Matthieu 25,31- 26,6

HOMÉLIE LXXIX.

« MAIS QUAND LE FILS DE L’HOMME VIENDRA DANS SA GLOIRE ACCOMPAGNÉ DE TOUS SES SAINTS ANGES, ALORS IL S’ASSIÉRA SUR LE TRÔNE DE SA GLOIRE. ET TOUTES LES NATIONS DE LA TERRE SERONT RASSEMBLÉES DEVANT LUI, ET, IL SÉPARERA LES UNS D’AVEC LES AUTRES, COMME UN BERGER SÉPARE LES BREBIS D’AVEC LES BOUCS ». (CHAP. XXV, 31, 32, JUSQU’AU VERSET 6 DU CHAP. XXVI.)

ANALYSE 

1. Le jugement dernier. Combien les oeuvres de miséricorde sont nécessaires.

2. Récompense accordée aux bons; châtiment infligé aux méchants.

3. Les princes des prêtres délibèrent sur les moyens à prendre pour se défaire de Jésus-Christ. — Ce qu’on désignait par ce nom de prince des prêtres.

4. et 5. L’Orateur exhorte ses auditeurs à n’avoir point de haine contre leurs ennemis.— Excellent modèle que Jésus-Christ nous a donné de cette vertu. — Que pour adoucir le mal que les autres nous ont fait, nous devons penser au mal que nous avons fait aux autres. — Que Dieu veut que nous compatissions même aux. souffrances des méchants qu’il punit dans sa justice. — De la joie que laisse dans l’âme une réconciliation chrétienne.


 

1. Je vous conjure, mes frères, d’écouter avec toute l’application et toute la componction de coeur qui vous sera possible, cet endroit de l’Evangile que nous vous allons expliquer; ce n’est pas sans raison que Jésus-Christ le réserve pour couronner son discours : il montre excellemment toute l’estime que Dieu fait de la miséricorde et de la charité. Il a déjà, dans ce qui précède, parlé de cette vertu de diverses manières; mais ici il s’en explique avec plus de clarté et plus de force que nulle part ailleurs. Il ne se contente plus ici d’en parler sous la parabole de deux, ou de trois, ou de cinq personnes. Il adresse son discours généralement à tous les hommes. Il est vrai .que lorsqu’il exprime en particulier un certain nombre dans les autres paraboles, ce n’est point pour nous marquer qu’il ne parle qu’à deux hommes, mais à deux sortes de personnes différentes : celles qui lui obéissent et celles qui lui sont rebelles. Mais il traite ici au long ce même sujet avec plus de clarté, et d’une manière qui nous frappe davantage. Il ne dit plus ici, comme ailleurs : « Le royaume des cieux est semblable, etc. » Il se désigne clairement lui-même, et il se découvre en disant: «Quand le Fils de l’homme viendra dans sa « gloire, etc. » Il est déjà venu une fois non pour éclater dans sa gloire, mais pour souffrir les injures et les outrages. Et remarquez, mes frères, qu’il parle souvent de « sa gloire »; parce que le temps de sa croix était proche. Il prépare ses auditeurs, et il les relève. Il leur représente le jugement général qu’il exercera sur tous les hommes. Il leur fait voir comment il rassemblera devant lui toute la terre, et il leur dit même, pour leur inspirer encore plus de terreur, qu’il fera descendre tous les anges du ciel pour venir avec lui rendre témoignage devant le monde entier, combien ses envoyés ont fait de choses par son ordre pour le salut de tous les hommes. C’est pourquoi ce jour sera épouvantable en toutes manières.

« Toutes les nations de la terre seront rassemblées devant lui, et il séparera les uns d’avec les autres, comme un berger sépare les brebis d’avec les boucs (32). Et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche (33) ». Il n’y a rien de séparé en ce monde. Les bons sont mêlés confusément avec les méchants; mais il s’en fera alors un discernement très-exact, et ils seront tellement séparés les uns des autres, qu’on ne pourra douter duquel des deux partis chacun sera. Il montre encore par ces deux noms différents (9) dont il se sert pour les distinguer, quelles sont les moeurs des uns et des autres. Il appelle les uns « boucs » pour marquer leur stérilité, parce qu’il n’y a rien de moins fertile que cet animal, et il appelle les autres « brebis», pour marquer leur fécondité; car on sait combien les brebis sont fertiles en lait, en laine et en agneaux. Mais il y a ici cette différence que cette fécondité et cette stérilité des animaux est un effet de la nature; au lieu que les hommes sont féconds ou stériles en bonnes oeuvres par le choix de leur volonté; et qu’ainsi c’est très-justement que Dieu punit les uns, et qu’il couronne les autres.

« Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, vous, les bénis de mon Père: possédez comme votre héritage le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde (34). Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire; j’ai eu besoin de logement et vous m’avez logé (35). J’ai été nu et vous m’avez vêtu ; j’ai été malade et vous m’avez visité; j’ai été en prison et vous m’ê« tes venu voir (36). Sur quoi les justes lui diront: Seigneur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim, et que nous vous avons donné à manger; ou avoir soif, et que nous vous avons donné à boire (37).? Quand est-ce que nous vous avons vu sans logement, et que nous vous avons logé; ou sans vêtements, et que nous vous avons vêtu (38)? Et quand est-ce que nous vous avons vu malade ou en prison, et que nous sommes allés vous visiter (39) ? Et le Roi leur répondra : Je vous dis en vérité que chaque fois que vous l’avez fait aux moindres de mes frères, c’est à moi- même que vous l’avez fait (40) ». Il est à remarquer que cet équitable Juge ne condamnera point les méchants avant que de les avoir accusés. Il les fait donc venir devant son Tribunal, et il leur dit les justes sujets pour lesquels il les accuse.

« Il dira ensuite à ceux qui seront à sa gauche : Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges (41). Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire (42). J’ai eu besoin de logement, et vous ne m’avez pas logé; j’ai été nu, et vous ne m’avez pas vêtu ; j’ai été malade et en prison, et vous ne m’avez pas visité (43) ». Les méchants répondront alors à ces reproches avec modestie et avec soumission; mais cette soumission leur sera entièrement inutile.

« Ils lui diront: Seigneur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim ou soif, ou sans logement, ou sans vêtements, ou malade, ou prisonnier, et que nous avons manqué à vous assister (44) ? Mais il leur répondra : Je vous dis en vérité qu’autant de fois vous avez manqué de le faire aux moindres de ces petits, autant de fois vous avez manqué à me le faire à moi-même (45). Et alors ceux-ci s’en iront au supplice éternel, et les justes à la vie éternelle (46) ». Ne sera-ce pas avec justice que les méchants souffriront ces reproches de Jésus-Christ irrité, puisqu’ils auront négligé durant toute leur vie une chose qui lui est si précieuse et si agréable? Car les prophètes disaient clairement au nom de Dieu même « Je veux la miséricorde et non pas le sacrifice ». Jésus-Christ le législateur le disait aussi continuellement, et par ses paroles et encore plus par ses actions, et la nature même imprime déjà ces enseignements dans l’âme des hommes. Mais remarquez, mes frères, que ces méchants, que Dieu condamne, n’avaient pas seulement manqué à la charité dans quelques points, mais qu’ils en avaient négligé généralement tous les devoirs. Car, non-seulement ils ne lui ont pas donné à manger lorsqu’il avait faim, et ils ne l’ont pas vêtu lorsqu’il était nu; mais ils n’ont pas fait même une chose aussi facileS que celle d’aller visiter un malade. Et considérez, mes frères, combien tout ce que Jésus-Christ commande est facile. Car il ne dit pas : «J’étais on prison », et vous ne m’avez pas délivré : « J’étais malade », et vous ne m’avez pas guéri; mais « vous ne m’avez point visité, vous ne m’êtes point venus voir». Il n’était pas aussi difficile de le soulager dans la faim qu’il endurait. Car il ne demande pas des tables somptueuses, il ne veut que ce qui est purement nécessaire. Il ne demande pas même ce secours sous la forme et sous l’apparence d’un prince, mais sous celle d’un pauvre et d’un humble esclave.

Considérez donc toutes ces circonstances, dont chacune aurait suffi pour condamner ces ingrats; le peu qu’il leur demandait, puisque ce n’était que du pain; la misère de celui qui leur demandait qui était si pauvre; la compassion dont ils devaient être touchés , (10) puisque c’était un homme; la grandeur de la récompense promise, puisque c’était la gloire du ciel; la crainte des peines réservées, puisqu’on les menaçait de l’enfer; la dignité de celui à qui ils faisaient part de leur bien , puisque c’était Dieu même qui le recevait par les mains des pauvres; l’honneur qu’il avait bien voulu leur faire, puisqu’il abaissait sa grandeur jusqu’à implorer leur assistance; enfin la justice qui les obligeait de ne pas le refuser, puisqu’il leur avait donné ce qu’il leur demandait, ce qui était plus à lui qu’à eux. Mais l’avarice les a aveuglés, et ils ont fermé les yeux à toutes ces considérations si pressantes. Ils n’ont point appréhendé les peines terribles dont Jésus-Christ menaçait les coeurs durs et impitoyables, jusqu’à leur déclarer qu’il leur ferait souffrir de plus grands supplices qu’à ceux de Sodome et de Gomorrhe. Et ils ont oublié que Jésus-Christ dit ici : « Quand vous avez refusé cette charité à un de ces petits, vous me l’avez refusée à moi-même ».

