ANALYSE.
1. C'est le propre de Dieu de consoler ceux qui sont dans
l'affliction.
2. Que la providence de Dieu est immense comme lui.
1. Plus haut, dans le psaume cent quarante-quatre, le Psalmiste dit : « Le Seigneur est grand et infiniment digne de louanges (Ps. CXLIV, 3), » et il s'étend sur sa gloire. Ici, maintenant, il montre que c'est un bien même de le louer et que la louange produit des biens sans nombre. En effet, elle éloigne la pensée de la terre, elle redresse l'âme et l'élève, elle rend l'âme moins pesante, elle transporte l'esprit dans le ciel. Aussi Paul disait : « Chantant et psalmodiant du fond de vos coeurs à la gloire du Seigneur. » (Eph. V, 19.) « Que la louange que l'on donne à notre Dieu, lui soit agréable ! » Un autre texte : « Alleluia ! car c'est un bien que le chant qui s'élève à Dieu. » Que signifie : « Que la louange que l'on donne à notre Dieu, lui soit agréable?» Cela veut dire, qu'elle soit acceptée de lui. En effet, il ne suffit pas de chanter pour que la louange soit agréable à Dieu, il faut joindre aux chants la conduite, la prière, l'attention de l'esprit. Pour moi, je crois que ce psaume a (293) pour sujet le retour des Juifs. Le Psalmiste le montre par ce qu'il ajoute en disant : « C'est le Seigneur qui bâtit Jérusalem et qui ressemblera tous les enfants d'Israël qui sont dispersés (2). » En effet, quoique ce soit Cyrus qui les ait renvoyés, ce n'est pas la volonté de Cyrus, c'est le pouvoir de Dieu qui seul a tout fait. Un autre interprète, au lieu de : « Qui bâtit, » dit : « Qui bâtira. » Quant à : « Tous les enfants d'Israël qui sont dispersés, » il remplace cette expression par « Expulsés. » Pourquoi ? C'est que tous n'ont pas été ramenés en même temps, mais, après le retour, peu à peu ils ont été réunis.
« Qui guérit ceux dont le coeur est brisé « et qui bande leurs plaies ( 3). » Un autre « texte : Leurs fractures. » Il ne fonde pas sa confiance sur sa conduite; il parle encore de son malheur, et il rappelle la conduite ordinaire de Dieu. C'est en effet l'oeuvre de Dieu, de consoler ceux qui sont abattus. De même, quand Paul disait: « Qui vivifie les morts; » et encore : « Qui appelle ce qui n'est point, comme ce qui est (Rom. IV, 47), » il racontait l'oeuvre ordinaire du Seigneur. De même ici encore : « Qui guérit ceux dont le coeur est brisé , » c'est pour montrer que, quelle que soit notre indignité, nous sommes l'ouvrage de Dieu, qui n'abandonnera pas ce qu'il a fait; Dieu ne se départira pas de son habitude. C'est encore ainsi que Paul disait: «Mais Celui qui console les humbles, nous a consolés. » (II Cor. VII, 6.) Autre texte : « Celui qui donne la patience à ceux qui ont l'esprit humble. » (Isaïe, LVII, 15.) Mais voyez le Psalmiste lui-même dans un autre passage : « Dieu ne méprisera pas un coeur contrit et humilié. » (Ps. L, 19.) Si vous voulez être consolés , rendez-vous humbles, faites-vous un coeur contrit. Donc il est question jusqu'ici de la volonté de Dieu, de sa bonté et de sa clémence; il est bien entendu que c'est son oeuvre propre que de consoler les malheureux. Pour ce qui suit, il s'agit de la puissance : « Qui compte les multitudes des étoiles (4), » c'est-à-dire qui les connaît. En effet, comme il s'agissait d'une multitude dispersée, et qui alors n'apparaissait nulle part, il était convenable de produire cet exemple pour montrer que Dieu peut rassembler, même ce qui est le plus dispersé. Il redresse, il console les coeurs contrits et il connaît exactement les multitudes innombrables des astres. Donc nous aussi, qui devons, selon ses promesses, égaler les astres en nombre, il nous ramènera tous. « Qui les appelle toutes par leurs noms. » Un autre texte « Appelant tous par leurs noms. » Un autre, texte: « Il les appellera, eux tous, par leurs noms. » Je pense que ceci s'applique aux Israélites, et que le Prophète exprime la même pensée qu'Isaïe plus tard : « Ne craignez point, Israël, je vous ai appelé des extrémités de la terre, et j'ai dit: Vous êtes mon fils. » (Isaïe XLI, 9. ) Que signifie, « Il les appellera eux tous par leurs noms? » Aucun d'eux , dit-il, ne périra ; comme ceux qui appellent en prononçant les noms , ainsi fera Dieu , qui les ramènera tous. « Notre Seigneur est vraiment grand, et sa vertu est grande (5). » Comme il vient d'énoncer une très-grande merveille, que Dieu réunira tant de milliers d'hommes dispersés par toute la terre, il parle ensuite de sa puissance, afin d'amener à la foi les Juifs profondément troublés. « Et sa sagesse n'a point de bornes. » Ne demandez pas comment, ni par quel moyen, car sa grandeur est infinie. Voilà pourquoi le Psalmiste dit ailleurs: « Et sa grandeur n'a point de bornes. » (Ps. CXLIV, 3. ) mais de même que sa grandeur est infinie, ainsi encore sa sagesse. Et voilà pourquoi, après avoir dit: « Notre Seigneur est grand, » il ajoute, « et sa sagesse n'a point de bornes, » bien plus sa science est admirable. Voilà pourquoi il disait: « Votre science est élevée d'une manière merveilleuse au-dessus de moi, elle me surpasse infiniment et je ne pourrai jamais y atteindre. » (Ps. CXXXVIII, 6, ) Et maintenant ses jugements ne peuvent être scrutés, voilà pourquoi il disait: « Vos jugements sont un abîme très-profond. » ( Ps. XXXV, 7.)
