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DE LUNITÉ DE LÉGLISE 1° Exhortation à la vigilance; 2° Les hérésies; 3° Principe de lunité; 4° Obligation de sen tenir à lunité; 5° Figures; 6° Les chefs de secte; 7° Leur crime; 8° Les hérésies prédites; 9° Union des premiers fidèles; 10° Affaiblissement de la foi. 1° Le Seigneur nous dit : Vous êtes le sel de la terre (Matt. V). Il nous recommande linnocence et la simplicité; mais il veut qua ces. vertus nous joignions la prudence. Cela posé, quoi de plus utile pour nous, mes frères bien-aimés, que de nous tenir sur nos gardes, de veiller avec sollicitude, de comprendre et de déjouer les embûches de notre mortel ennemi? Quelle honte en effet si, revêtus de Jésus-Christ, la sagesse du père, nous manquions de cette sagesse élémentaire qui nous conduit au salut? Nous navons pas à craindre seulement la persécution et ses dangereuses tentatives: quand le péril est manifeste, on se tient facilement sur ses gardes; on se prépare au combat, quand lennemi marche le front levé. Il est bien plus à craindre lorsquil sapproche en secret, lorsque, sous lapparence dune paix trompeuse, il se glisse dans lombre, comme le serpent dont il porte le nom. Son astuce est toujours la même; les (107) moyens ténébreux quil emploie pour nous séduire nont pas changé. Dès le commencement du monde, il sattaqua au premier couple humain, et, à laide de mensonges flatteurs, il trompa ces âmes encore neuves et simples. Il sattaqua de même à Jésus-Christ; il sapprocha de lui en secret, espérant réussir de nouveau dans son entreprise; mais il fut découvert, et par suite repoussé. Apprenons par cet exemple à ne pas suivre la voie du premier homme, à marcher sur les traces du Christ victorieux. Par là nous ne tomberons pas en téméraires dans le piège de la mort; mais, grâce à notre prudence, nous acquerrons des droits à limmortalité. Or comment jouir de limmortalité, si vous nobservez les préceptes du Christ, qui nous rendent vainqueurs de la mort? Il nous dit lui-même : Si vous voulez arriver à la vie, observez les commandements (Matt., XIX.); et dans un autre endroit: Si vous faites ce que je vous prescris, je ne vous donnerai plus le nom desclaves, mais celui damis (Joan., XV). Tel sont les hommes, au jugement de Dieu, forts et inébranlables, les hommes appuyés sur le rocher solide, capables de résister aux tempêtes et aux tourbillons du siècle. Celui qui entend mes paroles et les met en pratique, dit Jésus-Christ, ressemble à lhomme sage qui bâtit sur le rocher les fondements de sa demeure. La pluie tombe, les fleuves débordent, les vents se déchaînent et se précipitent sur la maison; mais elle ne tombe pas parce quelle est fondée sur la pierre (Matt., VII.). Nous devons donc nous attacher aux paroles du Maître, recueillir ses enseignements, imiter ses actions. 2° Or, comment peut-on dire quon croit en Jésus-Christ quand on naccomplit pas ses commandements? Peut-on recevoir la récompense de la foi quand on na pas foi aux préceptes? (109) Non; on ne peut querrer, tourbillonner sous le souffle de lerreur, comme la poussière que le vent emporte, et on doit désespérer darriver au salut puisquon nen suit pas le chemin. Evitez donc tous les pièges, mes frères bien-aimés, non-seulement ceux qui se montrent aux yeux; mais encore ceux, qui cachent dans les ténèbres leur astuce et leur malice. Quoi de plus astucieux, quoi de plus subtil que notre ennemi? Jésus, en sincarnant, triomphe de ses artifices et de sa puissance; alors, en effet, la lumière se montre aux nations pour les sauver; les sourds entendent la voix de la grâce; les aveugles ouvrent les yeux pour voir le Dieu véritable; les infirmes reviennent pour toujours à la santé; les boiteux courent à lEglise; les muets, sentant leur langue se délier, font entendre laccent de la prière, Mais lennemi ne savoue pas vaincu. Voyant les idoles abandonnées et ses temples désertés par la foule devenue croyante, il imagine un nouveau piège afin de tromper les impudents par lapparence même du nom chrétien. Il invente les hérésies et les schismes pour troubler la foi, corrompre la vérité, scinder lunité. Il séduit ceux quil ne peut retenir dans la voie des anciennes erreurs, et il les trompe en leur montrant de nouveaux chemins. Il ravit les fidèles à lEglise, et tout en leur persuadant quils évitent la nuit du siècle et quils approchent de la lumière, il les plonge, sans quils sen aperçoivent, dans de nouvelles ténèbres. Ainsi, déserteurs du lÉvangile et de la loi de Jésus-Christ, ils sobstinent à se dire chrétiens; ils marchent dans les ténèbres, et ils croient jouir de la lumière. Lennemi les flatte, il les trompe, cet ennemi qui, selon lapôtre, se transfigure en ange de lumière, qui transforme ses ministres eux-mêmes en prédicateurs de la vérité, donnant la nuit au lieu du jour, la mort au lieu du salut, le désespoir à la place de lespérance, la perfidie. sous le voile de la foi, lantéchrist sous le nom adorable du Christ. Cest ainsi quau moyen dune vraisemblance menteuse, ils privent les âmes de la vérité. (111) .