Mais comment Jésus-Christ, en les appelant « ses frères», dit-il en même temps qu’ils sont «petits »? C’est précisément pour marquer qu’ils ne sont « ses frères » que parce qu’ils sont «petits », c’est-à-dire humbles, pauvres et méprisables. Car Jésus-Christ ne veut avoir pour frères que les humbles. Ce que je n’entends pas seulement des religieux et des solitaires qui habitent les déserts et les montagnes; mais encore de chacun des fidèles qui vit dans l’Eglise. Quand vous voyez un chrétien qui, engagé dans le monde, y vit dans la pauvreté, et dans un entier dénûment de toutes choses, Jésus-Christ veut que vous le regardiez comme « son frère », et que vous ayez autant de soin de lui que vous en auriez pour votre Sauveur. Ces personnes, quelque viles et abjectes qu’elles paraissent, deviennent ses frères par le baptême, et par la participation de ses mystères.

2. Mais le Fils de Dieu voulant encore nous faire mieux voir avec quelle justice il condamnera ceux qui omettront ces devoirs de charité, commence par louer et par récompenser ceux qui les ont pratiqués : « Venez », dit-il, « vous, les bénis de mon Père, possédez comme votre héritage le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde. Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, etc. » Il semble que, pour. ôter toute excuse à ces coeurs endurcis, et pour les empêcher de dire qu’ils n’ont point trouvé l’occasion de pratiquer la charité, il ait voulu d’abord les confondre par la comparaison de leur conduite avec la conduite de ceux qui, dans les mêmes conditions qu’eux, ont su néanmoins la pratiquer.

C’est ainsi que, dans les paraboles précédentes, il confond les vierges folles en leur opposant les sages ; qu’il couvre de honte ce serviteur ivrogne et gourmand par la comparaison des autres qui étaient plus sobres et plus modérés que lui, et qu’il condamne ce lâche serviteur qui avait caché son talent en terre par l’exemple de ceux qui avaient si heureusement multiplié l’argent qui leur avait été confié. Il confondra de même un jour tous les pécheurs de la terre, en les comparant avec les justes.

Ces comparaisons concluent tantôt d’égal à égal, comme ici, comme dans la parabole des dix vierges; tantôt du moins grand au plus grand; par exemple: « Les hommes de Ninive s’élèveront au jour du jugement contre ce peuple, et ils le condamneront parce qu’ils ont fait pénitence à la prédication de Jonas: et cependant celui qui est ici est plus grand que Jonas. La reine du midi s’élèvera au jour du jugement contre ce peuple, et elle le condamnera, parce qu’elle est venue des extrémités de la terre pour entendre la sagesse de Salomon; et cependant celui qui est ici est plus grand que Salomon ». (Sup. XII, 41.) Un autre exemple où l’on conclut d’égal à égal, c’est lorsque le Sauveur dit : « C’est pourquoi vos enfants seront vos juges » (Luc. XI, 19.) Voici tin exemple où la comparaison conclut du plus au moins, c’est lorsque saint Paul dit: « Ne savez-vous pas que nous jugerons les anges, combien donc plus jugerons-nous le siècle»? (1 Cor. II, 6.) Et lorsque Jésus-Christ parle ici de son jugement, il fait des comparaisons d’égal à égal, puisqu’il compare le pauvre avec le pauvre, et le riche avec. le riche, et qu’il confond ceux qui n’ont pas fait l’aumône par l’exemple de ceux qui l’ont faite. Mais il ne justifie pas seulement l’arrêt qu’il portera contre ces coeurs sans pitié et sans miséricorde, en leur faisant voir d’autres hommes qui, dans le même état qu’eux, auront pratiqué tous les devoirs de la charité chrétienne. Il le justifie encore beaucoup plus eu leur représentant avec quelle indifférence ils ont négligé d’obéir à toutes ses règles, et dans (11) des rencontres où le prétexte de leur peu de bien ne pouvait ni leur être un obstacle, ni leur servir d’excuse, comme lorsqu’il s’agit de donner un verre d’eau froide à un pauvre qui a soit, d’aller consoler un prisonnier, et de visiter un malade.

Mais je vous prie de remarquer, mes frères, que lorsque Jésus-Christ veut donner des louanges aux bons, il commence par leur représenter l’amour éternel que Dieu a toujours eu pour eux: «Venez », dit-il, « vous que mon Père a bénis, possédez comme votre héritage le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde ». Quel bonheur peut être comparable à celui d’être « bénis » et d’être bénis par le Père même? D’où peut venir un si grand bonheur à un homme, et comment peut-il mériter une telle gloire?

