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Une ou deux choses
que je sais d’elle
Paroles de Marie.
Prédicateur:
Père Guy Musy, dominicain de Genève
(messes de 8 h 30, 10 h
et 20 h)
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Du Lundi au Samedi, le matin messes à 5 h 30, 6 h 30, 7 h
30, 8 h 30 et 10 h.
Confessions au Vorbourg: Chaque matin de 7h à
10h
Dimanche 9 septembre :
Ouverture
L'Homélie du Père Guy Musy
en format MP3
Deux ou
trois choses que je sais d’elle… Evidemment, vous le soupçonnez bien, il ne
s’agit pas de révélations particulières, que la Vierge Marie m’aurait
faites. Deux ou trois choses que je sais d’elle… Même pas quelques pensées,
parce qu’à ce niveau là, je suis absolument persuadé que la grande majorité
d’entre vous en sait beaucoup plus que moi, sur la Vierge Marie. Grâce à
votre habitude de venir ici très fidèlement la prier à Notre-Dame du
Vorbourg. Mais ces deux trois choses que je sais d’elle, c’est deux trois
choses que j’ai apprises finalement où est-ce que je les ai apprises
finalement, si ce n’est dans l’Ecriture, dans le Nouveau Testament, dans les
Evangiles, dans les Lettres de Saint Paul, peut-être. Ils nous parlent de
Marie. Et vous le savez aussi bien que moi, encore une fois, il y a très,
très peu de passages dans le Nouveau Testament où on nous parle de Marie.
Saint Paul, lui est peut-être le plus sobre de tous. Quand il veut
l’évoquer, il ne l’appelle même pas Marie, il ne l’appelle même pas la mère,
il l’appelle simplement la femme. Jésus est né d’une femme, un point c’est
tout. Chez Jean, pourtant il est au pied de la croix avec Marie, dans son
Evangile, on ne voit jamais apparaître le nom de Marie. Mais on voit
toujours apparaître le nom de la mère, la mère de Jésus quand il veut
l’appeler. Alors, c’est Matthieu, c’est Luc qui à eux ou trois reprises,
mais assez peu nous parle de Marie, la mère de Jésus. Je pense qu’ils nous
en disent assez pour asseoir notre foi, pour trouver dans notre cœur et dans
notre esprit suffisamment de motifs pour l’évoquer, pour la prier et aussi
pour lui rendre grâce.
C’est pour ça que j’ai choisi ce texte de l’Epiphanie. Pour
introduire cette semaine de fête de Notre-Dame du Vorbourg. J’aime bien les
Rois Mages, vous aussi peut-être. Les rois mages représentent, je dirais
toute l’humanité, l’humanité entière en chemin. Les rois mages sont des
pèlerins, comme vous tout à l’heure, vous avez été des pèlerins pour venir
au Vorbourg. Vous le serez peut-être encore pour y venir les jours suivants.
Nous sommes tous des pèlerins comme les Rois Mages, et un pèlerin se met en
route, non pas pour oublier quelque chose, mais surtout pour chercher
quelque chose d’autre qu’il n’a pas… Qu’il n’a pas dans son cœur, qu’il n’a
pas dans sa tête, qu’il n’a pas dans son esprit et c’est pour ça qu’il se
met en marche. Qu’est-ce que vous venez chercher, vous les pèlerins en
général ? Qu’est-ce que nous venons chercher quand nous allons dans une
Eglise comme celle-ci, quand nous allons à Compostelle pour ceux qui ont
plus de force physique et qui font ce voyage à pied? Qu’est-ce qu’ils vont
chercher, qu’est-ce que nous allons chercher ? Un mot seulement. Je pense
que nous allons chercher le bonheur. Le bonheur c’est cet état, pas
seulement un état d’esprit, évidemment… Mais cet état du cœur, d’un cœur qui
est apaisé, finalement … qui est sorti du trouble et qui trouve une certaine
satisfaction. Cette satisfaction on la trouve dans son cœur, dans sa
personne, mais aussi autour de soi-même, dans ses relations sociales.
Quelqu’un qui vit apaisé en lui-même, apaisé dans ses relations, c’est
quelqu’un qui a trouvé le bonheur. Dieu lui-même est bonheur. On a cette
magnifique parole de Saint Augustin : « Votre cœur est toujours inquiet ,
votre cœur est toujours en mouvement, » comme le mouvement des pèlerins, «
jusqu’au jour où il s’est enfin arrêté auprès de toi, Ô Mon Dieu ! » Dieu
seul est assez grand pour remplir le cœur de l’homme et pour nous apporter
le bonheur. Si nous sommes ici, vous et moi, encore une fois, c’est pour
chercher le bonheur et dans l’espoir de le trouver.
Les Rois Mages ce sont ces quêteurs. Dans l’iconographie on les a
représentés de différentes manières. On les trouve déjà dans les catacombes
romaines. Vous pensez bien si c’est vieux. L’image des rois mages a observé
les chrétiens depuis toujours. Et puis ensuite, on en a fait trois
personnages qui représentent les trois âges de la vie. Ce n’est pas
tellement sous cette forme que nous nous les représentons. Dans les formes
les plus anciennes, on voit un vieux, on voit un jeune, et puis on voit…
Qu’est-ce que je vais dire ? Un moins jeune ou un moins vieux ? Entre les
deux. Moi, j’ai déjà dépassé ce stade. Un peu plus tard, on en a fait des
rois… On leur a mis des couronnes sur la tête et puis ensuite on les a
teints de différentes couleurs. On en a fait un noir, un blanc, et puis
aussi un entre les deux, un jaune si vous voulez. Cela représentait non
seulement les âges de la vie, mais tous les peuples du monde. C’est une
façon d’évoquer que toutes les nations du monde sont en marche à la
recherche du bonheur. Peut-être les peintres des années suivantes
représenteront aussi des reines mages. Pourquoi pas ? Il n’y a pas que des
hommes qui recherchent le bonheur.
Ils se sont mis en route… Notre texte est intéressant parce qu’il
nous dit qu’ils se sont fourvoyés. Leur chemin n’a pas été rectiligne. Ils
avaient une étoile, bien sûr, mais ils ont passé aussi par la maison
d’Hérode. En passant par cette maison, évidemment, ils se sont trompés
d’adresse. Cette erreur leur a valu une grande tristesse parce qu’à ce
moment-là leur étoile leur a été enlevée pour un certain temps. Vous avez
été frappé comme moi, peut-être, par ce fait, les journaux, la télévision ne
parlent que de cela : de ces années d’obscurité de la foi de Mère Térésa. Je
lisais l’autre jour une évocation de la sœur Emmanuelle qui disait ça ne
m’étonne pas. Les Rois Mages lorsqu’ils passent chez Hérode ont ce passage
de l’obscurité de la foi. Sur notre route, sur notre pèlerinage à la
recherche du bonheur, il y a toujours un moment, j’en suis persuadé, où
l’évidence disparaît et nous laisse seuls sur ce chemin. Evidemment, ils
traversent cette nuit et revoient leur étoile. Alors l’étoile, nous disent
les textes, s’arrêtent sur la maison. J’aime bien cette expression de la
Bible, sur la maison. Le bonheur se trouve dans la maison. Le pèlerin est
heureux lorsqu’il rentre à la maison. La maison, c’est quand on est chez
soi. La maison, ici, c’est la maison de Jésus et c’est aussi la maison de
Marie. Ce qui nous surprend un peu, c’est qu’ils entrent dans cette maison
et qu’est-ce qu’ils voient ? Ils voient l’enfant. Et l’Evangéliste ajoute :
il voit l’enfant et Marie sa mère. Vous allez me dire : Mais c’est tout
naturel, cet enfant si petit ne pouvait qu’être dans la maison de sa mère.
Bien sûr si nous jugeons de cette façon-là, c’est tout naturel, mais
n’oublions pas les intentions des Evangiles. D’une certaine manière Jésus
avait besoin de sa mère pour venir au monde. Mais n’oubliez pas, n’oublions
pas que Jésus se réclame d’un autre Père. Il y a une scène assez proche dans
l’Evangile. Un peu plus tard, dans l’Evangile, lorsque Jésus a 14 ans et
qu’il est au Temple de Jérusalem alors que ses parents, sa mère et Joseph,
le recherchent, sa mère lui dit : « Mais mon Fils, nous te cherchons depuis
longtemps. » Réponse de Jésus : « Pourquoi me cherchez vous, je suis aux
affaires de mon Père. » Cet enfant a beau être le fils de sa mère, il a sa
vocation, il a son identité divine et son identité humaine profonde. Il veut
réaliser ce qu’il est. Les Evangéliste ajoutent là : Les mages rencontrent
Jésus avec la mère. Si l’Evangéliste le dit, ce n’est pas anodin, pas anodin
du tout. Je pense, comme l’Evangéliste le pense aussi, pour découvrir le
bonheur, ce bonheur qu’incarne Jésus, et bien nous avons besoin de passer
par Marie. C’est Marie qui nous présente Jésus, c’est Marie qui d’une
certaine manière est notre guide, est notre étoile vers le bonheur. Elle
nous le montre dans la maison, là où nous nous trouvons maintenant, dans
cette maison, dans toutes les maisons où nous pouvons relire les Evangiles,
où nous pouvons retrouver sa présence et sa présence réconfortante et
apaisante.