3° Cela arrive, mes frères bien aimés, parce quon ne remonte pas à lorigine de la vérité; parce quon ne cherche pas le principe, parce quon ne conserve pas la doctrine du maître céleste. Si on se livrait à cet examen, on naurait besoin ni de longs traités, ni darguments. Rien de plus facile que détablir sur ce point la foi véritable. Dieu parle à Pierre: Je te dis que tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église et les puissances des enfers nen triompheront jamais. Je te donnerai les clefs du royaume du Ciel, et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans le Ciels et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans le Ciel (Matt., XVI.). Après sa résurrection, il dit au même apôtre : Pais mes brebis. Sur lui seul il bâtit son Église, à lui seul il confie la conduite de ses brebis. Quoique, après sa résurrection,. il donne à tous ses apôtres un pouvoir égal, en leur disant : Comme mon Père ma envoyé, je vous envoie; recevez le Saint-Esprit les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez (Joan., XX), cependant, afin de rendre lunité évidente, il a établi une seule chaire et, de sa propre autorité, il a placé dans un seul homme le principe de cette même unité. Sans doute les autres apôtres étaient ce que fut Pierre; ils partageaient le même honneur, la même puissance, mais tout se réduit à lunité. La primauté est donnée à Pierre, afin quil ny ait quune seule Église du Christ et une seule chaire. Tous sont pasteurs; mais on ne voit quun troupeau dirigé par les apôtres avec un accord unanime. LEsprit-Saint avait en vue cette Eglise une, quand il disait dans le Cantique des cantiques: Elle est une ma colombe, elle est parfaite, elle est unique pour sa mère; elle est lobjet de toutes ses complaisances (Cant., VI). Et celui qui ne tient pas à lunité de lÉglise croit avoir la foi! Et celui qui résiste à lÉglise, qui déserte la chaire de Pierre sur laquelle lÉglise repose, se flatte (113) dêtre dans lÉglise! écoutez lapôtre saint Paul; il expose lui aussi le dogme de lunité : Un seul corps, un seul esprit, une seule espérance de votre vocation, un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu (Ephés., IV). Nous devons tenir fortement à cette unité, nous devons la défendre, nous surtout évêques, qui occupons la première place dans lÉglise, afin que le corps épiscopal soit un et indivisible. Que personne naltère, par le mensonge, la fraternité qui nous unit; que personne, par des enseignements perfides, ne nuise à la sincérité de notre foi. Lépiscopat est un, chacun de nous possède cette dignité solidairement avec ses frères. LÉglise aussi est une, quoique, par leffet de sa fécondité, elle sétende sur une immense superficie. Ainsi les rayons innombrables du soleil ne font quune seule lumière; larbre a des rameaux nombreux, mais un tronc unique solidement attaché au sol ; plusieurs ruisseaux coulent de la source et portent au loin leurs, eaux abondantes, mais la source est unique. Cherchez à, enlever au soleil un de ses rayons, lunité de la lumière ne souffrira pas cette division; séparez un rameau de larbre, il se flétrira; écartez un ruisseau de la fontaine, il se desséchera. Il en est de même de lÉglise de Dieu : répandue partout, elle éclaire lunivers de ses rayons; mais il ny a quune seule lumière inséparable du corps qui la produit; arbre gigantesque, elle étend partout ses rameaux chargés de fruits; fontaine intarissable, elle porte au loin ses eaux abondantes et fécondes; mais il ny a quun principe, un tronc, une source, une mère dont la fécondité remplit lunivers. Le sein de cette mère nous donne la naissance, son lait nous nourrit, son souffle nous anime. Lépouse du Christ ne peut souffrir ladultère ; elle est incorruptible; elle ne connaît quune seule maison, quun seul lit conjugal. Cest elle qui nous conserve pour Dieu, et qui, après nous avoir engendrés, nous conduit au (115) royaume céleste. Quiconque se sépare de lÉglise véritable, pour se joindre à. une secte adultère, renonce aux promesses de lÉglise. Les promesses du Christ ne sont pas pour celui qui abandonne son Église. Cet homme est un étranger, un profane, un ennemi. Non, on ne peut avoir Dieu pour père si on na pas lÉglise pour mère. Au temps du déluge, pouvait-on se sauver hors de larche de Noé? De même aujourdhui, hors de lÉglise, le naufrage est certain. Cest lenseignement de Jésus-Christ : Celui qui nest pas avec moi est contre moi, et celui qui ne recueille pas avec moi dissipe (Matt., XII). Celui qui rompt les liens de la paix et de la concorde établis par le Christ agit contre le Christ; celui qui recueille hors de lÉglise dissipe lÉglise du Christ. Le Seigneur a dit encore : Moi et mon Père ne sommes quun (Joan., X.); et Jean, en parlant du Père et du Fils et du Saint-Esprit, ajoute, et ces trois ne sont quun. Qui donc pourrait croire que cette unité, née de lunité divine, cimentée par les sacrements célestes, peut être scindée selon le caprice des volontés rivales? Perdre cette unité, cest perdre la loi divine, la foi dans le Père et le Fils, la vie, le salut. 