris au sens
d’« universel ». Le critique n’a pas bien compris non plus les mots
de manière précise, c'est-à-dire sans
aucun ajout. En effet, l’auteur a voulu dire que l’être auquel rien ne s’ajoute
mais qui est être pur subsistant est le propre de Dieu ; mais il n’a pas
voulu dire que l’être en tant qu’on le considère sans ajout est le propre de
Dieu. |
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Quaestio 17 |
Question 17 |
[70701] De 108 articulis, q. 17 Quod vero septimo decimo ponitur, veritates
rerum comparatae ad subiectum diversae sunt, sed secundum quod comparantur ad
intellectum divinum, una est omnium veritas, verissimum est; tamen illa
una veritas non est veritas creata, ut obiiciens intellexit, sed veritas
increata. |
La 17e
proposition, que les vérités des
choses, comparées au sujet, sont diverses, mais en tant qu’elles sont
comparées à l’intelligence divine, leur vérité à toutes est unique, est
absolument vraie ; pourtant, cette vérité unique n’est pas une vérité
créée, comme l’a compris le critique, mais une vérité incréée. |
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Quaestio 18 |
Question 18 |
[70702] De 108 articulis, q. 18 Quod vero decimo octavo ponitur, ratio
creandi, ut est in creaturis, est invariabilis, et dicitur aeterna a carentia
variationis, non recte impugnat obiiciens. Licet enim omnis creatura de
non esse in esse producta sit, et pro tanto sit aliquo modo variabilis, tamen
et definitiones et propositiones aliquae dicuntur invariabiles propter
necessarium ordinem unius termini ad alium; sicut Socrates variabilis est, et
similiter cursus eius et motus, et tamen hoc est invariabile: si currit
movetur. Haec tamen invariabilitas non facit propositionem aeternam nisi
secundum quod est in intellectu aeterno, scilicet divino. |
La 18e
proposition, que la notion de création,
considérée dans les créatures, est invariable, et on la dit éternelle parce
qu’elle ne varie pas, est contestée à tort par le critique. En effet,
bien que toute créature ait été amenée du non-être à l’être et que, de ce
fait, elle soit variable, certaines définitions et certaines propositions
sont pourtant appelées invariables à cause de l’ordre nécessaire d’un terme à
l’autre ; ainsi, Socrate est variable, de même que sa course et son
mouvement ; mais une chose est invariable : s’il court, il est en
mouvement. Pourtant, cette invariabilité ne rend pas la proposition
éternelle, sauf en tant qu’elle est dans l’intelligence éternelle,
c'est-à-dire divine. |
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Quaestio 19 |
Question 19 |
[70703] De 108 articulis, q. 19 Quod autem decimo nono ponitur, decima
compositio est ex corpore heterogeneo et anima vegetabili; undecima ex
corpore huiusmodi et anima vegetabili et sensibili, ut animal; duodecima ex
his et anima rationali, improprie dictum est, ut obiiciens tangit, quia
dat intelligere per copulam, quod anima rationalis sit aliud a vegetabili et
sensibili; sed credo quod retulit copulam ad rationale tantum, non ad
substantiam animae. Unde melius staret, si diceret, ex his et rationali,
sicut dixit supra, ex anima vegetabili et sensibili. |
La 19e
proposition est la suivante : la
dixième composition est celle d’un corps hétérogène avec une âme
végétative ; la onzième, celle d’un tel corps avec une âme végétative et
sensible, comme l’animal ; la douzième, celle des précédents avec une
âme raisonnable. Elle est formulée improprement, comme le mentionne le
critique, parce que la particule « avec » donne à entendre que
l’âme raisonnable est autre que l’âme végétative et sensible; mais je crois
que l’auteur veut désigner par « avec » l’ajout du caractère
raisonnable et non l’union avec la substance de l’âme. Il aurait donc été
mieux de dire « d’un tel corps avec une âme également douée de
raison », comme il a dit plus haut avec
une âme végétative et sensible. |
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Quaestio 20 |
Question 20 |
[70704] De 108 articulis, q. 20 Quod vero vigesimo ponitur, essentia
divina non est ab alio in se, sed in persona filii, duplicem habet
intellectum. Si enim intelligatur quod essentia divina in filio existens, sit
ab alio, falsum est sicut obiiciens impugnat; si vero intelligatur quod
essentia divina est in filio ab alio, idest a patre, verum est: a patre enim
est, quod essentia divina sit in filio. |
La 20e
proposition, que l’essence divine en
soi ne vient pas d’un autre, mais elle vient d’un autre dans la personne du
Fils, peut se comprendre de deux façons. En effet, si on comprend que
l’essence divine, existant dans le Fils, vient d’un autre, cela est faux,
comme le soutient le critique ; mais si on comprend que l’essence divine
est dans le Fils en provenance d’un autre, c'est-à-dire du Père, cela est
vrai, car le fait que l’essence divine est dans le Fils vient du Père. |
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Quaestio 21 |
Question 21 |
[70705] De 108 articulis, q. 21 Quod autem vigesimo primo ponitur, essentia
est principium actuum notionalium prout est coniuncta cum proprietatibus
personalibus, non habet calumniam ex hoc quod dicit essentiam esse
coniunctam proprietatibus eo modo quo supra expositum est. Habere autem
calumniam magis videtur ex hoc quod dicitur, essentia est principium actuum notionalium: est enim falsum, si
intelligatur essentia esse principium huiusmodi actuum ut generans vel
spirans; sed si intelligatur esse principium actuum notionalium ut quo,
consonat dictis Magistri, in 7 dist. primi Lib., ubi dicit, quod potentia
generandi est divina essentia; potentia autem generandi est principium
generationis ut quo generans generat. |
La 21e
proposition, que l’essence est le
principe des actes conceptuels selon qu’elle est jointe aux propriétés des
personnes, n’est pas critiquable en ce qu’elle dit que l’essence est
jointe aux propriétés de la manière expliquée plus haut. Mais elle semble
davantage critiquable du fait qu’elle dit que l’essence est le principe des actes conceptuels : en effet,
cela est faux si on veut dire que l’essence est le principe de tels actes en
tant qu’elle est génératrice ou « spiratrice* » ; mais si on
veut dire qu’elle est le principe des actes conceptuels comme ce par quoi ils
sont*, cela concorde avec les propos du Maître des Sentences, qui dit, dans
la distinction 7 du livre I, que la puissance d’engendrer est l’essence
divine ; or, la puissance d’engendrer est principe de génération comme
source de laquelle le générateur produit son acte. |
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Quaestio 22 |
Question 22 |
[70706] De 108 articulis, q. 22 Quod autem vigesimo secundo ponitur, aliorum attributorum a natura et voluntate, principalitas non est
ratione agentis, sed exemplaris tantum; unde respectu rei alterius essentia
est, non respectu rei substantialis, hoc accipere voluit scribens, ex hoc
quod philosophus distinguit in II Physic. duo principia agentia; dicens,
eorum quae fiunt, alia fiunt a natura, alia a proposito vel voluntate.
Potentia autem et virtus non distinguuntur ab his duobus, eo quod communiter
se habent ad utrumque: est enim potentia et virtus et naturalis, et
rationalis, sive voluntaria; similiter etiam intellectus in agendo non
distinguitur a voluntate, quia intellectus non movet nisi mediante voluntate;
procedit tamen in divinis aliquid per modum intellectus, scilicet verbum,
sicut et spiritus sanctus per modum voluntatis, ut amor. |
Quant à la 22e
proposition, que la prééminence des
autres attributs de la nature et de la volonté n’est pas celle d’un agent,
mais celle d’une cause exemplaire ; c’est pourquoi leur essence se
rapporte à une chose différente et non à la chose substantielle, l’auteur
a voulu la prendre selon la distinction entre les deux principes d’action,
que fait le Philosophe au livre II des Physiques quand
il dit : « Parmi les choses qui sont faites, certaines le sont par
nature, et les autres par une intention ou par la volonté. » Or, la puissance
et la vertu ne se distinguent pas de ces deux principes, car elles se
rapportent de façon générale aux deux : il existe en effet une puissance
et une vertu naturelles, ainsi qu’une puissance et une vertu raisonnables ou
volontaires. Pareillement, l’intelligence, dans son action, ne se distingue pas
de la volonté, car elle n’agit que par son intermédiaire, et cependant, en
Dieu, quelque chose procède par mode d’intelligence, à savoir le Verbe, de
même que le Saint-Esprit procède par mode de volonté, en tant qu’amour. |
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Quaestio 23 |
Question 23 |
[70707] De 108 articulis, q. 23 Quod vero vigesimo tertio ponitur, filius
procedit ut verbum, et ars qua potest pater omnia producere; spiritus sanctus
ut amor, quo amor vult ea producere, multiplicem habet intellectum.
Potest enim intelligi, quod pater filio potest, et spiritu sancto velit; et
sic falsum est, ut obiiciens impugnat. Potest etiam intelligi, quod pater
possit producere filio et velit producere spiritu sancto; et sic verum est:
nam pater omnia producit per filium et spiritum sanctum; et quod facit,
manifestum est quod potest et vult. Potest ergo et vult omnia producere per
filium. |
La 23e
proposition, que le Fils procède comme
Verbe et comme l’art par lequel le Père peut produire toutes choses ; le
Saint-Esprit procède comme amour, par lequel l’Amour veut produire ces mêmes
choses, se comprend de plusieurs façons. En effet, on peut comprendre que
le Père peut par le Fils et veut par le Saint Esprit, ce qui est faux, comme le
soutient le critique. On peut également comprendre que le Père peut produire
par le Fils et veut produire par le Saint-Esprit, et ainsi cette proposition
est vraie. Car le Père produit tout par le Fils et le Saint-Esprit, et ce
qu’il produit, il est évident qu’il peut et veut le produire ; donc, il
peut et veut tout produire par le Fils. |
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Quaestio 24 |
Question 24 |
[70708] De 108 articulis, q. 24 Quod autem vigesimo quarto ponitur, spiritus sanctus procedit ut ratio volendi, creatura ut volitum,
si intelligatur, spiritus sanctus esse ratio volendi ex parte volentis,
falsum est, ut obiiciens tangit; quia non est patri ratio volendi quod non
est ei ratio essendi. Si autem intelligatur ex parte voliti, verum est quod
scribitur: finis enim est ratio volendi ea quae sunt ad finem. Nullus autem
dubitat, spiritum sanctum esse causam productionis creaturarum, sicut patrem
et filium. |
La 24e
proposition, que le Saint-Esprit
procède comme raison de vouloir et la créature comme voulu, est fausse si
on comprend que le Saint-Esprit est la raison de vouloir du côté de celui qui
veut, comme l’affirme le critique, car ce qui n’est pas une raison
d’existence pour le Père n’est pas pour lui une raison de vouloir. Mais si on
le prend du côté de l’objet voulu, cet énoncé est vrai, car la fin est la
raison de vouloir tout ce qui est en vue de la fin. Or, personne ne doute que
le Saint-Esprit, aussi bien que le Père et le Fils, est cause de la
production des créatures. |
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Quaestio 25 |
Question 25 |
[70709] De 108 articulis, q. 25 Quod vero vigesimo quinto ponitur, spiritus
sanctus procedit a patre et filio ut sunt plures agentes, sed tamen ut unum
in principio quo agunt, recte potest intelligi. Nec est simile de
processu creaturae, et spiritus sancti: quia spiritus sanctus requirit
secundum rationem suae processionis in his a quibus procedit, distinctionem;