La suite de l’Histoire des mages, vous la connaissez. On nous dit
qu’ils se mettent à genoux et qu’ils ouvrent leurs trésors ! Ah ! Quels
trésors ? Vous avez apporté de l’or en venant au Vorbourg ? Ils apportent de
l’or, de la myrrhe et de l’encens. Il faut le dire dans l’ordre : « De l’or,
de l’encens et de la myrrhe. Ils l’apportent… Moi, je dis qu’ils l’apportent
pour s’en débarrasser. L’or, finalement c’est la richesse. Dans l’Evangile
de ce matin, on disait : « personne ne peut être disciple s’il ne renonce
pas à tous ses biens. » C’est exigeant. Oui, quand on a trop d’or, vous
comprenez ce que ce mot or peut signifier, on n’est plus capable de faire un
pèlerinage. Pour faire un pèlerinage, il faut se délester, il faut vivre
d’une certaine manière sobrement. Il faut vivre durement, aller devant soi.
Les Mages se débarrassent de l’encens. L’encens, ça fume, c’est les
honneurs. L’honneur n’appartient qu’à Dieu, finalement. L’honneur
n’appartient pas aux hommes. En donnant l’encens au véritable roi, ils
reconnaissent sa dignité. Ils reconnaissent aussi la source de toutes les
dignités humaines. Nous autres, nous n’avons pas à réclamer des honneurs
pour nous, surtout quand ces honneurs sont immérités. La myrrhe alors ? La
Myrrhe nous dit-on, on s’en servait pour embaumer les morts. La myrrhe ça a
un odeur de mort. On se débarrasse de la myrrhe, on se débarrasse de tout ce
qui est mortifère en nous, de toutes nos pensées de mort et on les donne à
cet enfant qui lui seul a le pouvoir de transformer la mort en vie.
Transformer la mort en vie, laisser nos pensées morbides derrière nous,
laisser nos dépressions, laisser tout ce qui nous retient, qui courbe notre
tête… Laisser le Christ nous relever.
La fin de l’histoire : ils repartirent chez eux… par le même chemin ?
Non. Par un autre chemin. Vous allez reprendre le même chemin ? moi aussi du
reste.
Il y a une chanson que j’entends les jeunes chanter après les
confirmations : « Ne rentrez pas chez vous comme avant ». Ne rentrons pas
chez nous comme avant. Et bien à la fin du pèlerinage, même si on doit
reprendre le même chemin physiquement parlant, on ne rentre pas chez soi
comme avant. On ne rentre pas chez soi comme avant, parce qu’on a puisé
quelque chose, on s’est approché de la source du bonheur, d’un bonheur qui
peut nous inonder nous-mêmes, surtout d’un bonheur que nous sommes prêts à
partager, à diffuser là où Dieu nous a mis, là où Dieu nous envoie
maintenant, lorsque nous retournerons dans notre maison après avoir été avec
Marie et Jésus dans leur maison.
Lundi 10 septembre
"Comment cela se fera-t-il?"
Epître : 1 Samuel, 3, 1-18
Psaume 39
Evangile selon saint Luc 1, 34-38
Cher Frères et Sœurs,
La toute première parole de Marie que nous rencontrons dans l’Ecriture,
il n’y en a pas beaucoup, c’est une question et cela peut déjà un peu nous
surprendre. Nous aurions peut-être attendu qu’elle dise immédiatement Oui,
n’est-ce pas ? Oui d’accord, j’y vais.
Non, elle se pose une question : Comment cela
va-t-il se faire ?
Alors est-ce que Marie ne serait pas si pieuse
que nous l’imaginons ? Non, je ne pense pas... parce
que la vraie piété n’évite pas les questions. Les questions sont tellement
importantes pour accroître et agrandir notre foi. Le pourquoi du comment…
Je me souviens d’une petite fille qui est maintenant devenue très grande,
puisqu’elle est mère de 4 enfants, c’était ma nièce pour ne pas la nommer. Quand
elle était petite et avait 5, 6, 7 ans, on l’appelait mademoiselle pourquoi,
parce que chaque fois c’était pourquoi, pourquoi, pourquoi… Pourquoi ou bien
comment ? Ce n’est pas de l’enfantillage, vous le savez bien, vous qui avez eu
des enfants. L’esprit s’éveille a un moment donné et veut savoir. Ce savoir
n’est pas extérieur à notre personne. Au contraire, c’est un savoir qui va
intégrer profondément notre vie et qui va grandir avec nous. Pour la foi, c’est
la même chose. On a cette belle expression, et peut-être certains et certaines
d’entre vous y participent dans la pastorale de l’Eglise d’aujourd’hui qu’on
appelle l’éveil à la foi. Il y a certainement parmi vous, beaucoup de
grand-mamans et de grand-papas qui doivent répondre parfois à des questions très
embarrassantes, parce qu’on ne connaît pas de réponses immédiates, mais des
réponses très profondes, très pures, très directs de vos petits enfants. Oui,
pourquoi ? Où irons-nous après la mort. Le ciel, c’est où ? Tu dis que j’ai Dieu
dans mon cœur, mais je ne vois rien. Des questions fondamentales et ce n’est pas
du tout de l’enfantillage…
Et Marie pose cette question, comment cela va-t-il se faire ? Mais
attention comme on le disait tout à l’heure, ce n’est pas un rejet de sa part.
Ce n’est pas un doute de sa part. Bien au contraire, dans l’Evangile de Luc, on
nous raconte en parallèle, deux attitudes très différentes. Il y a l’attitude de
Marie, et puis il y a l’attitude du père de Jean-Baptiste, de Zacharie, qui se
pose une question et qui est puni justement, pour la question qu’il se pose.
Marie n’est pas du tout punie, mais la question est bien différente. L’attitude
de Zacharie par rapport à l’ange qui lui annonce la naissance d’un fils est bien
différente de celle de la Vierge Marie. J’allais dire, excusez-moi, c’est
l’attitude d’un vieux, de quelqu’un qui a déjà vu beaucoup de choses dans sa
vie, quelqu’un à qui on ne la fait plus, comme on dit vulgairement… Quelqu’un
qui marchande avec Dieu : d’accord, tu me dis que j’aurai un fils…. Bien, bien…
Mais tu m’as regardé ? Qu’est-ce que tu me donnes pour que je puisse y croire ?
Il veut un signe. Sa foi est le fruit d’un marchandage.
Pour Marie, il ne s’agit pas d’un marchandage, elle l’accepte. Mais son
acceptation, son oui, il faut qu’elle l’accepte profondément avec ce qu’elle est
profondément, avec ce qu’elle est toute entière, avec sa vie, avec son mariage,
qu’elle a commencé avec Joseph. Il faut que ce oui, ne soit pas un oui farfelu,
mais un oui qui intègre parfaitement sa personnalité. Un oui, comme on disait
tout-à-l’heure, un oui qui soit discerné et discerné dans la force de l’Esprit.
Cela va lui prendre du temps. Evidemment, l’Evangile est très court, parce que
au terme de cette lecture, et on va le dire demain, c’est
Je suis la Servante du Seigneur. Mais entre la question et « Je suis la
servante du Seigneur », il me semble qu’il y a tout un temps, c’est le temps de
l’éveil à la foi. Et parfois vous savez bien que ce temps là peut correspondre
pour nous à toute notre vie. On a jamais fini de trouver la réponse à cette
question fondamentale. C’est là où je veux en venir maintenant ? Marie pose une
question, quand on lui propose une mission extraordinaire. C’est normal. Mais
combien de fois ça nous est arrivé à nous aussi quand on nous a proposé des
missions ou des responsabilités importantes. Ce devoir de réfléchir, comme on le
disait hier dans l’Evangile, ce devoir de s’asseoir où on se demande si on a
vraiment les possibilités de s’asseoir et d’aller jusqu’au bout de notre oui…
Chaque fois que je célèbre un mariage, moi, j’y pense. Oui, c’est un oui pour la
vie… Je le leur dit pas : est-ce que vous avez bien réfléchi ? Si je leur disait
cela, il s’étonnerait vraiment. Mais parfois quand on les revoit quelques mois
plus tard ou quelques années plus tard… Ah ! Si on avait réfléchi… Ce n’est pas
seulement une question de réflexion. Je peux le dire aussi pour moi-même, par
rapport à mon engagement religieux, comme un prêtre peut le faire, par rapport à
son engagement. Pour ma part, il y 50 ans cette année, que j’aurai dit mon oui.
Je cois que je n’ai pas fini de trouver la réponse à cette question. Il faut que
le oui s’intègre encore chaque jour dans ma vie, comme le oui de personnes
mariées doit s’intégrer chaque jour dans leur vie. Chaque matin, il faut dire
oui. Et Marie connaît le prix de ce oui, puisqu’elle a osé justement cette
question fondamentale.