5° Ce dogme de lunité est figuré dans lÉvangile par la tunique du Christ : les soldats ne la partagèrent pas; mais ils La tirèrent au sort et ainsi elle resta dans son entier. Écoutez lévangéliste : Quant à la tunique, comme elle nétait pas cousue, mais entièrement tissée, ils se dirent les uns aux autres : ne la partageons pas, mais tirons au sort pour voir à qui elle appartiendra (Joan., XIX.). Elle représentait cette unité qui vient du Ciel, cest-à-dire de Dieu, qui ne peut être violée par les hommes, mais qui doit subsister en entier et sans la moindre altération. Or, comment posséder le vêtement du Christ, quand on scinde et quon divise lÉglise du Christ? (117) Le Livre des Rois nous offre un exemple contraire. A la mort de Salomon, le royaume et le peuple se divisèrent. Alors le prophète Achias alla dans la campagne au devant de Jéroboam et, faisant de son manteau douze parts, il lui dit: Prends dix de ces morceaux, car voilà ce que dit le Seigneur Je diviserai le royaume de Salomon et je te donnerai dix tribus; deux tribus resteront à son héritier, à cause de David mon serviteur et de Jérusalem que jai choisie pour y établir mon nom (III Reg., XI.). Lorsque les douze tribus dIsraël étaient divisées, le prophète Achias déchira son manteau; mais il nen est pas de même du peuple du Christ: là toute scission est impossible; aussi sa tunique tissée et dune seule pièce ne fut pas déchirée par les soldats. Elle nous montre, par son intégrité, la concorde qui doit exister parmi les disciples du Christ; elle est la figure de lunité de lÉglise. Qui donc pousserait assez loin la scélératesse, la perfidie ou la fureur de la discorde pour croire quon peut scinder lunité divine pour oser déchirer la robe du Seigneur, lÉglise du Christ? Il nous dit lui-même dans son Évangile : Il ny aura quun seul troupeau et un seul pasteur (Joan., X.); et vous croyez que, dans le même lieu, il peut exister plusieurs pasteurs ou plusieurs troupeaux? Lapôtre saint Paul nous recommande la même unité : Je vous supplie, mes frères, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, de suivre tous la même doctrine, afin quil ny ait pas de schismes parmi vous. Soyez unis dans le même sentiment, dans la même croyance (I Cor., I). Il dit encore : Supportez-vous les uns les autres dans la charité; efforcez -vous de conserver lunité de lesprit dans le lien de la paix. Vous croyez quon peut vivre hors de lÉglise, quon peut sy établir une demeure, alors quil fut dit à Raab, qui était la figure de lÉglise : Introduis dans ta maison ton père, ta mère, tes (119) frères, toute ta famille, et quiconque en franchira le seuil périra ( Jos., II)? De même, dans lExode, la cérémonie de la Pâque porte que lagneau, qui est la figure du Christ, doit être mangé dans une seule maison. Écoutez plutôt la parole du Seigneur : Il sera mangé dans une seule maison et vous ne jetterez dehors aucune partie de sa chair (Exod., XII.). Jeter dehors la chair de Jésus-Christ, le Saint du Seigneur, serait un sacrilège : les croyants nont donc. quune seule maison, quune seule Église. Cest cette maison,. cest lharmonie qui y règne que le Saint-Esprit a en vue quand il dit dans les Psaumes: Dieu réunit dans la même, demeure ceux qui sont unis par la même pensée, le même sentiment (Ps. LXVII.); cest-à-dire, dans la maison de Dieu, dans lÉglise du Christ, habitent les âmes simples, unies ensemble par les liens dune foi commune. Voilà pourquoi lEsprit-Saint se montre sous la forme dune colombe. La colombe est un oiseau simple et joyeux, sans fiel, sans violence; il ne déchire ni avec son bec ni avec ses ongles; il aime les habitations humaines, se contente dune seule demeure. Les colombes élèvent leurs petits en commun, volent ensemble serrées les unes contre les autres, vivent en famille, témoignent leur amour par des caresses, en un mot, elles paraissent navoir toutes quun même sentiment. Ainsi, dans lÉglise, ayons cette simplicité, cette charité qui fait de nous des colombes, cette douceur et cette innocence qui nous rend semblables aux agneaux et aux brebis. La férocité des loups, la rage des chiens, le venin mortel des serpents, la cruauté des bêtes sauvages peuvent-ils trouver place dans un coeur chrétien? Lorsque des hommes souillés de ces passions infâmes se séparent de lÉglise, il faut sen féliciter; du moins ils ninfecteront pas de leur contagion mortelle les colombes et les brebis du Christ. Lamertume ne peut sunir à la douceur, lobscurité à la lumière, la pluie à la (121) sérénité, la lutte à la paix, la stérilité à. labondance, la sécheresse â la source, la tempête au calme de latmosphère. Ce ne sont pas les bons, croyez-le bien, qui peuvent se séparer de lÉglise. Le vent nemporte pas le pur froment, la tempête ne renverse pas le chêne solidement assis sur ses racines. Cest la paille inutile que le vent emporte; cest larbre faible et sans vigueur qui est renversé par les tourbillons. Ils sont sortis du milieu de nous, dit lapôtre saint Jean, mais ils ne furent jamais des mitres; sils lavaient été, ils seraient restés avec nous (I Joan., II). La cause des hérésies passées et présentes ce sont ces esprits pervers qui ne peuvent rester en paix, ces hommes perfides qui brisent les liens de lunité. Dieu permet et souffre ces désordres pour laisser à la liberté humaine toute son intégrité. Ainsi lexamen de la vérité devient pour le coeur et lesprit une épreuve décisive, et la foi des élus en sort victorieuse pour se montrer au grand jour. LEsprit-Saint, dailleurs, a eu soin de nous en prévenir par la bouche de lapôtre: Il faut quil y ait des hérésies pour faire connaître les vrais disciples du Christ (I Corint., XI.). Par là les fidèles sont éprouvés, les