HOMÉLIE XXXIII

HOMÉLIE XXXIII. LA CHARITÉ EST PATIENTE; ELLE EST BIENFAISANTE ; ELLE N'EST POINT ENVIEUSE; ELLE N'AGIT POINT A LA LÉGÈRE ; ELLE NE S'ENFLE POINT D'ORGUEIL. (CHAP. XIII, JUSQU'Au VERS. 8.)

 

ANALYSE.

 

1-4. Explication littérale du fameux texte de saint Paul sur la charité.

5-7. Des effets admirables de la charité. — Combien les saints de l'ancienne Loi, par exemple David et Jacob; excellaient dans cette vertu.

 

1. Après avoir déclaré que la foi, la science, le don de prophétie, le don des langues, le don d'assistance, le don de guérison ne servent pas à grand'chose sans la charité, il nous la dépeint dans toute sa beauté et dans toute sa pureté. 11 répand sur ce portrait les charmes, c'est-à-dire, les couleurs et les traits de la vertu ; il a soin d'établir entre toutes les parties de cette image une parfaite harmonie. Gardez-vous de n'accorder aux paroles de l'apôtre que peu d'attention, pesez-les au contraire avec soin , l'une. après l'autre ; c'est le moyen d'apprécier ce trésor et l'habileté du peintre. Voyez par où il commence et quelle est la qualité qu'il regarde comme la source de tout bien. Cette qualité , c'est la patience. Voilà la base de toute philosophie ! C'est pourquoi un sage disait : « L'homme patient fait preuve d'une haute sagesse; l'homme impatient n'est qu'un grand fou ». (Prov. XIV, 29.) Et comparant la patience à une place forte, il déclare que la comparaison est tout à l'avantage de cette qualité. Cette qualité est une armure impénétrable, une tour à l'épreuve de tous les assauts. Comme l'étincelle qui tombe sur l'abîme et qui, sans endommager l'abîme, s'éteint d'elle-même , chaque trait imprévu qui tombe sur une âme patiente, s'émousse aussitôt , sans troubler le repos de cette âme. Quoi de plus fort que la patience ! Les armées, les richesses, la cavalerie, les remparts, les armures, tout est faible auprès de la patience. Avec tout cet appareil guerrier, un conquérant , vaincu souvent par sa fureur, se voit renversé comme un faible enfant, en semant -sur ses pas le trouble et la tempête. Mais l'homme patient est comme dans un port, où il goûte un calme profond. Le dommage que vous lui causerez ne pourra émouvoir ce roc; vos outragés ne pourront ébranler cette tour; vos coups s'amortiront sur ce, métal indomptable. La patience s'appelle aussi longanimité, parce que l'homme patient a une âtre d'une vaste étendue, c'est-à-dire une grande âme; car « longueur et grandeur » sont des ternies synonymes. Mais cette qualité vient de la charité et rapporte de grands avantages à ceux qui la possèdent et qui en jouissent.

Ne me parlez pas ici de certaines âmes dont on peut désespérer, de ces hommes qui faisant le mal impunément, se plongent encore plus avant dans le mal. Cette corruption n'est pas l'effet de la patience du sage, mais de la perversité des méchants qui en abusent. Parlez-moi, non de ces hommes pervers, mais de ces âmes plus douces, à qui la patience du sage rapporte un grand profit: quand ces hommes font le mal et qu'on ne le leur rend pas, ils admirent la douceur de l'homme patient, ils y puisent un grand enseignement philosophique. Mais l'apôtre ne s'arrête pas là, et détaillant les autres perfections de 1a charité, il ajoute : « La charité est bienfaisante ». Il y a des hommes en effet pour lesquels la patience n'est pas, la (520) voie de la sagesse, mais un acheminement laborieux vers la vengeance. La charité , dit l'apôtre, ne tombe pas dans ce vice. Voilà pourquoi il ajoute : « La charité est bienfaisante ». Ce n'est point pour attiser la flamme de la colère dans les âmes irritées, qu'elle se montre douce et généreuse, c'est pour apaiser et éteindre cette flamme. Ce n'est pas seulement par une généreuse patience, c'est par ses soins et ses exhortations qu'elle soulage et qu'elle soigne la plaie des coeurs ulcérés par la colère. « Elle n'est pas envieuse ». On pourrait être patient et envieux, et l'envie gâte tout.. Mais la charité évite encore cet écueil. Elle n'agit point légèrement... Cela veut dire : elle n'agit point avec précipitation. L'homme qui la possède est sage et grave ; il marche paisiblement dans la vie. La précipitation est le propre des penchants honteux ; mais la charité n'est point asservie à de pareils tyrans. La paix du coeur est incompatible avec la précipitation et les excès. La charité qui veille sur notre âme comme un bon agriculteur sur un champ, ne donne pas à de pareilles épines le temps de germer. « La charité n'est point gonflée d'orgueil ». Que de gens se glorifient, sous nos yeux, de n'être ni jaloux, ni méchants, ni pusillanimes, ni agressifs ! De pareils défauts en effet ne sont pas l'apanage exclusif de la richesse et de la pauvreté ; ils se rencontrent aussi dans les âmes bien nées ; mais la charité a soin de les extirper tous. Et ici faites bien attention : la patience n'est pas tout à fait la bienfaisance et la générosité. Oc la patience, sans la générosité, est un défaut; elle peut amener la rancune. Mais, grâce à la générosité qui sert d'antidote à ce poison, la charité se conserve pure. La générosité dégénère parfois en faiblesse ; mais la charité est là pour l'en empêcher. « La charité , dit l'apôtre , n'est ni inconsidérée ni orgueilleuse ». La générosité et la patience n'excluent pas non plus l'arrogance; mais la charité nous corrige aussi de cette imperfection.