J’ai une autre conclusion, si vous voulez, que je tire de cet Evangile et qui me
paraît très importante aussi. La foi chrétienne, j’allais dire la foi
catholique, aussi… n’est pas la foi du charbonnier. Vous savez ce qu’est la foi
du charbonnier ? On pose la question à quelqu’un : Qu’est-ce que tu crois ? -
Tout ce que la sainte Eglise catholique m’enseigne. - Très bien. – Et qu’est-ce
la sainte Eglise catholique t’enseigne ? – Et bien tout ce que je crois…
D’accord !
Ah c’est une fois bien chevillée, n’est-ce pas, mais ça ne va pas très
loin. C’est une fois très extérieure qui n’a pas évangélisé nos profondeurs, ni
même notre cœur et surtout pas notre esprit, surtout pas notre intelligence.
C’est une foi qui démissionne, d’une certaine manière. Elle se remet à quelqu’un
d’autre. Je crois comme celui-là. Ne me demande pas, je crois parce que celui-là
croit comme ça. C’est une foi qui n’est plus personnelle, tandis que la foi de
Marie, c’est une foi très personnelle, à cause justement de cette question. Il
faut que cette foi rentre profondément dans son cœur. J’insiste là-dessus,
justement parce qu’il me semble qu’aujourd’hui, ça vaut la peine de le dire.
Trop souvent, pas seulement dans les médias, mais de façon plus générale, on
remarque : Tu es catholique… Oh ! je te plains tu sais… Comment tu peux croire à
des histoires pareilles ? - Ah oui !... Et toi, tu crois à l’horoscope ?
Eh bien, nous n’avons pas le droit de recevoir la plainte des autres, si
nous n’avons intériorisé notre foi, si nous n’avons éclairé notre foi à partir
de notre raison. d’une certaine manière.
J’aime bien notre pape actuel, justement, Benoît XVI, parce qu’il insiste
beaucoup là-dessus. La foi, ce n’est pas un cri, ce n’est pas simplement chanter
alleluia, etc… etc… ! Non ! La foi, c’est faire passer la parole de Dieu, la
parole de Dieu dans tout ce que nous sommes, dans votre cœur, bien sûr ! Mais
aussi dans votre esprit ! Ne mettons pas notre intelligence entre parenthèse.
Surtout pas notre cœur, bien sûr, mais ne mettons pas notre intelligence entre
parenthèses.
Si Dieu est parole, c’est parce qu’il veut s’adresser à des êtres
intelligents. Des êtres intelligents, c’est-à-dire des êtres qui sont capables
d’écouter une parole, de la comprendre et de la faire passer dans leur coeur.
C’est pour ça que cette lecture avec cette question, m’invite à invoquer
la Vierge d’une façon particulière. Elle a beaucoup de titre, n’est-ce pas, la
Vierge Marie ? La Litanie de la Sainte Vierge nous en énumère une cinquantaine,
peut-être. Il y a un titre parmi tant d’autres, que j’aimerais relever
aujourd’hui. On l’appelle la Mère de la Sagesse. Le Sage, c’est celui qui ne va
pas tête baissée, comme ceci ou comme cela. Mais le Sage, c’est celui qui a reçu
la parole dans son esprit et dans son cœur et qui l’a fait descendre dans toute
sa personne.
Nous savons que la Vierge Marie (il y a de beaux passages dans l’Evangile
qui évoquent cela), ruminait la parole qui est dans son cœur. Elle la ruminait.
On dit d’une façon très polie : elle la méditait. Justement elle la ruminait
dans son cœur, elle faisait repartir toutes ces paroles qu’elle avait entendues,
d’abord de la Bible, de l’Ancien Testament, et puis des paroles de son Fils.
Toute sa vie, d’une certaine manière, cette parole était dans son cœur, était
dans son esprit. Je pense à cette parole qui l’a fait aller finalement jusqu’au
bout de sa vie.
Alors,
invoquons-là aujourd’hui, et qu’elle indique à chacun et chacune d’entre vous la
meilleure méthode justement pour méditer la parole de Dieu, cette parole qui
fait de nous des êtres vraiment humains, des êtres responsables, mais aussi de
fervents chrétiens, des êtres qui peuvent trouver le bonheur déjà sur cette
terre et bien sûr au terme de leur vie.
Mardi 11 septembre 2007
"Que toute se passe pour moi comme tu l'as dit"
Chers
frères et sœurs, au cours de cette semaine passée ici au Vorbourg, nous portons
notre attention à quelques paroles, il y en a tellement peu dans la Bible,
quelques paroles de Marie. Marie a parlé. Hier, c’était une parole que nous
évoquions, et cette parole, c’était une question : Comment cela va-t-il se faire
? Et puis aujourd’hui, c’est la réponse… Parce qu’on ne peut pas questionner
toute la vie… Il faut bien qu’on arrive une fois à une réponse. On disait hier
combien il était très important de commencer par une question, de commencer par
se dire si on a la force et la possibilité d’aller jusqu’au bout de la mission
qu’on nous confie. Mais un moment arrive, inéluctablement, où il faut dire : je
suis d’accord, je ne suis pas d’accord. C’est la décision. Aujourd’hui, vous
avez cette réponse de Marie une réponse très décidée, une réponse positive : «
Que tout se passe pour moi comme tu l’as dit. » Je préfère cette traduction
plutôt qu’une autre. « Que tout se passe pour moi comme tu l’as dit. »
Bon, la discussion est finie, c’est le moment de partir, et je ne
regretterai plus rien. Ah ! si on pouvait toujours dans notre vie, agir comme
cela : Une fois qu’on a décidé quelque chose, après avoir bien réfléchi, après
avoir prié le Saint-Esprit de nous éclairer… Eh bien, maintenant, on avance. On
n’avance pas forcément sur une plaine, on n’avance pas forcément sur une route
toute droite, on avance parfois sur des petits chemins sinueux, mais on ne
regrette pas la décision qu’on a prise, quelles que soient les difficultés
rencontrées. En cela, la Vierge Marie est déjà notre modèle.
Je viens à un autre point.
Oui, quand nous prenons des décisions, ou plutôt quand il nous arrive des
événements que nous n’avons pas tellement choisis, quand on nous invite parfois
d’entrer dans une mission un peu difficile, alors nous avons des réactions un
peu différentes et je pense que c’est normal. Il y a des missions qui sont très
difficiles, des choses qui nous arrivent dans la vie qu’on n’avait pas prévues.
Imaginez une maladie, par exemple. Imaginez un accident, imaginez une grande
surprise. Alors souvent, comment réagissons-nous ? C’est une phrase qu’on entend
souvent… Je me la dis de temps en temps… « Ah ! Qu’est-ce que vous voulez, il
faut faire avec. » C’est une expression de résignation. « Je ne peux pas faire
autrement, par conséquent, il faut faire avec. » Ou on a des expressions comme
celle-ci : « Que voulez-vous, c’est la vie. » Quand on dit c’est la vie, parfois
c’est la mort aussi. La décision de la Vierge Marie : « Qu’il me soit fait selon
ta parole », je pense qu’on ne l’a pas du tout. C’est une décision qu’elle a
intégrée, c’est la sienne aussi.
Elle ne dit pas simplement : « Il faut faire avec, c’est le destin. »
Mais elle va de l’avant. Elle fait sienne cette décision, elle l’intègre
profondément dans son cœur et puis elle part. Il faut dire qu’en faisant ce pas,
elle accomplit la mission de Dieu. Et ne l’oublions jamais, la mission de Dieu,
c’est une mission de Dieu. C’est pas une mission de mort. L’Enfant qu’on lui
demande de mettre au monde, on ne l’appelle pas le juge du monde. On l’appelle
le Sauveur du monde. Et un Sauveur, c’est celui qui intervient dans des
situations calamiteuses. C’est celui qui vient ramasser les hommes à la petite
cuillère, si j’ose employer cette expression. Elle est la mère de la vie, d’une
certaine manière, et elle s’engage profondément dans cette mission de vie. Même
si cette mission qui vise à protéger la vie, à la donner aussi, peut être
sinueuse… Eh bien elle va conduire Marie à travers le cheminement de Jésus
parfois par des étapes difficiles. Vous les connaissez comme moi ces étapes.
Cette fameuse étape où elle a failli perdre son enfant, lorsqu’il avait douze
treize ans, un jeune adolescent. C’était à Jérusalem au Temple, et puis il y a
eu cette terrible étape du Calvaire. On en parlera encore prochainement, le jour
de la Fête de Notre-Dame des 7 douleurs. C’était une mission qui l’a associée à
la vie, profondément.
Alors ceci peut faire penser aussi à notre mission à nous. Est-ce que
vous avez une mission, est-ce que j’ai une mission ? Est-ce que le Seigneur nous
a confié une mission ? Vous allez die, ça c’est bon pour les missionnaires. Ils
prenaient l’avion… enfin aujourd’hui. Autrefois, ils prenaient le bateau et puis
ils allaient je ne sais pas où, chez les Canaques, en Afrique, en Amérique du
Sud… Bon, je ne suis pas missionnaire… Ah non ! Chacun et chacune d’entre nous,
que par son baptême est missionnaire. Missionnaire, ça veut dire : il s’associe
à la mission de vie de Dieu.