perfides. découverts; même avant le jour du jugement, les âmes des justes sont séparées de celles des méchants et le froment delà paille. Ces chefs de secte se placent deux-mêmes et sans lordre divin à la tête de leurs concitoyens; ils semparent du pouvoir, sans sinquiéter de lordination qui le donne; ils prennent le titre dévêques, sans que personne leur confère lépiscopat. Lesprit nous les représente, au livre des Psaumes, assis dans la chaire empestée; ce sont, dit-il, les fléaux de la foi; sur leur langue réside la malice du serpent; ils sont habiles à corrompre la vérité; ils vomissent de leur bouche empoisonnée des venins mortels; leur parole se glisse comme la vipère; leur (123) contact seul frappe dune blessure mortelle les esprits et les coeurs (I Corint., XI). Le Seigneur sélève contre ces faux prophètes; il cherche à en détourner son peuple : Nécoutez pas leurs paroles, dit-il, car ils sont le jouet de leurs propres visions. Ils parlent, mais ce nest pas Dieu qui parle par leur bouche. Ils disent à ceux qui repoussent la parole du Seigneur: la paix sera avec vous. Ils disent à ceux qui suivent leurs conseils perfides: tout homme qui suit le mouvement de son coeur na à craindre aucun mal. Je nai jamais parlé à ces faux prophètes, dit le Seigneur; ils prophétisent de leur propre autorité. Sils étaient restés fidèles à ma loi, sils avaient écouté ma parole, sils avaient travaillé à instruire mon peuple, je les aurais détournés de leurs funestes pensées (Jér. XXIII). Le Seigneur désigne encore ces mêmes prophètes lorsquil dit : Ils mont abandonné, moi la fontaine deau vive, et ils se sont creusé des réservoirs vermoulus qui ne peuvent contenir leau (Jér., II.). Il ne peut y avoir quun baptême, et eux pensent pouvoir baptiser (On peut voir ici le principe des erreurs de Saint Cyprien relativement au baptême conféré par les hérétiques.). Après avoir quitté la fontaine de vie, ils promettent la grâce de leau régénératrice. Loin de purifier les. hommes, ils les souillent davantage; loirs de laver les fautes, ils les multiplient. Une telle génération donne des enfants, non à Dieu, mais au démon. Nés du mensonge, ils nont aucun droit aux promesses de la vérité; issus de la perfidie, ils perdent la grâce de la foi. Peuvent-ils compter sur, la paix ceux qui, aveuglés par lesprit de discorde, ont ruiné la paix du Seigneur? Certains pourraient peut-être se faire illusion, en interprétant mal ces paroles du Christ : Là où se trouvent deux ou trois personnes réunies en mon nom, je suis au milieu (125) delles ( Matt., XVIII..). Ces corrupteurs de lÉvangile, ces faux interprètes des Écritures citent la fini du texte et en suppriment le commencement, selon les besoins de leur cause. De même quils sont eux-mêmes retranchés de lÉglise, ils scindent, pour en altérer le sens, les paroles de lÉcriture. Le Seigneur, exhortant ses disciples à la concorde et à la paix, leur dit : Si deux dentre vous sentendent sur la terre pour une chose à demander, quelle quelle soit, elle vous sera accordée par mon Père qui est dans le Ciel; car là où se trouvent deux ou trois personnes réunies en mon nom, je suis au milieu delles. Il montre par là que la grâce est accordée, non à la multitude de ceux qui prient, mais à la concorde et à la charité qui les animent. Si deux dentre vous, dit-il, sentendent sur la terre: voilà la concorde; il la place en première ligne, il nous y exhorte de tout son pouvoir. Or, comment peut-on se mettre daccord avec quelquun, lorsquon est séparé du corps de lÉglise et de toute la société des frères? Comment deux ou trois personnes peuvent-elles se réunir au nom de Jésus-Christ, lorsquil est certain quelle sont séparées de Jésus-Christ et de son Évangile? Ce nest pas nous qui nous sommes éloignés deux, mais ils se sont éloignés de nous. De là les hérésies et les schismes : en cherchant à former des assemblées hors du sein de lÉglise, ils ont abandonné le principe et la source de la vérité. Mais le Seigneur parle du milieu de lÉglise; il parle à ceux sont dans lÉglise et il leur dit : Ne fussiez-vous que deux ou trois, si vos âmes sont unies par les liens de la charité, vous obtiendrez de Dieu leffet de vos prières. Là où se trouvent deux ou trois personnes réunies en mon nom, je suis au milieu delles, cest-à-dire avec les simples, avec les amis de la paix, avec ceux qui craignent Dieu et qui observent ses commandements. Il est avec, ces hommes, quoiquils ne soient (127) que deux ou trois, comme il était autrefois avec les trois enfants dans la fournaise. Ils se confiaient simplement à Dieu; ils persévéraient dans lunion fraternelle : aussi un souffle rafraîchissant vint tempérer lardeur des flammes qui les enveloppaient. Deux apôtres étaient en prison; eux aussi persévéraient dans la simplicité et lunion fraternelle le Seigneur vint à leur secours, il brisa leurs liens et les renvoya sur la place publique pour prêcher lÉvangile à la multitude. Ainsi donc lorsquil dit : Là où seront deux ou trois personnes réunies en mon nom, je serai au milieu d elles, il ne sépare pas les hommes de lEglise, lui qui en est le fondateur, mais il reproche aux perfides hérétiques lesprit de discorde qui les anime, il recommande la paix aux fidèles, il montre quil se trouve plutôt avec deux ou trois personnes priant dune voix unanime quau milieu dune foule en discorde, et que les voeux des premiers, vivifiés par la charité, auront plus dempire sur le cur de Dieu que les voix tumultueuses des autres. 