2. Et voyez : l'apôtre fait servir à l'ornement de cette vertu non-seulement les qualités qu'elle a, mais encore les défauts qu'elle n'a pas. Elle nous mène au bien, dit-il, et elle extirpe le mal. Que dis-je? elle ne laisse pas aux mauvais germes la faculté de naître. L'apôtre n'a pas dit, en effet : La charité est jalouse, mais elle étouffe la jalousie. Elle est arrogante, mais c'est un défaut dont elle se corrige. Il a dit : « La charité n'est ni jalouse, ni inconsidérée, ni gonflée d'orgueil ». Et ce qu'il y a de plus admirable, c'est qu'elle fait le bien sans effort; c'est qu'elle dresse des trophées, sans faire la guerre, sans verser de sang. Ce n'est point au prix de mille sueurs qu'elle donne la couronne à ses adeptes; elle leur donne le prix du combat, sans les condamner aux fatigues. En effet, là où la raison ne rencontre pas la passion pour adversaire, elle n'a pas la peine de lutter : « Elle ne croit pas qu'on puisse la flétrir ». Pourquoi dire, ajoute l'apôtre, que la charité n'est point gonflée d'orgueil ? Elle est si éloignée d'un pareil défaut, qu'elle ne regarde pas comme un déshonneur tout ce qu'elle a souffert pour l'objet aimé. L'apôtre n'a pas dit : La charité qui s'honore elle-même par sa patience, supporte généreusement le déshonneur; il a dit qu'elle ne se sent pas même blessée. Car si les hommes cupides, pour étancher la soif du gain qui les dévore, bravent tous 1es affronts, non-seulement sans honte, ruais avec orgueil, à plus forte raison l'homme qui possède la charité, cette vertu si louable; ne reculera devant aucun affront et ne rougira pas de sa patience. Mais, pour puiser nos exemples â des sources pures, examinons la charité dans le Christ, et nous pourrons apprécier les paroles de l'apôtre. Notre-Seigneur Jésus-Christ était conspué et souffleté par de misérables esclaves; et non-seulement il ne voyait pas là de déshonneur, mais ces affronts étaient poux lui autant de triomphes dont il se glorifiait. Quand il introduisait avec lui dans le paradis un voleur et un assassin, quand il adressait la parole à une courtisane au milieu d'un cercle d'accusateurs, il ne voyait pas là un déshonneur. Il permettait, au contraire, à la courtisane de lui baiser les pieds, d'arroser son corps de ses larmes et de lui faire un voile de ses cheveux; et c'était au milieu de ses ennemis, sur le théâtre de leur haine qu'il donnait un pareil exemple. La charité, en effet, se croit à l'abri de l'humiliation.

