HOMÉLIE LI

CINQUANTE-UNIÈME HOMÉLIE. « Cependant il arriva une famine en ce pays-là, comme il en était arrivé au temps d'Abraham. » (Gen. XXVI, 1)

 

ANALYSE.

 

1. Commentaire des versets 1-3. Du 26e chapitre de l'imposition des noms propres. — 2. Commentaire des versets 4-11. Dieu, dans ses communications avec nous, a plus égard à notre infirmité qu'à sa dignité. — 3. Exhortation.

 

 

 

1. Nos dernières paroles serviront encore de point de départ à notre enseignement d'aujourd'hui. Mais pour que vous sachiez bien où s'est terminé notre dernier entretien , où doit commencer l'entretien de ce jour, il importe, mes bien-aimés, de vous rappeler ce qui a été dit précédemment. Peut-être avez-vous , dans le grand nombre de pensées qui viennent vous distraire, oublié ce que vous avez entendu. Mais mon devoir est de secourir votre mémoire, afin que le discours d'aujourd'hui soit plus clair pour tout le monde. Vous savez que dernièrement nous vous avons raconté la pieuse histoire de Rébecca; de là nous sommes arrivés à Esaü et à Jacob, et vous avez vu le droit d'aînesse, vendu à Jacob par Esaü, qui avait faim. A son désir de manger, il a sacrifié sa prérogative. Or, ces faits ne se sont pas accomplis au hasard, mais pour réaliser la prophétie qui disait : J'ai chéri Jacob, j'ai détesté Esaü. (Malachie, I, 2, 3.) Dieu à qui appartient la prescience, a prédit la vertu de l'un; la perversité de l'autre. Mais maintenant, que signifie ce droit d'aînesse? Le temps ne nous a pas permis dernièrement, mes bien-aimés, de tout vous dire à ce sujet, il est nécessaire de vous donner aujourd'hui une explication. Chez les anciens, c'était un très-grand honneur que le droit d'aînesse ; or, de cet honneur, voici la cause et l'origine. Quand Dieu voulut délivrer les Israélites de la domination des Egyptiens, et, selon la promesse faite au patriarche, les arracher à la tyrannie de Pharaon, le roi d'Egypte lutta contre Dieu, et voulut les retenir; le Seigneur, après différentes plaies, infligea la dernière que vous connaissez; il força presque les Egyptiens à chasser, de leurs propres mains, les Israélites. (Exode, XII.) Il ordonna de mettre à mort, à la fois, tous les premiers-nés des Egyptiens. C'était alors, dans foules les maisons, des cris de douleur et des larmes. Et tes Egyptiens ne croyaient pas que le fléau s'arrêterait là, ils pensaient que la mort, après un tel début, continuant sa course, les frapperait tous. Or, tous les premiers-nés en Egypte ayant subi en même temps la mort, les Israélites, au contraire, par la grâce divine, étant restés sans atteinte, le Dieu de toutes les créatures voulut encore faire mieux paraître sa bienveillance envers son peuple, et il commanda que, désormais, à cause de l'extermination des premiers-nés de l'Egypte, les premiers-nés parmi les enfants du peuple juif lui fussent offerts. De là la distinction qui a destiné la tribu de Lévi au sacerdoce, et de là, l'usage d'offrir à Dieu les premiers-nés, non. seulement parmi les hommes, mais encore parmi les animaux, et les prémices de toutes choses en général. Il était en outre ordonné de payer une somme d'argent, pour les hommes (339) et pour les animaux immondes. Sans doute, cette législation, concernant les premiers-nés, est postérieure; cependant, même dans les temps anciens , on voit un privilège attaché à ceux qui sortaient les premiers des flancs maternels. C'est donc cette prérogative naturelle qu'Esaü possédait, qu'il a, dans son intempérance, transportée à son frère. Et, tandis que l'un a perdu ce qu'il tenait de la nature, l'autre a gagné ce que la nature lui avait refusé. et comme ces événements avaient été d'avance prédits par un oracle, Rébecca donna à son fils chéri le nom de Jacob, ce que vous pouvez expliquer par action de supplanter. C'est ainsi qu'Esaü se lamentant, après la bénédiction soustraite à son père, disait : C'est avec raison qu'il a été appelé Jacob, car voici la seconde fois qu'il m'a supplanté ; il m'a enlevé mon droit d'aînesse, et maintenant il m'enlève la bénédiction qui m'était due. (Gen. XXVII, 36.)