7° Cest pour cela que Jésus a dit en nous imposant la loi de la prière : Lorsque vous vous mettrez a prier, si vous avez quelque chose contre quelquun, pardonnez, afin que votre Père qui est dans le Ciel vous pardonne vos péchés (Marc., XI.). Il repousse de lautel celui qui vient offrir son sacrifice avec la haine dans le coeur; il lui ordonne daller dabord se réconcilier avec son frère et de venir ensuite présenter son offrande. Dieu naccueillit pas les présents de Cain : il ne pouvait être en paix avec Dieu celui qui par jalousie avait voué à son frère une haine aveugle. Quelle paix peuvent donc se promettre nos ennemis? quels sacrifices croient-ils célébrer quand ils dressent autel contre autel ? simaginent-il,s que le Christ assiste à leurs réunions, alors que ces réunions se font hors de lÉglise? Leur crime est si grand que, sils mouraient en confessant la foi, leur sang ne suffirait pas à le laver. La discorde anéantit toute charité; (129) rien ne peut lexpier, pas même le martyre. Peut-il y avoir des martyrs hors de lÉglise? Peut-on arriver au royaume céleste, quand on abandonne celle en qui nous devons régner? Le Christ nous a donné la paix; il nous a recommandé la concorde et lunion; il nous a prescrit de conserver dans leur intégrité les liens de la charité et de lamour il ne peut donc se dire martyr celui qui ne persévère pas dans la charité fraternelle. Cest aussi la doctrine de lapôtre saint Paul: Quand ma foi serait capable de transporter les montagnes, si je nai pas la charité, je ne suis rien. Quand je distribuerais tous mes biens aux pauvres, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je nai pas la charité, je ne gagne rien. La charité est magnanime, bienveillante, sans jalousie, sans pensée amère; elle ne senfle pas, ne sirrite pas, ne pense pas le mal; elle aime tout, croit tout, espère tout, supporte tout. La charité ne périt pas (I Corint., XIII). Vous lentendez, mes bien-aimés, la charité ne périt pas; elle vivra dans le royaume céleste; elle sera le lien éternel et indissoluble des élus. Mais, pour la discorde, elle sera à tout jamais frappée dexclusion. Le Christ a dit : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés moi-même. Il a promis une récompense à ceux qui observeraient ce précepte : comment mériterait-il la récompense celui qui, par des dissensions perfides, anéantit la charité du Christ? Celui qui na pas la charité ne possède pas Dieu, dit lapôtre saint Jean, car Dieu est amour; celui qui persévère dans lamour demeure en Dieu, et Dieu en lui (I Joan., IV.). Les déserteurs de lÉglise de Dieu rie peuvent demeurer en Dieu. Quils périssent dans les flammes, quils meurent sous la dent des bêtes, ce nest pas un-titre à la récompense, mais le châtiment de leur perfidie; ce nest pas la fin glorieuse dune vie chrétienne , mais le dernier acte dun aveugle désespoir. Ils (131) peuvent recevoir la mort, mais non pas la couronne. Ils se disent chrétiens, comme le démon se dit le Christ, selon cet avertissement du Maître : Plusieurs viendront en mon nom, disant : Je suis le Christ; et ils séduiront la multitude (Marc., XIII.). De même que le démon nest pas le Christ, quoiquil se serve de son nom pour séduire, ainsi lhomme qui ne persévère pas dans la vérité (le lÉvangile et de la foi ne peut se dire chrétien. Certes, cest une chose sublime et admirable que de prophétiser, chasser les démons, opérer des prodiges; et pourtant le dépositaire de tous ces pouvoirs ne peut arriver au royaume céleste quautant quil suit le chemin de la vérité et de la justice. Le Maître nous en avertit lui-même : Plusieurs diront en ce jour : Seigneur, Seigneur, navons-nous pas prophétisé, navons-nous pas chassé les démons, navons-nous pas fait de grands prodiges en votre nom? et je leur dirai : Je ne vous connais pas; éloignez-vous de moi, hommes diniquité (Matt., VII.). Cest par la justice quon peut fléchir la justice de Dieu; cest en obéissant à ses préceptes que nous pouvons obtenir la récompense due à nos mérites. Le Seigneur établit en deux mots, dans lÉvangile, les fondements de notre espérance et de notre foi : Votre Dieu, dit-il, est un Dieu unique. Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre coeur, de tout votre esprit et de toutes vos forces cest là le premier commandement. Le second commandement est semblable au premier : Vous aimerez votre prochain comme vous-même. Dans ces deux commandements se trouvent toute la loi et les prophètes (Marc, XII). En renfermant dans deux préceptes les prophètes et la loi, le Seigneur nous recommande lunité et la charité. Lunité et la charité! ils sen occupent bien ces fauteurs de discordes qui. emportés par une haine aveugle, scindent lÉglise, détruisent la foi, troublent la paix, ruinent la charité, profanent nos mystères. (133) Ce fléau, mes frères bien-aimés, a commencé depuis longtemps; mais, de nos jours, ses ravages deviennent plus affreux. Les hérésies et les schismes, en se multipliant, répandent davantage leurs poisons. Nen soyons pas étonnés; il doit en être ainsi au déclin du monde; lEsprit-Saint, par la