« Car j’ai eu faim », dit-il, « et vous m’avez donné à manger; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ». O paroles pleines de joie, de consolation et d’honneur pour ceux qui mériteront de les entendre ! Il ne leur dit pas: Recevez le royaume, mais « possédez-le comme votre héritage»; comme un bien qui est à vous, que vous avez reçu de votre Père, et .qui vous est dû de tout temps. Car je vous l’ai préparé avant même que vous fussiez nés, parce que je savais que vous seriez ce que vous êtes. Quelles sont donc les actions que Jésus-Christ récompense dans ses saints d’une manière si divine? C’est, mes frères, parce qu’ils ont retiré chez eux un étranger, c’est parce qu’ils ont revêtu un pauvre, c’est parce qu’ils ont donné du pain à celui qui avait faim, et de l’eau à celui qui avait soif, enfin c’est parce qu’ils ont visité un malade ou un prisonnier. Car Dieu a principalement égard au secours que nous donnons à ceux qui en ont besoin.

Il y a même des cas où il ne considère pas si nous les avons retirés de leur misère. Et, en effet, comme je l’ai déjà dit, un malade et un prisonnier ne désirent pas seulement d’être visités. L’un veut être guéri de son mal, et l’autre veut sortir de prison. Mais Dieu étant aussi doux et aussi bon qu’il l’est, se contente du peu que nous donnons quand nous ne pouvons davantage. Il n’exige pas même tout ce que nous pourrions donner. Il laisse à notre liberté de faire plus si nous le voulons, afin d’avoir la gloire de passer volontairement au delà de ce que nous étions obligés de faire.

Mais Jésus-Christ parle à ceux qui seront à sa gauche d’une manière bien différente. Il dit aux uns : « Venez, bénis »; il dit aux autres « Allez, maudits », et il n’ajoute pas « de mon Père »; parce que ce n’est que leur malignité propre, et leurs actions criminelles qui leur ont attiré cette malédiction si effroyable « Allez au feu éternel qui a été préparé », non pour vous, «mais pour le diable et pour ses anges ». Quand il parle de ce royaume bienheureux, il dit expressément qu’il a été préparé pour ceux qu’il y fait entrer; mais lorsqu’il parle des flammes qui ne s’éteindront jamais, il ne dit pas qu’elles ont été préparées pour les damnés, mais «pour le démon et pour ses anges». Ce n’est point moi, dit-il, qui vous ai préparé ces feux. Je vous ai bien préparé un royaume, mais ces flammes n’étaient destinées par moi que pour le démon et pour ses anges. C’est vous seuls que vous devez accuser de votre malheur, et vous vous êtes précipités volontairement dans ces abîmes.

C’est donc pour se justifier en quelque sorte qu’il dit ces paroles. « Qui a été préparé au diable, aussi bien que celles qui suivent: « Car j’ai eu faim et vous ne m’avez pas donné à manger». Quand j’aurais été votre ennemi, ne suffisait-il pas pour toucher les coeurs les plus durs de voir tant de maux joints ensemble, la faim, la soif, la nudité, la captivité, la maladie? Tant de maux ensemble n’adoucissent-ils pas d’ordinaire les coeurs les plus impitoyables et les plus envenimés? Cependant c’est dans cet état même que vous n’avez pas secouru votre Dieu et votre Seigneur, qui vous fait tant de grâces, et qui vous aimait si tendrement.

Si vous voyiez un chien, ou une bête sauvage mourir de faim, vous seriez touché de compassion. Vous voyez Dieu même pressé de la faim, qui vous demande du pain par la voix du pauvre, et vous n’en avez point de pitié. Qui peut excuser cette barbarie? Quand vous n’auriez point d’autre récompense à attendre de la charité que vous lui faites, que l’action même de cette charité et l’honneur de pouvoir rendre ce service à votre maître, cela seul, sans parler de la reconnaissance qu’il vous en témoignera à la face de toute la terre, cela seul , dis-je, ne devrait-il pas vous (12) porter à aimer les pauvres? Cependant vous voyez qu’outre cet honneur, il vous promet encore, lorsqu’il sera assis sur le trône de son Père, et que tous les hommes seront au pied de son tribunal, de vous louer devant toute la terre , et de publier que c’est vous qui l’avez nourri, qui l’avez logé, et qui l’avez revêtu lorsqu’il était pauvre. Il ne rougit point de se rabaisser dans sa gloire, afin de contribuer à la vôtre.

Si les uns sont punis si rigoureusement, c’est par une grande justice, et ce sont leurs péchés qui les condamnent : Et si les autres sont si glorieusement récompensés, c’est par une grande miséricorde, et c’est la grâce qui les couronne qui les a prévenus de sa bonté. Quand ils auraient fait mille actions de vertu; ce ne peut être que l’ouvrage de la grâce de rendre de si grands biens pour des choses si petites, et de récompenser des actions si légères et d’un moment, d’un poids éternel de gloire et de tout le bonheur du paradis.

3. Jésus, ayant achevé tous ces discours, dit à ses disciples : « Vous savez que la Pâque se fait dans deux jours, et que le Fils de l’homme sera livré pour être crucifié ». (XXIV, 1, 2.) Vous voyez, mes frères, que Jésus-Christ prend encore l’occasion de parler de ses souffrances aussitôt qu’il a parlé du royaume éternel des bienheureux et des peines infinies des réprouvés. Il semble que par là il dise à ses apôtres: Pourquoi craignez-vous les maux si courts de cette vie, puisque vous savez qu’on vous a préparé des biens qui ne finiront jamais?