Voyez ce père qui tient le premier rang parmi les philosophes et les orateurs. Il ne rougit pas de bégayer avec ses enfants, et ceux qui sont témoins de cet acte de condescendance, loin de blâmer le père, rendent hommage à sa conduite et la citent pour modèle. Les enfants retombent-ils dans les mêmes fautes, le père est toujours là pour  (524) les corriger, pour avoir soin d'eux, pour réprimer leurs écarts, et il ne rougit pas de sa minutieuse sollicitude. La charité, en effet, est au-dessus de l'humiliation ; elle a comme des ailes d'or, pour cacher tous les défauts de l'objet aimé. C'est ainsi que Jonathas aimait David. Quand  son père lui disait : « Fruit des « amours de quelque fille complaisante, jeune « efféminé » (I Rois, XX, 30), il ne rougissait pas, et c'étaient 'là pourtant des paroles bien insultantes. C'était lui dire : Fils de quelque femme folle de son corps qui provoque les passants, être sans force et sans courage qui n'a rien de viril, c'est pour ta honte et pour celle de ta mère que tu vis. Eh bien ! Jonathas s'est-il irrité de ces insultes? A-t-il été cacher sa honte? S'est-il éloigné de son ami? Et pourtant c'était un fils de roi que Jonathas, et David n'était qu'un vagabond. Malgré cela, il n'a pas rougi de son ami; car la charité n'a jamais lieu de rougir. Ce qu'il y a d'admirable en elle, c'est qu'elle ôte à l'affront tout ce qu'il a de poignant, pour faire trouver, dans ses morsures, une sorte de douceur : aussi Jonathas outragé s'éloigna-t-il de David en l'embrassant, comme s'il venait de recevoir la couronne. C'est que la charité ne connaît pas d'affront. Que dis-je? Elle trouve de la douceur dans les outrages qui font rougir les autres. Ce qu'il y a de honteux, en effet, c'est de ne pas savoir aimer, c'est de ne pas savoir tout braver et tout souffrir pour l'objet aimé. Quand je dis tout, je ne veux pas dire qu'il faille prêter à un ami un coupable ministère. Il ne faut pas s'employer pour lui auprès d'une femme qu'il aime, il ne faut pas lui accorder quelque honteuse demande. Ce ne serait pas là de l'amitié, et c'est ce que je vous ai démontré plus haut, à propos de la femme égyptienne. Celui-là seul sait aimer qui comprend les véritables intérêts de son ami. Celui qui n'a pas un but honorable aura beau protester de son attachement pour vous; il sera toujours votre plus grand ennemi. Ainsi Rébecca qui était fort attachée à son fils, commit une fraude, sans rougir ni sans craindre d'être surprise, en s'exposant à un péril assez grand. Et , comme une contestation s'était élevée entre le fils qui résistait et la mère, elle lui dit : « Que ta malédiction soit sur moi, mon fils ». (Gen. XXVII, 13.)

3. Et voyez-vous l'âme apostolique de cette femme? De même que saint Paul (pour comparer les petites choses aux grandes) consentait à être anathème pour les Juifs, ainsi cette femme, pour que son fils fût bien, consentait à être maudite. Elle lui cédait tout le fruit de cette bénédiction; car elle ne devait pas le partager avec lui. Elle était préparée à tous les malheurs. Et pourtant elle se réjouissait, elle pressait son fils et, malgré l'imminence et la grandeur du péril, elle était impatiente de tout retard. Elle craignait que la soudaine arrivée d'Èsaü ne fît échouer sa ruse. Aussi comme sa parole est concise ! Comme elle presse le jeune homme ! Elle se laisse d'abord contredire, puis elle lui donne une raison qui doit suffire pour le décider. Elle ne lui dit pas Tes objections sont vaines et tes craintes sans motif, puisque ton père est vieux et aveugle. Elle lui dit : Que ta malédiction soit sur moi, mon fils ! Profite seulement du moyen que je t'offre et ne laisse pas échapper le trésor que te livre l'absence de ton frère. Et Jacob lui-même ne fut-il point, durant sept années, un mercenaire aux gages dé son parent ? Cette condition servile et la substitution qu'il fut obligé d'admettre n'en faisaient-elles pas un objet de risée?

Eh bien ! se montra-t-il sensible au ridicule? Se crut-il déshonoré, pour avoir, lui homme libre né de parents libres, lui qui avait reçu une éducation libérale, souffert de la part de ses parents les traitements qu'on inflige aux esclaves, traitements d'autant plus durs que les outrages de nos proches sont les plus poignants de tous? Non ; Jacob ne se crut point déshonoré. Il était soutenu par sa tendresse pour sa race. La charité abrégeait pour lui le temps de ces longues épreuves. « Il lui semblait qu'il n'avait que quelques jours à souffrir » (Gen. XXIX, 30), tant il s'en fallait que son esclavage fût pour lui un tourment et une honte ! Saint Paul avait donc raison de dire : « La charité n'a point à rougir de ses actes; elle ne cherche pas son avantage, elle ne s'irrite pas ». Après avoir dit qu'elle n'a point à rougir de ses actes, l'apôtre nous dit pourquoi : « C'est qu'elle ne cherche point son avantage ». L'objet aimé est tout pour elle, et c'est lorsqu'elle ne peut l'arracher aux suites d'une action honteuse qu'elle croit avoir à rougir. Son déshonneur, s'il pouvait servir à l'objet aimé, ne serait point un déshonneur pour elle; car votre ami c'est vous. Quand l'amitié existe-t-elle en effet ? C'est lorsque (522) celui qui aime et celui qui est aimé ne forment plus deux êtres distincts et font une seule et même personne.