procedit etiam ut nexus duorum: quod de creatura dici non potest. Nec oportet
quod effectus sit simplicior causa, si spiritus sanctus procedit a pluribus
secundum quod sunt plures aliquo modo: quia similitudo effectus ad causam
agentem vel dissimilitudo attenditur secundum formam qua agens agit; pater
autem et filius spirant potentia spirativa, quae est natura divina, quae est
una in utroque. Non tamen haec dicuntur pro tanto quod in divinis sit causa
et causatum, vel agens et factum; sed hoc modo haec dicuntur secundum quod
loquimur de divinis modo humano. Nec etiam oportet quod si procedit a
pluribus inquantum sunt plures, quod non procedat totaliter ab uno; sed quod
non procedat ab uno sine respectu ad alterum. |
La 25e
proposition, que le Saint-Esprit
procède du Père et du Fils en tant que plusieurs agents, qui sont pourtant
comme un seul dans le principe de leur action, peut être comprise
correctement. La procession de la créature et celle du Saint-Esprit ne sont
pas semblables non plus, car le concept de la procession de l’Esprit
nécessite la distinction de ceux dont il procède ; car il procède comme le
lien entre les deux, ce qu’on ne peut pas dire de la créature. Il ne s’ensuit
pas non plus que l’effet est plus simple que la cause si le Saint-Esprit
procède de plusieurs en tant qu’ils sont plusieurs d’une certaine façon, car
la ressemblance ou la différence doit être considérée selon la forme par
laquelle l’agent agit ; or, le Père et le Fils produisent l’Esprit par
la puissance de spiration, qui est la nature divine, laquelle est la même
dans les deux. Pourtant, tout cela ne veut pas dire que dans les choses
divines il y a cause et effet, ou agent et résultat de l’action, mais ces
propos sont tenus du fait que nous parlons des choses divines en langage
humain. Si le Saint-Esprit procède de plusieurs en tant qu’ils sont
plusieurs, cela n’entraîne pas non plus qu’il ne procède pas totalement d’une
personne, mais plutôt qu’il ne procède pas de l’une sans considération de l’autre. |
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Quaestio 26 |
Question 26 |
[70710] De 108 articulis, q. 26 Quod autem vigesimo sexto ponitur, quamvis
spiritus procedat ab eis ut sunt plures secundum numerum agentium, non tamen
secundum formam eos plurificantem, eandem habet rationem sicut
praecedens. |
La 26e
proposition, que bien que le
Saint-Esprit procède des autres Personnes en tant qu’elles sont plusieurs par
le nombre d’agents, mais non par la forme qui fait qu’elles sont plusieurs, s’explique
de la même manière que la précédente. |
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Quaestio 27 |
Question 27 |
[70711] De 108 articulis, q. 27 Quod vero vigesimo septimo ponitur, non sequitur quod sit magis auctor, quia et mediate et immediate,
si absolutum modum intelligit, falsum est. Si autem intelligat modum
relativum, quantum ad aliquid verum est, et quantum ad aliquid falsum: quia
relatio qua filius est principium spiritus sancti, est communis patri et
filio. Unde quantum ad hanc, idem est modus relativus, sed relatio qua filius
est a patre propria est ei. Secundum hunc igitur modum potest dici, quod
filius alio modo est auctor spiritus sancti quam pater; inquantum filius haec
habet ab alio, non autem pater. Et similiter potest dici de omnibus quae
conveniunt patri et filio, quia omnia filius habet a patre, et pater a nullo. |
La 27e proposition,
qu’il ne s’ensuit pas que le Fils est
davantage agissant parce qu’il agit à la fois de façon médiate et immédiate,
est fausse si on l’entend de façon absolue. Mais si on l’entend de façon
relative, elle est vraie sous un aspect et fausse sous un autre aspect, car
la relation par laquelle le Fils est le principe du Saint-Esprit est commune
au Père et au Fils. Il s’ensuit que le mode de relation est le même dans les
deux, mais la relation par laquelle le Fils vient du Père lui est propre. En
ce sens, on peut donc dire que le Fils est l’auteur du Saint-Esprit d’une
autre façon que le Père, parce que le Fils tire cette relation d’une autre
personne, et non le Père. On peut dire quelque chose de semblable de tout ce
qui est commun au Père et au Fils, car le Fils tient tout du Père, et
celui-ci ne tient rien de personne. |
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Quaestio 28 |
Question 28 |
[70712] De 108 articulis, q. 28 Quod vero vigesimo octavo ponitur, Deus
generans est nomen essentiale tractum ad personale, sicut potentia coniuncta
actui notionali est notionalis, sanum intellectum habet. Nec est simile
de essentia et potentia, ut obiicitur, quia essentia non importat aliquam
habitudinem principii, sicut potentia: secundum rationem cuius habitudinis
dicitur potentia generandi, idest quae est generationis principium. |
La 28e
proposition, que le Dieu qui engendre
est un nom essentiel pris dans un sens personnel, comme la puissance jointe à
l’acte notionnel est notionnelle, peut se prendre dans le bon sens. Mais
il n’en va pas de même pour l’essence et la puissance, comme le veut
l’objection, car l’essence n’implique aucun rapport avec le principe, comme
c’est le cas de la puissance : en raison d’un tel rapport, on parle de
puissance d’engendrer pour désigner une puissance qui est principe de
génération. |
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Quaestio 29 |
Question 29 |
[70713] De 108 articulis, q. 29 Quod vigesimo nono ponitur, spiritus
sanctus procedit a duobus, filius ab uno, unde videtur magis procedere,
omnino falsum est; nisi faciat vim in hoc quod dicitur, videtur: ut intelligatur, videtur sophisticum, quod non est. |
La 29e
proposition, que le Saint-Esprit
procède de deux personnes et le Fils d’une seule ; il apparaît donc
qu’il procède davantage, est absolument fausse, à moins qu’on ne torde le
sens du mot apparaît de sorte qu’il
veuille dire « en apparence », ce qui n’est pas le cas. |
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Quaestio 30 |
Question 30 |
[70714] De 108 articulis, q. 30 Quod vero trigesimo ponitur, alia
ratio est, quia procedit spiritus sanctus ab uno in alterum, ideo videtur
magis habere de ratione processionis, simpliciter male dicitur, nisi
etiam fiat vis in hoc quod dicitur: videtur. |
La 30e
proposition, qu’une autre raison est
que le Saint-Esprit procède d’une personne par l’entremise d’une autre ;
il apparaît donc que le concept de procession se réalise davantage en lui, est
tout à fait mauvaise, à moins, ici encore, qu’on ne torde le sens du mot apparaît. |
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Quaestio 31 |
Question 31 |
[70715] De 108 articulis, q. 31 Quod autem trigesimo primo dicitur, uno modo dicitur temporale quod subiacet variationi temporali, et hoc
modo illud per quod elevamur supra tempus, non est temporale, sive in
tempore: sic vero est gratia, hoc videtur accipi ex eo quod Augustinus
dicit, quod inquantum aliquid aeternum mente sapimus, non in hoc mundo sumus:
quod quidem verum est ex parte obiecti in quod elevamur, quod est supra
mundum et supra tempus; sed ex parte nostri qui elevamur, cum simus
temporales, et in mundo, gratia temporalis est. |
La 31e
proposition, que d’une façon, on appelle
temporel ce qui est assujetti aux variations temporelles, et de cette façon,
ce qui nous élève au-dessus du temps n’est pas temporel ni inscrit dans le
temps ; tel est le cas de la grâce, semble être inspiré de ce que
dit saint Augustin : « en autant que nous goûtons quelque chose
d’éternel dans notre esprit, nous ne sommes pas dans ce monde » ;
donc, cela est vrai en effet du côté de l’objet en lequel nous sommes
élevés ; mais de notre côté, à nous qui sommes élevés, puisque nous sommes
temporels et vivons dans le monde, la grâce est temporelle. |
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Quaestio 32 |
Question 32 |
[70716] De 108 articulis, q. 32 Quod vero trigesimo secundo ponitur, datio aliquando importat communicationem solam, aliquando etiam
emanationem, aliquando translationem; primo modo potest dici quaelibet
persona dare seipsam, secundo modo una persona aliam, tertio modo quaelibet
persona donum creatum, sane dicitur; non sane autem diceretur, si
diceret, quod secundo modo quaelibet persona dat quamcumque aliam, ut
obiiciens intellexit. |
La 32e
proposition, que le don ne comporte
dans certains cas que la communication, dans d’autres cas l’émanation en
plus, et dans d’autres cas le transfert ; on peut dire que chaque
personne se donne elle-même de la première façon, qu’une seule personne en
donne une autre de la deuxième façon, et que chaque personne donne les choses
créées de la troisième façon, est correcte ; mais elle serait fausse
si on disait que chaque personne donne chacune des autres de la deuxième
manière, comme l’a compris le critique. |
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Quaestio 33 |
Question 33 |
[70717] De 108 articulis, q. 33 Quod autem trigesimo tertio ponitur, sancti novi testamenti magis sunt dispositi ad recipiendam gratiam
quam sancti veteris testamenti, propter impedimentum peccati Adae remotum,
sane dicitur: quia etsi circumcisio a peccato originali purgaret in veteri
lege, ut obiiciens dicit, non tamen tanta copia gratiae conferebatur sicut in
Baptismo, nec erat solutum pretium pro redemptione totius humani generis. |
La 33e
proposition, que les saints du Nouveau
Testament sont mieux disposés à recevoir la grâce que les saints de l’Ancien
Testament, parce que l’entrave causée par le péché d’Adam est enlevée, est
correcte, car, même s’il est vrai que la circoncision effaçait le péché
originel dans l’Ancienne Loi, comme l’affirme le critique, elle ne conférait
pas une aussi grande abondance de grâce que le baptême, et le prix de la
rédemption de tout le genre humain n’avait pas encore été payé. |
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Quaestio 34 |
Question 34 |
[70718] De 108 articulis, q. 34 Quod vero trigesimo quarto ponitur, non aliud est esse animae quam quod dat corpori, oportet verum
esse. Si anima enim est forma corporis, forma autem et materia sunt unum
secundum esse, quod non esset verum, si aliud esset esse formae, et aliud
esset esse quod dat materiae. Nec propter hoc sequitur quod anima habeat esse
corruptibile sicut corpus, quia illud esse corpus potest amittere, non autem
anima: et propter hoc remanet anima habens esse a corpore separata. |
La 34e
proposition, que l’être de l’âme n’est
rien d’autre que celui qu’elle donne au corps, est nécessairement vraie.
En effet, si l’âme est la forme du corps, la forme et la matière ne font
qu’un seul être, ce qui serait faux si l’être de la forme différait de celui
qu’elle donne à la matière. Il ne s’ensuit pas pour autant que l’âme ait un
être corruptible comme celui du corps, car le corps peut perdre cet être, et
l’âme ne le peut pas; c’est pour celaque l’âme séparée du corps conserve son
être. |
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Quaestio 35 |
Question 35 |
[70719] De 108 articulis, q. 35 Quod vero trigesimo quinto ponitur, non fiebat missio visibilis in veteri testamento, quod verum est,
sed decipitur obiiciens, quod non distinguit inter apparitiones et missiones:
non enim omnis apparitio est missio visibilis, sed solum illa quae fit ad
declarandum processum copiosum gratiae in aliquo. |
La 35e
proposition, qu’il n’y avait pas de
mission visible dans l’Ancien Testament, est vraie, mais le critique se
trompe parce qu’il ne distingue pas entre les apparitions et les missions.