Je vois qu’il y a devant moi beaucoup de dames, et c’est normal. Elles
sont mis au monde des enfants. Eh bien, mettre au monde des enfants, c’est
s’associer profondément à la mission créatrice de Dieu. Quelle plus belle
mission que celle de mettre au monde un enfant. Pas seulement de le mettre au
monde, de veiller sur lui. Depuis sa naissance, et pendant les années de sa
croissance, jusqu’au jour où cet enfant, devenu homme, devenu adulte prend son
envol et son essor, indépendamment de ses parents. C’est une mission
profondément créatrice. Je crois que qui que nous soyons, quel que soit notre
âge, même si nous avançons profondément dans le nombre de nos années, nous avons
toujours des missions. Pas forcément des grandes missions, mais des missions qui
parfois s’identifient au jour que nous vivons aujourd’hui. Et quand nous nous
levons le matin, peut-être pouvons-nous nous demander : Qu’est-ce que Dieu
attend de moi aujourd’hui? Non pas que je fasse le mal, bien sûr ! Mais
qu’est-ce que Dieu attend de moi pour que je mette davantage de vie, davantage
de bonheur, davantage de paix dans le monde qui est le mien, peut-être dans mon
petit monde à moi, où c’est pas mal perturbé parfois. Il m’appelle profondément.
Dans le petit monde et dans le grand monde dans lequel je suis investi. Ca,
c’est la mission de Marie, ça c’est notre mission à chacun et à chacune d’entre
nous. Ce jour-là, Marie nous encourage à aller de l’avant.
Attention ! Marie dit : Que tout me soit fait, que tout se passe selon ta
parole, comme tu l’as dit… Pas autrement. Comme tu l’as dit, ça c’est un bon
garde-fou, je crois. Parce que très souvent, nous pensons aller au-delà ou en
deçà, de la Parole de Dieu. Nous confondons la mission de la Parole de Dieu,
avec notre mission à nous. Là, nous nous trompons profondément.
J’ai rencontré il y a quelques années une religieuse qui avait passé plusieurs
années en Afrique, et Dieu sait si elle travaillait, je la connaissais bien !
Elle travaillait à construire un dispensaire, elle se dévouait jour et nuit… Et
puis un jour, elle était encore relativement jeune, elle n’avait pas cinquante
ans, elle a décidé de rentrer chez elle, chez elle dans son pays. Cela m’avait
un peu intrigué. Je lui ai dit : mais pourquoi pars-tu maintenant alors que tu
as un travail extraordinaire. Alors, elle m’a dit cette parole qui m’a fait
beaucoup réfléchir. « Pendant tant d’années que j’étais là, je croyais
construire le Royaume de Dieu, et en fait c’était mon propre Royaume que je
construisais. »
Parfois on se trompe de mission, et c’est pour ça que la Vierge Marie
ajoute : « Selon ta parole. » - Comme tu le veux, et non pas forcément comme je
veux. Il y a une disponibilité du cœur qui est extraordinaire.
Nous avons entendu, et je termine par là, une première lecture, une des plus
belles de la Bible, je pense, vous la connaissez bien : l’appel du jeune Samuel.
Ce gamin… On entendait durant la messe d’hier, sa mère qui avait prié instamment
le Seigneur de lui donner cet enfant, et voilà que cet enfant, un peu comme sa
mère, entend un jour l’appel du Seigneur. D’abord, il se trompe, il ne sait pas
trop qui l’appelle. Il faut qu’on l’oriente pour qu’on le discerne. Le
grand-prêtre, lui dit écoute : « Si tu es appelé, répond simplement : Parle,
Seigneur, ton serviteur écoute. » Parle : la Parole de Dieu qui n’est pas la
parole du Grand Prêtre, qui n’est pas la parole des hommes, mais bien la Parole
de Dieu. … - Et je serai toute écoute à cette parole, et je ferai tout ce que tu
veux de moi, comme tu le veux, pas plus que cela, et pas moins que cela.
Ce défi, je le trouve très beau, parce qu’il évoque la générosité de la
jeunesse, la générosité parfois des enfants, la générosité des ados, la
générosité des plus jeunes… il ne faut pas l’oublier, ils sont capables d’un don
de soi extraordinaire. Ils évoquent ces deux disciples qui au matin de Pâques,
allaient au tombeau de Jésus. On nous raconte ça dans l’Evangile de Jean. Il y
en a un qui courait, qui courait le premier et qui a tout compris. Et il y avait
l’autre, c’était Pierre, plus vieux sans doute, qui marchait en claudiquant, en
boitant et qui est arrivé au tombeau essoufflé, asthmatique. Il a cru plus tard.
Mais il a fallu que le plus jeune l’entraîne dans sa voie. Quelle belle image !
Nous prions encore pour les vocations. Qu’est-ce que ça veut dire, prier
pour les vocations ? Prier ce n’est pas pour envoyer des missionnaires. Prier
pour les vocations, c’est prier pour que nos oreilles puissent s’ouvrir quel que
soit notre âge, à son appel pour que nous puissions comme la Vierge Marie,
partir dans une mission « Selon Sa Parole ». Et tant mieux si les jeunes vous y
entraînent, parce qu’ils sont là. Encore une fois, si nous avons les yeux
ouverts et le cœur ouvert pour voir leur appel et bien nous serons aussi
entraînés par eux sur ce chemin.
Mercredi 12 septembre 2007
"Mon âme exalte le Seigneur"
1ère lecture : Colossiens 3, 12-17
Psaume 83
Evangile selon saint Luc, 2, 41-51
Chers pèlerins de Notre-Dame du Vorbourg et en particulier chère équipe
pastorale de Porrentruy qui êtes venus animer cette messe.
Vous avez entendu dans l’Evangile que nous a lu notre diacre
d’aujourd’hui, le magnificat de Marie, un chant d’action de grâce. Au cours de
ces fêtes du Vorbourg, nous avons pris l’habitude de commenter quelques paroles
de Marie. Il n’y en a pas beaucoup dans la Bible. La première parole, c’était
une question qu’elle posait : Comment cela va-t-il se faire ? C’était le premier
jour. Hier c’était la réponse à cette question, me voici Seigneur, je viens
faire ta volonté. Et aujourd’hui, c’est un cantique d’action de grâce.
Vous me direz
que la Bible est remplie de cantiques d’action de grâce, mais ce qui est
remarquable, ce n’est pas seulement les gens qui chantent dans la Bible. Il y a
aussi les femmes qui chantent. Il y en a en tout cas trois qui chantent et qui
chantent même très bien, et qui s’échelonnent sur un millier d’années peut-être.
Un premier chant de femme, il nous a été transmis dans la Bible, c’est le chant
de la sœur de Moïse, parce que Moïse avait une sœur. Figurez-vous qu’elle
s’appelait aussi Marie, Myriam. Lorsque Moïse a conduit son Peuple, au-delà de
la Mer Rouge, dans le désert, alors sa sœur a chanté un cantique extraordinaire,
un cantique très fort, qu’on chante encore lors de la vigile pascale. Un
cantique un peu guerrier, il faut le dire. Et puis… il y a le cantique d’Anne,
la mère de Samuel, dont nous évoquions la personne déjà lundi et hier à travers
son enfant. Elle chante ce cantique admirable lorsqu’elle a donné naissance à
son enfant, cet enfant qu’elle désespérait de voir venir au monde. Elle l’avait
obtenu du Seigneur à force de gémissements et de supplication. Aujourd’hui,
c’est le cantique de Marie. Ces trois femmes se complètent d’une certaine
manière. Elles reprennent le même refrain, les mêmes intentions. Ce n’est pas
étonnant, la Bible c’est une relecture perpétuelle des grandeurs de Dieu dans
notre histoire, dans l’histoire des hommes. Ce n’est jamais le cantique d’une
personne particulière, c’est le cantique général de tout ce que Dieu a fait à
travers notre histoire et qui est répété cette fois, par une femme qui s’appelle
Marie.
Comment commence ce cantique de Marie ? Mon âme exalte le Seigneur !