Or, cette assimilation est un effet de la charité. Ne cherchez donc pas votre intérêt, si vous voulez trouver votre intérêt. Car celui qui cherche son intérêt ne le trouve pas. Voilà pourquoi saint Paul a dit: «Qu'on ne cherche pas son intérêt, mais celui du prochain ». (I Cor. X, 24.) Votre intérêt, en effet, s'identifie avec celui du prochain, et celui du prochain avec le  nôtre. Si votre or est enfoui dans la maison du voisin et que vous refusiez d'aller l'y chercher et l'y déterrer, vous ne le trouverez jamais. Il en est de même de votre intérêt. Si vous ne le cherchez pas dans l'intérêt de votre prochain, renoncez à cette couronne promise à la charité. Dieu, en effet, a tout arrangé de manière à ce que nous soyons liés les uns aux autres. Vous voulez éveiller un enfant dormeur et l'engager à suivre son frère ; s'il ne veut pas le suivre de bonne volonté, vous mettez entre les mains du frère quelque objet désirable pour l'enfant, pour que l'envie d'avoir cet objet l'engage à suivre celui qui en est possesseur, et votre moyen réussit. Ainsi Dieu a mis l'intérêt de chacun entre les mains de son prochain, afin que nous accourions les uns vers les autres et que nous ne soyons pas divisés.

Voyez plutôt ce qui se passe pour nous autres qui conversons ensemble. Mon intérêt est entre vos mains et votre avantage entre les miennes. Votre intérêt exige que vous connaissiez ce qui est agréable à Dieu. Or c'est à moi qu'a été confié le soin de vous donner l'enseignement qui vous en instruira; vous êtes donc forcés de venir à moi. Quant à moi, c'est mon avantage de vous rendre meilleurs , car pour cela je serai largement payé. Or ce résultat dépend de vous. Me voilà donc forcé de courir après vous pour vous rendre meilleurs et pour obtenir de vous ce résultat avantageux pour moi. Voilà pourquoi saint Paul disait : « Où est mon espoir ? n'est-il pas en vous ? » Et dans un autre passage : « Vous êtes mon espérance,.ma joie, ma couronne de gloire ». Les disciples de saint Paul faisaient donc sa joie. Aussi pleurait-il quand il les voyait périr. D'un autre côté leurs intérêts reposaient entre les mains de saint Paul. Aussi l'apôtre disait-il : « C'est pour l'espoir d'Israël que ces chaînes m'entourent » (Act. XXVIII, 20); et ailleurs : « Je souffre pour mes élus, afin qu'ils obtiennent la vie éternelle ». (II Tim. II, 10.) De pareils dévouements se voient dans la vie: « Car, » dit l'apôtre, « l'épouse, pas plus que l'époux, ne peut disposer de sa personne. Ils appartiennent l'un à l’autre ». (I Cor. VII, 4.) Nous agissons ainsi envers ceux que nous voulons lier. Nous ne laissons à nul d'entre eux la disposition de lui-même, mais nous étendons la chaîne de l'un à l'autre. Voyez ce qui se passe dans l'ordre judiciaire : le juge ne rend pas la justice dans son intérêt; il consulte les intérêts de son prochain. Ses inférieurs cherchent, par leurs hommages, par leurs services de toute manière, à servir les intérêts de leur chef. Les soldats prennent les armes dans notre intérêt, c'est pour nous qu'ils affrontent les dangers. Et nous, c'est pour eux que nous bravons les fatigues ; car c'est nous qui les nourrissons.