Car une apparition n’est pas une mission visible dans tous les cas, mais
seulement si elle est donnée pour annoncer une abondante effusion de grâce en
quelqu'un. |
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Quaestio 36 |
Question 36 |
[70720] De 108 articulis, q. 36 Quod vero trigesimo sexto dicitur, in
fine Ecclesiae non erit tempus propagationis spiritualis ad multiplicationem
fidelium, hoc potest verum esse, si intelligatur quantum ad tempus
Antichristi: non quin illo tempore aliqui ad Ecclesiam convertantur, ut
Augustinus dicit XX de Civ. Dei, sed quia propter tribulationes non multi
convertentur. |
La 36e
proposition, que vers la fin ce ne sera
pas le temps pour l’Église de se propager spirituellement pour multiplier le
nombre de ses fidèles, peut être vraie si on l’applique au temps de
l’Antéchrist ; cela n’empêche pourtant pas que durant ce temps certains
se convertiront à l’Église, comme le dit saint Augustin au livre XX de la Cité de Dieu, mais les conversions
seront peu nombreuses, à cause des tribulations. |
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Quaestio 37 |
Question 37 |
[70721] De 108 articulis, q. 37 Quod vero trigesimo septimo ponitur, omne agere est a forma inhaerente agenti, si intelligatur
inhaerente accidentaliter, ut obiiciens intellexit, falsum est; si
intelligatur inhaerente, idest existente in agente quocumque modo, verum est:
dicimus enim formam substantialem esse in igne, et deitatem in Deo. |
La 37e
proposition, que tout agir provient de
la forme inhérente de l’agent, est fausse si « inhérente » veut
dire par accident, comme l’a compris le critique ; si on prend
« inhérente » au sens d’existante dans l’agent de n’importe quelle
façon, elle est vraie ; nous disons en effet que la forme substantielle
est dans le feu et la divinité en Dieu. |
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Quaestio 38 |
Question 38 |
[70722] De 108 articulis, q. 38 Quod vero trigesimo octavo dicitur, hoc falsum est, scilicet quod Deus non agit in anima nisi per novum
influxum: nam novus influxus potest provenire in anima sed nova dispositione
recipientis, sicut nova illuminatio in aere ex nova dispositione aeris. Manifestum est enim, quod Deus in anima agit
non solum causando in ea aliquem habitum, puta gratiae vel virtutis, sed
etiam inclinando liberum arbitrium ad hoc vel ad illud; quod non proprie
dicitur influere, sed magis movere ad actum. |
La 38e
proposition, que Dieu n’agit en l’âme
que par nouvel influx : en effet, un nouvel influx ne peut se produire
dans l’âme que par une nouvelle disposition du récepteur, comme une nouvelle
illumination de l’air se fait par une nouvelle disposition de l’air, est
fausse*. Il est manifeste en effet que Dieu agit dans l’âme non seulement en
causant en elle un habitus, de grâce ou de vertu par exemple, mais aussi en
inclinant son libre arbitre vers telle ou telle chose, ce qu’on ne peut pas
appeler proprement un influx, mais plutôt un mouvement vers l’action. |
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Quaestio 39 |
Question 39 |
[70723] De 108 articulis, q. 39 Quod vero trigesimo nono ponitur, in
spiritualibus additio non recedit a simplicitate, verum est, si
intelligatur de additione quae est per modum intentionis, sicut illud quod
est melius, dicitur addere in bonitate supra illud quod est minus bonum; non
est autem verum, si intelligatur de additione rei ad rem, vel speciei ad
speciem: nam intellectus minus est simplex, qui habet plures species
intelligibiles. |
La 39e
proposition, que dans les choses spirituelles
l’addition ne détruit pas la simplicité, est vraie, si on l’entend de
l’addition qui se fait par mode d’intensité, comme on dit que ce qui est
meilleur ajoute à la bonté de ce qui est moins bon, mais elle n’est pas vraie
si on l’entend de l’addition d’une chose à une autre ou d’une espèce à une
autre. En effet, l’intelligence est moins simple quand elle a plusieurs
espèces intelligibles. |
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Quaestio 40 |
Question 40 |
[70724] De 108 articulis, q. 40 Quod vero quadragesimo ponitur, filio
convenit dari actu non aptitudine, credo inconvenienter dici. |
Je crois que la 40e
proposition, qu’il convient au Fils
d’être donné en acte et non en capacité, est mal formulée. |
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Quaestio 41 |
Question 41 |
[70725] De 108 articulis, q. 41 Quod vero quadragesimo primo ponitur, verbum increatum non est ratio proferendi alia verba, simpliciter
falsum est. |
La 41e proposition,
que le Verbe incréé n’est pas la raison
de la production d’autres paroles, est absolument fausse. |
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Quaestio 42 |
Question 42 |
[70726] De 108 articulis, q. 42 Quod vero quadragesimo secundo ponitur, quamvis idem sit finis utriusque, tamen alter est ordo utriusque ad
illum finem, quia spiritus sanctus ordinat ad illum per modum efficientis,
inconvenienter dicitur, si per finem intelligatur illud propter quod est
aliud: nam spiritus sanctus non est propter aliquem effectum creatum; si vero
finis accipiatur pro termino, sicut punctum dicitur finis lineae, sic potest
dici aliquis effectus creatus finis ad quem terminatur operatio personae
increatae. |
La 42e proposition,
que les deux [Fils et Saint-Esprit]
ont la même fin ; pourtant, les
deux agissent différemment vers cette fin, car le Saint-Esprit y ordonne les
choses comme une cause efficiente, est mal dite si on en tend par fin ce
en vue de quoi quelque chose d’autre existe, car le Saint-Esprit n’existe pas
en vue de quelque effet créé. Mais si par fin on entend le terme, comme on
dit que le point est la fin de la ligne, on peut alors dire qu’un effet créé
est la fin où se termine l’opération de la personne incréée. |
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Quaestio 43 |
Question 43 |
[70727] De 108 articulis, q. 43 Quod vero quadragesimo tertio ponitur, quod procedit ab aliquo in aliud sicut in obiectum, non dicitur
respectu eius procedere ut donum, non habet aliquam necessariam rationem. |
La 43e proposition,
que ce qui procède d’un être vers un
autre comme vers un objet n’est pas dit procéder vers ce dernier en tant que
don, n’a pas de raison d’être nécessairement vraie. |
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Quaestio 44 |
Question 44 |
[70728] De 108 articulis, q. 44 Quod vero quadragesimo quarto ponitur, aequale potest accipi dupliciter: ut dicat solam relationem, aut ut
cum relatione, importat actum seu motum ad illam; primo modo dicitur pater
aequalis filio, secundo filius aequalis patri, non est calumniabile
quantum ad id quod obiiciens tangit. Aequalitas enim solam relationem
significat, praesupponit tamen unitatem. Quantum ad hoc tamen non videtur
bene dictum, quod aequale quandoque importat motum ad aequalitatem: huiusmodi
enim motum non significat aequale sive aequalitas, sed adaequatio. Dato tamen quod huiusmodi motum significaret,
non sequitur inconveniens, ex eo quod dicit filium hoc modo esse aequalem
patri: nam licet in filio non sit motus ad aequalitatem, accipit tamen a
patre unde est ei aequalis: et ipsa acceptio quantum ad hoc idem facit in
filio quod motus ad aequalitatem in creatura. |
La 44r proposition,
que le mot « égal » peut
s’entendre de deux façons : il peut désigner uniquement la relation, ou
il peut comporter, avec la relation, un acte ou un mouvement vers celle-ci.
On dit de la première façon que le Père est égal au Fils, et de la deuxième
façon que le Fils est égal au Père, n’est pas contestable sous l’aspect
soulevé par le critique. En effet, l’égalité signifie uniquement la relation,
mais elle présuppose l’unité. Cependant, il ne semble pas juste de dire que
ce qui est égal comporte parfois un mouvement vers l’égalité : un tel
mouvement en effet n’implique pas l’égalité, mais l’égalisation. Mais si on
admet qu’un tel mouvement signifie l’égalité, aucune absurdité ne s’ensuit du
fait qu’il dit que le Fils est égal au Père de cette façon, car, bien que
dans le Fils il n’y ait pas mouvement vers l’égalité, le Fils reçoit pourtant
du Père ce qui le rend égal à lui, et cet acte de recevoirfait la même chose
dans le Fils que le mouvement vers l’égalité dans la créature. |
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Quaestio 45 |
Question 45 |
[70729] De 108 articulis, q. 45 Quod vero quadragesimo quinto dicitur, filius dicitur aequari patri secundum quod aequari quasi motum dicit
ad quantitatem eandem quam consequitur relatio, sanum habet intellectum:
nam licet in filio non sit motus, tamen generatio habet aliquid simile motui
quantum ad hoc quod accipere, sicut dicit Basilius, est commune filio et
creaturae. |
La 45e
proposition, qu’on dit que le Fils
devient égal au Père en tant que « devenir égal » désigne une sorte
de mouvement vers la quantité pareille qui fait suite à la relation, peut
se prendre dans le bon sens. En effet, même s’il n’y a pas de mouvement dans
le Fils, la génération présente une ressemblance au mouvement en ce que le
fait de recevoir, comme le dit saint Basile, est commun au Fils et à la
créature. |
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Quaestio 46 |
Question 46 |
[70730] De 108 articulis, q. 46 Quod vero quadragesimo sexto dicitur, una persona non habet esse in seipsa, falsum est secundum quod
dicitur Deus esse in seipso: quod exponitur magis negative quam affirmative,
quia scilicet non indiget alio in quo sit, eo modo loquendi quo dicitur pater
esse a seipso, quia non ab alio. |
La 46e proposition,
qu’une personne n’a pas l’être en elle-même,
est fausse en tant qu’on dit que Dieu existe en lui-même, énoncé qui
s’explique de façon plus négative qu’affirmative, au sens où il n’a pas
besoin d’un autre dans lequel il existe, de la même manière dont on dit que
le Père vient de lui-même parce qu’il ne vient pas d’un autre. |
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Quaestio 47 |
Question 47 |
[70731] De 108 articulis, q. 47 Quod vero quadragesimo septimo dicitur, actus existendi triplex est: quidam omnino potentiae impermixtus, ut
esse divinum; alius semper potentiae permixtus, tale est rerum generabilium;
tertius modo medio se habens: est enim potentiae permixtus inquantum est ab
alio; partim vero non, inquantum est simplex et simul totus completus, et
tale est esse Angeli, sanum potest habere intellectum. Non enim scribens
intendit excludere ab esse angelico quaslibet potentias, sed potentiam quae
esset transmutabilis, quae est in rebus corruptibilibus. |
La 47e
proposition est correcte : l’acte d’existence* se produit
de trois façons : sans aucun mélange de puissance, comme l’être divin;
avec un mélange de puissance toujours présent, comme les choses qui peuvent être
engendrées; ou dans un état intermédiaire, comportant un mélange de puissance
en tant qu’il provient d’un autre, mais en partie sans mélange de puissance,
en tant qu’il est un tout simple et complet à la fois, et tel est l’être de
l’ange. En effet, l’auteur n’a pas l’intention de nier tout genre de
puissances dans l’être de l’ange, mais seulement la puissance qui rend sujet
à changement, qu’on trouve dans les êtres corruptibles. |
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Quaestio 48 |
Question 48 |
[70732] De 108 articulis, q. 48 Quod vero quadragesimo octavo ponitur, posse et agere rerum aeternarum non est totum simul, sed successive:
non tamen continue, sed intercise, verum est de actionibus secundum suam
naturam: habent enim actiones successivas; unde Augustinus dicit, quod Deus movet creaturam spiritualem per
tempus, et per tempus moveri est per actiones moveri; sed actiones
Angelorum, secundum quas fruuntur verbo, sunt sine successione, et secundum
eas sunt in participatione aeternitatis. Posse etiam Angeli dicitur
intercisum non quantum ad essentiam potentiae, sed secundum quod posse
dividitur contra agere, quia Angelus quandoque potest agere aliquid,
quandoque agit. |
La 47e
proposition, que le pouvoir et l’agir
des êtres éternels ne se produisent pas toutalement en même temps, mais de
façon successive, non continue pourtant, mais de façon entrecoupée, est
vraie pour les actions selon leur nature; en effet, leurs actions sont
successives. C’est pourquoi saint Augustin dit que Dieu meut les créatures spirituelles dans le temps, et être mû
dans le temps, c’est être mû dans les actions; mais les actions des anges par
lesquelles ils jouissent du Verbe ne sont pas successives, et par elles ils
participent à l’éternité. On dit également que le pouvoir de l’ange est
interrompu, non quant à l’essence de sa puissance, mais en tant que le
pouvoir s’oppose à l’agir, car tantôt l’ange peut faire quelque chose, et
tantôt il le fait. |
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Quaestio 49 |
Question 49 |
[70733] De 108 articulis, q. 49 Quod vero quadragesimo nono ponitur, materia a Deo distinguitur imperfecta distinctione, quamvis Deus ab
ipsa distinguatur distinctione perfecta, non satis proprie dicitur, licet
sustineri possit. Proprie autem
diceretur, quod materia prima distinguatur a Deo per aliquod imperfectum. |
La 49e
proposition, que la matière se
distingue de Dieu par une distinction imparfaite, même si Dieu se distingue
d’elle par une distinction parfaite, n’est pas assez bien exprimée, bien
qu’elle puisse se soutenir. Mais on pourrait dire à proprement parler que la
matière première se distingue de Dieu par quelque chose d’imparfait. |
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Quaestio 50 |
Question 50 |
[70734] De 108 articulis, q. 50 Quod vero quinquagesimo ponitur, ordo
alicuius dicitur dupliciter: vel ut subiecti quod ordinatur, vel ut rationis
secundum quam ordo attenditur; primo modo non est in divinis ordo naturae,
sed secundo modo, potest recte et non recte intelligi. Ordo enim non est nisi aliquorum distinctorum
convenientium in aliquo: quae enim in nullo conveniunt, nullum habent ordinem
ad invicem. Ratio igitur ordinis potest accipi in divinis
personis vel ex parte distinctionis personarum: et sic ratio ordinis non est
natura, sed relatio; vel ex parte convenientiae, et sic natura est ratio ordinis:
propter hoc enim dicitur ordo naturae in divinis personis, quia natura divina
communicatur filio a patre, et ab utroque spiritui sancto. |
La 50e
proposition, que l’ordre d’une chose se
considère de deux façons : soit comme celui du sujet qui est mis en
ordre, soit dans l’aspect selon lequel l’ordre est considéré. Il n’y a pas
d’ordre de nature dans les personnes divines de la première façon, mais de la
deuxième façon, peut être prise dans le bon sens ou dans le mauvais sens.
En effet, il n’y a d’ordre qu’entre des choses distinctes qui ont un point commun,
car les choses qui n’ont aucun point commun n’ont aucun ordre entre elles.
Donc, on peut considérer la raison de l’ordre dans les personnes divines soit
sous l’aspect de la distinction des personnes, et ainsi la raison de l’ordre
n’est pas la nature, mais la relation, soit sous l’aspect de leur point
commun, et ainsi la nature est la raison de l’ordre. C’est pour cela, en
effet, que nous parlons d’un ordre de nature dans les personnes divines, car la
nature divine est communiquée au Fils par le Père, et par l’un et l’autre au
Saint-Esprit. |
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Quaestio 51 |
Question 51 |
[70735] De 108 articulis, q. 51 Quod vero quinquagesimo primo ponitur, essentia in Deo una est re, sed habet multitudinem attributorum differentium
in Deo sola ratione, in seipsis vero re, secundum naturas et rationes
proprias, falsum est, et improprie dictum, secundum quod sonant verba.