Mais considérez de quelle adroite précaution il enveloppe, pour en adoucir le coup, cette nouvelle qu’il savait leur devoir être si affligeante. Car il ne dit pas ici tout simplement qu’il sera livré dans deux jours, mais « que la Pâque se fera dans deux jours, et que le Fils de l’homme sera livré ensuite pour être crucifié », pour montrer que ce qui allait se passer était un grand mystère, et une fête que toute la terre célébrerait dans tous les siècles. Il voulait encore, par là, faire connaître qu’il savait tout, et que l’avenir lui était présent. C’est pourquoi, croyant que cela leur suffisait pour leur consolation, il ne leur parle point ensuite de sa résurrection, comme il faisait dans toutes les autres occasions. Il était superflu de leur en parler encore ici après l’avoir fait tant de fois. D’ailleurs, comme la Pâque des Juifs rappelait dans leur mémoire tant de miracles que Dieu avait faits autrefois en leur faveur, il leur découvre de même que sa passion délivrerait les hommes d’une infinité de maux, et qu’elle deviendrait la source de tous les biens.

« En même temps les princes des prêtres, les docteurs de la Loi, et les sénateurs du peuple Juif s’assemblèrent dans la salle du grand prêtre appelé Caïphe (3); et tinrent conseil ensemble pour trouver moyen de se saisir de Jésus avec adresse, et de le faire mourir (4). Et ils disaient : Il ne faut point que ce soit pendant la fête, de peur qu’il ne s’excite quelque tumulte parmi le peuple (5) ». Considérez, mes frères, l’iniquité déplorable de la conduite et du gouvernement des Juifs. Lorsqu’ils entreprennent de faire l’action la plus détestable qui fut jamais, ils commencent par consulter le grand Prêtre, afin que le crime fût autorisé par celui-là même qui aurait dû l’empêcher.

Vous me demanderez peut-être combien il y avait de ces grands prêtres? La Loi défendait qu’il y en eût plus d’un. Cependant il y en avait plusieurs alors, ce qui fait assez voir dans quelle dissolution et vers quelle ruine se précipitaient les affaires des Juifs. Car Moïse avait expressément ordonné qu’il n’y eût qu’un grand prêtre, et que, lorsqu’il serait mort, on en choisirait un autre en sa place. Et c’était comme vous savez au temps de cette élection que finissait l’exil de ceux qui avaient été bannis pour avoir tué quelqu’un sans y penser, et contre leur volonté. Comment donc y avait-il tant de grands prêtres alors? sinon parce qu’ils n’étaient en charge que durant un an; comme saint Luc le marque en disant de Zacharie qu’ « il était de la famille d’Abia, l’une des familles sacerdotales qui servaient tour à tour dans le temple». L’Evangile donc appelle ici « grands prêtres » ceux qui l’avaient été autrefois, quoiqu’ils eussent cessé de l’être.

Mais quel est le conseil qu’ils prennent ensemble? De se saisir de Jésus, et de le faire mourir secrètement, parce qu’ils craignaient le peuple. C’est pourquoi ils avaient résolu de laisser passer la fête , et ils disaient entre « eux : Il ne faut point que ce soit pendant « la fête » : Le démon, et les Juifs étaient unis dans ce dessein : le démon, afin de ne point rendre la passion de Jésus-Christ publique et manifeste, et les Juifs, afin qu’ « il ne (13) s’excitât aucun tumulte parmi le peuple ». Remarquez en toute rencontre comme ils ont peu de crainte de Dieu, et combien en même temps ils craignent les hommes. Ils n’appréhendent point que la sainteté du jour de Pâque ne rende leur sacrilège encore plus énorme et plus odieux, mais seulement que le concours du peuple n’excite quelque trouble. Cependant leur colère les transportait avec tant de violence, qu’aussitôt qu’ils ont trouvé un traître ils changent d’avis , et que, ne pouvant attendre que la fête soit passée, ils sont résolus enfin contre leur première pensée de le faire mourir en un jour si saint. Leur passion également aveugle et furieuse les pressait de telle sorte qu’aussitôt qu’ils trouvèrent une occasion favorable pour la satisfaire, il leur fut impossible de différer plus longtemps.

A la vérité, Dieu par sa sagesse toute-puissante avait ménagé cet emportement pour le faire servir à ses desseins et pour tirer le bien d’un si grand mal; il ne faut pas douter néanmoins que les Juifs ne se soient rendus dignes d’une effroyable punition, en traitant si cruellement celui qui leur avait fait tant de biens, et qui avait pu négliger les autres peuples pour se donner tout entier à eux, et en faisant mourir Celui qui était l’innocence même, en ce jour si saint, jour où ils avaient coutume de délivrer les plus criminels.