Voyez combien grande était la sagesse des anciens hommes, ou plutôt combien grande a été la sagesse de Dieu, qui a fait que les mères n'ont pas donné au hasard les premiers noms venus à leurs enfants, mais des noms qui prophétisaient l'avenir. Vous ne trouverez que rarement des fils portant le même nom que leur père; peut-être n'en trouverez-vous nulle part, dans l'Écriture ; mais soit qu'une mère , soit qu'un père donnât un nom à son fils, c'était une appellation singulière, étrange. qui, par avance, signifiait quelques événements à venir. C'est ainsi que Lamech appela son fils Noé, en disant : Celui-ci nous fera reposer. (Gen. V, 29.) Et de même, si vous examinez les noms un à un, vous trouverez absolument dans tous un sens particulier. Ce n'est pas ce que nous voyons aujourd'hui, que les parents donnent sans réflexion, et par hasard, les noms qui se présentent. Autrefois , on se proposait d'attacher un souvenir durable aux noms de ses enfants. Mais laissons cela, et voyons maintenant, après cette mutation du droit d'aînesse,ce que le bienheureux Moïse nous raconte du père de cette famille. Nous avons déjà vu dans l'histoire du patriarche Abraham, et nous lisons de même, à propos d'Isaac, qu'une, grande famine étant survenue, il fut entouré de toute la sollicitude du Seigneur, qui le récompensait de sa propre vertu, et remplissait la promesse faite à son père. Cependant il arriva une famine en ce pays-là, comme il en était arrivé une au temps d'Abraham. C'est pour que vous ne confondiez pas la nouvelle famine avec l'ancienne, que le texte ajoute: Comme il en était arrivé une au temps d'Abraham; manière de dire, une autre famine, semblable à l'ancienne, arriva, une seconde fois, en ce pays-là, au temps d'Isaac, comme il en était arrivé une au temps de son père. Le manque des aliments nécessaires les jetait tous dans une grande angoisse, et les forçait de quitter leur pays pour chercher à l'étranger les aliments dont ils avaient besoin. D'où il suit que, voyant cette famine, ce juste s'en alla, dit le texte, auprès d'Abimélech à Gérara ; c'était            là qu'Abraham était allé, après son retour d'Égypte. Il est vraisemblable qu'Isaac s'y rendit parce qu'il voulait, de là, passer en Egypte. Et ce qui le prouve, c'est l'Écriture: Car le Seigneur lui avait apparu, dit le texte, et Dieu lui avait dit : N'allez point en Egypte. (Ibid. 2.) Je ne veux pas, dit le texte,. que vous fassiez ce long voyage; mais je veux que vous restiez ici, je ne veux pas que vous soyez dans les angoisses, mais j'accomplirai les promesses faites, à votre père; elles recevront en vous leur accomplissement. Les promesses qui lui ont été faites, c'est vous qui les réaliserez. Ne descendez pas en Egypte; mais demeurez dans le pays que je vous montrerai ; passez-y quelque temps comme étranger.

2. Ensuite, de peur que le juste ne s'imagine que Dieu rie lui donne cet ordre que pour lui faire subir les angoisses de la famine et lui interdire le passage en Egypte , il lui dit: Ne soyez pas inquiet; n'ayez aucun souci, restez où vous êtes: Car moi, je serai avec vous. Donc, puisque vous avez pour vous celui qui fournit tous les biens quelconques, n'ayez plus souci de rien ; car moi, le Seigneur de toutes les créatures, je serai avec vous. Et ce n'est pas tout, mais, Et je vous bénirai, c'est-à-dire, je vous glorifierai, je vous donnerai la bénédiction qui vient de moi. Quelle condition plus heureuse que celle de ce juste, qui reçut de Dieu une telle promesse: Je serai avec vous et je vous bénirai. Voilà qui montrera que vous êtes le plus heureux, le plus riche de tous les hommes; voilà qui fera régner autour de vous l'abondance; voilà pour vous la plus éclatante gloire; voilà l'ineffable splendeur; voilà la sécurité parfaite; voilà le principe de tous les biens : Je suis avec vous et je vous bénis. Mais comment vous bénirai-je? A vous et à votre race, je donnerai cette terre. On vous prend (340) pour un étranger, pour un vagabond dans ces pays; eh bien ! sachez qu'à vous et à votre race toute cette terre appartiendra. Et voici pour vous donner de la confiance, apprenez que : Le serment que j'ai fait à Abraham, votre père, je l'accomplirai avec vous. Voyez la condescendance de Dieu. Il ne dit pas simplement: Le pacte que j'ai fait avec votre père, ni les promesses que je lui ai faites; mais que dit-il : Le serment que j'ai juré. J'ai confirmé ma parole, dit-il, par serment, et je suis tenu à réaliser, à accomplir le serment que j'ai fait.