Contradicit enim sibi ipsi, si stricte verba discutiantur. Primo enim dicit
quod attributa quae habet essentia divina in se, in Deo differunt sola
ratione, et quod in seipsis differunt re: idem est enim haberi in essentia
divina et esse in Deo. Haec autem falsitas contingit non ex malo intellectu
scribentis, sed quia nimis truncate scripsit. Poterat sic bene dici: essentia
divina est una re, cui multa attribuuntur, quae in Deo differunt sola
ratione; in rebus autem creatis re, secundum naturas et rationes proprias. |
La 51e
proposition, que l’essence de Dieu est
une dans la réalité, mais elle a une multitude d’attributs qui diffèrent
uniquement en raison en Dieu, mais en réalité en eux-mêmes, selon leur nature
et leurs notions propres, est fausse et exprimée improprement si on la
prend au pied de la lettre. En effet, l’auteur se contredit lui-même si on
prend ses paroles au sens strict. En effet, il dit en premier que les
attributs possédés par l’essence divine en elle-même ne diffèrent en Dieu
qu’en raison mais, en tant que tels, diffèrent en réalité; en effet, être
possédés par l’essence divine, c’est la même chose qu’être en Dieu. Mais
cette fausseté ne vient pas de ce que l’auteur a mal compris, mais de ce
qu’il a écrit de façon trop concise. Sa pensée peut être bien énoncée comme
suit : en Dieu, les attributs ne diffèrent qu’en raison; dans les choses
créées, ils diffèrent en réalité, selon leurs natures et leurs notions
propres. |
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Quaestio 52 |
Question 52 |
[70736] De 108 articulis, q. 52 Quod vero quinquagesimo secundo ponitur, ipsum suppositum divinum a natura generali habet rationem per se
subsistendi, a natura speciali habet rationem intelligendi, a forma singulari
rationem distinguendi, male exceptum est. Addidit enim exceptor, divinum, de suo. In scripto autem sic
habetur: ipsum autem suppositum a
natura generali etc. et loquitur de supposito creato; unde parum supra
dixerat: animal significat substantiam cum proprietate generali, homo cum
proprietate speciali, Paulus cum individuali. Si vero intelligeretur de
supposito divino, esset simpliciter male dictum, quia in divinis non est
genus et species. |
La 52e
proposition, que le suppôt divin
lui-même tient de sa nature générale le fait de subsister par soi, de sa nature spéciale le fait d’être intelligent,
de sa forme singulière le principe de distinction, est mal citée. En
effet, le recenseur a ajouté de son cru le mot divin. Mais dans le texte, il est écrit : mais le suppôt lui-même tient de sa nature
générale, etc., et l’auteur veut parler du suppôt créé; c’est pourquoi il
avait dit un peu plus haut : « “Animal” désigne une substance ayant une
propriété générale, “homme” une substance ayant une propriété d’espèce, et “Paul”
une substance ayant une propriété individuelle. » Mais si on appliquait
cet énoncé au suppôt divin, il serait tout à fait faux, car dans l’être divin
il n’y a ni genre ni espèce. |
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Quaestio 53 |
Question 53 |
[70737] De 108 articulis, q. 53 Quod vero quinquagesimo tertio ponitur, hypostasis in intellectu suo claudit et naturas communes, et
proprietatem, non ita quod unum horum insit alteri, sed ita quod utrumque
sibi, bene dictum est; sed nimis calumniose ab obiiciente reprehenditur;
dicuntur enim proprietates inesse personis, sicut et esse in personis: et
similiter essentia divina est in patre, et est pater. Per hunc autem modum
omnia quae de Deo dicuntur, reprobari possent, cum nihil de Deo verbis
nostris proprie dici possit. |
La 53e
proposition, que l’hypostase renferme
dans sa compréhension les natures communes et le caractère propre, non de
sorte que l’un des deux soit dans l’autre, mais de sorte que l’un et l’autre
est en lui-même, est bien exprimée, et le critique a absolument tort de
la blâmer. En effet, on dit que les propriétés sont dans les personnes comme
l’être est dans les personnes; et pareillement, l’essence divine est dans le
Père, et elle est le Père. De cette manière, on pourrait rejeter tout ce qui
se dit de Dieu, car nos propos ne peuvent rien dire de Dieu qui soit
approprié. |
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Quaestio 54 |
Question 54 |
[70738] De 108 articulis, q. 54 Quod vero quinquagesimo quarto ponitur, Deus pater in eadem specie, scilicet seipso sive essentia sua, se et
omnia intelligit, ideo eandem speciem, idest filium, ad se et ad omnia
proferenda de se gignit, improprie dictum est, sicut et si diceretur Deus
pater de se gignit sapientiam; esset autem proprie dictum, si diceret, filium
de se gignit sapientiam: quia est eadem species proferendi. Proferre autem
accidit dicere; unde convenientius diceretur: Deus pater gignit de se filium
ad se et omnia dicenda: pater enim se et omnia alia dicit verbo suo, quod est
filius. Obiiciens autem male exponit proferre, idest producere. |
La 55e
proposition, que Dieu le Père se
comprend lui-même et comprend toute chose dans la même espèce*, par lui-même
ou par son essence; c’est pourquoi il engendre la même espèce, c'est-à-dire
le Fils, pour s’extérioriser en lui-même et en toute chose, est mal
formulée, comme si on disait aussi que Dieu le Père engendre de lui-même la
sagesse; mais ce serait une bonne formulation si on disait que le Père
engendre le Fils, sa sagesse, car il s’agit alors de l’extériorisaton d’une
espèce unique. Mais s’extérioriser
peut signifier « dire »; c’est pourquoi il conviendrait mieux de
dire que « Dieu le Père a engendré le Fils pour se dire en lui-même et
en toute chose », car le Père se dit et dit toute chose par son Verbe,
qui est le Fils. Mais le critique a expliqué à tort le mot s’extérioriser au sens de produire. |
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Quaestio 55 |
Question 55 |
[70739] De 108 articulis, q. 55 Quod vero quinquagesimo quinto ponitur, filius magis convenit cum patre quam spiritus in exterioribus, in
scripto additur, idest in habitudine
spirativa, scilicet communi spiratione, hoc acceptum videtur a Richardo
de sancto Victore. Sed non videtur convenienter dici: quia neque in divinis,
dicitur aliquid interius et exterius proprie loquendo, neque filius convenit
magis cum patre quam spiritus sanctus, licet in pluribus relationibus cum eo
conveniat. |
La 55e
proposition, que le Fils a un rapport
plus étroit avec le Père dans les choses extérieures que le Saint-Esprit, est
suivie dans le texte par les mots c'est-à-dire
dans la disposition spiratrice, plus précisément la spiration commune,
semble être acceptée par Richard de Saint-Victor. Mais cet énoncé ne semble
pas approprié, car d’une part, dans les choses divines, on ne peut pas dire
que quelque chose est intérieur ou extérieur à proprement parler, et d’autre
part, le Fils n’a pas un rapport plus étroit avec le Père qu’avec le
Saint-Esprit, bien qu’il lui soit uni par un grand nombre de relations. |
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Quaestio 56 |
Question 56 |
[70740] De 108 articulis, q. 56 Quod vero quinquagesimo sexto ponitur, pater et filius non sunt idem principium spiritus sancti, licet a
multis hoc dicatur propter articulum quem habet pronomen inclusum, ratione
cuius videtur ad personam pertinere; tamen hoc videtur multum non cogere,
quin possit concedi, quod pater et filius sint idem principium, sicut et
unum: utimur enim pronominibus communiter et pro essentia et pro persona. |
La 56e
proposition, que le Père et le Fils ne
sont pas le même principe du Saint-Esprit, bien que beaucoup l’affirment
à cause de l’article qui est inclus dans le pronom*, et en raison duquel
celui-ci semble viser la personne, ne semble vraiment pas convaincante, à
moins que l’on ne puisse admettre que le Père et le Fils sont le même
principe du fait qu’ils sont un; en effet, nous employons couramment les
pronoms pour désigner aussi bien l’essence que la personne. |
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Quaestio 57 |
Question 57 |
[70741] De 108 articulis, q. 57 Quod vero quinquagesimo septimo ponitur, loquendo de specie naturae et de specie cognitionis, dicitur filius
species patris, secundum quod nominativus constituitur cum genitivo in
ratione causae efficientis, non in ratione causae formalis, non habet
calumniam ex hoc quod obiiciens tangit: non enim sequitur quod filius sit
causa efficiens patris, vel e converso; sed constructio est secundum
habitudinem talis causae, secundum modum loquendi quo grammatici utuntur.
Vult autem hoc accipere, quod filius sit species patris ex hoc quod Hilarius
dicit: species est in imagine. Augustinus autem speciem interpretatur pulchritudinem.
Et licet Hilarius non dicat quod filius sit species patris, potest tamen hoc
modo intelligi, species vel pulchritudo patris, sicut dicitur splendor
patris. |
La 57e
proposition, qu’en parlant de l’espèce
de la nature et de l’espèce de la connaissance, on dit que le Fils est
l’espèce du Père, en autant que le nominatif est construit avec le génitif
pour désigner la cause efficiente et non la cause formelle, n’est pas
critiquable quant à l’objection soulevée par le critique; en effet, il ne
s’ensuit pas que le Fils est la cause efficiente du Père, mais plutôt
l’inverse. Mais c’est une construction habituelle pour une telle cause, selon
la manière de parler usuelle des grammairiens. Mais l’auteur veut dire que le
Fils est l’espèce du Père, en s’appuyant sur saint Hilaire qui dit que
l’espèce est dans l’image, et sur saint Augustin, d’après qui l’espèce veut
dire la beauté. Et quoique saint Hilaire ne dise pas que le Fils est l’espèce
du Père, on peut quand même comprendre qu’il est l’espèce ou la beauté du
Père, comme on dit qu’il est la splendeur du Père. |
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Quaestio 58 |
Question 58 |
[70742] De 108 articulis, q. 58 Quod vero quinquagesimo octavo ponitur, aliquid potest significari terminus actionis dupliciter, secundum
rem, aliquid secundum rationem: primo modo terminus spirandi amorem respectu
patris est filius, secundo modo pater respectu sui ipsius, nimis obscure
dictum est. Hic tamen videtur esse sensus. Quia enim terminus actionis
principaliter distinguitur ab agente ubi est realis distinctio, terminum
actionis ab agente, dixit esse terminum secundum rem: et sic est realis
distinctio inter patrem et filium; ubi autem non est realis distinctio, dixit
esse terminum secundum rationem: sicut in patre cum diligit seipsum,
distinguitur amans et amatum ratione tantum. Non autem ex hoc sequitur quod
pater aliter diligat se, aliter filium, ut obiiciens tangit; sed sequitur,
quod se diligat ut eundem, et filium ut alium. |
La 58e
proposition, que voici, est vraiment trop obscure : une chose peut constituer le terme d’une action de deux façons :
en réalité ou en raison; de la première façon, le terme de la spiration de
l’amour envers le Père est le Fils; de la deuxième façon, le Père est le
terme envers lui-même. Cependant, le sens semble être le suivant :
puisque le terme de l’action se distingue principalement de l’agent là où il
y a une distinction réelle, l’auteur dit que c’est un terme en réalité, et
qu’ainsi il y a une distinction réelle entre le Père et le Fils; là où il n’y
a pas une distinction réelle, il dit que c’est un terme en raison; ainsi,
dans le Père, quand il s’aime lui-même, celui qui aime et l’aimé ne se
distinguent qu’en raison. Il ne s’ensuit pourtant pas que le Père s’aime et
aime le Fils de manières différentes, comme le comprend le critique, mais il
s’ensuit que le Père s’aime comme lui-même et aime le Fils en tant qu’autre. |
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Quaestio 59 |
Question 59 |
[70743] De 108 articulis, q. 59 Quod vero quinquagesimo nono ponitur, loquendo de amore essentiali, spiritus sanctus se diligit seipso, loquendo
de amore notionali, non, credo falsum esse; quia cum amor notionalis
nihil aliud sit quam spiritus sanctus, sicut haec est vera: *spiritus sanctus
se diligit seipso, ita haec est vera: spiritus sanctus diligit se amore
notionali; nisi forte dicatur, quod diligere notionaliter sumptum est spirare
amorem: et sic diligere nullo modo convenit spiritui sancto. |
Je crois que la 59e
proposition, que le Saint-Esprit s’aime
par lui-même sous l’aspect de l’amour essentiel, mais pas sous l’aspect de
l’amour notionnel, est fausse. En effet, puisque l’amour notionnel n’est
rien d’autre que le Saint-Esprit, de même qu’il est vrai de dire que le Saint-Esprit s’aime par lui-même, il
est pareillement vrai que le Saint-Esprit s’aime d’un amour notionnel, à
moins peut-être qu’on ne comprenne l’amour notionnel comme étant la spiration
de l’amour, et cette sorte d’amour ne convient nullement au Saint Esprit. |
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Quaestio 60 |
Question 60 |
[70744] De 108 articulis, q. 60 Quod vero sexagesimo ponitur, licet spiritus sanctus non diligat se
vel alteram personam notionaliter seipso, tamen diligit creaturam et
personaliter et essentialiter seipso, credo simpliciter esse falsum secundum
praedicta. |
D’après ce qui
précède, je crois que la 60e proposition, que voici, est
absolument fausse : bien que le
Saint-Esprit n’aime ni lui-même ni une autre personne par lui-même d’un amour
notionnel, il aime pourtant les créatures par lui-même de façon personnelle
et essentielle. |
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Quaestio 61 |
Question 61 |
[70745] De 108 articulis, q. 61 Quod vero sexagesimo primo ponitur, cum dicitur, omnia in verbo dicit pater, non vocatur verbum dicendi principium,
sed terminus, intelligendum est ex parte dicentis; non enim verbum est