Exalter, c’est un verbe qu’on n’emploie pas très souvent dans le langage
courant. Exalter, c’est faire lever. Autrement dit, mettre à la première place,
ce qui est considéré habituellement comme à la deuxième, troisième ou quatrième
place… Elle exalte le Seigneur, autrement dit, elle remet Dieu à sa place. La
place de Dieu, c’est la première. Elle remettrait comme on dit aujourd’hui,
l’Eglise au milieu du village. Dieu seul mérite la gloire, Dieu seul mérite le
chant. Soli Dei Gloria… A Dieu seul la Gloire, comme on a répété dans l’histoire
chrétienne très souvent. Je pense que c’est très bien que nous commencions ce
cantique en remettant les choses en place. C’est une question, non seulement que
je vous pose, mais que je me pose à moi-même : Quel est l’ordre des priorité
habituelles que nous avons dans notre vie ? Ah oui ! Je me rends compte que plus
j’avance en âge, le langage autour de moi, tourne autour de la santé. C’est
inévitable. Il y a quelques années, un de mes amis me disait, qu’est-ce que tu
veux tu es rentré maintenant dans le bloc des « t’as mal où » ? De quoi
voudriez-vous qu’en descendant du Vorbourg si ce n’est de notre santé ? Il y a
la santé et puis les affaires de famille, bien sûr. Et puis, c’est notre petite
sécurité personnelle, ça, il faut bien qu’on en parle…
Et Dieu dans tout ça, comme on dit ? Dieu dans tout ça, il essaye de se
trouver la place qu’il peut. Parfois, on pense à Lui comme un bouche-trou. Quand
on a essayé toutes les autres solutions, alors on allume un cierge par-ci
par-là, on fait un petit pèlerinage. Que sais-je encore ? Mais après tout le
reste. Parfois il revient à la première place. C’est très bien que Marie le
remette à sa place. Elle lui convient, parce que cette première place, elle
assure, comme elle assure à la Vierge, un élargissement de notre cœur. Mettre
Dieu à sa première place, c’est ouvrir les frontières de notre cœur, ouvrir les
frontières de notre vie, sortir de notre petit moi, qui est assez souvent
égoïste, il faut l’avouer. Dieu a la première place, comme Jésus qui nous disait
: « Mon Père et moi, nous sommes un. » disait-il. Ah ! Si on pouvait dire cela :
Dieu et moi ne sont qu’un… On ne peut pas dire cela comme ça, mais j’ai toujours
devant moi, la pensée de Dieu.
La deuxième
phrase, alors, elle nous convient peut-être mieux : « Mon Esprit exulte de joie
en Dieu, mon Sauveur. » Exulter, voilà une expression encore assez bizarre.
Exulter, je ne sais pas s’il vous arrive d’exulter tous les jours. On traduit
habituellement, et je préfère cette traduction, mon cœur est rempli
d’allégresse. « Allegria », ça, ça fait beaucoup plus gentil. Ce n’est pas le
rire gras, le rire gros, qu’on a pour s’efforcer d’oublier certains malheurs, ou
le rire gênant, mais c’est plutôt le sourire. Si vous approchez de Notre-Dame du
Vorbourg, vous verrez qu’elle a un très beau sourire, quand elle regarde son
Fils. Si l’artiste a très bien pu exprimer cela, c’est avec l’aide de Marie.
Elle n’est pas une joie turbulente, mais une joie très profonde, une joie
apaisée, une joie qui lui vient de son cœur. C’est de cette façon-là qu’elle est
joyeuse. Elle exulte pourquoi ? Elle exulte parce que Dieu l’a sauvée. «
J’exulte de joie en Dieu mon Sauveur. » Elle dira plus tard, parce que Dieu m’a
regardée… Dieu a regardé l’humilité, la bassesse de sa Servante, comme on
traduit parfois… « En Dieu mon Sauveur. » Est-ce que Dieu est notre Sauveur ?
Voilà une autre question que je me pose. Est-ce qu’il est mon Sauveur ? Sauveur,
ça veut dire quoi ? C’est le nom que Jésus porte « Dieu sauve »…. Dans l’Ancien
Testament, ce mot a une signification bien particulière, le Sauveur, c’est le
grand frère, le grand frère qui intervient dans la famille quad ça va pas et qui
est prêt à s’exposer même avec son sang, ça va jusque là, pour sauver le reste
de la famille. Mais quand il s’agit du sauveur qui s’appelle Jésus, la famille
n’est pas restreinte, la famille n’est pas limitée à quelques personnes, mais
c’est une famille universelle. Comme nous allons le répéter au cours de la
messe, il a versé son sang pour tous ! Jésus représentant Dieu dans sa mission,
est le Sauveur universel, le Sauveur de tous les hommes, celui qui vit au milieu
de leur détresse et qui veut d’une certaine manière supprimer leur détresse et
passer de cet état de désespérance à un état de vie. Vous vous trouvez dans une
très belle chapelle, ici, avec de beaux ex-votos, qu’est-ce que c’est des
ex-votos sinon l’expression de la misère des hommes. Combien de personnes sont
venues dans cette chapelle exposer leur détresse, parce qu’elles avaient besoin
d’un Sauveur. Il faudrait prendre son temps, peut-être pour déchiffrer toutes
ces maladies, toutes ces supplications particulières qu’on apportait à
Notre-Dame du Vorbourg. Nous sommes ici dans une cour de miracles, d’une
certaine manière. Dieu est mon Sauveur. La Vierge Marie rend grâce à Dieu parce
que Dieu l’a sauvée. Mais alors il l’a sauvée de quoi ? Evidemment beaucoup plus
tard, l’Eglise catholique parlera de l’Immaculée Conception. La Vierge a été
sauvée comme chacun, comme chacune d’entre nous de la faute originelle. Mais
dans le Magnificat, il n’est pas question de cela. Lorsque Marie dit que Dieu
l’a sauvée, elle donne à ce mot salut une envergure qui dépasse sa petite
personne, encore une fois qui remplit tout son Peuple. Elle parle d’Abraham,
elle parle d’Israël. Elle rend grâce à Dieu chaque fois que Dieu est intervenu
dans l’histoire de son Peuple et je dirais maintenant dans l’histoire des
hommes, d’une façon bien particulière, lorsque Dieu a pris le parti des plus
pauvres et des plus faibles. Il renverse les puissants de leur trône, et il
élève les humbles. Dieu a souci de ceux qui ont faim. Autrement dit, Dieu a
priorité pour les pauvres, pur les affamés, pour les proscrits de ce monde.
C’est pour cela que la Vierge rend grâce à Dieu. C’est assez extraordinaire.
Bien sûr, on peu la remercier pour tant de faveurs reçues, comme sur les
ex-votos. Mais est-ce que ça nous arrive, peut-être moins souvent de remercier
le Seigneur pour de grandes choses qu’il peut faire envers les pauvres, envers
les petits, envers les proscrits. Chaque fois que nous voyons une situation
changer, qui s’améliore… Et bien, nous rendons grâce à Dieu. Ca ne nous concerne
pas, mais nous rendons grâce à Dieu. Ensuite, heureusement, nous avons un cœur
très sensible aux misères de l’humanité, chaque fois que je suis témoin d’une
détresse quelque part, (Tsunami, chaîne du bonheur, etc…) . Nous y allons.
Heureusement que nous avons ce cœur bien sensible. Mais est-ce que nous
partageons très souvent la joie des autres ? les petites joies des autres. Il y
a quelques années à Fribourg, un bon musicien qui s’appelait Pierre Kaelin, a
composé avec des amis, une très belle cérémonie qui s’appelait la joie partagée.
La joie partagée, c’est la joie de Marie. Me réjouir de ce qui arrive à mon
voisin, même si c’est une petite joie, même si c’est un petit accommodement dans
sa misère… Partager, partager la soupe du pauvre, parce que moi, je suis riche
et que j’ai apparemment besoin de rien. J’ai besoin justement de la joie du
pauvre qui va me réconforter et qui va me remettre sur le chemin.
Je pense que c’est le sens de ce cantique de Marie, qui ouvre nos
perspectives, bien sûr d’abord vers Dieu et singulièrement vers nos frères et
nos sœurs, non seulement pour émouvoir notre cœur, pour agrandir notre cœur,
mais aussi pour que notre cœur puisse s’ouvrir et d’enrichir de la richesse du
pauvre.
La Bénédiction des Enfants:
Vendredi 14 Septembre
"Faites tout ce qu'il vous dira"
1ère Lecture : Actes des Apôtres 1, 12-14
Psaume 26
Evangile selon saint Jean 2, 1-12
Vous
connaissez déjà, chers pèlerins, le thème de cette semaine de « Fêtes du
Vorbourg », « Deux ou trois choses que je sais d’elle ». Alors, aujourd’hui,
c’est l’Apôtre Jean, l’auteur du Quatrième Evangile qui va nous dire ce qu’il
sait de Marie. A vrai, dire, il ne sait pas grand-chose, il n’en connaît pas
trois, il n’en connaît que deux. Il situe Marie dans deux circonstances bien
précises, celle d’aujourd’hui, les noces de Cana, et puis une autre
circonstance, beaucoup plus dramatique, beaucoup moins festive, au pied de la
Croix.
Demain, de jour de la Fête de Notre-Dame des 7 Douleurs dont vous avez
une très belle représentation sous vos yeux, et bien, nous méditerons cette
place de Marie relatée par l’Apôtre Jean, sous la croix, près de la Croix de
Jésus. Aujourd’hui, elle se trouve aux noces de Cana.
Je pense qu’il y a deux façons de comprendre ce récit.
Il y a une façon très réaliste, que nous comprenons tous, un petit peu
psychologique, voilà il y a des noces quelque part… Si vous avez fait le
pèlerinage en Terre Sainte, peut-être certains de vous l’ont-il fait, dans le
village de Cana, on nous montre des immenses amphores, plus d’origine,
évidemment, des amphores qui ressemblent à celles que Jésus avait remplir d’eau.