2. Donc, puisque telle est sa grandeur, sa puissance, sa sagesse, bannissez l'indiscrétion qui demande comment cela arrivera-t-il. « Le Seigneur prend dans ses bras ceux qui sont doux, mais il abaisse les pécheurs jusqu'en terre (6). » Les insensés auraient pu dire Que nous importe sa connaissance parfaite de tous les astres? C'est pour les prévenir que le Psalmiste ajoute donc le soin que Dieu prend des hommes. Et maintenant, il ne dit pas : le Seigneur porte secours à ceux qui sont doux, mais, ce qui est bien plus expressif : « Prend dans ses bras, » comme s'il parlait d'un bon père. Que signifie maintenant : « Prend dans ses bras ? » ranime, porte, transporte. (294) Voyez-vous encore ici la plénitude de sa puissance, qui s'exerce de deux manières , c'est-à-dire qui élève les humbles, et qui abaisse les arrogants? et non-seulement il les abaisse , mais il les abaisse profondément, ce que marque cette expression, « jusqu'en terre.» « Chantez les louanges du Seigneur en le confessant (7). » Autre texte : « Enumérez. » Donc, après avoir dit les merveilles de Dieu, il invite de nouveau à le célébrer. « Chantez les louanges du Seigneur, en le confessant, » c'est-à-dire, en lui rendant des actions de grâce avec un grand zèle. « Publiez avec la harpe la gloire de notre Dieu. » Un autre texte : « Avec la lyre. C'est lui qui couvre le ciel de nuées et qui prépare la pluie pour la terre (8), » De peur qu'un être dépourvu de sentiment n'aille dire ici : Et que me font à moi les choses célestes ? le Psalmiste s'est empressé d'ajouter ce qui concerne les besoins de l'homme ; il montre tout de suite pourquoi Dieu couvre le ciel de nuées. C'est pour toi, dit-il, pour te préparer la pluie; et la pluie c'est pour toi, pour faire pousser les herbes à ton usage. Et maintenant, voyez la sagesse du Psalmiste ! Il a dit les biens accordés à tous en général et dont l'abondance est faite pour fermer la bouche à l'impie. Car si telle est la munificence de Dieu pour les infidèles, s'il rassemble pour eux les nuées, s'il verse la pluie, s'il active la fertilité de la terre; à bien plus forte raison fera-t-il de même pour vous qui vous appelez son peuple.
« Qui produit l'herbe sur les montagnes. » Voyez la grandeur de la Providence ! Ce n'est pas seulement dans les terres labourées, mais sur les montagnes, que la table est richement servie pour les bêtes de somme, qui ont été créées, afin de nous servir. Et le Psalmiste ajoute : « Qui donne aux bêtes la nourriture qui leur est propre et nourrit les petits des corbeaux qui invoquent son secours (9). » Il exprime ici un autre caractère de cette munificence, qui ne nourrit pas seulement les bêtes de somme au service de l'homme, mais de plus les autres animaux. « Les petits des corbeaux, » dit-il, « qui invoquent son secours. » Eh bien ! si les bêtes, les bêtes sauvages, celles qui rendent le moins de services à l'homme, sont l'objet d'une si grande. providence, à combien plus forte raison, cette providence s'occupera-t-elle des hommes , des hommes qui la célèbrent par des hymnes et des cantiques de louanges ! Ajoutez encore des hommes que Dieu a appelés son peuple particulier et sa portion. Ce n'est pas tout, les Israélites étaient faibles, sans armes, dépouillés de tout; pour prévenir le trouble de leurs esprits, voyez le Psalmiste, quel soin il prend de corriger leur faiblesse; écoutez ses paroles: « Il n'aime point qu'on se fie à la force du cheval, ni que l'homme s'assure sur la force de ses jambes. Le Seigneur met son plaisir en ceux qui le craignent et en ceux qui espèrent en sa miséricorde (10, 11). » Un autre texte : « Qui attendent sa miséricorde. » Si telles sont, dit-il, vos dispositions, la crainte, la parfaite espérance en lui, vous vous attirerez sa bienveillance, et, quand vous l'aurez conquise, vous serez plus forts que tous ceux qui ont des chevaux et des armes. On ne demande donc de vous qu'une seule chose. Ne vous plaignez pas, ne vous troublez pas, mais attendez sa miséricorde. Car voilà surtout ce qui constitue l'espérance , attendre ce qu'on ne reçoit pas aussitôt , attendre avec confiance sans jamais se décourager. Et le Psalmiste a raison de dire : « En sa miséricorde, » car les Israélites ne pouvaient pas se fier en leurs couvres; et pourtant, dit-il, quoique les événements nous aient trahis, espérez en sa miséricorde, vous obtiendrez les effets de sa providence et son secours. Puissions-nous tous les ressentir, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartiennent la gloire et la puissance, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.