principium patri, quod dicatur; sed dicitur a patre ut principium aliorum quae
dicuntur per hoc verbum: et sic cessat omnis obiectio. |
La 61e
proposition, quand l’auteur dit : Le
Père dit tout par le Verbe, et le Verbe n’est pas appelé principe, mais terme
du dire, doit être comprise du côté de celui qui dit; en effet, le Verbe
n’est pas le principe du Père, de sorte qu’il serait dit, mais il est dit par
le Père en tant que principe des autres choses dites par le Verbe; ainsi,
toutes les objections tombent. |
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Quaestio 62 |
Question 62 |
[70746] De 108 articulis, q. 62 Quod vero sexagesimo secundo ponitur, filius respectu alicuius actus paterni non potest esse principium,
sed terminus, eundem habet intellectum: etsi enim sit principium spirandi
et creandi, non tamen est principium quo pater spiret vel creet. |
La 61e
proposition, que le Fils ne peut être
le principe d’aucun acte du Père, mais il en est le terme, se comprend de
la même façon : en effet, même s’il est principe de spiration et de
création, il n’est pas le principe par lequel le Père réalise la spiration ou
la création. |
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Quaestio 63 |
Question 63 |
[70747] De 108 articulis, q. 63 Quod vero sexagesimo tertio dicitur, non potest dici aeternitas de aeternitate, male dictum est
quantum ad duo: primo, quia ea ratione potest dici aeternitas de aeternitate,
sicut sapientia de sapientia, vel natura de natura; secundo quia aeternitas
non repugnat rationi originis, quia et filius et spiritus sanctus sunt
aeterni. |
La 63e
proposition, qu’on ne peut dire « éternité
d’éternité », est fausse pour deux raisons. Premièrement, parce
qu’on peut dire « éternité d’éternité » pour la même raison qu’on
dit « sagesse de sagesse » ou « nature de nature »;
deuxièmement, parce que l’éternité n’exclut pas la notion d’origine, puisque
le Fils et le Saint-Esprit sont éternels. |
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Quaestio 64 |
Question 64 |
[70748] De 108 articulis, q. 64 Quod vero sexagesimo quarto ponitur, persona non distinguitur seipsa, sed sua proprietate, falsum est:
nam personae seipsis et proprietatibus distinguuntur. |
La 64e
proposition, que la personne ne se
distingue pas en elle-même, mais en ses propriétés, est fausse, car les
personnes se distinguent en elles-mêmes et en leurs propriétés. |
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Quaestio 65 |
Question 65 |
[70749] De 108 articulis, q. 65 Quod vero sexagesimo quinto ponitur, solus Christus habet perfectionem cognitionis in genere creaturae,
verum est secundum aliquem modum perfectionis; unde non obstat quod beatorum
cognitio est perfecta: nam multiplex est modus perfectionis. |
La 65e
proposition, que seul le Christ possède
la perfection de la connaissance dans le genre des créatures, est vraie
selon un certain mode de perfection; pourtant, cela n’empêche pas la
connaissance des saints d’être parfaite, car il y a plusieurs modes de
perfection. |
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Quaestio 66 |
Question 66 |
[70750] De 108 articulis, q. 66 Quod vero sexagesimo sexto ponitur, ideae habent pluralitatem ex parte connotati propter respectuum
pluralitatem, et ille respectus aeternus est, verum est, si respectus
ille est intellectus a Deo. Deus enim ab aeterno sicut intellexit
multitudinem creaturarum, ita intellexit multitudinem respectuum, prout sunt
inter ipsum et creaturas: et hoc sufficit ad pluralitatem idearum, quae nihil
aliud sunt quam rationes rerum, prout sunt intellectae a Deo; et sic neque
oportet essentiam divinam plurificari, neque oportet esse aliquam relationem
realem aeternam praeter proprietates personales, ut obiicitur. |
La 66e
proposition, que les idées sont
multiples du côté de l’objet connu à cause de la pluralité des rapports, et
ces rapports sont éternels, est vraie si ces rapports sont compris par
Dieu. En effet, de même que Dieu a compris de toute éternité la multitude des
créatures, de même il a compris la multitude des rapports qui existent entre
lui et les créatures, et cela suffit à la multiplication des idées, qui ne
sont rien d’autre que les notions des choses en tant qu’elles sont comprises
par Dieu; ainsi, il n’est pas nécessaire que l’essence divine soit multiple, ni
non plus qu’il existe une relation réelle et éternelle en plus des propriétés
personnelles, comme le soutient le critique. |
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Quaestio 67 |
Question 67 |
[70751] De 108 articulis, q. 67 Quod vero sexagesimo septimo ponitur, pluralitas idearum est in Deo secundum rationem, non tamen
intellectus humani, vel angelici, sed divini, patet ex praecedenti
quomodo verum est; non tamen sequitur quod aliqua realis distinctio ex ideis
sit in Deo, sed quod plura intelligantur ab ipso. |
La 67e
proposition, que la pluralité des idées
est en Dieu en raison, non en raison de l’intelligence humaine ou angélique
mais en raison de l’intelligence divine, est vraie d’une certaine
manière, laquelle est évidente d’après ce qui précède. Il ne s’ensuit
pourtant pas qu’il y ait une distinction réelle des idées en Dieu, mais
seulement que Dieu comprend plusieurs choses. |
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Quaestio 68 |
Question 68 |
[70752] De 108 articulis, q. 68 Quod vero sexagesimo octavo ponitur, vel secundum aliud, in instanti eodem secundum rem est Angelus in
utroque termino, tamen multiplicato secundum rationem, hoc simpliciter
falsum est; sed hoc dicit non asserendo, sed opinionem recitando. |
La 68e
proposition, que, ou bien, à un autre
point de vue, l’ange est en réalité et au même instant dans les deux termes,
qui ne sont pourtant multiples qu’en raison, est absolument fausse, mais
l’auteur ne l’affirme pas; il rapporte seulement l’opinion d’un autre. |
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Quaestio 69 |
Question 69 |
[70753] De 108 articulis, q. 69 Quod vero sexagesimo nono ponitur, scientia
de eo quae est per speciem alienam non est assimilatio cum rebus scitis, sed
scientia per speciem propriam, obscure dictum est, et male ab obiiciente
intellectum: non enim loquitur de specie qua Deus sciens scit, sed de specie
qua scitum scitur; quae enim habent formam, sciuntur per proprias formas,
sicut homo scitur ex hoc quod cognoscitur humanitas eius; quae vero non
habent formam, sicut privationes, cognoscuntur per opposita. Cognoscere enim
caecitatem, est cognoscere defectum visus. |
La 69e
proposition, que la science qui vient à
ce sujet par une espèce étrangère n’est pas une ressemblance des choses
connues, mais c’est seulement la science par l’espèce propre qui l’est, est
énoncée de façon obscure par l’auteur et mal comprise par le critique. En
effet, il n’est pas question de l’espèce par laquelle Dieu connaît, mais de
l’espèce par laquelle l’objet connu est connu, car les êtres qui ont une
forme sont connus par leur propre forme, comme l’homme est connu du fait que
son humanité est commue; mais ce qui n’a pas de forme, comme la privation,
est connu par son opposé : connaître la cécité, c’est connaître
l’absence de la vue. |
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Quaestio 70 |
Question 70 |
[70754] De 108 articulis, q. 70 Quod vero septuagesimo ponitur, malum
scitur a Deo per speciem alienam, non per propriam, unde quasi per accidens,
non per se, qualiter intelligendum sit, patet ex immediate praecedenti;
tamen quod dicit per accidens non per se, non usquequaque bene dicitur: non
enim caecitas per accidens cognoscitur, cum cognoscitur esse privatio visus. |
La 70e
proposition est la suivante : le
mal est connu par Dieu au moyen d’une espèce étrangère et non de son espèce
propre, et donc comme par accident et non par soi. La manière de la
comprendre est évidente d’après ce que l’auteur dit juste avant; Toutefois,
quand il dit par accident et non par
soi, ce n’est pas tout à fait bien dit, car la cécité n’est pas connue
par accident quand on sait que d’est la privation de la vue. |
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Quaestio 71 |
Question 71 |
[70755] De 108 articulis, q. 71 Quod vero septuagesimo primo ponitur, est actio Dei interior et exterior; exterior cessat cessante obiecto,
si intelligat, quod Deus agat aliqua actione exteriori, quae non sit sua
essentia, omnino falsum est; si vero actio Dei dicatur exterior non ratione
sui ipsius, sed ratione obiecti, sic sustineri potest. |
La 71e
proposition, que l’action de Dieu est
intérieure et extérieure; l’action extérieure cesse quand l’objet disparaît, est
absolument fausse si on comprend que Dieu agit par une action extérieure qui
n’est pas son essence. Mais si on qualifie l’action de Dieu d’extérieure non en raison de sa nature mais en raison de
son objet, la proposition peut se soutenir. |
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Quaestio 72 |
Question 72 |
[70756] De 108 articulis, q. 72 Quod vero septuagesimo secundo ponitur, creare obiectum suum ponit in tempore, et ideo actus est temporalis,
et subiacens legibus temporalibus, et potest non esse antequam sit, non
est bene dictum de actione, sed de obiecto tantum. |
La 72e
proposition, que la création établit
son objet dans le temps; c’est pourquoi cet acte est temporel et assujetti
aux lois du temps, et il peut ne pas être avant d’être, n’est pas bien
formulée quant à l’action, mais l’est seulement quant à l’objet. Ceci est
faux quant à l’action, et vrai quant à l’objet. |
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Quaestio 73 |
Question 73 |
[70757] De 108 articulis, q. 73 Quod vero septuagesimo tertio ponitur, quaedam dicuntur subiacere divinae providentiae ut facta, quaedam ut
fienda; mala ut iam facta, bona ut fienda, obscure dictum est, et hunc
habet sensum: quia per divinam providentiam ordinatur ut bona fiant, non
autem ut mala fiant; sed iam facta ordinantur ad aliquod bonum secundum
aeternam Dei providentiam; unde cessat obiectio obiicientis. |
La 73e
proposition, que certains actes sont
dits être assujettis à la Providence divine en tant qu’accomplis, et d’autres
comme étant à accomplir : les actes mauvais en tant qu’à accomplir, et
les bons comme étant à accomplir, est formulée de façon obscure, et son
sens est le suivant : la Providence divine dispose que les actes bons
soient accomplis, mais non les mauvais. Mais les actes déjà accomplis sont
disposés en vue de quelque chose de bon par la providence éternelle de Dieu,
ce qui résout l’objection du critique. |
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Quaestio 74 |
Question 74 |
[70758] De 108 articulis, q. 74 Quod vero septuagesimo quarto ponitur, praedestinatio est causa salutis prima, liberum arbitrium proxima;
effectus vero magis sequitur conditionem causae proximae, ut patet in
generatione inferiorum ex motu necessario superiorum, quantum ad aliquid
verum est, scilicet quantum ad contingentiam et necessitatem: quia si causa
prima est necessaria, et secunda contingens, sequitur effectus contingens;
sed non debuit proponi communiter. Quod vero obiiciens calumniatur, quod Deus
est magis causa proxima quam liberum arbitrium, omnino frivolum est: est enim
Deus causa proxima secundum efficaciam actionis, et non secundum ordinem
enumerationis causarum. |
La 74e
proposition, que la prédestination est
la cause première du salut, et le libre arbitre en est la cause prochaine;
mais l’effet découle davantage de l’état de la cause prochaine, comme il est
évident dans la génération des êtres inférieurs par le mouvement nécessaire
des êtres supérieurs, est vraie sous un certain aspect, celui de la
contingence et de la nécessité; car si la cause première est nécessaire et la
cause seconde contingente, il s’ensuit un effet contingent; mais cette
affirmation n’aurait pas dû être générale. Mais le reproche du critique,
quant au fait que Dieu est une cause plus prochaine que le libre arbitre, est
tout à fait frivole; car Dieu est la cause prochaine quant à l’efficacité de
l’action, et non selon l’ordre d’énumération des causes. |
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Quaestio 75 |
Question 75 |
[70759] De 108 articulis, q. 75 Quod vero septuagesimo quinto ponitur, Deus mera voluntate dat gratiam rationabiliter bene usuro, et non dat
male usuro, falsum est, si universaliter intelligatur, ut sit sensus,
quod nunquam dat male usuro; si vero particulariter intelligatur, ut scilicet
quandoque det male usuro, et quandoque non det, verum est. |
La 75e
proposition, que Dieu, par un acte pur
de sa volonté, donne la grâce raisonnablement à celui qui en fait bon usage,
et ne la donne pas à qui l’emploiera mal, est fausse si on la considère
au sens universel, comme voulant dire qu’il ne la donne jamais à qui
l’emploiera mal; mais si on la prend de façon particulière, au sens où tantôt
il la donne, tantôt il ne la donne pas à qui l’emploiera mal, elle est vraie. |
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Quaestio 76 |
Question 76 |
[70760] De 108 articulis, q. 76 Quod vero septuagesimo sexto ponitur, divina potentia ab actu
exteriori nullam recipit multiplicitatem, sed ab actu interiori potest
recipere multiplicitatem aliquam: prout enim differunt actus notionales et
essentiales interiores, sic differt potentia actui notionali et essentiali
coniuncta, diminute exceptum est. Proponitur enim primo, quod divina potentia
una tantum est, si in sua radice consideretur, quae est divina essentia; si
autem consideretur divina potentia prout coniuncta actibus interioribus
essentialibus et notionalibus, sic habet differentiam secundum modum quo
dicitur differre in Deo absolutum et relatum, vel essentiale vel notionale.