C’est une interprétation matérialiste, c’est une fête, c’est une fête populaire,
et puis Marie est là, c’est tout à fait normal, elle était peut-être apparentée
aux jeunes mariés et puis Jésus était là aussi, pourquoi pas avec des disciples.
Alors un drame allait arriver, on manque de vin, qui c’est qui s’en aperçoit ?
On voit que quelque chose allait mal dans le service, alors Marie en bonne
maîtresse de maison, va trouver son Fils : - Tu ne pourrais pas faire quelque
chose, etc… Le Fils la rabroue d’abord, selon mon interprétation très réaliste,
alors finalement le miracle a lieu.
Je crois qu’il y a une façon beaucoup plus spirituelle de comprendre ce
miracle. C’est dans le sens même où il a été écrit. Il y a d’abord, le mot
heure. Jésus dit à sa Mère, mon heure, n’est pas encore venue. Sa véritable
heure, arrivera quand ? Et bien, le jour où il sera sur la croix. Voilà quand
son heure sera venue. Mais il va anticiper son heure et il va réaliser ce
miracle qui annonce déjà le miracle qui va découler de la Croix et de la
Résurrection, à savoir cette inondation de vie, de bonheur sur l’humanité. Alors
pour annoncer déjà ce grand miracle, il change l’eau en vin pour que la fête
puisse continuer. Si Jésus est mort sur la croix, c’est pour que la fête puisse
continuer dans l’humanité. La résurrection, c’est la joie de cette Fête.
Il y a cette phrase de Marie dans cette circonstance, elle s’adresse aux
serviteurs : « Faites tout ce qu’il vous dira. » Ca sonne un peu fort quand on
l’entend pour la première fois. Deux impératifs… Ca fait un peu penser à une
maman qui parle à son adolescent : Ecoute, tu feras ce que ton père va te dire…
Je transmets le bagage à quelqu’un qui est plus fort que moi. Il y a un peu de
ça dans la réponse de Marie, mais il y a beaucoup plus que cela. Il y a
naturellement une grande confiance entre elle et son Fils. – Faites ce qu’il
vous dira, j’ai confiance en lui. Il va pour vous inaugurer cette fête et c’est
pour cette fête qu’il est venu sur cette terre. Alors, vous allez faire ce qu’il
va vous dire.
Et là vous me permettrez une petite parenthèse. Je ne sais pas si c’est
votre cas. Mais une certaine piété chrétienne, une piété mariale a voulu un peu
séparer le Fils de sa Mère. Jésus serait le juge, un juge assez sévère et Marie
serait la Bonne Mère. Alors parfois, il vaut mieux s’adresser à la Bonne Mère
qu’à son Fils. Elle nous comprend mieux, etc… Oui, il y a une apparition de la
Vierge, que certains voyants nous ont rapportés où la Vierge aurait dit : - Je
n’en peux plus de soutenir le bras de mon Fils qui va punir les gens.
Mon Dieu, quelle horreur ! Entre la Mère et le Fils, il y a une confiance
absolue, et le bras de la Mère, c’est aussi le bras du Fils. Et le bras de la
Mère et du Fils, ce n’est pas pour punir, c’est pour relever, c’est pour donner
la vie, c’est pour faire vivre. C’est pour cela que je comprends cette phrase
avec une extraordinaire confiance. – Faites tout ce qu’il vous dira. Je sais
qu’il va vers le bien, je sais que c’est lui, le chemin, la vérité et la vie.
Suivez-le et vous vivrez.
Alors, chers amis, suivez-le et vous vivrez… Ce que les serviteurs ont
reçu ce jour-là, c’est une parole que nous recevons et c’est une parole que nous
avons à répercuter maintenant. Je crois que de moins en moins le don de Jésus
est connu, dans notre temps, dans notre époque. J’espère me tromper. Cela
surtout parmi nos plus jeunes et nos enfants. L’autre jour, à la cure de
Delémont, au milieu du repas, quelqu’un disait, moi je donne la catéchèse, je
fais reculer les frontières de l’ignorance. Mais plutôt que de faire reculer les
frontières de l’ignorance, il faudrait faire éclater cette Bonne Nouvelle de
Jésus, de la Parole de Jésus, une Parole qui sauve, une Parole qui est adressée
à tous… surtout aux plus jeunes qui ne le connaissent pas ou qui le connaissent
mal. N’ayons pas peur de proclamer l’identité du Christ. O vous savez, au jour
d’aujourd’hui… Pourquoi ne serait-ce que les musulmans qui peuvent parler de
Dieu, finalement ? Pourquoi est-ce que nous, nous n’oserions pas parler de
l’identité de Jésus, si nous sommes convaincus que lui a les paroles de la vie.
Voyez juste au-dessus de moi, il y a un très grand saint, saint François
d’Assise. Saint François d’Assise c’est un homme profondément pacifique, il ne
pouvait pas ne pas dire l’amour de Jésus. Cette nécessité est allée un jour
jusqu’à prendre un bateau, vous pouvez imaginer ce qu’au 13ème siècle, ce que
cela pouvait signifier. Il a traversé la Méditerranée, est allé jusqu’en Egypte
trouver le Sultan, le musulman, non pas pour aller faire la croisade, mais
seulement pour parler avec lui de Jésus, comme le Sultan lui parlait de son
prophète.
Je poursuis sur cette lancée. En Russie, on nous dit que durant les 50
ans d’oppression communiste et d’athéisme, ceux ou celles qui ont gardé la foi,
ce sont celles qu’on appelle les babouchkas, les grands-mères, peut-être les
arrière-grands-mères. Pourquoi pas les grands-pères, après tout, qui, dans le
secret ont continué malgré tout à parler de Jésus à leurs petits-enfants. Et
c’est comme ça que la foi a pu se transmettre… C’est pas seulement la foi, c’est
le bonheur, le chemin de la foi, la perspective pour la foi. C’est ça qui est
extraordinaire. J’ai beaucoup de joie, ces derniers jours dans mon ministère à
Genève d’accompagner un garçon de onze ans, il s’appelle Thibaud pour ne rien
vous cacher. Il va être baptisé. De plus en plus d’enfants ne sont pas baptisés,
mais ont le désir de l’être. Les parents qui sont des catholiques… comme on dit
chez moi, m’ont confié cet enfant, je l’ai donc reçu quelques fois, avec un
grand plaisir. J’ai pris mon évangile, pensant qu’il ignorait tout de cela… Mais
il en savait presque plus que moi. – Ah ! Thibaud, mais d’où est-ce que tu sais
ça ? – C’est ma grand-maman. – Ta grand-maman ? – Oui, je vais chez elle de
temps en temps, et puis tu sais, j’aime beaucoup lire. J’ai trouvé une petite
Bible chez ma grand-maman… Et il l’avait lue.
La foi se transmet de cette manière-là. Vous avez là Sainte-Anne. Elle porte
l’Enfant-Jésus dans ses bras, et puis elle a à côté d’elle la Vierge Marie. Elle
est très petite, là, la Vierge. Elle est comme un enfant… La babouchka, elle a
beaucoup de choses à dire à l’enfant Jésus, elle a beaucoup de choses à dire à
sa fille aussi, elle ne se cache pas. Je pense que c’est aussi une patronne pour
nous aujourd’hui.
Faites tout ce qu’il vous dira… Il y a un très beau passage dans
l’Evangile. Au moment du baptême de Jésus, une voix se fait entendre qui vient
du ciel. « Celui-ci est mon Fils bien aimé, écoutez-le ». C’est presque la
parole de Marie. Faites tout ce qu’il vous dira… Celui-ci est mon Fils
bien-aimé, écoutez-le. C’est le Père qui appelle. Mais on pourrait dire que
c’est aussi Marie qui le dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, Ecoutez-le, il
vous amène à la vie, il vous amène au bonheur, marchez avec confiance sur son
chemin. » Amen.
Samedi 15 Septembre
"Femme, voici ton fils !"
1ère Lecture : Galates, 4, 4-7
Psaume 130
Evangile selon saint Jean 19, 25,-27
Chers Frères et Sœurs, une heureuse coïncidence nous a permis et nous
permet tout au cours de cette journée de terminer cette semaine des messes du
Vorbourg par la fête de Notre-Dame des 7 Douleurs, ou Notre-Dame de Compassion,
je ne sais pas comment vous préférez l’appeler. Je préfère l’appeler Notre-Dame
de Compassion. Vous avez sous vos yeux, un très beau retable qui a été offert
par un laïc, Soleurois semble-t-il, il y a très longtemps, il y a quelques
siècles, pour qu’elle puisse présider à notre prière dans cette chapelle du
Vorbourg. C’est assez émouvant de penser que depuis des siècles et des siècles,
des gens sont venus prier devant cette image. Notre-Dame de Compassion…
Et pourtant, quand on lit l’Evangile, vous venez de l’entendre après
ma lecture, on ne nous dit pas que la Vierge Marie a reçu son Fils supplicié,
mort sur ses genoux, comme vous la voyez là, lorsqu’on l’a descendu de sa croix.