bouche de lapôtre, la prédit: Aux derniers jours, viendront des temps difficiles. On verra paraître des hommes pleins de confiance en eux-mêmes, superbes, vaniteux, avares, blasphémateurs, désobéissants, ingrats, impies, sans affection, sans bonne foi, délateurs, débauchés, cruels, ennemis de tout bien, traîtres, insolents, enflés dorgueil, préférant leurs passions à Dieu, altérant les dogmes de la religion et ne croyant pas à son origine et à sa vertu divine. Ces hommes se glissent dans les maisons; ils séduisent des femmes faibles et chargées de fautes qui se laissent conduire par de vains désirs. Ils cherchent sans cesse à apprendre et narrivent jamais à la science de la vérité. Autrefois Jamnès et Mambrès résistèrent à Moïse : eux de même résistent à la vérité, égarés quils sont par leur corruption et leurs erreurs. Mais leur succès sera de courte durée; bientôt leur perversité sera découverte, comme celle des ennemis de Moïse (II Thess., III). Toutes ces prophéties saccomplissent, et comme la fin du monde approche, ces hommes paraissent pour nous éprouver. Grâce à la fureur du démon, toutes les passions sagitent à la fois: lerreur séduit les âmes déjà. égarées par lorgueil, la jalousie les enflamme, la cupidité les aveugle, limpiété les déprave, la vanité les enfle, la discorde les exaspère, la colère les précipite à leur ruine. Ne nous laissons pas troubler ou émouvoir par lexcessive perfidie dun si grand nombre; mais plutôt, puisque la chose est prédite, servons-nous-en pour fortifier notre foi. La conduite des hérétiques est conforme à la prédiction. Donc, mes frères, appuyés sur la prophétie, tenez-vous en garde contre eux, car le Seigneur a dit: Méfiez-vous; (135) je vous ai tout annoncé davance. Évitez ces hommes, je vous en supplie, repoussez leurs paroles perverses comme une contagion mortelle, selon cette parole des Livres saints : Fermez rigoureusement vos oreilles et nécoutez pas les méchants; et ailleurs : Les mauvais propos corrompent les bonnes moeurs. 8° Tels sont les hommes que nous devons fuir; la parole du Seigneur est formelle : Ce sont des aveugles, dit-il, et des conducteurs daveugles. Si un. aveugle conduit un autre aveugle, tous deux tomberont dans la fosse (Matt., XV.). Si un homme est séparé de lÉglise, évitez-le, fuyez-le. Cest un pervers, un pécheur, condamné par sa propre conduite. Eh quoi! il simagine être avec le Christ, celui qui agit contre les prêtres du Christ, qui se sépare de lassemblée du clergé et du peuple du Christ? Armé contre lÉglise, il combat linstitution de Dieu. Ennemi de lautel et du divin sacrifice, perfide envers la foi, sacrilège envers la religion, serviteur désobéissant, fils impie, frère révolté, il méprise les évêques de Dieu, il abandonne ses prêtres et il dresse un autel étranger; il fait monter vers le Ciel une prière sacrilège, il profane par un sacrifice menteur la sainteté de lhostie divine. Il ne sait donc pas que ceux qui sélèvent contre lordre divin sont punis de leur audacieuse témérité? Coré, Dathan et Abiron, révoltés contre Aaron et Moïse, avaient voulu sattribuer lhonneur doffrir à Dieu des sacrifices; à linstant même, ils reçurent leur châtiment : la terre sentrouvrit sous leurs pas et les engloutit vivants dans ses profondeurs. La justice divine ne se contenta pas de frapper ceux qui furent les auteurs de la sédition; mais deux cent cinquante hommes qui avaient partagé leur crime, en sattachant à leur parti, périrent consumés par le feu du Ciel. Dieu nous montre par ce châtiment terrible que les méchants, en cherchant à détruire lordre divin, sattaquent à Dieu lui-même. Il en fut de même du roi Osias. Malgré la loi divine et les (137) résistances du grand prêtre Azarias, il porta la main à lencensoir et sarrogea par la violence le droit de sacrifier. Le châtiment ne se fit pas attendre. : frappé par la colère divine, son front fut souillé de la lèpre. Ainsi cette partie du corps où Dieu imprime un caractère sacré pour désigner ses élus, porta les traces de-la vengeance céleste. Les fils dAaron placèrent sur lautel un feu profane : ils furent frappés de mort en présence du Dieu quils avaient offensé. Ils imitent ces grands coupables ceux qui sattachent à des doctrines étrangères, méprisent la tradition divine et lui substituent leurs propres folies. Le Seigneur sélève contre eux dans son Évangile : Vous rejetez lordre de Dieu pour établir vos traditions (Marc, VII.). Ce crime est pire que celui des apostats qui, admis à la pénitence, cherchent à fléchir la justice du Ciel par leurs expiations. Chez ceux-ci on cherche lÉglise, on implore son pardon; chez les hérétiques on lui résiste en face. Un apostat a pu céder à la violence; lhérétique, de son plein gré persévère dans le crime. En succombant dans la persécution, on ne nuit quà soi-même; en se mettant à la tête dune hérésie ou dun schisme, on entraîne la multitude et on la trompe. Dans le premier cas, il ny a danger que pour une seule âme, dans le second, que dâmes se perdent! Celui qui tombe comprend sa faute, il la déplore amèrement; mais lhérétique se glorifie de son crime, il sy complaît, il sépare les enfants de la mère, les brebis du pasteur, il profane les sacrements institués par Dieu lui-même. Le premier ne pèche quune fois, le second tous les