Potentia enim generandi ratione actus est notionalis; potentia intelligendi,
essentialis; sed potentia creandi et gubernandi vel quicumque alius effectus
adiungatur, est essentialis: et sic ex praecedentibus et sequentibus patet
intentionem scribentis absque calumnia esse. |
La 76e
proposition, que la puissance divine
n’est aucunement rendue multiple par l’acte extérieur, mais elle peut devenir
multiple d’une certaine façon du fait de l’acte intérieur; en effet, selon
que les actes notionnels et les actes essentiels intérieurs diffèrent, de
même la puissance diffère quand elle est jointe à un acte notionnel ou
essentiel, est critiquée à tort. En effet, on affirme en premier que la
puissance divine est seulement une si on la considère dans sa source, qui est
l’essence divine; mais si on la considère en tant que jointe aux actes
intérieurs essentiels et notionnels, on y trouve la même différence que quand
on dit que le relatif et l’absolu, ou l’essentiel et le notionnel, diffèrent
en Dieu. Car la puissance d’engendrer, sous l’aspect de l’action, est notionnelle,
la puissance de comprendre est essentielle, mais la puissance de créer et de
gouverner, ou de produire tout autre effet semblable, est essentielle. Aussi,
il est évident, d’après ce qui précède et ce qui suit, qu’on ne peut rien
reprocher à l’idée de l’auteur. |
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Quaestio 77 |
Question 77 |
[70761] De 108 articulis, q. 77 Quod vero septuagesimo septimo ponitur, quantitas virtutis non est idem quod quantitas potentiae, sed
universalior, quia quantitas virtutis attenditur sive in essendo, sive in
operando, sive in durando, quantitas vero potentiae in operando tantum,
bene diceretur, si adderetur quantitas potentiae activae; alias diminute
dictum est. |
La 77e
proposition, que la quantité de vertu
n’est pas pareille à la quantité de puissance, mais elle est plus
universelle, car on considère la quantité de vertu soit dans l’être, soit
dans l’opération, soit dans la durée, mais on ne considère la quantité de
puissance que dans l’opération, est bien formulée, si on précise que
c’est la quantité de puissance active; autrement, elle est insuffisante. |
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Quaestio 78 |
Question 78 |
[70762] De 108 articulis, q. 78 Quod vero septuagesimo octavo ponitur, infinitas potentiae tota attenditur penes respectum ad potentialia, infinitas
autem essentiae non solum attenditur penes esse hoc et non illud, sed penes
esse in hoc et in altero quolibet ente, et etiam in infinitis si essent
infinita, vel male, vel defective dicitur; si enim diceret sic: infinitas
potentiae in quantum est potentia, tota attenditur penes respectum ad
potentialia, posset sustineri, quia potentia importat respectum ad
potentialia. Quod autem dicitur de infinitate essentiae, non bene explanatur:
non enim infinitas divinae essentiae est ex hoc quod Deus potest esse in
infinitis, sed per se infinita est. |
La 78e
proposition, que l’infinité de la
puissance est considérée uniquement dans ce qui est potentiel; mais
l’infinité de l’essence est considérée non seulement quant au fait d’être
telle chose et non telle autre, mais aussi quant au fait d’être dans tel être
et dans n’importe quel autre, et même dans les êtres infinis s’ils existent, est
soit fausse, soit insuffisante; en effet, s’il était écrit : « l’infinité
de la puissance, en tant que puissance, est considérée uniquement dans ce qui
est potentiel », cela pourrait se soutenir, car la puissance implique un
rapport avec ce qui est potentiel. Par ailleurs, ce qui est dit de l’infinité
de l’essence n’est pas bien expliqué; en effet, l’infinité de l’esse divine
ne vient pas de ce que Dieu pourrait être dans les êtres infinis, mais de ce
qu’elle est infinie par elle-même. |
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Quaestio 79 |
Question 79 |
[70763] De 108 articulis, q. 79 Quod vero septuagesimo nono ponitur, Deus vere est quidquid sibi est, intelligitur de his quae sibi est
simpliciter, ut bonus, sapiens, et non de his quae sibi est secundum modum
intelligendi, ut finitus, comprehensibilis, addendum est secundum quendam
modum intelligendi: quod enim dicitur, Deus esse sibi finitus vel
comprehensibilis, non eodem modo dicitur sicut res aliae dicuntur finitae et
comprehensibiles, sed quodam speciali modo, ut intelligatur magis negative
dictum quam affirmative: dicitur enim sibi comprehensibiles, quia suum
intellectum non excedit; finitus vero, quia non est sibi ignotus vel
impertransibilis secundum intellectum; sed bonus et sapiens dicitur
affirmative. |
À la 79e
proposition, que l’énoncé voulant que
Dieu soit vraiment tout ce qui est à lui s’applique à ce qui est à lui
absolument (c’est ainsi qu’il est bon et sage), et non à ce qui est à lui
selon une manière de comprendre (c’est ainsi qu’il est fini et
compréhensible), il faut ajouter que c’est selon une manière bien
particulière de comprendre : en effet, quand on dit que Dieu est fini ou
compréhensible pour lui-même, ce n’est pas comme quand on dit que les autres
choses sont finies ou compréhensibles; mais on le dit d’une façon spéciale, à
comprendre de façon plus négative qu’affirmative; en effet, on dit qu’il est
compréhensible pour lui-même parce qu’il ne dépasse pas son intelligence, et
qu’il est fini parce qu’il n’est pas inconnu ou insaisissable par son
intelligence; mais on dit de façon affirmative qu’il est bon et sage. |
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Quaestio 80 |
Question 80 |
[70764] De 108 articulis, q. 80 Quod vero octuagesimo ponitur, ille actus, scilicet generatio, de Dei
substantia et ideo est ei essentiale esse infinitum; sed productio
creaturarum non est ex nihilo, et ideo est illi essentiale esse finitum,
obscure dictum est, quod dicit productionem creaturarum esse ex nihilo: et
non sic est intelligendum, quasi ipsa actio productionis sit ex nihilo, sed
productum, eo modo loquendi, quod diceretur quod operatio cultelli est ex
ferro; similiter quod dicit productionem creaturarum esse aliquod finitum,
intelligit ex parte producti, et non ex parte actionis: Deus enim actione
infinita producit effectum finitum. |
La 80e
proposition, que cet acte de génération
vient de la substance de Dieu, et il lui est donc essentiel d’être infini;
mais les créatures n’ont pas été produites à partir de rien*, et il est donc
essentiel à cette production d’être finie, est exprimée de façon obscure
quand l’auteur dit que les créatures ont été produites à partir de rien; et
il ne faut pas la comprendre comme si l’acte même de production provenait du
néant, mais au sens où le produit est fait à partir de rien, de la même façon
qu’on dirait que l’opération produite du couteau vient du fer; pareillement, quand
il dit que la production des créatures est finie, il veut dire du côté du
produit et non du côté de l’action, car Dieu produit un effet fini par une
action infinie. |
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Quaestio 81 |
Question 81 |
[70765] De 108 articulis, q. 81 Quod vero octuagesimo primo ponitur, non est simile de omnipotentia, et de omniscientia; quia posse
pertinet ad actionem, scire ad receptionem: in creatura vero non potest esse
potentia activa infinita, sed passiva quae potest reduci in actum, secundum
quod unitur agenti infinito, obscure et defective dictum est: nam posse
pertinet et ad actionem et ad receptionem. Addendum igitur fuit, quod posse
potentiae activae ad actionem. Item non omne scire pertinet ad receptionem,
sed scire intellectus possibilis humani: scire autem intellectus divini non
est per receptionem. Quod vero dicitur, quod in creatura potest esse potentia
passiva infinita, non habet calumniam. Ut enim supra iam dictum est, potentia
importat respectum ad possibile: unde potentia passiva creaturae dicitur
infinita, secundum quod ad infinita se habet: sicut potentia materiae primae
se habet ad infinitas formas et figuras, et continuum est divisibile in
infinitum; et similiter intellectus possibilis se habet ad infinitas species
intelligibiles. Nec propter hoc
sequitur quod aliquid creatum sit infinitum simpliciter, sed infinitum in
potentia tantum. Haec autem potentia passiva infinita in rebus naturalibus
non reducitur in actum tota simul, sed successive; sed potentia passiva
animae Christi ad intelligendum reducitur tota in actum, quia scit omnia
scibilia ad quae intellectus humanus est in potentia naturali, quae sunt infinita;
et hoc habet ex unione verbi quod est agens infinitum. |
La 81e
proposition, qu’il n’en va pas de même
pour la toute-puissance et pour l’omniscience, car la puissance vise
l’action, et la connaissance vise la réception; or, dans la créature, il ne
peut pas y avoir de puissance active infinie, mais une puissance passive qui
peut être amenée à l’acte en tant qu’elle est unie à un agent infinie, est
formulée de façon obscure et insuffisante, car le pouvoir se rapporte aussi
bien à l’action qu’à la réception. Il fallait donc ajouter que le pouvoir
« de la puissance active » vise l’action. De plus, ce n’est pas
toute connaissance qui suppose une réception, mais seulement la connaissance
de l’intellect possible de l’homme; la connaissance de l’intelligence divine
ne se fait pas par réception. Mais quand l’auteur dit que la créature peut
avoir une puissance passive infinie, cela n’est pas critiquable. En effet,
comme on l’a dit plus haut, la puissance indique un rapport avec le possible;
c’est pourquoi on dit que la puissance passive de la créature est infinie, du
fait qu’elle est susceptible d’une infinité de choses, de même que la
puissance de la matière première est susceptible d’une infinité de formes et
de figures, et qu’elle est continue et divisible à l’infini, et pareillement,
l’intellect possible est capable de recevoir une infinité d’espèces
intelligibles. Il ne s’ensuit pas pour autant qu’une chose créée soit
absolument infinie, mais qu’elle est seulement infinie en puissance. Mais
cette puissance passive infinie, dans les choses naturelles, n’est pas amenée
à l’acte d’un seul coup, mais de façon successive, tandis que la puissance
passive de comprendre de l’âme du Christ est entièrement amenée à l’acte
parce qu’il connaît toutes les choses connaissables, en quantité infinie,
auxquelles l’intelligence humaine est naturellement en puissance; et il a ce
pouvoir de par son union au Verbe, qui est un agent infini. |
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Quaestio 82 |
Question 82 |
[70766]
De 108 articulis, q. 82 Quod vero octuagesimo
secundo ponitur, quod aliquis non
possit quidquid aliquando potuit, potest esse dupliciter, aut quia non habet
omnes potestates quas aliquando habuit, aut quia factum est impossibile quod
aliquando fuit possibile: hoc secundo modo Deus non potest quicquid potuit,
quia non est possibile Deo quicquid fuit possibile: quod enim actu praesens
est aut praeteritum, perdit rationem possibilis, hoc omnino calumniam non
habet: non enim Deus potest facere id quod est praesens simul cum est non
esse, aut id quod praeteritum est non esse praeteritum. Ex magna autem
ignorantia calumniantis procedit quod contra hoc obiicit quia Deus potest id
quod in nihilum cedit idem numero facere, et quod eadem caro numero resurgat,
quamvis aliquid eius in nihilum cesserit: quia ut hoc ei sine quaestione
concedatur, non propter hoc sequitur quod id quod est praeteritum non sit
praeteritum. Quamvis enim Deus faceret id quod in nihilum cedit iterum esse, non
tamen faceret quod in nihilum non cessisset. |
La 82e
proposition, que voici, n’est absolument pas critiquable : il peut arriver de deux façons que
quelqu'un soit incapable de faire une chose qu’il a déjà pu faire : ou
bien parce qu’il n’a plus toutes les puissances qu’il a déjà eues, ou bien
parce que ce qui a déjà été possible est devenu impossible. De la deuxième
manière, Dieu ne peut pas faire tout ce qu’il pouvait faire, parce que tout
ce qui était possible à Dieu ne lui est plus possible : en effet, ce qui
est présent en acte ou passé perd sa qualité de possible. En effet, Dieu
ne peut pas faire en sorte que ce qui est présent ne soit pas en même temps
qu’il est, ni que ce qui est passé ne soit pas passé. Le critique manifeste une
grande ignorance qnand il fait valoir que Dieu peut faire en sorte que ce qui
est tombé dans le néant revienne à l’être de façon numériquement identique,
même si quelque chose de cet être est tombé dans le néant, car même si on lui
concède ce point sans contestation, il ne s’ensuit pas pour autant que ce qui
est passé n’est pas passé. En effet, même s’il faisait en sorte que ce qui
est tombé dans le néant existe de nouveau, cela n’empêcherait pas cet être
d’avoir cessé d’exister. |
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Quaestio 83 |
Question 83 |
[70767]
De 108 articulis, q. 83 Quod vero octuagesimo
tertio ponitur, quamvis primo malum non
praecesserit meritum de condigno, praecessit tamen, de congruo, scilicet non
converti ad suum creatorem, non bene dictum est: nam primum malum est
prima culpa; prima autem culpa non est poena, unde nullum meritum habet. Si
autem intelligit de primo malo poenae, sic oportet quod praecesserit ipsum
meritum de condigno. |
La 83e
proposition, que le mal n’a pas d’abord