C’est quelque chose d’atroce, quand on y pense. Un condamné à mort comme Jésus
remis sur les genoux de sa Mère, c’est absolument insupportable. L’Evangile ne
nous parle pas de cela, mais c’est la piété chrétienne. Marie a souffert,
pourquoi n’aurait-elle pas pu souffrir jusqu’à ce point là. Non ! L’Evangile
nous présente Marie au pied de la croix dans une attitude très différente. Il y
a deux jours, une amie qui vit dans ce canton, me demandait : - Comment est-ce
que tu vois la mort, toi ! Quelle est ton attitude face à la mort ?
Et si je vous posais la question ?
Alors je lui ai répondu : - Oui, la mort des autres, je vois un petit
peu ce que ça signifie.
J’ai assisté plusieurs fois à la mort de quelqu’un. Des jeunes, des moins
jeunes, des plus âgés et même des très âgés. Mais quand à la perspective de ma
mort. Comment est-ce que je vais entrevoir ma propre mort…
L’Evangile d’aujourd’hui nous montre comment la Vierge
Marie envisage la mort, la mort de son Fils. On nous la présente au pied de la
Croix, comme associée à sa souffrance. On nous la présente debout, debout…
Stabat Mater, comme on chantait autrefois. Elle est debout, elle n’est pas
effondrée. Elle regarde la mort en face. Et peut-être, dans un geste d’offrande,
elle offre son Fils, finalement à son Père, le Père de Jésus qui est aussi le
Père de Marie.
Il y a deux, trois semaines, mourrait brutalement, mourrait
subitement un de nos frères dominicain qui a un travail extraordinaire dans
notre ordre. Il est mort d’une mort subite au milieu d’une assemblée, très loin
de son pays, il était français… Il est mort en Amérique du Sud. Il avait 50 ans,
je crois. Il laisse ses parents, son père et sa mère, bien sûr éplorés. On a
reçu de cette vieille maman qui a plus de 80 ans ce témoignage : - Voilà,
disait-elle, j’ai mis Dominique au monde, j’apprends sa mort maintenant, et
bien, je l’offre à son Père.
L’attitude de Marie au pied de la croix, envisageant la mort,
j’allais dire comme une nouvelle naissance, comme un engendrement à une autre
vie, à la vie éternelle.
Ca c’est le premier élément de cette fête d’aujourd’hui. Le deuxième
élément, bien sûr, c’est la parole de Jésus, qui agonisant, fait un testament.
C’est le testament de Jésus. Voyant son disciple, c’est pas n’importe quel
disciple, c’est le disciple qu’il aimait, c’est son disciple préféré. Il va lui
donner aussi, je pense, la chose qu’il préfère le plus au monde, il va lui
donner sa propre Mère. « Femme, voici ton Fils » et en disant au disciple : «
Voici ta mère. » la Mère, la femme. La première femme qui apparut dans le monde,
dont nous parle la Bible. Nous connaissons son nom, elle s’appelle Eve. Eve
signifie la mère des vivants. C’est extraordinaire que le nom de la femme, et
j’en vois beaucoup devant moi… Une femme, c’est la mère des vivants, la mère de
la vie. Dans beaucoup de cultures, on a toujours associé la femme, à la
naissance, à la vie, mais aussi à la mort, à ces deux engendrements :
l’engendrement à la vie et l’engendrement à une autre vie.
Jésus donne la femme à son disciple préféré, à son disciple bien-aimé pour qu’il
la reçoive comme sa mère, comme la mère des vivants… que cette mère puisse
entretenir dans le cœur des disciples non pas la tristesse et la désolation à la
suite de la mort de Jésus. Non ! Mais la vie, une vie qui part, une vie qui
reprend, et une vie qui se développe. La Mère est donnée au fils, au disciple.
Le disciple va remplacer Jésus s’une certaine manière. La Mère aura pour le
disciple, la même relation qu’elle aura avec son Fils, avec Jésus. Il y a là un
transfert de témoin qui est assez extraordinaire. A partir de ce moment-là,
Marie sera présente dans la vie du disciple pour lui rappeler les paroles de son
Fils. Comme on le disait hier soir : « Faites tout ce qu’il vous dira ». Marie
sera présente aussi dans la vie des disciples, pour que le disciple puisse
rendre grâce de toutes les faveurs qu’il aura reçue de Dieu, comme Marie a
chanté le Magnificat.
Le disciple aussi devra se poser la question, s’il est capable
d’aller jusqu’au bout, comme Marie s’est posée la question : - Comment cela se
fera-t-il ?
Le disciple aussi devra dire un jour : - Et bien, voilà, je suis le
serviteur, je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ce que tu
as dit, comme Marie a du le dire.
Marie devient indissociable d’une certaine manière dans la vie du
disciple.
Et puis l’Evangile se termine par une phrase : - A partir de ce
moment-là, ou à partir de cette heure, le disciple la prit… Ou ça ? chez lui !
On traduit parfois dans sa maison. C’est une manière de dire aussi.
Il y a des pèlerins qui partent là-bas en Turquie, à Ephèse. On nous montre la
maison de Marie. Moi, je l’ai vue.
La maison de Marie… Vous savez, c’est peut-être une pieuse coutume…
je n’en sais rien. Mais ce n’est pas ça que veut nous dire le texte. Il la prit
chez lui… On pourrait dire, il prit Marie dans ses affaires. C’est la traduction
exacte. Il prend Marie dans ses affaires personnelles.
On aime bien dire parfois : - Ah ! ce sont mes affaires, pas les
tiennes. Mes affaires, c’est mon jardin secret. Ca n’appartient qu’à moi. Et
bien, Marie, à partir de ce jour-là, entre dans le cœur du disciple, comme dans
ses affaires personnelles. Marie est liée intimement à la vie du disciple.
Il y a à Fribourg, un vieil évêque, Mgr Mamie qui a 85 ou 86 ans
maintenant. On rappelle souvent que lorsqu’il y avait une ordination et qu’il
voyait ensuite le nouveau prêtre qu’il venait d’ordonner : - N’oublie pas de
prendre Marie chez toi.
A tel point que c’est devenu une espèce de plaisanterie…
Ce n’est pas seulement pour les prêtres que Marie appartient à nos
affaires. Je pense que c’est pour n’importe quel disciple. Nous sommes tous
appelés à le devenir. Et peut-être dans cette grande famille qu’est l’Eglise
toute entière, nous les disciples de confession catholique, nous avons cette
spécialité et heureusement qu’on l’a… de pouvoir avoir Marie dans nos affaires.
Non pas pour nous écarter des autres parce que je pense que les Evangéliques eux
aussi ont leurs spécialités et peuvent nous apporter beaucoup de choses. Nous,
nous avons ce trésor, ne l’oublions jamais, il est essentiel, non seulement à
notre vie de foi, mais à la vie l’Eglise toute entière.
Alors je termine simplement en reprenant la parole de Mgr Mamie : -
Prenez Marie chez vous.
Dimanche 16 septembre 15h00
Célébration de Clôture
Evangile selon Saint Marc, 3, 31-35
Chères familles, chers frères et sœurs, pèlerins du Vorbourg, voici
notre dernière rencontre au cours de ces fêtes.
Tout le monde, le sait, en Suisse, en tout cas, nous sommes en période
électorale, je ne veux pas ajouter mon propre grain à tout ce qui nous siffle,
parfois un peu trop fort dans les oreilles. Pourtant, il y a un mot que
j’entends assez souvent, ces temps derniers, c’est celui d’intégration. On veut
intégrer. Intégrer qui, et intégrer quoi… Et bien, on le dit, on veut intégrer
les étrangers qui ne parlent pas notre langue, qui n’ont pas notre religion, qui
n’ont pas notre culture, on veut les intégrer à notre groupe, celui que nous
formons, notre groupe traditionnel. Je retrouve le même problème dans l’Evangile
que je viens de lire.
Il y a deux groupes, mais deux groupes apparemment fermés, qui sont face à face
qui cherchent à s’intégrer, mais l’intégration n’est pas facile. Il y a un
premier groupe qui est formé par la famille de Jésus. J’allais dire, sa famille
de sang, ceux qui sont proches de lui par le sang. On mentionne sa mère,
évidemment, sa mère qui l’a mis au monde, mais aussi ses frères, ses sœurs,
entendez, on peut le traduire comme ça, ses cousins, ses cousines, les gens de
son village, ceux de Nazareth. Ceux-ci forment un cercle. Ils arrivent en face
d’un autre cercle. On le dit aussi dans l’Evangile, un cercle, qui aussi
apparemment est fermé, c’est le cercle des disciples de Jésus. Ils ne viennent
pas de Nazareth, ils n’ont pas de lien de sang avec la famille de Jésus, mais
ils sont les disciples de Jésus. C’est la famille spirituelle. D’un côté, on a
la famille spirituelle, les liens du sang, de l’autre côté, on a une famille
spirituelle. Vont-ils s’intégrer. Les premiers cherchent à intégrer les seconds
dans leur groupe. On nous dit que la famille de Jésus cherche non seulement à
voir qui est Jésus, on le sait par l’Evangile de Marc, mais à le ramener à
Nazareth, à le ramener chez lui, d’où à leur avis, il n’aurait jamais du partir.