jours. Enfin lapostat peut encore recevoir la palme. du martyre et par suite la couronne céleste; mais le sectaire, mis à mort hors de lÉglise, na droit à rien. Ne vous étonnez pas, mes frères bien-aimés, de voir des confesseurs tomber dans lhérésie : ce nest pas plus étonnant que den voir dautres commettre des fautes graves. La (139) confession du nom de Jésus-Christ ne nous garantit pas des embûches du démon, pas plus quelle néloigne entièrement de nous, pendant cette vie, les tentations, les périls, les séductions du siècle. Sil en était ainsi, nous ne verrions pas, chez des hommes qui ont confessé la foi, ces fraudes, ces impuretés, ces adultères qui arrachent parfois nos gémissements. et nos larmes. Pour être confesseur, on nest ni plus grand, ni plus saint, ni plus cher à Dieu que Salomon. Tant quil marcha dans la voie du Seigneur, Salomon conserva son amitié; en quittant le droit chemin, il perdit la grâce divine, selon cette parole de lÉcriture : Le Seigneur excita Satan contre Salomon lui-même. De là cette autre parole: Soyez fidèle, de peur quun autre ne reçoive votre couronne (Apoc., III). Dieu nous parlerait-il de la perte de la. couronne de la sainteté, si en perdant la sainteté nous ne perdions infailliblement la couronne? La confession du nom chrétien est le commencement de la gloire, mais elle nassure pas définitivement la récompense céleste; elle rehausse notre dignité, mais sans nous conduire au couronnement de lédifice. Il est écrit: Celui qui persévèrera jusquà la fin sera sauvé; donc tout ce quon fait avant la fin est un degré par lequel on arrive au faîte du salut. Mais ce nest pas encore le salut. Vous êtes confesseur de la foi, cest bien; mais prenez garde, le péril est encore plus grand, parce que lennemi est plus furieux. Vous êtes confesseur de la foi : raison de plus pour vous attacher à lÉvangile du Seigneur, vous qui navez mérité votre gloire que par lÉvangile. Le Seigneur a dit: On demandera beaucoup à celui qui a beaucoup reçu. Plus on est élevé en dignité, plus on doit être fidèle. Que personne ne périsse par lexemple dun confesseur de la foi; que personne ne trouve dans ses moeurs des leçons dinjustice, dorgueil, de (141) perfidie. Vous êtes confesseur, soyez donc humble et patient, soyez modeste et réservé dans votre conduite; soyez digne du nom que vous portez et imitez le Christ dont vous proclamez la divinité. Jésus a dit : Celui qui sélève sera abaissé et celui qui sabaisse sera élevé. Lui-même, le Verbe, la Puissance, la Sagesse du Père, a été élevé parce quil sest abaissé sur la terre. Comment donc., aimerait-il lorgueil, lui qui nous fait un précepte de lhumilité et qui, à cause de cette humilité, a reçu de son père le plus sublime de tous les noms? Vous êtes confesseur du Christ; encore une fois, cest bien; mais alors ne blasphémez pas la majesté et la divinité, du Christ. Votre langue lui a rendu témoignage, quelle ne soit donc plus un instrument de médisance, de troubles, de haines, de discordes. Quelle ne distille plus sur les fidèles et sur les prêtres de Dieu le venin de la calomnie, assaisonné de quelques mots déloge. Du reste, sachez-le bien, si vous reprenez votre vie coupable et criminelle, si vous perdez par vos mauvaises moeurs le mérite de votre confession, si vous souillez votre vie par des vices honteux, si, en un mot, désertant lÉglise où vous avez reçu votre titre de confesseur, vous brisez les liens de lunité et imprimez à votre foi première la flétrissure de la perfidie, vous compteriez en vain sur votre confession pour arriver à la récompense céleste. Loin de là, vous ne méritez que de plus graves châtiments. Le Seigneur choisit Judas et le plaça parmi ses apôtres, et cependant Judas trahit son maître; niais la fidélité et, la fermeté des apôtres ne furent pas ébranlées parce que le traître séloigna de leur société. Il en est de même parmi nous: la sainteté et la dignité des confesseurs restent les mêmes, malgré la défection de quelques-uns. Lapôtre saint Paul va au-devant de cette objection : Quelques-uns dentreux, dit-il, firent défection; est-ce que leur infidélité anéantit la foi en Dieu? non. Dieu est la vérité même et tout homme est menteur (Rom., III.). Une partie des confesseurs, et cest la meilleure et la (143) plus nombreuse, demeure ferme dans sa croyance, ferme dans la loi et dans les préceptes du Seigneur. Certes, ils ne séloignent pas de lÉglise ceux qui se souviennent quils y ont reçu la grâce par la miséricorde de Dieu. Ils se séparent de ceux qui confessèrent autrefois avec eux le nom de Jésus-Christ, et leur foi nen est que plus glorieuse. Ils évitent la contagion du crime, pour jouir des purs reflets de la lumière évangélique, et ils ont dautant plus de mérite à conserver la paix du Christ quils sont sortis vainqueurs de leurs combats avec le démon. Je vous en supplie, mes frères bien-aimés, si c est possible, quaucun de vous ne périsse : cest là que tendent mes conseils et mes exhortations. Que lÉglise, notre mère, fière de sa fécondité, renferme dans son sein tout un peuple ne formant quun seul corps, nayant qu une seule et même foi . Si certains schismatiques, auteurs de toutes nos dissensions, sobstinent dans leur aveugle démence et repoussent nos conseils salutaires, vous, du moins, dont la simplicité a été surprise, vous, séduits un instant par les artifices de lerreur, brisez ces liens perfides où vous êtes enveloppés, sortez de ces sentiers ténébreux, reconnaissez la route qui conduit directement au Ciel. Écoutez lapôtre : Nous vous prescrivons, au nom de Jésus-Christ, de vous séparer des frères qui marchent en dehors de toute règle et non selon la tradition quils ont reçue de nous. Ne vous laissez pas égarer, dit-il encore, par des paroles trompeuses; car cest à cause de cela que Dieu a fait tomber sur le peuple rebelle le poids de sa colère. Ne participez donc pas à leurs erreurs (II Thess., III). 