Voyez la bonté de Dieu : il ne s'arrête pas, quand il nous parle, à sa propre dignité; il accommode son langage à la faiblesse de notre nature. En effet, trop souvent les hommes se font un point de conscience de tenir non pas leurs simples promesses, mais les promesses qu'ils ont faites sous la garantie du serment. De même ici, Dieu, pour inspirer à l'homme juste une pleine confiance, lui annonce que ses paroles auront leur rigoureux accomplissement. Sachez bien, dit-il, que ce que j'ai juré se réalisera. Quoi donc, dira-t-on, Dieu a juré ! Et par qui a-t-il juré? Vous voyez que son langage s'accommode à notre faiblesse; ce qu'il appelle un serment, ce n'est que la confirmation de la promesse. J'accomplirai, dit-il, le serment que j'ai juré à Abraham, votre père. Il lui montre ensuite quelles ont été ces promesses, faites sous la garantie du serment : Je multiplierai vos enfants comme les étoiles du ciel. (Ibid. 4.) C'est ce qu'il disait au patriarche dans le commencement: Vos enfants égaleront en nombre les étoiles et les grains de sable. Et je donnerai à votre postérité tous ces pays que vous voyez, et toutes les nations de la terre seront bénies dans celui qui sortira de vous. Et maintenant, voici pourquoi les promesses qui lui ont été faites se réaliseront en vous : C'est parce qu'Abraham, votre père, a entendu ma voix, qu'il a observé les commandements et les cérémonies et les lois que je lui ai donnés. (Ibid. 5.) Voyez la sagesse de Dieu, comme il réveille la pensée du juste, anime son ardeur et le dispose à suivre l'exemple de son père, car si ce père, dit-il, parce qu'il a obéi à ma voix, a été jugé digne d'une si grande promesse; si, en considération de sa vertu, je dois accomplir cette promesse en vous qui êtes sorti de lui, supposez qu'à votre tour, vous suiviez son exemple, que vous marchiez dans la même route que lui, considérez alors quelle sera ma bienveillance pour vous, de quels soins, de quelle sollicitude je vous entourerai. En effet, si la vertu d'autrui est une source de bonheur, l'homme personnellement vertueux est, bien plus encore l'objet de la Providence divine. Mais que signifient ces paroles, parce qu'il a obéi à ma voix et qu'il a observé mes commandements et mes cérémonies ? Je lui disais : Sortez de votre pays et de votre parenté, et venez en la terre que je vous montrerai. (Gen. XII, 1.) Et il a quitté ce qu'il tenait entre les mains; et il a poursuivi ce qui était invisible, sans fluctuation d'esprit, sans hésitation; plein d'un zèle ardent, il accomplissait mes ordres, et il obéissait à ma voix. Je lui ai, en outre, promis un don supérieur à la nature, et lorsque l'âge ne lui laissait plus d'espoir; lorsque ni lui ni votre mère ne pouvaient plus attendre de postérité, quand ma parole lui annonça que sa race se multiplierait, au point de remplir toute la terre, il ne s'est pas troublé, il a eu foi, et sa foi lui a été imputée à justice. Par sa foi en ma puissance, par son espérance en mes promesses, il s'est montré supérieure la faiblesse humaine. Et depuis votre naissance, quand votre mère voyait avec chagrin Ismaël, le fils de la servante; quand elle voulut le chasser avec Agar, pour qu'il n'eût rien de commun avec vous, ce patriarche, malgré sa naturelle affection, malgré l'amour paternel qu'il ressentait, n'écouta que l'ordre que je lui donnai; de faire ce que voulait Sara; il oublia sa tendresse naturelle; il chassa Ismaël, avec la servante, et toujours il a obéi à ma voix, et il a gardé mes commandements. Enfin, quand je lui ai commandé de m'offrir en sacrifice cet enfant accordé à sa vieillesse, ce fils tant chéri, il n'a cherché aucun prétexte, il n'a montré aucune curiosité indiscrète; sa pensée n'a pas été confondue; il n'a révélé, ni à votre mère, ni à ses serviteurs, ni à vous-même l'action qu'il allait faire; d'une âme forte, d'une volonté allègre, ardente, il s'est hâté d'accomplir mon commandement. Et moi, en conséquence, j'ai couronné sa volonté, sans permettre à l’oeuvre de s'accomplir. Et voilà pourquoi, parce qu'en toutes choses il m'a montré la perfection de son obéissance, son zèle à garder mes commandements, vous qui êtes né de lui, vous êtes, je le veux, l'héritier de toutes les promesses qui lui ont été faites.