Alors Jésus a cette phrase admirable : « Qui est ma mère, qui sont mes frères ?
» - « Ma mère et mes frères sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la
mettent en pratique. » Autrement dit : - Ma véritable mère, mes véritables
frères, mes véritables sœurs, ce sont finalement mes disciples.
Ce n’est pas les disciples à s’intégrer dans la famille de sang, mais ce sont
eux à s’intégrer dans cette famille spirituelle qui écoute la parole de Dieu et
qui la met en pratique. Alors, la mère de Jésus est non seulement sa maman, mais
elle est aussi, la première des disciples. La mère de Jésus fait partie par le
sang du premier cercle, mais elle fait aussi partie par la spiritualité, par son
écoute, du deuxième cercle.
Il y a un autre passage dans l’Evangile qui est très frappant. Un
jour, il part et une femme s’adresse à Jésus et lui dit : « Heureux le sein qui
t’a porté heureuse les mamelles que tu as sucées. » Je traduis textuellement, et
Jésus répond : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la
mettent en pratique. » Il ne repousse pas sa Mère, mais il inclut sa Mère dans
le cercle de ses disciples. Nous savons combien Marie a suivi Jésus, nous
l’avons répété pendant ces fêtes, et comment elle est pour nous, un véritable
exemple, l’exemple du disciple. Je rappelle simplement trois moments de Marie
qui ont fait l’objet des prédications de cette semaine : - Le jour où elle
reçoit cet appel extraordinaire de Dieu, elle s’arrête, elle se pose une
question, puis ensuite, elle accepte cette question, elle accepte de devenir la
servante du Seigneur, elle chante son cantique d’action de grâce, mais elle sait
aussi que ce chemine qu’elle va prendre ne sera pas un chemin facile qui va
l’entraîner à être au pied de la croix, et au-delà de la croix. La Mère de Jésus
est devenue aussi la Mère des disciples et notre Mère. Ca, c’est très
intéressant, chers amis. Notre Eglise n’est pas posée sur une mafia familiale.
Elle n’est pas posée sur une mafia locale. Elle est universelle dès le départ.
Son universalité, c’est la parole de Jésus, c’est l’obéissance à la parole de
Jésus.
Je n’ai pas été le seul à l’avoir remarqué, au cours de cette semaine au
Vorbourg, d’avoir applaudi à quelques occasions à la présence de prêtres qui
venaient d’Afrique, de quatre pays. Ils nous ont rappelé, justement que
Notre-Dame du Vorbourg, excusez-moi, ce n’est pas seulement la Notre-Dame des
Jurassiens, c’est la Notre-Dame de tout le monde. Il y a dans l’Eglise une
famille sans frontières, une famille universelle qui est fondée directement sur
la parole de Dieu et sa mise en pratique.
Oui, Jésus dit : Celui qui écoute la parole, et qui la met en pratique, celui-là
est mon disciple.
Il y a une très jolie parabole, dans l’Evangile de saint Matthieu,
utilisées parfois par les gens qui se marient. Il y a deux maisons, l’une est
construite sur le roc, l’autre sur le sable. Ce qui doit arriver arrive, à cause
des inondations arrive l’éboulement. Celle qui est fondée sur le sable passe
dans la rivière, dans la Birse et celle qui est construite sur le roc, comme le
Vorbourg, elle tient… Quant on demande justement aux jeunes mariés pourquoi ils
ont choisi ce texte, quel est le roc sur lequel ils veulent bâtir leur mariage,
alors souvent ils vont jusque là, mais c’est l’amour mon Père. Bien sûr, c’est
l’amour. Jésus ne dit pas que ce n’est pas l’amour. Mais Jésus dit une chose
différente, d’une certaine manière. Ce qui assure notre maison sur le roc, ce
qui nous donne la stabilité, c’est d’écouter sa parole et pas seulement de
l’écouter, mais de la mettre en pratique. Ecouter, parler, mais surtout faire.
Il y a ce proverbe en français qui nous dit : - Il y a loin de la coupe aux
lèvres.
On peut très facilement parler, sans conséquence, sans vérité. Ce que Dieu
attend de nous, c’est que nous soyons des hommes et des femmes conséquents, avec
la parole que nous entendons. Dans ce sens-là, la Vierge Marie est un exemple
qui rend libre. Elle a été conséquente, elle a été jusqu’au bout, elle n’a pas
tellement parlé, finalement, elle a entendu parler, elle a remué ces paroles
dans son cœur, et puis elle est allée jusqu’au bout de son amour.
Le thème de ces prédications, c’était une ou deux choses que je sais
d’elle. Le JE , c’est l’Ecriture, une ou deux choses dont l’Ecriture nous parle.
J’aurais pu aussi l’intituler : Le silence de Marie. Ou bien : Le silence sur
Marie. Dans l’Ecriture, Marie ne parle pas beaucoup. On peut repérer trois
phrases dans l’Ecriture, seulement trois ou quatre… rien de plus. On n’en parle
pas tellement non plus. Elle est l’exemple du disciple qui met en pratique dans
ce qu’elle a entendu. Dans le silence, dans la sérénité, dans la paix, et pour
nous, elle nous ouvre un chemin vers Lui. Il ne suffit pas de parler trop de
Marie, il ne suffit pas de la prier beaucoup, mais il suffit, je pense, de vivre
comme elle, dans la fidélité à la parole de Dieu, cette fidélité qui la conduit
finalement son bonheur et ce bonheur qui est le nôtre.
Je termine ces quelques mots, par une évocation d’un beau poème, un
poème de notre temps, ô de notre temps… du siècle dernier. Les plus âgés d’entre
nous, peut-être ont entendu son nom, il s’appelle Paul Claudel. Il a écrit un
jour, un poème à Marie. Il est intitulé « Prière à la Vierge à l’heure de midi.
» Nous sommes à 15-16 heure, maintenant, mais il est fait aussi chaud qu’à cette
heure-là. C’était une prière absolument silencieuse. Il entrait dans une
chapelle sous la pression de la chaleur, sous la pression du jour, il s’asseyait
sur un banc, il regardait la Vierge et puis ce regard suffisait. C’était un
regard croisé, c’était un regard silencieux. Le
silence de la Mère rejoignait le silence du Fils et le silence des disciples
sous la croix. Vous le savez bien, à mesure qu’on avance en âge et que vous avez
encore la chance d’avoir votre compagnon et votre compagne à vos côtés, il n’est
pas nécessaire de parler beaucoup pour se comprendre. Un seul regard suffit qui
peut s’accompagner parfois d’un long silence, mais ça vaut beaucoup mieux que
tant de bavardages… parfois nos prières à la Vierge ressemblent un peu à du
bavardage. Si vous êtes, si nous sommes là, au
Vorbourg aujourd’hui, c’est pour que nous puissions simplement la regarder, pour
qu’elle puisse aussi nous regarder, et qu’elle puisse nous conduire dans tous
les détours de notre vie, là où Jésus veut bien nous mener.
La Vierge à midi
Il est midi, je vois l'église ouverte. Il faut entrer.
Mère de Jésus Christ, je ne viens pas prier.
Je n'ai rien à offrir et rien à demander.
Je viens seulement Mère, pour vous regarder.
Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
Que je suis votre fils et que vous êtes là.
Rien que pour un moment pendant que tout s'arrête
Midi !
Être avec vous Marie, en ce lieu où vous êtes.
Ne rien dire, regarder votre visage,
laisser le coeur chanter dans son propre langage,
Ne rien dire, mais seulement chanter parce qu'on a le coeur trop plein
Comme le merle qui suit son idée en ces espaces de couplets soudains.
Parce que vous êtes belle, parce que vous êtes immaculée,
la femme dans la Grâce enfin restituée,
La créature dans son honneur premier et dans son épanouissement final,
Telle qu'elle est sortie de Dieu au matin de sa splendeur originale
Intacte ineffablement parce que vous êtes la Mère de Jésus Christ, qui est la
vérité entre
vos bras, et la seule espérance et le seul fruit.
Parce que vous êtes la femme, l'Éden de l'ancienne tendresse oubliée,
Dont le regard trouve le coeur tout à coup et fait jaillir les larmes
accumulées.
Parce que vous m'avez sauvé, parce que vous avez sauvé la France,
Parce qu'elle aussi, comme moi, pour vous fut cette chose à laquelle on pense.
Parce qu'à l'heure où tout craquait, c'est alors que vous êtes intervenue,
Parce que vous avez sauvé la France une fois de plus,
Parce qu'il est midi, parce que nous sommes en ce jour d'aujourd'hui
Parce que vous êtes là pour toujours, simplement parce que vous êtes Marie,
simplement
parce que vous existez
Mère de Jésus Christ, soyez remerciée.
Auteur : Paul Claudel (poème écrit en 1914, à l'heure où l'on attendait
l'issue de la bataille de la Marne)
Source :
http://tresordelafoi.org/news/la-vierge-a-midi
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