9° Éloignez-vous des transgresseurs de la loi, que dis-je, fuyez-les, de peur quunis à eux dans la voie de lerreur et du crime vous ne quittiez le chemin véritable et ne partagiez leur châtiment. Dieu est un, le Christ est un, lÉglise est une, la foi est une, et le peuple chrétien, uni par le ciment de la (145) charité, ne forme quun seul corps. Lunité ne peut être scindée sans cesser dêtre, de même quun corps ne peut être coupé par fragments sans périr. Lenfant quon retire du sein de sa mère ne peut vivre et respirer seul; il perd la substance qui le nourrissait. LEsprit-Saint nous dit : Quel est lhomme qui veut vivre et voir de longs jours? Que le mal ne souille jamais votre langue, que vos lèvres ne prononcent aucune parole insidieuse. Évitez le mal et faites le bien; cherchez la paix et suivez-la toujours (Ps. XXXIII). Lenfant de la paix doit rechercher la paix et la conserver, précieusement; celui qui connaît et aime les liens de la charité doit interdire à. sa langue toute parole haineuse. La veille de sa Passion, le Seigneur ajouta à tous ses enseignements cette parole admirable : Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix. Tel est lhéritage quil nous a légué: il fait dépendre toutes ses promesses et toutes ses récompenses de la conservation de la paix. Si nous sommes les héritiers de Jésus-Christ, persévérons dans la paix quil nous a laissée; si nous sommes les fils de Dieu, suivons la paix. Bienheureux les hommes pacifiques, dit-il, car ils seront appelés les fils de Dieu (Matt., V.). Oui, les fils de Dieu doivent aimer la paix; ils doivent être doux et humbles de coeur, simples dans leurs paroles, unis dans une même affection, fidèles à conserver les liens de la charité, et de la concorde. Cette union existait sous les apôtres, et cest ainsi que le peuple de Dieu, à son origine, persévéra dans la charité. La sainte Écriture nous latteste : Or la multitude des croyants ne formait quun coeur et une âme. Et dans un autre endroit : Les apôtres, étroitement unis, persévéraient dans la prière, avec Marie, mère de Jésus et les proches parents du Sauveur (Act., I). Cest ainsi que, leurs prières étaient efficaces; cest ainsi quils pouvaient obtenir de la Miséricorde (147) divine tout ce quils demandaient. Parmi nous, lesprit dunion a diminué en raison directe des bonnes oeuvres. Autrefois, les fidèles vendaient leurs maisons et leurs terres, et contents des trésors quils sassuraient dans le Ciel, ils déposaient aux pieds des apôtres le prix de leurs possessions pour les distribuer aux indigents. Mais aujourdhui nous ne prélevons pas même la dîme sur notre patrimoine, et malgré la parole du Seigneur qui nous dit : Vendez, nous achetons, et nous augmentons sans cesse nos possessions. 10° Voilà., mes frères, ce qui affaiblit parmi nous la vigueur de la foi; voilà ce qui enlève au peuple fidèle sa force et son énergie. Le Seigneur avait sans doute en vue notre époque, lorsquil disait: Quand le fils de lhomme viendra, pensez-vous quil trouvera la foi sur la terre(Luc, XVIII)? Cette parole ne se réalise que trop. La foi a cessé dinspirer la crainte de Dieu, les devoirs de la justice, lesprit de charité, les bonnes oeuvres. Personne ne pense avec crainte à lavenir, au jour du Seigneur, au jugement de Dieu; personne ne prévoit les supplices réservés aux incrédules, les tourments éternels qui doivent être le partage des faux frères. Nous craindrions, si nous avions la foi. Comment craindre quand on ne croit pas? En croyant, nous nous tiendrions sur nos gardes et nous éviterions le danger. Réveillons-nous, mes frères bien-aimés, et secouant le sommeil de notre ancienne paresse, efforçons-nous dobserver et daccomplir les préceptes du Seigneur. Écoutez-le lui-même: Ceignez vos reins, tenez dans vos mains des lampes allumées; soyez comme des serviteurs qui attendent leur maître à son retour des noces, prêts à lui ouvrir la porte dès quil frappera. Bienheureux les serviteurs que le maître trouvera éveillés (Luc, XII). Soyons toujours prêts à partir, afin que lorsque lheure sera venue, nous ne soyons retenus par aucun embarras. Que notre lampe, alimentée par les bonnes oeuvres, brille sans cesse, afin quelle nous conduise de la nuit de ce siècle à léternelle lumière. Tenons-nous sur nos gardes, en attendant la venue subite du Seigneur, afin que, lorsquil frappera à la porte, notre foi se présente pour recevoir la récompense promise à ceux qui veillent. Si nous observons fidèlement ces préceptes, si nous suivons cette ligne de conduite, malgré la ruse du démon, nous ne serons pas surpris pendant notre sommeil, mais, serviteurs vigilants, nous régnerons dans le royaume du Christ. (151) |