4. Ne m'objectez pas que ces hommes, en agissant ainsi , cherchent leur intérêt. Je vous répondrai que, s'ils le cherchent, ils le trouvent dans celui du prochain. Le soldat ne trouverait personne pour le nourrir, s'il ne faisait pas la guerre pour ceux qui le nourrissent; ceux-ci rie trouveraient personne pour les défendre , s'ils ne nourrissaient pas leurs défenseurs. Voyez-vous jusqu'où s'étend la charité et comme elle préside à tout? Mais ne vous lassez point de compter tous les anneaux de cette chaîne d'or. Après avoir dit : La charité ne cherche pas son intérêt, l'apôtre énumère les avantages qui résultent de cette manière d'être. Quels sont-ils? « C'est qu'elle ne s'irrite pas; c'est qu'elle ne pense pas à faire le mal ». Vous voyez que la charité, loin de supporter la tyrannie du vice, ne lui laisse pas seulement mettre le pied chez elle. Il ne dit pas: Elle s'irrite, mais elle surmonte sa colère; il dit: Elle ne s'irrite pas. Il ne dit pas: La charité ne fait pas le mal; il dit: La charité ne pense pas à faire le mal. Loin de se préparer à faire du mal à celui qu'on aime, on n'y songe même pas. Comment donc ferait-elle le mal, comment s'irriterait-elle , cette vertu qui bannit jusqu'à l'idée du mal, et c'est là surtout que se trouve la source de la charité. «.Elle n'applaudit pas à l'iniquité ». C'est-à-dire : elle ne se complaît pas dans la souffrance du prochain. Bien loin de là, « elle aime la justice ». (Rom. XII , 15.) Elle applaudit au bonheur des autres (523) et, comme dit saint Paul: « Elle se réjouit avec ceux qui sont dans la joie; elle pleure avec ceux qui pleurent ». Chez elle par conséquent point de jalousie, point d'orgueil elle fait son bonheur de celui des autres. Voyez-vous comme peu à peu la charité élève ses adeptes au niveau des anges? Exempt de colère, pur de toute jalousie, libre du joug des vices, soustrait aux faiblesses de la nature humaine, 'homme parvient, par la charité, à revêtir là nature impassible des anges. Mais saint Paul ne s'arrête pas là. Que lui reste-t-il donc à dire de plus? Car ses dernières paroles sont toujours les plus fortes. Il nous dit : « La charité supporte tout ». Sa patience, sa douceur l'endurcit contre les outrages , contre les coups, contre la mort, contre tous les mauvais traitements. Voyez le bienheureux David. Y a-t-il une douleur plus grande que celle d'un père qui voit son fils se révolter contre lui, attenter à sa couronne et être altéré du. sang paternel? Eh bien ! voilà ce que le bienheureux David a souffert. Il n'a pas eu le courage délaisser échapper une seule parole amère contre ce fils parricide ; à tous les capitaines qu'il avait chargés de la conduite de cette guerre il recommandait d'épargner son fils, tant sa charité reposait sur des bases solides ! Aussi il supporte tout et montre par là sa constance. Quant à sa bonté, elle éclate dans les paroles, qui suivent. «Il espère tout », dit-il, « il croit tout, il supporte tout ». Que veulent dire ces mots : il espère tout? Il ne désespère pas, dit-il, du coeur de son fils; quelque vicieux que soit ce fils, il persiste à vouloir le corriger, il l'entoure de sa sollicitude et de ses soins. « Il croit tout ». Il ne se contente pas d'espérer, dit-il, il a confiance dans celui qu'il aime tant : bien que sa conduite ne réponde pas à son espoir, bien qu'il lui cause toujours de nouveaux chagrins, il les supporte encore. Car « il supporte tout », dit-il. « La charité ne finira jamais». Il met ici la dernière main à son ouvrage. Il nous montre ce que le don de la charité a de plus rare. Que signifie ce mot? « Elle ne finira jamais ». Elle ne meurt pas, elle ne s'use point par la patience : elle est toujours aimante. Celui qui aime en effet ne peut jamais haïr, quelle que soit la conduite que l'on tienne envers lui et c'est là le plus grand fruit de la charité.

Tel se montre saint Paul. « Je voudrais », dit-il , « exciter une sainte jalousie dans l'âme de ces hommes qui me sont unis selon la chair» (Rom. II, 14) , et il a persisté dans cet espoir. Et il exhortait Timothée en ces termes : Un serviteur de Dieu ne doit pas lutter; il doit être doux envers tout le monde, il doit instruire , en conservant le ton de la modération, ceux qui résistent à la vérité, pour voir si Dieu leur en donnera connaissance. (II Tim. II, 24, 25.) Eh quoi , direz-vous, si ce sont nos ennemis , si ce sont des gentils, ne faut-il pas les haïr? Ce qu'il faut haïr, ce ne sont pas les gentils, c'est leur erreur; ce n'est pas l'homme,: c'est le mal qu'il fait, c'est sa corruption. L'homme en effet est l'oeuvre de Dieu; l'erreur est celle du démon. Ne confondez pas ce qui est à Dieu, et ce qui est au démon. Les Juifs n'étaient-ils pas des blasphémateurs, des persécuteurs insolents qui se répandaient en injures contre le Christ? Saint Paul; qui aimait tant le Christ, les détestait-il pour cela? Non assurément; il les aimait au contraire et faisait tout pour eux. Tantôt il dit : « Je sens dans mon coeur une grande affection pour le salut d'Israël et je le demande à Dieu dans mes « prières » (Rom. XI, 1); tantôt il s'écrie « J'aurais voulu devenir moi-même anathème à l'égard du Christ pour les sauver ». (Rom. IX, 3.) C'est ainsi que parlait Ezéchiel témoin du massacre des Juifs : « Hélas, Seigneur, veux-tu détruire les débris d'Israël?» (Ezéch. IX, 8.) C'est ainsi que parlait Moïse . « Si tu leur pardonnes, épargne-les ». (Exod. XXXII, 31.) Et David que dit-il? « Ceux qui te haïssent, Seigneur, je les haïssais, et la haine qui m'enflammait contre tes ennemis me consumait: c'était du fond du coeur que je les détestais ». (Ps. CXXXVIII, 21, 22.) Mais David, dans ses Psaumes, ne parle pas toujours pour lui. Ne dit-il pas aussi : « J'ai planté ma tente parmi les tentes de Cédar, et auprès des fleuves de Babylone nous nous sommes assis et nous avons pleuré ? » (Ps. CXIX, 5, et CXXXVI,1). Pourtant David n'a jamais vu ni Babylone , ni Cédar. Aujourd'hui du reste Dieu réclame de nous une sagesse encore plus haute que sous l'ancienne loi. Aussi, quand les disciples du Christ lui demandaient de faire descendre le feu du ciel , comme du temps d'Elie, il leur répondait : « Vous ignorez l'esprit de la loi nouvelle à laquelle vous appartenez » . (Luc, IX, 55.)