précédé le mérite par condignité mais
il l’a précédé par convenance*, par
le fait de ne pas se tourner vers son créateur, est mal formulée. En
effet, le premier mal est la première faute; mais la première faute n’est pas
une peine subie et ne produit donc aucun mérite. Mais si l’auteur a voulu
parler du premier mal de peine, il est alors nécessaire que le mérite par condignité l’ait précédé. |
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Quaestio 84 |
Question 84 |
[70768]
De 108 articulis, q. 84 Quod vero octuagesimo
quarto ponitur, mala esse futura in tempore, fuit verum ab aeterno per
accidens, non per se, scilicet per speciem sui oppositi, et quod est bona
fieri, non proprie dictum est: nam licet malum cognoscatur per aliud, hoc
tamen non est ei per accidens, sed per se, ut supra dictum est. Et licet bono
aeterno non opponatur malum proprie loquendo, tamen bonum creatum cui
opponitur malum, fuit intellectum ab aeterno; et sic malum fieri potuit per
speciem sui oppositi ab aeterno intellecti. Nec sequitur plura esse ab
aeterno, ut obiiciens dicit; sed sequitur plura esse intellecta ab aeterno:
omnia enim temporalia sunt intellecta ab aeterno. |
La 84e proposition, que « le
mal devait exister dans le temps » est une proposition éternellement
vraie par accident et non par soi, c'est-à-dire par l’espèce de son opposé et
par l’existence du bien, n’est pas dite de façon appropriée, car, même si
le mal est connu par autre chose, ce fait ne lui est pas accidentel, mais
essentiel, comme on l’a dit plus haut. Et même si le mal ne s’oppose pas à
proprement parler au bien éternel, le bien créé, auquel s’oppose le mal, a
été compris de toute éternité; et ainsi le mal a pu exisger par l’espèce de
son exposé qui a été comprise éternellement. Il ne s’ensuit pas cependant que
plusieurs êtres existent de toute éternité, comme le prétend le critique,
mais il s’ensuit que plusieurs êtres ont été compris de toute éternité; en
effet, tous les êtres temporels ont été compris de toute éternité. |
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Quaestio 85 |
Question 85 |
[70769]
De 108 articulis, q. 85 Quod vero octuagesimo
quinto ponitur, licet mala futura esse
sit verum ab aeterno veritate aeterna, non tamen fuit veritas aeterna, quia
non est verum per se, sed per accidens, male dicitur: omne enim verum et
ab aeterno, inquantum est verum, est veritas aeterna, licet res cui competit
esse scitam vere ab aeterno non sit aeterna ut divina veritas. |
La 85e proposition, que bien
que l’existence de maux futurs ait été vraie de toute éternité comme vérité
éternelle, cette vérité n’était quand même pas éternelle, car elle n’étaitt
pas vraie en soi mais par accident, est mal énoncée, car tout ce qui est
vrai et l’est de toute éternité, en tant que c’est vrai, est une vérité
éternelle, même si la chose qui se trouve à être connue comme vraie de toute
éternité ne soit pas éternelle comme la vérité divine. |
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Quaestio 86 |
Question 86 |
[70770]
De 108 articulis, q. 86 Quod vero octuagesimo
sexto ponitur, innocentem interfici non
est secundum se malum, hoc falsum est, si intelligatur interfici ab
homine, prout verba sonant; sed interfici a Deo, qui occidit et vivere facit
omnes qui vivunt et moriuntur tam innocentes quam nocentes, iustum est; nisi
forte dicatur, quod innocentes non occiduntur a Deo, quia mors est poena
peccati originalis, sicut obiiciens tangit: unde nulla instantia est de
parvulis Sodomorum. |
La 86e proposition, qu’il
n’est pas mal en soi de tuer un innocent, est fausse si on veut dire que
l’innocent est tué par un homme et si on la prend au sens strict; mais s’il
est tué par Dieu, qui fait mourir et fait vivre tous ceux qui vivent et qui
meurent, innocents comme coupables, cela est juste, à moins peut-être que
l’on ne dise que Dieu ne tue pas les innocents, puisque la mort est la peine
du péché originel, comme le mentionne le critique; il ne sert donc à rien
d’invoquer le cas des petits enfants de Sodome. |
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Quaestio 87 |
Question 87 |
[70771]
De 108 articulis, q. 87 Quod vero octuagesimo
septimo ponitur, ad conformitatem
voluntatis divinae in actu non tenetur quis nisi habita caritate, falsum
est: quia quilibet tenetur habere rectum cor; quod non potest esse nisi sit
Deo conforme. |
La 87e proposition, qu’on
n’est pas tenu d’être conforme en acte à la volonté divine, à moins d’avoir
la charité, est fausse, car tout être humain est tenu d’avoir le cœur
droit, et il ne peut pas être droit sans être conformé à Dieu. |
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Quaestio 88 |
Question 88 |
[70772]
De 108 articulis, q. 88 Quod vero octuagesimo
octavo ponitur, qui actu cogitat
articulos, tenetur credere |
La 88e
proposition, que qui réfléchit en acte
aux articles de foi est tenu de les croire, |
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Quaestio 89 |
Qestions 89 |
[70773]
De 108 articulis, q. 89 et quod octuagesimo nono
ponitur, qui actu cogitat divinam
bonitatem, tenetur diligere, falsum est, si universaliter intelligatur:
non enim peccat quicumque cogitans articulos fidei non movetur actu fidei, et
quicumque cogitans Dei bonitatem non movetur actu caritatis, quia aliquando
speculative tantum potest aliquis considerare, ut in disputationibus accidit;
et tamen non movetur aliquo actu voluntatis ad id quod speculatur. |
et la 89e proposition, que qui pense en acte à la bonté de Dieu est tenu de l’aimer, sont
fausses si on les prend au sens universel; en effet, on ne pèche pas chaque
fois qu’on pense aux articles de la foi sans être poussé à un acte de foi, ou
chaque fois qu’on pense à la bonté de Dieu sans être poussé à un acte de
charité, car il arrive qu’on puisse penser à quelque chose de façon purement
spéculative, comme c’est le cas dans les discussions scolaires, sans qu’on
soit poussé à un acte de volonté vers ce qu’on étudie. |
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Quaestio 90 |
Question 90 |
[70774]
De 108 articulis, q. 90 Quod nonagesimo ponitur, voluntatem nostram conformare voluntati
divinae non tenemur in eo quod ignotum est, universaliter verum est in
his quae ignorare possumus absque peccato; unde cessat calumnia obiicientis. |
La 90e proposition, que nous
ne sommes pas tenus de conformer notre volonté à la volonté divine quant à ce
qui nous est inconnu, est universellement vraie pour les choses que nous
pouvons ingorer sans péché; donc, l’objection du critique tombe. |
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Quaestio 91 |
Question 91 |
[70775] De 108 articulis, q. 91 Quod vero nonagesimo primo ponitur, modus productionis alicuius ex aliquo triplex est: de sua natura, aut
de aliena, aut de nulla, improprie dicitur: quia productio alicuius de
nulla natura, non est productio alicuius de aliquo; nisi aliquid accipiatur
valde communiter, secundum quod etiam nihil dicitur aliquid, et non ens
dicitur ens, ut philosophus dicit. |
La 91e
proposition, qu’il existe trois
manières de production d’une chose à partir d’une autre : de sa nature,
d’une nature étrangère ou d’aucune nature, est formulée de façon
impropre, car la production d’une chose à partir d’aucune nature n’est pas la
production d’une chose à partir d’une autre, à moins qu'on ne prenne
« chose » dans un sens si général que même « rien » est
appelé quelque chose et que le non-être est appelé être, comme le dit le
Philosophe. |
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Quaestio 92 |
Question 92 |
[70776]
De 108 articulis, q. 92 Quod vero nonagesimo
secundo ponitur, mutatio accipitur stricte et proprie, quae habet duo
extrema, a quorum uno tendit in alterum manente eodem subiecto, et sic
accipitur mutatio naturaliter, bene dictum est, si per extrema intelligat terminos,
et per hoc quod dicitur naturaliter intelligatur, idest in scientia naturali:
hoc enim quod hic dicitur, commune est tam mutationi naturali quam violentae.
Nec est instantia quam ponit obiiciens, quod in generatione et corruptione
non sunt duo extrema, sed termini generationis et corruptionis sunt privatio
et forma, non autem duae formae. |
La 92e
proposition, que le changement est pris
au sens strict et propre quand il a deux extrêmes et tend de l’un vers
l’autre et que le sujet demeure le même, et alors le mot
« changement » est pris dans son sens naturel, est correcte si
par extrêmes on entend les termes
et si, par son sens naturel, on
veut dire « selon la science de la nature »; en effet, le présent
énoncé s’applique à la fois au changement naturel et au changement par
violence. Et peu importe l’objection soulevée par le critique quand il fait
valoir qu’il n’y a pas deux extrêmes dans la génération et la corruption mais
que les termes de ceux-ci sont la privation et la forme et non deux formes. |
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Quaestio 93 |
Question 93 |
[70777] De 108 articulis, q. 93 Quod vero nonagesimo tertio ponitur, in relationibus quae sunt secundum intellectum non est inconveniens
abire in infinitum, omnino verum est secundum potentiam; sed secundum
actum non contingit esse relationes infinitas in intellectu nostro: possum
enim intelligere relationem ad subiectum, et relationem ipsius relationis, et
sic in infinitum. |
La 93e
proposition, que dans les relations qui
existent dans l’intelligence, il n’est pas absurde d’aller à l’infini, est
absolument vraie en puissance; mais en acte, il ne peut pas y avoir une
chaîne infinie de relations dans notre intelligence. En effet, nous pouvons
comprendre la relation au sujet, la relation de cette relation, et ainsi de
suite indéfiniment. |
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Quaestio 94 |
Question 94 |
[70778] De 108 articulis, q. 94 Quod vero nonagesimo quarto dicitur, fieri est passio, cum habeat materia suum subiectum; sed creatio
relatio tantum est, et non passio, verum est, si fieri et passio
accipiantur sicut in scientia naturali: passio enim est alicuius subiecti
patientis, et fieri naturale ex subiecto; creatio autem alio modo dicitur
fieri et passio. |
La 94e
proposition, que le devenir est un
subir, puisque la matière en est le sujet, mais la création est seulement une
relation et non un subir, est vraie si on entend devenir et subir comme
on le fait dans la science de la nature. En effet, le subir affecte un sujet
qui subit, et le devenir naturel appartient au sujet; mais la création est
appelée devenir et subir en un sens différent. |
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Quaestio 95 |
Question 95 |
[70779] De 108 articulis, q. 95 Quod vero nonagesimo quinto ponitur, creatio passio in creatura est, et est accidens eius, et posterius ea
naturaliter secundum rem, verum est, quod creatio secundum rem nihil ponit
in creato nisi relationem tantum, a quo habet esse, quae est quoddam
accidens: et haec quidem relatio quantum ad aliud esse quod habet in
subiecto, accidens quoddam est et posterius subiecto; sed inquantum est
terminus actionis divinae creantis habet quandam rationem prioritatis. |
La 95e
proposition, que la création est un
subir dans la créature, est un accident de celle-ci et lui est naturellement
postérieure dans la réalité, est vraie, car la création, dans la réalité,
n’ajoute rien à l’objet créé, sinon une relation d’où elle tient son être, ce
qui est un genre d’accident; et cette relation quant à l’autre être qu’elle a
dans le sujet, est un accident et est postérieure au sujet; mais en tant
qu’elle est le terme de l’action créatrice de Dieu, elle est antérieure sous
un certain aspect. |
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Quaestio 96 |
Question 96 |
[70780] De 108 articulis, q. 96 Quod vero nonagesimo sexto ponitur, per generationem non possunt fieri nisi quae habent ante se simile
suae speciei, non est verum in qualibet generatione, sed solum in
generatione univoca. |
La 96e
proposition, que seuls peuvent venir à
l’être par génération les êtres qui sont précédés par d’autres êtres de même
espèce, n’est pas vraie pour toute génération, mais seulement pour la génération
univoque*. |
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Quaestio 97 |
Question 97 |
[70781] De 108 articulis, q. 97 Quod vero nonagesimo septimo ponitur, opinio Moysi fuit quod mundus non esset aeternus, non satis
reverenter dictum est, nisi forte dicatur per comparationem ad opiniones
aliorum: ut si diceretur, opinio Aristotelis talis fuit, sed opinio Moysi
talis, ad designandum excellentiam huius super alios. |
La 97e
proposition, que selon l’opinion de
Moïse, le monde n’était pas éternel, ne montre pas assez de révérence, à
moins peut-être u’elle ne soit formulée par comparaison avec les opinions des
autres, comme si on disait qu’Aristote a eu telle opinion et Moïse telle
autre opinion, pour montrer la supériorité de cette dernière par rapport aux
autres. |
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Quaestio 98 |
Question 98 |
[70782] De 108 articulis, q. 98 Quod vero nonagesimo octavo ponitur, sol qui est agens improportionatus effectum communem in inferioribus
facit, non est verum si simpliciter accipiatur, sed solum secundum nos:
sicut dicitur quod terra per comparationem ad primum caelum obtinet locum