3. Imitez donc l'obéissance de ce juste; ayez foi en mes paroles, pour mériter des (341) récompenses beaucoup plus belles encore, qui vous seront décernées en considération de la vertu de votre père, et pour votre propre obéissance. Et ne descendez pas en Egypte, mais demeurez ici. Avez-vous bien compris la miséricorde de Dieu; cette manière de rappeler la vertu du père, pour fortifier l'âme du fils? Isaac demeura donc à Gérara. (Ibid. 6.) Voyez, il lui arrive de courir à peu près les mêmes dangers que son père; car, comme il habitait à Gérara : Les habitants de ce pays-là lui demandant qui était Rébecca son épouse, il leur répondit: C'est ma soeur (Ibid. 7), parce qu'il avait peur que les gens de ce pays ne le missent à mort, à cause de la beauté de son épouse. De crainte, dit le texte, que les hommes de ce pays ne le fissent mourir à cause de Rébecca, parce qu'elle était belle. Il se passa ensuite beaucoup de temps, et, comme il demeurait toujours dans le même lieu, il arriva qu'Abimélech vit Isaac qui se jouait avec Rébecca sa femme, et il l'appela et lui dit : Est-ce que c'est votre femme? Pourquoi donc avez-vous dit que c'est votre soeur? (Ibid. 8, 9.) Convaincu par des preuves, le juste ne dissimule plus la vérité; il la confesse, et il explique pourquoi il l'appelait sa soeur. En effet, dit le texte, j'ai eu peur qu'on ne me fit mourir à cause d'elle. C'est la crainte de la mort qui m'a fait tenir cette conduite. Peut-être aussi avait-il appris que son père avait, pour sauver ses jours, recouru au même moyen; et il fit ce qu'avait fait son père. Mais le roi, se souvenant encore de ce que lui avait valu, au temps du patriarche, l'enlèvement de Sara, s'amende aussitôt et lui dit : Pourquoi avez-vous fait cela? peu s'en est fallu que quelqu'un de nous n'ait été reposer auprès de votre épouse, et vous nous auriez fait tomber dans l'ignorance. (Ibid. 10.) Cette ruse, dit-il, nous l'avons jadis expérimentée de la part de votre père; et aujourd'hui si nous ne nous étions arrêtés à temps, vous nous auriez fait tomber dans l’ignorance; c'est-à-dire, autrefois nous avons été sur le point de pécher par ignorance, et aujourd'hui encore, vous avez presque été cause que nous allions commettre un péché d'ignorance. Or Abimélech fit cette défense à son peuple: Tout homme qui touchera cet homme-là, ou sa femme, sera puni de mort. (Ibid. 11.) Voyez la providence de Dieu ; voyez le soin ineffable. Car celui qui avait dit : Ne descendez pas en Egypte, habitez dans cette terre, et je serai avec vous, c'était lui qui disposait tous ces événements; qui assurait au juste, une si grande sécurité. Considérez, en effet, le soin que prend le roi, pour qu'il n'ait rien à craindre, pour qu'il soit affranchi de toute inquiétude. C'est de la mort qu'il menace, dit le texte, quiconque le touchera, lui ou son épouse. En effet, c'était cette crainte, la crainte de la mort, entendez bien, qui avait ébranlé son âme; pour cette raison, le Seigneur miséricordieux l'en délivre, pour qu'il vive ensuite dans une parfaite sécurité. Et voyez quel sujet d'étonnement et d'admiration ! comment cette sagesse industrieuse tourne toutes choses à sa volonté, découvre en dehors de tout chemin frayé, la voie qui lui convient, et, dans les obstacles