5. Autrefois en effet ce n'était pas l'impiété toute seule , c'était les impies eux-mêmes que Dieu nous disait de haïr, pour que (524) l'amitié des impies ne fût pas pour nous une occasion de commettre aussi l'iniquité. Aussi Dieu défendait-il de s'unir à eux par le sang, de se mêler à eux, et de tous côtés il élevait des remparts entre eux et son peuple. Aujourd'hui qu'il a guidé nos pas vers une philosophie plus élevée, aujourd'hui qu'il nous a placés trop haut pour que la contagion de l'impiété puisse nous atteindre, il nous fait une loi d'accueillir les infidèles et de les consoler. Il n'y a là rien à perdre pour nous; il y a tout à gagner pour eux.

Que nous dit-il donc? D'avoir pitié des infidèles, au lieu de les haïr. Si vous les haïssez, comment ramènerez-vous aisément ces âmes égarées? Comment vous déciderez-vous à prier pour un infidèle? Sur la nécessité de la prière, écoutez saint Paul : « Je vous en conjure ,  adressez surtout à Dieu des supplications, des prières, des demandes, des actions de grâces, pour le salut de tous les hommes». (I Tim. II, 1, 2.) Or à cette époque, « tous les hommes » n'étaient pas au nombre des fidèles : c'est évident. Et il dit encore : « Priez pour les rois, pour les hommes constitués en dignité ». Or ces rois, ces personnages étaient des impies et des hommes injustes c'est encore une vérité manifeste. Et pourquoi faut-il prier pour eux? Il nous l'explique, lorsqu'il ajoute: « Ces prières sont une bonne oeuvre, une oeuvre bien vue de notre Sauveur qui veut que tous les hommes soient sauvés, et qu'ils parviennent tous à la connaissance de la vérité ». (Ib. 3, 4.) C'est pourquoi s'il trouve une femme païenne unie à un mari fidèle, il ne rompt pas ce mariage. Où trouver, pour une femme, un lien plus étroit que celui qui l'unit à son époux? « Ils ne feront tous deux qu'une seule chair ». (Gen. II, 24.) Il y a là pour unit les âmes et pour y allumer un fervent amour quelque chose de bien puissant. Ah ! si les impies et les hommes injustes deviennent l'objet de notre haine, nous irons plus loin nous haïrons aussi les pécheurs, et notre haine gagnant toujours de proche en proche, nous fera rompre avec un grand nombre de nos frères, que dis-je? avec tous nos frères; car personne, non, personne n'est exempt de péché. S'il faut haïr les ennemis de Dieu, il nous faudra haïr non-seulement les impies, mais encore les pécheurs et alors nous serons pires que des bêtes féroces; nous aurons de l'aversion pour tout le monde et nous serons gonfles d'orgueil comme le pharisien. Ce n'est pas là ce que veut saint Paul.

Comment dit-il? « Reprenez ceux qui sont déréglés , consolez ceux qui ont l'esprit  abattu, soutenez les faibles ; soyez patients envers tous ». (I Thess. V, 14.) Mais, me direz-vous, qu'entend-il donc par ces paroles « Si quelqu'un n'obéit pas à ce que nous ordonnons par notre lettre » , notez-le et « n'ayez joint de commerce avec lui ». (II Thess. III, 14.) Oui, il parle ici de nos frères. Mais ces paroles n'ont rien d'absolu, rien de rigoureux. Il ne faut pas retrancher les mots qui suivent; il faut au contraire les ajouter ici : Après avoir dit : « N'ayez point de commerce avec lui », ne joint-il pas à cette recommandation cet adoucissement? « Ne le considérez pas néanmoins comme votre ennemi; mais avertissez-le comme votre frère ». (Ibid. V, 15.)

Voyez-vous comme il nous recommande de haïr le mal et non l'homme ? Car c'est l'oeuvre du démon de nous détacher les uns des autres; il met tous ses soins à faire disparaître la charité du milieu des hommes afin de nous couper toute voie d'amendement, afin d'entretenir l'un dans son erreur, l'autre dans sa haine et de lui fermer ainsi le chemin du salut.