Mais qui n’admirera la douceur et la miséricorde de Jésus-Christ? Après avoir été traité si outrageusement par les Juifs, il leur a néanmoins envoyé ses apôtres après sa résurrection, et il a exposé ses amis à la fureur de ces barbares pour sauver un peuple si digne de haine. Saint Paul les a conjurés en son nom de se convertir, ou plutôt lui-même parlant par la bouche de saint Paul les a conjurés de se réconcilier avec lui, en leur disant : « Nous faisons « la charge d’ambassadeurs pour Jésus-Christ, « et Dieu même vous exhortant par nous, « nous vous conjurons au nom de Jésus-Christ « de vous réconcilier avec Dieu ». (II Cor. V, 20.)

Puis donc, mes frères, que nous avons dam le Sauveur le modèle d’une charité si divine, je vous exhorte non pas à mourir comme lui pour vos ennemis, quoique cela serait à souhaiter mais au moins, puisque cette vertu est encore au-dessus de votre faiblesse, je vous conjure de n’avoir point d’envie contre ceux qui vous aiment et que vous aimez. Je ne vous dis point encore que vous cherchiez tous les moyens dé faire du bien à vos ennemis, quoique je le souhaite avec ardeur; mais, puisque vous êtes trop lâches pour aspirer à une si haute perfection, je me contente que vous étouffiez au moins en vous tous les mouvements de la vengeance.

Croyez-vous que ce lieu où je vous parle soit un théâtre , .et que l’Eglise soit un lieu de fables et de fictions? Pourquoi résistez-vous avec tant d’opiniâtreté aux avis que je vous donne et aux vérités que je vous prêche ? Ce n’est pas sans raison que Jésus-Christ a fait écrire toutes les parties de son Evangile, et particulièrement tout ce qu’il a fait et tout ce qu’il a dit aux approches de sa croix. Il a voulu que vous eussiez en sa personne un modèle de douceur, et que sa charité infinie vous servit d’exemple pour vous apprendre à aimer vos frères. Lorsque ses ennemis viennent se saisir de lui, il les renverse tous avec une seule parole; il fait en même temps un miracle pour guérir l’un de ceux qui, le venaient prendre il épouvante, la femme de son juge par des visions et des songes; il prédit ce qui devait arriver longtemps après, et il parle à son juge avec une douceur et une humilité admirable qui le devait plus toucher encore que les miracles Etant sur la croix il agit en Dieu, et il obscurcit le soleil; il fait fendre les pierres, il ouvre les sépulcres, et il ressuscite les morts; et en même temps il jette un grand cri, et il conjure son Père de pardonner sa mort à ses bourreaux. Sa charité envers les Juifs ne finit point avec sa vie. Aussitôt qu’il est ressuscité, il leur envoie ses apôtres. Il les appelle à la foi; il leur pardonne leurs péchés, et il les comble de grâces. Qui n’admirera cette bonté? Il choisit ceux qui l’ont crucifié pour les rendre enfants de Dieu, et il prend pour frères ses meurtriers.

Rougissons donc, mes frères, et soyons couverts de confusion, en voyant combien nous sommes éloignés de celui qui s’est rendu notre modèle, et qui nous commande de l’imiter. Considérant cette disproportion infinie, qui est entre lui et nous, afin qu’en nous accusant nous-mêmes, et en condamnant nos fautes, nous soyons plus disposés à entrer dans des sentiments de pénitence, et qu’au moins nous n’offensions pas ceux pour qui Jésus-Christ même adonné sa vie. Quelle honte de ne (14) vouloir pas se réconcilier avec ceux dont Jésus-Christ a acheté la réconciliation avec son Père au prix de son sang?

4. Vous pouvez faire ce que je vous demande sans dépenser votre argent, que vous avez tant de soin d’épargner lorsqu’on vous exhorte à donner aux pauvres. Souvenez-vous combien vous êtes redevables à Dieu, et je m’assure que vous n’attendrez plus que votre ennemi vienne vous demander pardon, et que vous le préviendrez et lui pardonnerez de bon coeur, afin que Dieu vous traite comme vous avez traité ce frère, et qu’il guérisse les blessures de votre âme.

On a vu souvent que les gentils qui n’avaient aucune connaissance ni aucune espérance des biens que nous attendons, ont pardonné par une générosité toute humaine les plus grands excès qu’on avait commis contre eux, et vous, qui espérez des récompenses infinies, vous différez de faire avec la grâce de Jésus-Christ ce que des hommes comme vous n’ont fait que par le seul instinct de la nature? Votre passion ne durera pas toujours. Elle s’amortira peu à peu. Prévenez donc ce temps, et étouffez-la par la crainte de Dieu, et-vous en recevrez une grande récompense: Que si vous n’en usez pas de la sorte, vous serez punis très-sévèrement pour n’avoir pas~ voulu sacrifier à Dieu ce ressentiment qui devait enfin s’éteindre de lui-même.