mêmes, dans les difficultés qui la contrarient, les circonstances de nature à procurer le salut de ses serviteurs. De là vient que ce roi montre tant d'intérêt pour l'homme juste. Il lui sert comme de héraut, devant tous ceux qui habitent le pays; il annonce sa gloire, tous les honneurs, tout le culte dont il faut l'entourer. C'est ainsi que Nabuchodonosor, après avoir jeté les trois jeunes gens dans la fournaise, après avoir éprouvé par la réalité des faits la vertu de ses prisonniers, se met à célébrer leurs louanges, et sa langue devient partout l'instrument de leur gloire. C'est par là que se manifeste, au plus haut degré, la puissance de Dieu; il fait que ses ennemis mêmes célèbrent ses serviteurs. Ce furieux qui avait ordonné d'embraser cette fournaise, voyant que la vertu des trois jeunes gens, grâce au secours d'en-haut, triomphait des flammes, le voilà soudain converti, il crie d'une voix bruyante : Serviteurs du Dieu Très-Haut. (Daniel, III, 26.) Voyez, il exalte non-seulement leur élévation, mais aussi le Seigneur Dieu de l'univers : Serviteurs, dit le texte, du Dieu Très-Haut, sortez. Que s'est-il donc passé? N'est-ce pas vous qui les avez livrés à la torture; n'est-ce pas vous qui avez allumé cette fournaise si ardente? Sans doute, dit-il; mais ce que je vois maintenant est étrange, prodigieux. Voici que l'élément s'oublie; des liens mystérieux l'enchaînent, et le feu obéissant, n'ose pas même toucher leurs cheveux. Ce qui montre qu'il y a ici quelque chose qui surpasse la nature humaine, l'oeuvre ineffable d'une puissance divine qui s'intéresse au plus haut point à ces jeunes gens. Avez-vous bien compris cette miséricorde de Dieu, qui n'abandonne jamais ses serviteurs, tout en permettant qu'on les jette dans la fournaise, (342) parce qu'elle veut ajouter à leur gloire, faire éclater sa puissance? Et voilà pourquoi elle adoucit l'âme d'un barbare ; pourquoi elle montre tant de patience. Et en effet, où serait la merveille, si tout d'abord Dieu avait défendu qu'on les jetât dans la fournaise? Ce qui est plus merveilleux, plus étrange, c'est qu'au sein même des flammes, ils n'ont rien souffert; car Dieu n'a qu'à vouloir, même au milieu des périls et des tortures, il double les forces de ceux qui souffrent, et les persécutés sont plus forts que les persécuteurs. C'est ce qui est arrivé pour les apôtres. Ceux qui les tenaient en leurs mains, qui les traînaient captifs au milieu des peuples, qui grinçaient des dents, pour ainsi dire, en les menaçant, se disaient entre eux : Que ferons-nous de ces hommes ? (Act. IV, 16.) Ils les tenaient entre leurs mains et ils ne savaient qu'en faire. Voilà la puissance, voilà la force de la vertu, voilà la faiblesse de la malignité, la vertu souffre et triomphe; la malignité réussit, et n'aboutit qu'à trahir sa naturelle impuissance.

Dans ces pensées, mes bien-aimés, attachons-nous à la vertu, et fuyons la perversité. C'est ainsi que nous acquerrons la grâce d'en-haut, et que nous obtiendrons les biens à venir; et puissions-nous tous les conquérir, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, l'empire, l'honneur, maintenant et toujours; et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

 

 

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