En effet, quand le médecin hait le malade et le fuit, et que le malade déteste le médecin, comment guérira-t-il, s'il n'appelle point le médecin, et si le médecin ne vient point le voir? Pourquoi donc, je le demande, le détester et le fuir? Est-ce parce qu'il est impie? mais c'est pour cela même qu'il faut aller le trouver et le soigner, afin de rappeler le malade à la santé. Que s'il souffre d'un mal incurable, vous devez encore faire ce qui est en votre pouvoir, car Judas aussi souffrait d'un mal incurable, et cependant Dieu n'a point cessé de le soigner. C'est pourquoi ne vous découragez point; car, lors même que malgré tout votre zèle, vous ne l'arracheriez point à l'impiété , vous recevriez la récompense, comme si vous l'aviez fait, et vous feriez que lui-même admirerait votre douceur : et ainsi la gloire en reviendrait tout entière à Dieu vous auriez beau faire des miracles, ressusciter des morts, ou faire n'importe quoi, jamais les gentils ne vous admireront autant que quand ils vous verront doux, bienveillant, (525) et d'un caractère clément. Ce n'est point là un petit effort de vertu, c'est par là que beaucoup seront enfin arrachés au mal. Car rien ne saurait attirer comme la charité : les prodiges et les miracles vous feront envier, mais la charité vous fera admirer et aimer; or, si l'on vous aime, on fera un pas de plus et l'on embrassera la vérité. S'il s'en trouve qui ne deviennent point fidèles d'un coup, ne vous en étonnez pas, ne les pressez point, ne cherchez pas tout à la fois ; laissez-les d'abord vous louer, vous aimer, et c'est ainsi qu'avançant toujours ils finiront parvenir à vous. ,Et, pour que vous sachiez clairement combien cela est important, écoutez comment Paul, se présentant devant un juge païen, se justifie; car il dit : « Je m'estime heureux de me justifier à ton tribunal ». (Act. XXVI, 2.) II disait ainsi, non pour le flatter, loin de là, mais pour le gagner par la douceur. Et il le gagna en partie, et il s'empara du juge, celui que jusqu'alors on croyait être sous le poids d'une accusation, et celui-là même qui fut captivé proclamait à haute voix la victoire de l'apôtre devant tous les assistants : « Peu s'en faut que tu ne me persuades de me faire chrétien ». (Actes, XXVI, 28.)

6. Que répond Paul ? Il étend ses filets, et il dit. « Je souhaiterais que non-seulement toi, mais que tous les assistants fussent ce que je suis, en exceptant ces liens ». (Ib. 29.) Que dis-tu, Paul? « En exceptant ces liens? » Et quelle confiance peut-on avoir en toi pour tout le reste, si tu rougis de ces liens, si tu les rejettes, et cela devant une si grande foule? Est-ce que dans tes épîtres tu ne t'en glorifies point partout? Est-ce que tu ne t'appelles pas l'enchaîné ? Est-ce que tu ne te présentes pas entouré de ces liens comme d'un diadème? Pourquoi donc souhaiter maintenant qu'ils te soient ôtés? Je ne le souhaite point, dit-il, et je n'en rougis point, mais je condescends à la faiblesse de ces hommes, car ils ne peuvent pas encore atteindre à ma gloire. J'ai appris de mon Seigneur qu'il ne faut point insérer une pièce d'étoffe neuve dans une vieille étoffe (Matth. IX, 16) ; c'est pourquoi j'ai parlé ainsi. Notre croyance n'est pas en bonne odeur auprès d'eux, et la croix leur est odieuse. Si donc j'y ajoutais encore ces liens, leur haine n'en serait que plus grande. C'est pourquoi je les ai supprimés, afin que la croyance fût acceptée. En effet, il leur paraît honteux d'être chargés de liens, parce qu'ils n'ont pas encore goûté la gloire qui est chez nous. Il faut donc des tempéraments.

Quand ils auront appris la vraie sagesse, ils connaîtront aussi la beauté des fers, et la splendeur qui naît des liens. Et, en effet, discourant avec d'autres, il appelle ces liens une grâce, disant qu'ils « nous ont été donnés par Dieu, non-seulement pour que nous croyions en lui, mais encore pour que nous souffrions pour lui » (Philipp, I, 29); mais alors il fallait seulement souhaiter qu'entendant parler de la croix, ils n'éprouvassent point de honte. C'est ainsi que saint Paul gagne du terrain. Si l'on introduisait quelqu'un dans un palais, on ne le forcerait point, avant de lui avoir montré le vestibule, d'admirer ce qui est à l'intérieur, et même rien ne lui paraîtrait admirable, s'il n'était instruit de tout, avant d'avoir pénétré dans l'intérieur. De même faut-il discourir à l'égard des gentils avec des tempéraments, avec charité :  c'est là la grande maîtresse , celle qui nous peut soustraire à l'erreur, adoucir nos moeurs, aplanir la voie de la sagesse, et avec des pierres faire des hommes.