coniuncti, et non habet proportionem ad ipsum, scilicet secundum aspectum
nostrum. |
La 98e
proposition, que le soleil, qui est un
agent sans commune mesure, produit un effet général dans les êtres
inférieurs, n’est pas vraie si on la prend telle quelle, mais elle est
vraie seulement de notre point de vue, de la façon qu’on dit que la terre,
comparativement au premier ciel, atteint le lieu d’union* et est sans
proportion avec lui, du moins selon notre point de vue. |
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Quaestio 99 |
Question 99 |
[70783] De 108 articulis, q. 99 Quod vero nonagesimo nono ponitur, creatura
consequitur bonitatem creatoris non in seipsa, sed in participativa
similitudine, verum est: loquitur enim de creatura quantum ad esse, non
quantum ad operationem, qua creatura rationalis fruitur ipso Deo; et sic
cessat obiectio. |
La 99e proposition,
que la créature possède la bonté du
créateur, non par elle-même, mais par une ressemblance de participation, est
vraie; on parle en effet de la créature quant à son être, non quant à
l’opération par laquelle la créature raisonnable jouit de Dieu lui-même; et
ainsi l’objection tombe. |
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Quaestio 100 |
Question 100 |
[70784] De 108 articulis, q. 100 Quod vero centesimo ponitur, res dicuntur creaturae in principio
temporis quod mensurat primi mobilis motum, non sicut in mensurante
creationem, sed sicut in adiacente, verum est si intelligatur, sicut in
adiacente, idest simul existente; non autem si intelligatur, sicut in
adiacente, idest inhaerente accidentaliter. |
La 100e
proposition, que les choses sont
appelées créatures au début du temps que mesure le mouvement du premier
mobile, non en tant qu’il mesure la création, mais en tant qu’il y est associé,
est vraie si on comprend en tant
qu’il y est associé au sens d’existant en même temps, mais non au sens où
il serait présent en elle accidentellement. |
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Quaestio 101 |
Question 101 |
[70785] De 108 articulis, q. 101 Quod vero centesimo primo ponitur, infinitum
actu nihil praeter Deum esse potest, sed infinitum actu pro aliqua conditione
infinitatis potest esse. Illud autem infinitum actu est secundum quid, et non
simpliciter, quia a parte post, non a parte ante. Hoc dictum est quia si
habet successionem, tunc non est totum in actu; si non habet successionem,
tunc non est infinitum, sed quoddam simpliciter indefectibile. |
La 101e
proposition est que rien d’autre que
Dieu ne peut être infini en acte, mais il peut y avoir quelque chose d’infini
en acte sous un certain aspect. Mais cet infini en acte est relatif, et non
absolu, car il s’applique à l’après et non à l’avant. La raison de cet
énoncé est que, s’il y a succession dans une chose, elle n’est pas
entièrement en acte; s’il n’y a pas succession, la chose n’est pas infinie,
mais elle est totalement indestructible. |
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Quaestio 102 |
Question 102 |
[70786] De 108 articulis, q. 102 Quod vero centesimo secundo ponitur, in aevo secundum se non est fuisse neque futurum esse, verum est;
sed aevum non mensurat operationes Angeli quae sunt successivae, sed solum
esse ipsius quod est uniforme; et sic cessat obiectio de Deo, qui non novit
fuisse nec futurum esse, neque secundum esse, neque secundum operationem, et
de confirmatione vel culpa Angeli quae pertinent ad operationes. |
La 102e
proposition, que dans les siècles
éternels, il n’y a pas de passé ni de futur en soi, est vraie; toutefois,
les siècles éternels ne mesurent pas les opérations des anges, qui sont
successives, mais seulement leur être, qui est constant. Cela détruit
l’objection au sujet de Dieu, qui n’est affecté par le passé ou l’avenir ni
dans son être, ni dans son opération, et au sujet de la confirmation de la
béatitude des anges ou de leur faute, qui relèvent de leurs opérations. |
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Quaestio 103 |
Question 103 |
[70787] De 108 articulis, q. 103 Quod vero centesimo tertio ponitur, nihil ens unum potest esse in diversis, sed aliquod unum ens in
potentia, sic intelligendum est: nihil ens actu creatum potest esse in
diversis naturaliter; non enim haec est falsa: caecus non potest videre,
licet Deus miraculose posset ei dare visum; et sic cessant obiectiones. Materia autem prima una existens in se
considerata non per unitatem formae, sed per carentiam omnis formae est in
potentia ad hoc quod sit in diversis, licet secundum quod est in diversis non
sit una, sed multiplex. |
La 103e
proposition, qu’aucun être ne peut être
un dans des états opposés, mais il peut être un objet unique en puissance, doit
être comprise ainsi : aucun être créé en acte ne peut être naturellement
dans des choses opposée; en effet, il n’est pas faux de dire que l’aveugle ne
peut pas voir, même si Dieu peut lui donner miraculeusement la vue; et ainsi
l’objection tombe. Or, la matière première, qui est une si on la considère en
soi non dans l’unité de la forme, mais en l’absence de toute forme, est en
puissance à se trouver dans des contraires, même si, en tant qu’elle est dans
des contraires, elle n’est pas une mais multiple. |
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Quaestio 104 |
Question 104 |
[70788] De 108 articulis, q. 104 Quod vero centesimo quarto ponitur, materia secundum essentiam una est multiplicata in singulis, improprie
dictum est; proprie autem diceretur, materia secundum essentiam una, est
multiplicata in singulis, vel magis in singula. |
La 104e
proposition, que la matière, une par
son essence, est multipliée dans les singuliers, est mal énoncée; il
serait correct de dire que la matière, une par son essence, est multipliée
dans les singuliers, ou l’est davantage dans les singuliers. |
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Quaestio 105 |
Question 105 |
[70789] De 108 articulis, q. 105 Quod vero centesimo quinto ponitur, infinitum simplex potest agere multa, finitum simplex nonnisi unum,
verum est si bene intelligatur, ut scilicet accipiatur unum in genere vel
specie, secundum quod exigit virtus simplex; ut si diceretur, quod auditus
non potest cognoscere nisi unum, scilicet sonum. |
La 105e
proposition, que l’infini simple peut
faire beaucoup de choses; le fini simple ne peut en faire qu’une, est
vraie si elle est bien comprise, de sorte que l’un dans le genre ou l’espèce
est pris en tant qu’il exige une puissance simple, comme si on dit que l’ouïe
ne peut connaître qu’une chose, qui est le son. |
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Quaestio 106 |
Question 106 |
[70790] De 108 articulis, q. 106 Quod vero centesimo sexto ponitur, quamvis
in creatione animae nova materia secundum esse creetur; tamen per essentiam
materiae praeexistenti unitur et coniungitur, sicut punctus puncto, nec
bene nec intelligibiliter dicitur. |
La 106e
proposition, que même si, dans la
création de l’âme, une nouvelle matière est créée selon l’être, elle est
pourtant unie et jointe par essence à une matière préexistante comme un point
est joint à un point, n’est formulée ni correctement ni de façon
intelligible. |
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Quaestio 107 |
Question 107 |
[70791] De 108 articulis, q. 107 Quod vero centesimo septimo ponitur, duplex est potentia: quaedam determinata quae agit per modum naturae;
quaedam indeterminata, quae agit per modum voluntatis; penes primum accipitur
triplex potentia imaginis; penes secundum libertas arbitrii, non bene
dictum est: quia quae ad liberum arbitrium pertinent, etiam ad voluntatem
pertinent quae est pars imaginis. |
La 107e
proposition, qu’il y a deux sortes de
puissance : la puissance déterminée, qui agit suivant la nature, et la
puissance indéterminée, qui agit suivant la volonté. À la première se
rattache la triple puissance d’imagination; à la seconde, le libre arbitre, est
incorrecte, car ce qui appartient au libre arbitre appartient également à la
volonté, qui est une partie de l'imagination. |
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Quaestio 108 |
Question 108 |
[70792] De 108 articulis, q. 108 Quod vero centesimo octavo ponitur, animae individuantur per
individuationem et materias corporum, quamvis ab eis separatae retineant
individuationem, sicut cera in impressione sigilli, potest et bene et male
intelligi: si enim intelligatur quod animae individuentur per corpora, quasi
corpora sint causa totalis individuationis animarum, falsum est; si vero
intelligatur esse aliqualiter corpora causa individuationis animarum, verum
est: unumquodque enim secundum quod habet esse, habet unitatem et
individuationem. Sicut igitur corpus non est tota causa animae, sed anima
secundum suam rationem aliquem ordinem ad corpus habet, cum de ratione animae
sit, quod sit unibilis corpori, ita corpus non est tota causa individuationis
huius animae; sed de ratione huius animae est quod sit unibilis huic corpori,
et haec remanet in anima etiam corpore destructo. |
La 108e
proposition, que les âmes sont
individualisées par leur identité propre et par la matière de leurs corps;
cependant, séparées de leurs corps, elles gardent leur identité propre comme
la cire garde l’impression du sceau, peut être bien ou mal comprise. Si
en effet on comprend que les âmes sont individualisées par les corps, comme
si les corps étaient l’unique cause d’individualisation des âmes, cela est
faux; mais si on comprend que les corps sont cause d’individualisation des
âmes de quelque façon, cela est vrai, car toute chose, en tant qu’elle
possède l’être, est une et a son identité propre. De même donc que le corps
n’est pas l’unique cause de l’âme, mais que l’âme, de par sa nature, est
ordonnée de quelque façon au corps, puisqu’elle y est unissable par nature,
de même le corps n’est pas l’unique cause d’individualisation de cette âme;
mais il appartient à la nature d’une âme donnée d’être unissable à un corps
donné, et de continuer d’y être unissable même après la destruction du corps. |
NOTES
« qui est creaturarum causa effectiva aequivoca » (q. 1) :
voir Vivian Boland, Ideas in God
according to Saint Thomas Aquinas : sources and synthesis. Dieu,
n’appartenant à aucun genre, ne peut être appelé cause efficiente que de façon
équivoque (ou analogique).
«
Suppositum » (q. 9) : R. Garrigou-Lagrange (1877-1964) traduit ce mot par «
sujet réel » dans l’article « L’unique personnalité du Christ »,
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Garrigou_Lagrange/Table.html
« generans vel spirans » (q. 21) : de même que la
génération est l’acte du Père engendrant le Fils, de même la
« spiration » est l’acte par lequel le Père et le Fils engendrent le
Saint-Esprit.
« ut quo » (q. 21) : expression rare et difficile,
parfois opposée à « ut quod », par exemple : « Ad quartum dicendum, quod hoc nomen Deus non praedicat naturam divinam
solum per modum formae, sicut alia praedicata substantialia, prout significatur
natura divina ut quo est, sed ut rem subsistentem, prout significatur ut quod
est; et secundum hoc potest ei addi solus. » (Sent. I, d. 21, q. 2, a. 1
ad 4.)
« novum influxum » (q. 38) : la
même affirmation est discutée et déclarée fausse dans le Commentaire des
Sentences (Sent. I, d. 17, q. 2, a. 2, ad 2). Le cas discuté à cet endroit est
celui de la charité, qui ne s’accroît pas par addition, mais par augmentation
d’intensité. Le « novum influxum » est donc un genre d’addition,
quelque chose qui vient de l’extérieur et modifie les puissances de l’âme.
« actus existendi » (q. 47) :
cette expression n’est jamais employée par saint Thomas lui-même. On en trouve
une discussion à la fin d’un chapitre consacré à Pierre de Tarentaise, dans Théologie négative et noms divins chez saint
Thomas d’Aquin, par Thierry-Dominique Humbrecht, p. 333-334, en ligne à
« eadem specie » (q. 54) : il ne
s’agit pas de l’espèce par opposition au genre, mais de l’espèce intelligible,
au sens où ce mot est utilisé dans le traité de la connaissance.
« propter
articulum quem habet pronomen inclusum » (q. 56) : le pronom est sans
doute idem, mais quant au reste, je
comprends mal ce que je traduis. J’aimerais avoir une seconde opinion.
« prout enim differunt » (q. 76) : il semble manquer
quelque chose au texte latin.
« non est ex nihilo » (q. 80) :
erreur manifeste du texte latin, réparée deux lignes plus loin par les mots
« esse ex nihilo » (sans le « non »). Je traduis l’erreur
telle qu’elle est. D’ailleurs, Pierre de Tarentaise, futur pape, n’a pas pu
écrire une chose contraire à une vérité si élémentaire de la foi.
« de condigno » et « de
congruo » (q. 83) : traductions trouvées dans un recueil de la
correspondance du cardinal Journet et de Jacques Maritain, vol. IV, p. 834, à
« De condigno » veut dire « par participation à la
dignité des mérites du Christ ».
« generatione univoca » (q.
96) : génération produite par l’acte sexuel, où l’animal produit un animal
de même espèce. Saint Thomas exclut ainsi la génération spontanée, à laquelle
on croyait à l’époque dans le cas d’animaux inférieurs comme certains insectes
qui semblaient apparaître spontanément dans la terre ou les détritus.
« obtinet locum coniuncti » (q.
98) : je comprends mal et j’aimerais avoir une autre opinion.