Si vous dites que vous vous sentez tout ému, lorsque l’injure que l’on vous a faite vous revient dans la pensée, jetez plutôt les yeux sur le bien que vous a peut-être fait autrefois celui dont vous vous plaignez, et sur le mal ‘que vous avez fait vous-même si souvent aux autres. Si l’on a médit de vous, considérez si vous n’avez jamais médit de personne. Comment osez-vous espérer que Dieu vous pardonne, vous qui ne voulez point pardonner aux autres?

Vous me dites que vous n’avez jamais dit de personne des calomnies aussi noires que celles qu’on dit contre vous. Mais peut-être que vous avez trop facilement prêté l’oreille à celles que les autres ont répandues devant vous; et qu’ainsi vous vous êtes rendu coupable de ce même crime. Si vous voulez donc comprendre quelle vertu c’est que d’oublier et de pardonner les injures, et combien cette disposition de coeur est agréable aux yeux de Dieu, jugez en par les peines rigoureuses dont il punit ceux qui se réjouissent de la vengeance qu’il exerce sur les méchants. Quoiqu’il ne les traite avec cette sévérité qu’avec justice, il ne vous est pas permis néanmoins de vous en réjouir. C’est pourquoi, après que le prophète a fait plusieurs reproches aux Juifs, il leur dit enfin ces paroles : « Ils n’ont point été touchés de compassion dans l’affliction de Joseph. Il n’est point sorti de sa maison., pour aller pleurer les malheurs de la maison qui lui était jointe». (Amos. VI, 6.) Ainsi, quoique Joseph, c’est-à-dire les tribus qui en étaient sorties, eussent senti les justes effets de sa vengeance, Dieu veut néanmoins que nous soyons sensibles à leurs maux, et que nous compatissions à leurs misères.

Que si, malgré notre dureté, nous ne laissons pas néanmoins de nous irriter contre un serviteur qui rit, lorsque nous en punissons un autre; si la méchanceté de cet homme insensible à ce que son compagnon souffre, nous offense alors, et si elle attire sur lui-même notre colère, combien Dieu, étant aussi doux et aussi bon qu’il est, doit-il s’aigrir davantage, lorsque nous trouvons notre joie dans les afflictions des autres?

Si donc, au lieu de nous réjouir dans ces occasions, nous avons au contraire de la compassion dans les maux dont Dieu frappe les hommes, nous devons compatir bien davantage à ceux qui nous ont offensés; puisque ce sentiment est l’effet et la preuve de notre charité que Dieu préfère à toutes nos autres vertus. Comme dans les fleurs et dans les couleurs, il n’y en a point de plus précieuses que celles dont on se sert pour teindre la pourpre des rois; on peut dire de même que, de toutes les vertus, il n’y en a point de plus précieuses que celles où paraît la charité qui n’éclate jamais plus que lorsque nous pardonnons les injures qu’on nous a faites.

Mais, quoi! me direz-vous, Dieu n’a-t-il donc songé qu’à celui qui a reçu l’injure, et a-t-il oublié celui qui l’a faite? Nullement. Car ne lui a-t-il pas commandé d’aller trouver celui qu’il a offensé pour se réconcilier avec lui ? Ne l’a-t-il pas comme arraché du pied de l’autel pour le porter à satisfaire premièrement son frère, afin de revenir ensuite achever son sacrifice? Mais pour vous, mes frères, n’attendez pas que vos ennemis vous viennent trouver de la sorte. Ce serait perdre votre avantage. Dieu vous promet une récompense infinie, afin que vous (15) préveniez celui qui vous a maltraités. Si vous ne vous réconciliez que parce que votre ennemi vous est venu demander pardon, et parce que Dieu vous le commande, ce n’est plus vous qui méritez le prix de la victoire ; vous le laissez remporter par celui que vous appelez votre ennemi.

Mais osez-vous bien dire que vous avez un ennemi, et le pouvez-vous dire sans rougir? Ne vous suffit-il pas d’avoir le démon pour ennemi, faut-il que les hommes le soient encore? Et plût à Dieu même que cet ange rebelle ne fût jamais devenu démon. Nous ne serions point ses ennemis, s’il ne nous avait déclaré une guerre si cruelle. Vous ne sauriez comprendre, mes frères, si vous ne l’éprouvez vous-mêmes, quelle douceur on ressent dans l’âme après une réconciliation si chrétienne. Mais quel moyen de l’éprouver, lorsque l’on a l’esprit plein d’aversion et de haine? Ce n’est qu’après avoir étouffé les inimitiés que l’on reconnaît combien il est plus doux d’aimer son frère que de le haïr. Pourquoi imitons-nous ces furieux qui se déchirent avec les dents, et qui satisfont leur rage en se dévorant l’un l’autre?