Et si vous voulez connaître toute vertu, amenez-moi un homme timide qui craigne le moindre bruit et qui ait peur d'une ombre ; qu'il soit colère, intraitable, plutôt bête qu'homme, lubrique et débauché, atteint de tous les vices; livrez-le aux mains de la charité, et introduisez-le en ce gymnase, et vous verrez aussitôt cet homme timide et craintif devenir fort, magnanime, et capable de tout oser. Ce qu'il y a de merveilleux, c'est que ces changements ne sont point naturels, mais dans cette âme timide, c'est la charité qui déploie sa puissance; c'est comme si une épée de plomb, sans devenir de fer, et tout en conservant sa nature de plomb, pouvait produire les mêmes effets que le fer. Faites-y bien attention : Jacob était un homme simple, sédentaire, exempt de travaux et de dangers, menant une vie tranquille et libre, comme une vierge qui ne sort pas de la chambre; ainsi, demeurant chez lui, il était forcé le plus souvent de garder la maison, loin du tumulte et du tracas de la place publique, au sein d'un tranquille repos. Et cependant, quand il fut embrasé des feux de l'amour, voyez, comme cet homme simple et sédentaire est devenu fort et laborieux, et ce n'est point moi, c'est (526) le patriarche lui-même qui vous l'apprend. Car, accusant son beau-père, il dit : « J'ai passé vingt ans avec toi ». (Gen. XXXI, 38, 40.) Et comment avez-vous. passé ces vingt ans? C'est ce qu'il nous apprend encore lui-même :. « Brûlé par la chaleur du jour et le froid de la nuit, et le sommeil s'éloignait de mes paupières ». Voilà ce que, disait cet homme simple, sédentaire, et qui menait une vie si paisible. Qu'il fût timide, c'est ce qui n'est point démenti par ceci, que, quand il s'attendait à voir Esaü, il mourait de crainte. Mais voyez comme l'amour a rendu cet. homme timide plus hardi qu'un lion. Comme un guerrier placé au premier rang, il était prêt à soutenir le choc de cet ennemi qu'il croyait si farouche et avide de carnage, et à faire de son corps un rempart pour ses femmes, et le premier il désirait voir, sur le champ de bataille, celui qu'il craignait et qu'il redoutait. L'amour de ses femmes l'emportait en lui sur la crainte. Voyez-vous comment, quoique timide, il devient tout à coup hardi, non par un changement de caractère, mais par la force que donne l'amour? Car, qu'il fût timide même dans la suite, c'est ce qui est démontré, par ceci, qu'il changeait sans cesse de demeure.

Il ne faut point croire que ces paroles soient une accusation contre le juste. Ce n'est pas, en effet, un crime d'être timide, cela est naturel; c'en est un seulement, quand la crainte nous fait transgresser nos devoirs. Un homme naturellement timide peut devenir par piété fort et magnanime. Voyez Moïse : ne s'est-il pas sauvé par la crainte d'un , seul Egyptien, pour s'en aller dans l'exil? Cependant ce fugitif, qui n'avait point supporté les menaces d'un seul homme, après avoir goûté le miel de la charité, par un beau mouvement et sans que personne l'y forçât, était prêt à mourir avec ceux qu'il aimait. «. Si tu leur remets », dit-il, « leurs péchés, remets-les ; sinon, efface-moi aussi du livre que tu as écrit» . (Exod. XXXII, 31.) Que l'amour donne la douceur à l’homme farouche, et la chasteté au débauché, c'est ce qu'il n'est point besoin de prouver par des exemples : cela est clair pour tous : fût-on plus cruel que toute bête fauve, l'amour vous rend plus doux qu'un agneau. Car qu'y avait-il de plus cruel et de plus furieux que Saül? mais quand sa fille délivra son ennemi, il ne prononça pas même une parole amère contre elle, et celui qui avait tué tous les prêtres à cause de David, quand il vit que sa fille l'avait fait évader de sa maison, ne trouva pas même contre elle une parole d'indignation, quoiqu'elle se fût rendue coupable de fraude envers lui ; il était retenu par le frein plus puissant de l'amour. De même que la douceur, la charité donne la continence : si quelqu'un aime sa femme comme il faut l'aimer, quoiqu'il soit naturellement débauché, il n'en verra point d'autre, contenu qu'il est par l'amour de sa femme; car il dit : « L'amour est puissant comme la mort ». (Cant. VIII, 6.) Ainsi, on n'est débauché que parce qu'on n'aime point. Puis donc que la charité est ouvrière de toute vertu; il faut la faire entrer dans nos âmes avec le plus grand soin, afin qu'elle nous apporte de nombreux biens, et pour cueillir à jamais ses fruits abondants, toujours certains, et qui ne se corrompent point. C'est ainsi que nous obtiendrons les biens éternels : puissions-nous les acquérir par la grâce et la faveur de Notre-Seigneur Jésus-Christ auquel, conjointement avec le Père et le Saint-Esprit, appartiennent la gloire, la puissance et l'honneur, aujourd'hui et toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il

 

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