5. Souvenez-vous combien la Loi ancienne même s’opposait à ces désordres: « Toutes les voies», dit le Sages « de ceux qui se souviennent des injures, tendent à la mort. L’homme conserve sa colère contre un autre homme, et il attend que Dieu le guérisse »?(Eccl. VIII.) — Mais Dieu, dites-vous, n’a-t-il pas fait lui-même cette ordonnance dans sa loi : « Oeil pour oeil, et dent pour dent »? Comment donc après cette parole peut-il condamner ceux qui l’exécutent? — Il faut bien remarquer, mes frères, que Dieu n’a pas fait cette loi pour permettre aux hommes de se traiter cruellement les uns les autres; mais pour que la crainte de souffrir nous-mêmes nous empêchât de faire souffrir les autres. D’ailleurs cette colère dont il est parlé dans la loi, est une passion violente qui surprend l’âme par un mouvement prompt et impétueux; au lieu que le souvenir des injures est la marque d’une âme noire qui se nourrit de la haine et de la vengeance.

Vous me direz peut-être que cet homme vous a maltraité. Et moi je vous dis qu’il ne peut vous avoir fait autant de mal que vous vous en faites à vous-même par ce ressentiment que Dieu vous défend. Je dis même qu’il n’est pas possible qu’un homme de bien souffre quelque mal. Car supposons d’un côté qu’un homme vive chrétiennement avec sa femme et ses enfants, qu’il soit riche, et par conséquent exposé aux accidents ordinaires de la vie, qu’il ait beaucoup d’amis et beaucoup de charges, qu’il soit élevé en honneur, et que néanmoins il ait sans comparaison plus d’attache pour pieu et pour sa Loi sainte que pour tous ces avantages extérieurs: supposons aussi de l’autre qu’un méchant homme se déclare son ennemi, et qu’il entreprenne de le perdre. En quoi lui nuira-t-il par tous ses efforts? Il lui ôtera une partie de son bien. Il fera mourir ses enfants. Mais l’homme de bien sait qu’il les reverra après sa mort, et cette espérance l’occupe sans cesse. Peut-être même qu’on tuera sa femme? Mais il est persuadé qu’on ne doit point pleurer ceux de qui la mort n’est qu’un sommeil. L’ennemi ne sera pas satisfait encore, il le déchirera par ses calomnies. Mais celui qui regarde tous les hommes, comme l’herbe qui naît et se sèche en même temps, ne s’arrête point à leurs paroles. Enfin, cet ennemi l’enfermera dans une prison, et il le fera beaucoup souffrir. Mais quelle impression pourra-t-il faire sur l’esprit de celui qui a appris de saint Paul que, quand même l’homme extérieur se corrompt, l’intérieur se renouvelle, et que l’affliction produit la patience?

Il me semble que j’ai plus fait que je n’ai promis. Je voulais vous montrer que tous les maux ne peuvent nuire à un homme qui est tout à Dieu; et il se trouve qu’ils lui servent, bien loin de lui nuire. Ne vous emportez donc plus à l’avenir contre les autres. Epargnez-vous en les épargnant et n’affaiblissez point en vous la vigueur de vos âmes et de votre foi. La douleur que vous ressentez, lorsqu’on vous fait tort en quelque chose, vient plutôt de votre propre faiblesse, que du pouvoir de celui qui vous offense. Si on vous dit une injure, vous en versez des larmes. Si on vous dérobe, vous en pleurez aussi. Nous sommes comme des petits enfants qui, se trouvant parmi leurs compagnons, pleurent pour la moindre chose qu’on leur fait. Si ceux qui sont les plus hardis les voient, si tendres à pleurer, ils les tourmentent encore davantage. Mais s’ils s’aperçoivent qu’ils ne font que rire de ce qu’on leur dit, ils les laissent en paix. Nous sommes encore plus faibles et plus (16) insensés que ces enfants, lorsque nous pleurons pour mille choses qui ne nous devraient être qu’un sujet de rire.

Je vous conjuré donc, mes frères, de quitter toutes ces pensées d’enfants, et de travailler à vous rendre dignes du ciel où vous aspirez. Jésus-Christ veut que nous soyons des hommes parfaits. C’est à quoi saint Paul nous exhorte aussi, lorsqu’il dit : « Mes frères, n’ayez point un esprit d’enfants, mais soyez sans malice comme des enfants, et ayez un esprit d’hommes ». (I Cor. XXXIV, 20.) Allions donc la simplicité des enfants avec la sagesse des hommes de Dieu. Fuyons les inimitiés , et soyons ardents à aimer nos frères pour jouir un jour de la gloire du ciel, par la grâce et par la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ. à qui est la gloire et la puissance dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

Capturé par MemoWeb à partir de http://membres.lycos.fr/abbayestbenoit/Matthieu/079.htm  le 6/06/2003